XVI) – XIX° s. TRAFIC NEGRIER TRANSATLANTIQUE

C’est la
prévisible conclusion à laquelle l’on arrive après la lecture du symptomatique
ouvrage de l’historien péruvien, Germàn Peralta Rivera, « El comercio negrero el
América Latina (1595-1640), livre qui vient d’être publié à Lima aux éditions de
l’Université Nationale FedericoVillareal.

 

 

S’étalant sur 472
pages, sous une illustration issue du montage d’une gravure de Gregorio Lopes,
représentant un navire portugais du XVI ème siècle et d’une estampe du XVII ème
siècle, restituant une caravane d’esclaves africains, le livre s’articule en
trois parties qui analysent, respectivement, les conditions des débuts de la
traite, ses mécanismes de déploiement, ses aspects quantitatifs et ceux liés a
ses effets économiques dans la Péninsule et dans les colonies de
l’outre-Atlantique espagnole.

 

Cette
configuration se subdivise en une dizaine de chapitres ou l’on note le passage,
dans le Nouveau Monde, de l’infatigable voyageur portugais Duarte Lopes,
co-auteur de la fameuse « Relatione de Reame di Congo… », publiée a Rome en 1591
et les premières licences délivrées aux négociants ibériques, le « cycle
portugais », en réalité, « luso-castillan », période de traitement chronologique
de l’ouvrage, correspondant, pratiquement, au contrôle du Royaume du Portugal,
entre 1580 et 1640, par l’Espagne.

 

L’auteur, qui a
travaillé, entre autres archives, dans celles relatives aux Indes, a Séville et
a Torre do Tombo, a Lisbonne, y examine, avec force de détails, l’évolution du
régime des asientos (contrats), l’activisme des ports, leurs types
d’opérations, les principaux  itinéraires empruntés par les bateaux negriers
ainsi que les différentes modalités de fraude technique et commerciale,
pratiquées.

 

Le patient
travail effectué dans les diverses archives et bibliothèques de ces deux pays,
vieilles puissances maritimes, a permis a Peralta Rivera, de joindre en annexe,
de son étude, près d’une quarantaine de tableaux restituant des données
contenues dans les registres tenues par la célèbre Casa de Contratacion de
Séville, entre 1595 et 1639. Ces documents renseignent, sur autres entre points,
les destinations africaines, puis outre-Atlantique, des navires et le nombre des
bois d’ébène que ceux-ci débarquèrent.

 

Le mémorialiste,
qui est aussi enseignant à l’Université de Garcilaso de la Vega , a Lima,
explique que l’un des arguments de sollicitation des premiers agréments de
trafic negrier était l’existence de divers points d’attache d’influence
portugaise sur la cote occidentale de l’Afrique,  tels que Sao Tomé, le Congo
et l’Angola.

 

Découvert
inhabité et, chroniquement, sous-peuplé, l’archipel golfe-guinéen servira, en
réalité, de plateforme de transit de captifs bantu venus des « Tierras
Firmes
 », telles que, pour l’essentiel, les possessions de la Reine et des
Rois Nzinga.

 

INTERCONNEXION
REGIONALE

 

Naturellement,
des autorisations seront accordées a des négociants lisboètes, parmi lesquelles,
celles, bien intitulées,  « Contrato  de la Isla de Santo Thomé »
et « El contrato del Reyno de Angola ».

 

Et, l’un des
argumentistes pour un engagement commercial dans cette région est le
susmentionné Duarte Lopes, bon connaisseur du septentrion angolais.

 

La fondation, en
1575, sur des raisons prioritairement mercantilistes et  esclavagistes, de la
Colonie
d’Angola, la plus grande possession continentale portugaise sur
la cote occidentale de l’Afrique
, fera, invariablement, de cette région,
le plus gros pourvoyeur de bois d’ébène dans  l’espace atlantique.

 

Conséquence, l’on
enregistrera, inévitablement, des cargaisons de pièces d’Inde, majoritairement
bantu, déchargés à Lisbonne, San Lucar, Séville, aux Canaries et Cadiz, dans le
bloc ibérique.

 

Les inventaires
feront le même constat à Espanola, San Juan de Porto Rico, Santiago de Cuba et à
la Jamaïque , dans les iles caribéennes.

 

Cette
configuration sera également notée dans le bloc continental, notamment, a
Veracruz, Carthagène des Indes, Maracaibo, Coro, Santa Maria, Rio de la Hacha ,
La Margarita , Cumama Benecuelas, Buenos Aires et Montevideo.

 

Tenant compte des
délais de voyage, relativement, moins longs, entre l’Afrique centrale et
l’embouchure de la Rio de la Plata et le caractère stratégique de ce couloir
dans l’introduction de la main d’œuvre malimbe, congo, ngola, mundongo,
matamba, imbangala e benguela
en Amérique du sud, le port de Buenos Aires
sera intensément exploite.

 

En effet, le
débarcadère bonaerense, grouillant de trafiquants portugais  est le point de
départ d’une interconnexion régionale, terrestre, menant la main d’œuvre
captive vers la cote Pacifique ou les centres miniers de l’intérieur tels que
ceux de Potosi, l’une des régions les plus riches de l’Empire espagnol.

 

Itinéraire fort
lucratif, Peralta reprend les affirmations de Canabrava Alice qui attestent que
les « navios saian de Buenos Aires rumbo a Angola » sans même respecter
les consignes royales.

 

L’on notera qu’un
autre fait, de nature politique, a encouragé cette prédominance
« angola », est l’engagement personnel de plusieurs Gouverneurs,
installés à Sao Paulo de Loanda, dans le trafic des esclaves. Ce fut les cas,
durant neuf ans, de Joao Rodrigues Coutinho ou de Duarte Dias Henrique
« Administrador  de Angola ».

 

Les autorités
sévillanes arrivèrent à évoquer, clairement, la « comodidad de Angola »
dans l’organisation du commerce triangulaire en souhaitant, fébrilement,
« extender las actividades a Angola ».

 

DE L´ANGOLA A
POTOSI

 

Et, afin de
soutenir son point de vue sur l’importance du territoire occupé de Ndongo dans
le ravitaillement en main d’œuvre esclave dans le Nouveau Monde, l’auteur
utilise la symptomatique étude de Carlos Sempat Assadourian « El trafico de
esclavos en Cordoba ; de Angola a Potosi ».

 

Les archives
ibériques ont aussi permis au chercheur de Lima, de rétablir les nombreuses
liaisons qui se faisaient entre la Colonie du Minotaure et  des dizaines de
ports du continent américain et de l’ensemble insulaire caribéen tels que La
Havane et San Juan Ulloa,

 

  Collant à cette réalité, l’historien péruvien a inséré dans son ouvrage
des gravures extraites de la relation de Cavazzi sur la Reine Nzinga et des
portraits de femmes esclaves congo et benguela de l’artiste
allemand Rugendas ou celui d’une negresse « angolena ».

 

Sur la base d’une
quinzaine de  témoignages et statistiques, l’ancien Directeur de l’Institut
National de la Culture du Pérou, insiste sur l’intensité du trafic des esclaves
sur les cotes de  l’Angola, en produisant des affirmations  telles que
« Angola fue la gran factoria que aprovisiono al
comercio esclavista
»ou « la region de Angola monopolizo la distribucion
de africanos ».

 

Il fournit divers
chiffres de débarquement, tels que ceux portant sur Carthagène des Indes et
Veracruz, deux des plus importants ports de l’Amérique espagnole, ou  près de
60% d’africains arrives en ces lieux provenait du Quadrilatère.

 

L’on soulignera,
en définitive, que  l’ouvrage « El comercio negrero en America Latina » établit
sa grande utilité dans l’ancrage de son sujet,  une meilleure connaissance des
origines des centaines de milliers de captifs mélano-africains, installes dans
la Péninsule Ibérique et le Nouveau Monde.

 

Cette avancée est
importante car elle contribuera, au-delà d’une histoire pesante, à
l’établissement de liens de civilisation entre les peuples de l’Atlantique ;
dans la saine dynamique que l’UNESCO vient de suggérer a l’ humanité, celle du
rapprochement des cultures du monde.

 

Simao
SOUINDOULA
 

Vice-président

Comite
Scientifique International

Projet UNESCO `
La Route de l`Esclave`

C.P. 2313

Luanda –
Angola

Tel. + 929 74 57
34

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