25.03.10 Le Potentiel: Cinq questions à Alpha Sow (*)

1. Comment jugez-vous la présence
politique de la Monuc, dix ans après?

Je ne peux qu’avoir une appréciation positive de cette présence. En
effet, je suis arrivé ici au mois de juin 2000, sept mois après
l’installation de la Mission. A l’époque, nous étions dans un pays
partagé entre les factions et un gouvernement. Il y avait 3 grands
blocs. A l’Est, le RCD qui contrôlait un bon tiers du pays. Au Nord, le
MLC et à l’Ouest l’autre moitié du pays était tenu par le gouvernement
dirigé par le président Laurent-Désiré Kabila. Les 3 entités
antagonistes ne collaboraient pas entre elles.

Entre ces trois blocs, la population était dispersée et entravée
dans ses mouvements; il y avait énormément de problèmes, notamment la
circulation des personnes et des biens. En effet avec la signature de
l’Accord de Lusaka en juillet 1999, les forces politiques congolaises
ont accepté que la Monuc soit déployée pour assurer la supervision du
cessez-le-feu et mettre en chantier un programme de réconciliation qui
devait passer à travers le dialogue entre les Congolais à Sun City et
plus tard par les élections qui allaient aboutir à l’installation des
nouvelles institutions que nous connaissons aujourd’hui. Les dix ans de
présence de la Monuc ont, ainsi, permis à la communauté internationale
d’aider les Congolais à réunifier leur pays. Le pays n’est plus divisé,
il est redevenu un et indivisible avec des institutions démocratiques.
La RDC est, donc, dans un processus de normalisation avancée. Alors que,
il y a dix ans, quand la Monuc arrivait, le pays était dans un état de
désintégration préoccupant.

2. Quel est, selon vous, un domaine qui pose encore problèmes
et qui a besoin de l’apport de la Monuc?

Disons que la Monuc ne peut pas continuer à rester au Congo sans le
consentement des populations et de leurs dirigeants démocratiquement
élus. Chacun le sait, il reste une situation très préoccupante à l’est
du pays où vivent les Congolais pris dans l’étau des groupes armés
étrangers, notamment les FDLR. Plus au nord dans les Ueles, des
éléments résiduels de la LRA continuent de commettre des exactions sur
la population civile, sans oublier les groupes résiduels de miliciens en
Ituri. Dans cette partie-Est de la RDC la situation sécuritaire est
assez préoccupante. Ce qui justifie la présence des 18.000 Casques
bleus, dont 95 % qui y sont concentrés. Ils aident au rétablissement de
la sécurité. Ceci fait que la protection de la population civile est
devenue la pierre angulaire du mandat de la Monuc ces quatre dernières
années. La Monuc insiste beaucoup sur la protection de la population
parce que sans elle l’action de la communauté internationale ne serait
pas très pertinente.

3. Outre la protection de la population, y a-t-il d’autres les
raisons de la présence de la Monuc en RDC ?

Grâce à cette action, la Monuc a pu aider les autorités congolaises à
normaliser la majorité du territoire congolais mais à l’est le problème
d’insécurité se pose toujours avec acuité. Voilà qui justifie, une fois
de plus la présence militaire de la Monuc, dont l’une des tâches
principales est d’appuyer et d’accompagner les FARDC qui nécessitent un
encadrement dans le cadre de la réforme du secteur de sécurité. Ce n’est
un secret pour personne, chaque Etat, particulièrement un Etat moderne,
a besoin d’une armée républicaine qui puisse protéger les frontières,
assurer la sécurité des populations de façon à ce que toutes les
conditions soient réunies pour que les investisseurs nationaux et
internationaux puissent bien travailler pour reconstruire et développer
le pays.

4 D’après vous, ce travail peut-il prendre encore combien de
temps à la Monuc?

Cela dépend de beaucoup de choses, y compris de la détermination des
autorités congolaises elles-mêmes. On sait qu’elles s’investissent
depuis qu’elles sont en place il y a trois ans, quatre ans bientôt. Mais
ce n’est pas facile. Un soutien continu de la communauté internationale
est toujours utile.

Cependant, il faut reconnaître que ces derniers douze mois des
progrès importants ont été enregistrés dans l’est du pays, depuis même
la Conférence de Goma qui a abouti à la signature des Actes d’engagement
entre le gouvernement et les groupes armés dans le Nord et le Sud-Kivu
en janvier 2008. Des progrès certains ont été réalisés, même si le cas
du CNDP a été un facteur qui a un peu retardé le rétablissement complet
de la paix et la stabilité dans les Kivu. Depuis le 23 mars 2009, après
le rapprochement constaté avec satisfaction entre Kinshasa et Kigali,
une nouvelle dynamique mise en place a favorisé la signature de ces
accords de Goma. C’est ainsi que les FARDC, avec le soutien des Casques
bleus de la Monuc, dans le cadre de l’Opération « Kimia 2 », ont pu
remporter des victoires importantes sur le terrain.

5. Avez-vous un message particulier relatif à la contribution
de la Monuc au processus de pacification de la RDC ?

La Monuc a aussi mis en place un programme de stabilisation qui a été
intégré dans celui du gouvernement, le STAREC, dans l’Est du pays. Et
nous pouvons espérer qu’avec la mise en oeuvre de ce programme et la
poursuite des actions militaires contre les forces résiduelles
restantes, la paix et la stabilité seront restaurées progressivement. Et
ceci peut être une question de mois.

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