07.07.10 Le Potentiel= Cinq questions à Dieudonné Musibono

 

1. Juin a été déclaré mois de l’environnement. Quelles sont
les activités organisées par le PNUE durant ce mois dans le cadre de sa
politique sur l’environnement en RDC?

Je pense qu’au stade actuel, le PNUE fonctionne comme un projet, ce
n’est pas encore une agence autonome. Il effectue une évaluation
environnementale post-conflit à travers tout le pays, province par
province. Et pour la journée du 05 juin, célébrée journée mondiale de
l’environnement, le PNUE, le ministère de l’Environnement, Conservation
de la nature et Tourisme et le PNUD ont organisé une série de
conférences sur le thème de l’année: «Des millions d’espèces, une
planète et un avenir commun ».
Ces conférences devraient s’efffectuer à trois endroits et à des dates
différentes à partir de ce 05 juin. Donc, le 05 juin, on a organisé une
conférence, et parmi les animateurs, ma modeste personne) sur le thème, «
L’intégration de la biodiversité dans les stratégies du développement
durable en RDC». La même journée du 05 juin, la coordination nationale
de I’UNREDD avait parlé du plan national sur la changement climatique.
L’ICCN a parlé de la politique de conservation durable des espèces à
grande valeur écologique. Et, les mêmes types de conférences sur le
thème de la biodiversité ont eu lieu, pas par les mêmes animateurs, à
l’Ista le 18 juin et à l’ISP/Gombe le 22 juin.

2. A quoi la RDC peut-elle s’attendre dans un délai à court
terme après ces activités ?

La RDC a tout à gagner; vous savez que la RDC est un pays
stratégique. Et en tant que tel, en abritant des espèces endémiques, et
une riche diversité biologique, soit dit en passant, la RDC a 80%
d’endémicité par rapport à l’Amazone 60%; l’Indonésie 30% comme le
Mississipi 30%. C’est une grande diversité qu’on peut capitaliser du
point scientifique, à travers les études et les recherches scientifiques
ciblées et identifiées.
Je cite l’exemple de la biodiversité végétale. Il doit avoir des espèces
des champignons qu’on peut utiliser dans l’industrie pharmaceutique;
utiliser des molécules pour fabriquer des médicaments contre des
maladies jusque là incurable comme le Vih/Sida. Du point de vue de la
biodiversité animale, il y a des espèces animales, peut-être, on pourra
découvrir des gènes capables de prévenir certaines maladies. Mais dans
les deux cas, il faut des études scientifiques en amont.
Par rapport aux agences onusiennes, celles-ci accompagnent la RDC dans
sa politique de développement. C’est la RDC qui propose aux agences
onusiennes des politiques de développement et non l’inverse.

3. En tant que professeur et expert en audit
environnemental, comment trouvez-vous la qualité de l’environnement en
RDC et quelles sont les mesures correctives envisageables pour en
améliorer la qualité?

La question est complexe, et même pertinente. La qualité de
l’environnement, en tant que scientifique vivant en RDC depuis ma
naissance et ayant réalisé certaines études, la qualité est médiocre. Je
m’explique. L’art. 53 de la constitution dit que tous les Congolais ont
droit à un environnement sain. C’est un voeu pieux, quand on voit le
cadre de vie au niveau des familles, où plus de 10 personnes vivent dans
un taudis et en sortent comme des souris.
Déjà, à ce niveau, c’est médiocre. Au niveau national, c’est la même
tendance. Tout cela, parce qu’il n’y a pas de politique qui oblige à des
aménagements ou qui fait obligation à des industriels à traiter leurs
déchets avant de les déverser. Chaque industriel se comporte comme un
seigneur intouchable. Regardez la qualité des taxis-bus, 90% sont des
déchets bons pour la casse et la décharge, mais qu’on amène pour
transporter les humains. Et les gens entassés dans ces fourgonnettes
sont en train de louer Dieu. On écrit des versets bibliques dans ces
déchets, tel « Rien n’est impossible à Dieu, la bénédiction divine..,
comme si ces déchets sont de la volonté divine, comme si Dieu est un
Dieu de médiocrité.

Je relève cet aspect pour souligner l’absence de référence pour
la qualité. En ce qui concerne le niveau de vie, comme indicateur de la
qualité, pour comprendre ce qui se passe en RDC, il faut considérer le
niveau de consommation. Dans un pays où il y a la bonne gouvernance, il y
a ce qu’on appelle le niveau de consommation des ménages. C’est un
indicateur pour l’environnement social. Chez nous, c’est médiocre,
insignifiant. Prenons le cas du salaire, qui se définit comme
consommation plus épargne, l’épargne devant être au-delà de 10%. Et
quand vous prenez le salaire des masses laborieuses de ce pays, il est
inférieur à la consommation et l’épargne est égale zéro. Et cela a comme
conséquence, l’insécurité sociale chronique. Et quand l’homme ou la
communauté vit dans cet état, il va se développer des mécanismes de
survie. Et c’est l’instinct qui agit à la place de la raison, on se
comporte comme un animal. Un des mécanismes de survie, c’est la
mendicité, la corruption, l’intimidation, les tracasseries… En résumé,
la qualité de l’environnement est médiocre tant au niveau du cadre de
vie qu’à celui du niveau de vie.

4. Mais…, les gens se résignent faute de mieux.

Je n’aime pas le terme résignation parce que c’est la démission. Et
la démission ne conduit pas au développement. On subit les aléas de la
vie, au lieu des affronter pour vaincre. C’est comme chez nous, un arbre
tombe, et au lieu de le couper, les gens le contournent. C’est la
culture de la cueillette, on se contente des opportunités du présent. Il
n’y a pas mieux que ce que dit l’hymne national, «(…) Dressons nos
fronts longtemps courbés, et prenons le plus bel élan…». C’est une
invitation à la responsabilité, chacun de nous doit prendre ses
responsabilités et ne croire à une fatalité en refusant la médiocrité.
En prônant l’excellence, en aimant le leadership vrai et les traîtres
qui trahissent la raison pour les intérêts personnels immédiats.
Toujours rejeter la culture de la cueillette au profit de celle de
production.

5. L’Organisation des Nations Unies a proclamé 2010, année
de la biodiversité. Quelle est la politique mise en place par le PNUE en
faveur de la RDC dans la protection des espèces menacées?

Je ne suis pas mandaté mais je vais parler dans les limites de mes
responsabilités. Le PNUE aide la RDC depuis des années, Il y a eu des
projets pour les gorilles et les aires protégées; les conventions
ratifiées par la RDC sur la biodiversité, la convention de Stockholm…
et actuellement, le PNUE, effectue l’évaluation environnementale
post-conflit, pour évaluer les différents défis environnementaux à
travers, d’analyser les réponses locales, provinciales et nationales,
afin de proposer des axes d’intervention spécifiques propres à chaque
défi identifié.

Dans le cadre de changement climatique, le PNUE soutient la
coordination nationale de I’UNREDD dans le cadre du processus lié à la
réduction des émissions de gaz à effet de serre, la déforestation et la
dégradation des terres forestières. Nous sommes donc un partenaire
technique et financier pour la RDC au même titre que le PNUD, la FAO, et
la Banque mondiale dans le cadre de son programme du carbone forestier.

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