Le coût excessif de la dot encourage le concubinage

L'argent de la dot qui
établit le lien du mariage entre familles africaines est devenu un
casse-tête pour les jeunes prétendants. Le coût de la dot a haussé le
ton au point de devenir exorbitant et brade la valeur de ce geste
symbolique.

 

Dans
certaines familles, elle a pris des allures d'une facture globale
incluant tous les frais et les dépenses consentis durant l'éducation et
la formation de la jeune fille offerte en mariage. Cela implique les
frais de scolarisation, de logement, d'habillement et d'alimentation.

Et
la dot prend davantage l'ascenseur quand la prétendante au mariage a
fait des études supérieures. Cette façon de faire peut être considérée
comme une déviation par rapport à la culture de la dot selon les rites
africains. Les familles qui se complaisent dans cette situation font non
seulement montre d'une 'frénésie boulimique' exagérée mais de plus,
elles hypothèquent les chances de leur fille d'obtenir une demande en
mariage.

Et
pourtant, s'il faut situer ses origines, la dot est une coutume
ancestrale instituée depuis la création du monde et constitue un acte
symbolique réunissant les aspirations d'un jeune couple à se passer la
corde au cou. Et à l'époque, elle ne nécessitait pas trop
d'extravagances en termes d'objets et d'argent à remettre à la famille
de la bien-aimée. 

Dénaturée
au fil des âges, elle est finalement devenue un fond de commerce, un
moyen de faire fortune ou d'apaiser la misère de certaines familles
infortunées.

Face
à une telle situation, le prétendant se sent pressée comme un citron.
Quant à la jeune femme victime de ce mercantilisme, elle encourt le
risque de coiffer Sainte Catherine, c'est-à-dire, de demeurer
célibataire après l'âge de 25 ans, compte tenu de la conjoncture
économique actuelle.

D'après
notre enquête, les tenants de cette pratique de la dot exorbitante
soutiennent que c'est un moyen qui permet d'organiser le mariage
coutumier qui se termine invariablement par une tapageuse fête avec
trompettes et tambours.

"Oza
na mbongo oza na nionso, oza na mbongo oza na ngenge
", cette phrase en lingala,
une des quatre langues nationales de la RDC, signifie "Quand tu as
l'argent, tu as tout". Ceci pour dire que celui qui a l'argent, peut
tout se permettre. Or, l'argent réputé bon et mauvais serviteur à la
fois, comporte en lui-même les germes de la dépravation et peut pousser
une personne à creuser sa propre tombe.

La
cupidité de certaines familles les mène à la dérive. Aussi cette
boulimie incontrôlée d'argent fait que les hommes qui en ont deviennent
arrogants, présomptueux et multiplient les conquêtes sous prétexte
d'être en mesure de s'acquitter de la dot.

Par
conséquent, bon nombre de filles se retrouvent dans des foyers
polygames où elles ne bénéficient d'aucune considération de la part de
leurs maris. Avec la conjoncture économique difficile qui sévit en RDC,
trouver un travail adéquat et surtout rémunérateur est devenu une mer à
boire pour tout jeune en âge nubile.

Faute
de pouvoir constituer la dot revendiquée par la famille de leur
dulcinée, les jeunes gens se complaisent dans la fameuse formule "Yaka
to vanda"
. Ce qui signifie littéralement "Cohabitons ensemble" ou
l'union libre. Ainsi, des couples informels se constituent et prennent
de l'ampleur sans que les familles des conjoints aient voix au chapitre.

A
trop vouloir maximiser le gain ou le profit, on arrive à tout gâcher ou à
tout perdre. La femme est le socle de la société. De ce fait, il est
impérieux qu'elle soit respectée et valorisée. Toute pratique dégradante
liée à une quelconque instrumentalisation de sa personne doit par conséquent être bannie. Elle doit être
valorisée par le mariage.

 

La dot

c'est une des plus anciennes traditions, dans les relations
familiales, que de payer lors du mariage une dot à la femme ou à son
père. en outre l'homme doit se charger des dépenses de sa femme et de
ses enfants..

quelles sont les racines de cette tradition ? comment, et pourquoi,
a-t-elle commencé ? pourquoi l'homme doit-il se charger de l'entretien
de sa femme ? quelle est la philosophie de la dot ? la dot et
l'entretien resteraient-ils pertinents, même si l'homme et la femme
jouissaient de tous les droits humains et naturels, et que les relations
entre eux étaient fondées sur la justice et l'équité ? ou bien sont-ils
seulement des survivances des époques où l'homme possédait la femme ?
la justice et l'égalité des droits, notamment au xxe siècle,
exigent-elles que ces traditions d'une autre époque soient abolies, que
le mariage se fasse sans dot, que la femme se charge elle-même de ses
dépenses, et que les enfants soient à la charge conjointe du mari et de
la femme ?

nous nous proposons de répondre à ces interrogations en commençant
par la question de la dot. voyons comment cette tradition a vu le jour,
quelle est sa philosophie, et comment les sociologues expliquent son
origine ?


un bref historique de la
dot

on dit qu'à l'époque préhistorique l'homme menait une vie sauvage
qui avait une forme tribale. pour une raison inconnue, le mariage était
interdit entre le mâle et la femelle du même sang. par conséquent, les
jeunes hommes d'une tribu qui voulaient se marier, étaient obligés de
choisir leurs épouses dans une autre tribu. ils rendaient souvent visite
à dautres tribus dans ce but. a cette époque-là, l'homme n'était pas
conscient de son rôle dans l'engendrement des enfants. il croyait que
les enfants appartenaient exclusivement à leur mère. bien qu'il se
rendît compte que les enfants lui ressemblaient beaucoup, il ne
comprenait pas la cause de cette ressemblance. evidemment, les enfants
aussi croyaient qu'ils appartenaient à leur mère et non à leur père. a
l'époque, la généalogie était tracée à travers les mères. les hommes
étaient considérés comme stériles et improductifs. après le mariage, ils
restaient dans la tribu
de leurs femmes comme de simples auxiliaires, parce que la femme avait
besoin de la compagnie de son mari. cette période sappelait l'époque du
matriarcat.

mais l'homme ne tarda pas à découvrir son rôle dans la procréation,
et à croire que les enfants lui appartenaient en réalité. dès lors, il
imposa sa domination à la femme et assuma le rôle du chef de la famille.
et là commença la période du patriarcat.

pendant cette période aussi le mariage entre des gens du même sang
fut prohibé, et l'homme devait choisir sa femme dans une autre tribu et
lamener chez la sienne. et, étant donné qu'il y avait constamment des
guerres entre les tribus, le seul moyen qui restait à l'homme pour avoir
une femme était de la kidnapper dans quelque autre tribu.

progressivement la paix prit la place de l'état de guerre, et les
tribus purent vivre dans une cxistence pacifique. pendant cette période,
la coutume du kidnapping des filles fut abolie. pour obtenir la fille
qu'il désirait, l'homme se rendait dans sa tribu et travaillait pour le
compte de son père pendant un certain temps. en contrepartie des
services rendus par le prétendant, le père lui accordait la main de sa
fille, et il la ramènait avec lui dans sa tribu.

lorsque la monnaie est entrée en scène, l'homme découvrit quau lieu
de servir son futur beau-père pendant des années, il valait mieux lui
offrir une somme dargent convenable et prendre la fille désirée,
immédiatement. telle fut l'origine de la dot.

ainsi, selon ce récit, au début l'homme vivait comme un auxiliaire
de la femme et au service de celle-ci. pendant cette période la femme
régnait sur l'homme. a l'étape suivante, lorsque le pouvoir passa aux
mains de l'homme, celui-ci kidnappait sa future femme dans une autre
tribu. au cours de la troisième étape, pour avoir une femme, l'homme se
rendait chez le père de celle-ci et le servait pendant des années.
pendant la quatrième étape, l'homme offrait une somme dargent au père de
la fille désirée. telles sont les quatre étapes de l'institution de la
tradition de la dot.

on dit que depuis l'époque où l'homme a aboli le système matriarcal
et posé la fondation du patriarcat, la femme fut réduite au statut
d'esclave, ou, au mieux, d'employée et de servante chez l'homme.
celui-ci la regardait comme un outil économique, qui pouvait, à
l'occasion, satisfaire sa volupté aussi. il ne lui accordait pas une
indépendance sociale ou économique. le fruit du travail de la femme
appartenait soit à son père, soit à son mari. elle navait pas le droit
de choisir son mari, ni de mener une activité économique pour son propre
compte. largent que l'homme payait à titre de dot, et les dépenses
qu'il supportait à titre d'entretien [nafaqah], représentait la
contrepartie des gains économiques qu'il tirait d'elle tout au long de
la période de leurs relations conjugales.

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la dot dans le système
islamique de droits

il y a aussi une cinquième étape à propos de laquelle les
sociologues et les autres commentateurs ont gardé le silence. pendant
cette étape, l'homme offre un cadeau à la femme elle-même, et aucun de
ses parents na le droit d'en disposer. la femme reçoit le cadeau, tout
en préservant son indépendance sociale et économique. elle choisit son
mari librement, et non selon la volonté de son père ou de son frère. en
outre, ni son père, ni son mari, n'ont aucun droit de lasservir ou de
l'exploiter. le produit de son travail et de ses efforts lui
appartiennent exclusivement, à elle. en matière financière, elle na
besoin du contrôle ni du patronage de personne.

le mari a un droit seulement. il peut jouir sexuellement de sa
femme. tant que leurs relations conjugales durent, le mari a
l'obligation de pourvoir aux besoins légitimes de sa femme, dans les
limites de ses moyens financiers.

c'est là que la question de la dot et de l'entretien dus à la femme
devient un peu intrigante. tant que la dot était payée au père de la
fille, que celle-ci allait à la maison de son mari, comme une esclave,
et que le mari pouvait l'exploiter économiquement, la question était
facile à comprendre et à expliquer : la dot était payée comme le prix de
la fille, et celle-ci devait être entretenue comme n'importe quel autre
esclave. mais dès lors que rien n'est à payer au père de la fille, que
le mari na pas le droit de l'exploiter, que la femme a une indépendance
économique et que, concernant ses droits, elle n'a besoin du contrôle et
du patronage de personne, quelle est donc la signification du paiement
d'une dot et l'allocation d'une pension ?


un coup d'oeil sur
l'histoire

si l'on veut saisir la philosophie de la dot et de l'entretien de
la femme dans la cinquième étape, nous devons faire un examen un peu
critique de la théorie des quatre précédentes étapes mentionnées plus
haut. en fait, tout ce qui a été dit à propos de ces quatre étapes est
hypothétique et fondé sur des présomptions et sur la spéculation. cela
ne constitue ni un fait historique, ni une vérité scientifique. nous
n'avons pas une connaissance précise de la vie préhistorique de l'homme.
tout ce qui est dit sur l'étape ou l'époque matriarcale, la vente des
filles par leurs pères, et de l'exploitation économique des femmes par
leurs maris, n'est pas très crédible. il y a deux choses qui frappent
l'esprit concernant ces présomptions et spéculations : d'une part,
l'homme primitif a été présenté comme étant extraordinairement sauvage,
violent, et dépouillé de tout sentiment humain. dautre part, la
formidable planification
de la nature en vue de parvenir à ses buts universels a été
complètement ignorée.

une telle interprétation de la nature humaine n'est possible que
chez les occidentaux, et jamais chez les orientaux, à l'exception de
ceux parmi eux qui imitent l'occident. pour quelque raison les européens
ne sont pas familiarisés avec les sentiments humains. ils ne peuvent
pas admettre que les sentiments humains jouent un rôle fondamental dans
l'histoire. s'ils ont une disposition d'esprit économique, leur
attention demeure concentrée autour des problèmes du pain et du beurre.
ils regardent l'histoire comme s'ils étaient une machine qui ne peut
tourner sans être alimentée par du fuel. s'ils ont une disposition
sexuelle, ils considèrent toute l'humanité et toute l'histoire humaine
avec ses manifestations culturelles, artistiques, morales et religieuses
comme étant des formes modifiées des jeux sexuels. et s'ils ont une
tendance politique, ils croient alors que toute l'histoire de l'humanité
consiste en une série de batailles,
d'effusion de sang et d'actes de cruauté.

l'européen a tellement souffert le martyre par la religion et au
nom de la religion pendant le moyen âge, où on brûlait souvent les gens
vifs, qu'il est devenu allergique au nom de dieu, au mot de religion, et
à tout ce qui a un "relent religieux". c'est pourquoi, malgré toute
l'évidence du fait que la nature a un but et que le système de l'univers
ne tourne pas au hasard, il n'ose pas admettre l'existence de "la cause
ultime" ou du principe de causalité.

nous ne demandons pas aux interprètes occidentaux de l'histoire
d'admettre l'existence des prophètes qui sont apparus à travers
l'histoire de l'humanité pour proclamer le message de justice et
d'humanité, et pour combattre la corruption. nous voulons seulement
qu'ils reconnaissent au moins le rôle conscient de la nature.

il ne fait pas de doute que, dans l'histoire des relations
homme/femme, il y eut beaucoup de cas d'extrême cruauté, mais cela
nautorise guère à dire que toute l'histoire débordait de cruauté et de
violence.

cadeau de mariage)">


la vraie philosophie de la
dot (ou le cadeau de mariage)

a notre avis, la dot a pour origine une disposition intelligente
dans la création visant à consolider et à renforcer la relation entre
l'homme et la femme. la dot est venue à l'existence parce que, par
nature, les rôles respectifs de l'homme et de la femme sont différents
l'un de lautre. selon les gnostiques, la loi de lamour et de "lattirant
et lattiré" sapplique à tous les êtres et créations. etant donné que
toute chose est faite pour accomplir une fonction déterminée, son rôle
est différent de tous ceux des autres choses.

lorsque nous avons abordé la question des différences entre l'homme
et la femme, nous avons expliqué que les sentiments de l'un vis-à-vis
de lautre ne sont pas similaires. la loi de la création a voulu que la
femme ait comme traits, la beauté, la vanité et l'indifférence, alors
que l'homme a comme caractéristiques la tendance à faire la cour et à
pourchasser la femme. de cette manière, la faiblesse de la femme est
contrebalancée par la force de l'homme, et il s'ensuit que c'est l'homme
qui prend l'initiative daller demander la main de la femme. et, comme
nous lavons déjà dit, selon les sociologues, pendant les époques
matriarcale et patriarcale, c'est l'homme qui allait à la recherche de
la femme.

les scientifiques disent que l'homme est plus lascif que la femme.
en fait c'est le contraire qui est vrai, selon certaines traditions
islamiques. seulement la femme peut mieux se contrôler dans ce domaine.
mais, pratiquement, les deux points de vue aboutissent à la même chose.
en tout cas, il est certain que l'homme contrôle moins ses désirs
sexuels. ce trait a rendu la femme capable de ne pas courir derrière
l'homme et de ne pas se soumettre à lui facilement, alors que l'instinct
de l'homme -ou sa tendance à faire la cour- le contraint à aller vers
la femme et à prendre des initiatives en vue de gagner ses faveurs.
l'une de ces initiatives, c'est le cadeau qu'il lui offre.

les membres du sexe masculin se sont toujours disputés pour gagner
une femelle. ils se sont même battus les uns avec les autres dans ce
but. mais les membres du sexe féminin n'ont jamais montré une telle
ardeur pour gagner un mâle. il en est ainsi parce que les rôles
respectifs de l'homme et de la femme ne sont pas identiques. le mâle
poursuit toujours une femelle, alors que la femelle affiche une sorte
d'indifférence à l'égard du mâle.

la dot est liée étroitement à la pudeur et à la chasteté de la
femme. celle-ci sait, d'instinct, que sa dignité exige d'elle de ne pas
se soumettre à l'homme gratuitement.

voilà comment la femme, malgré sa faiblesse physique, a été capable
d'amener les hommes à ses genoux, de les obliger à se disputer pour
l'obtenir, et de faire courir les roméo après les juliette. lorsqu'elle
accepte d'épouser un homme, elle reçoit de lui un cadeau en signe
damitié, de cordialité et de bonne volonté.

 

(*) Saint Hervé M'Buy est
journaliste en République Démocratique du Congo. Cet article fait partie
du service de commentaires et d'opinions de Gender Links.

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