19.07.10 Le Potentiel: Cinq questions à Kupa Tongolo Julien (*), par Angelo Mobateli
En 1960, il y avait au Congo autant de mentalités quil y avait des
tribus et des coutumes. Cet état desprit na pratiquement pas changé
puisque, de nos jours, le Congolais a un mode dêtre et de penser qui
résiste au développement, à un certain développement. Je constate une
vision déterministe qui aboutit souvent à la négation de la
responsabilité individuelle. Lexemple type est que chacun pense que
lobtention dune médaille de mérite civique doit rapporter à son
bénéficiaire des avantages honorifiques, matériels et financiers. Les
pionniers de lindépendance ont commis le péché de jeunesse de dormir
sur leurs lauriers, en se disant que le Congo indépendant se
développerait automatiquement. Que tout irait de soi. Or, il faut une
volonté politique de la part aussi bien de lAutorité politique que de
tout Congolais, à quelque niveau de responsabilité quil se trouve. Et
ce, pour que soient éradiquées des inégalités telles que lopulence
marginalisée, la santé pour les uns et les maladies pour les autres, les
revenues à double vitesse, labsence de pouvoir dachat pour la majeure
partie de la population congolaise.
2.A ces maux, quels remèdes proposez-vous ?
De prime abord, il y a lieu de relever que la cause ces maux réside
dans leur absolutisation. Je pense à quatre pistes de solutions :
affermir lhomme, promouvoir la garantie « justice », aiguiser la
volonté de progrès et revaloriser la culture du Congolais. Moi et mes
camarades membres de lAssociation des enfants des pionniers de
lindépendance pensons que le développement intégré et intégral du Congo est une affaire de tous les Congolais formés à ces quatre principes
majeurs. Depuis le premier gouvernement du Congo indépendant jusquà ce jour, les pouvoirs successifs ont pris conscience du fait que le devenir
de notre pays – voulu toujours meilleur – est une exigence la condition
humaine, un devoir moral. Aujourdhui, par exemple, la conscience
politique serait une réelle essence morale. Par conséquent, le
développement intégral de la RDC reposerait sur lamour profond et le
respect de la personne humaine.
3.Quest-ce à dire concrètement ?
Je veux dire que tout le monde connaît les turpitudes humaines dans
lesquelles ont vécu les pionniers de lindépendance et leurs
conséquences actuelles. Certains qui se présentent aujourdhui comme «
pionniers » navaient jamais siégé à la Table ronde politique au cours
de laquelle les émissaires congolais et belges avaient négocié
lindépendance du Congo. Plutôt que dentretenir les mensonges, on doit
dire la vérité aux Congolais qui ont le droit de connaître lhistoire
vraie de leur pays.
4.Se pose-t-il, dès lors, un devoir de mémoire ?
Oui, bien sûr. Après avoir négocié âprement avec les colonisateurs
belges en 1960, les pionniers de lindépendance avaient rêvé dun Congo
où les espoirs du peuple seraient exaucés par ses dirigeants. Leur joie
inouïe, combinée à lallégresse que le peuple avait exprimée dans la
solidarité, se justifiait par le fait de voir les Blancs accéder à leur
demande, celle daccorder la souveraineté nationale et internationale au
Congo. En 2010, ce sont laspect « fête », la recherche effrénée des
moyens de senrichir et linjustice sociale qui sont observés. Tout le
monde veut être décoré, avoir une médaille, même ceux qui nétaient pas
présents à la Table ronde politique de Bruxelles, en Belgique. Cest
dommage. Nous espérons que le président Joseph Kabila Kabange honorera, à titre posthume, tous les pionniers de lindépendance décédés et prendra en compte les veuves ainsi que les orphelins.
5.Avez-vous des informations sur lensemble des pionniers
de lindépendance ?
Lassociation des enfants des pionniers de lindépendance (Assepico),
créée à mon initiative, possède une riche documentation quelle mettra
volontiers à la disposition du journal Le Potentiel dont elle apprécie
la ligne éditoriale et lesprit de recherche. Elle a dénombré 170
négociateurs congolais à la Table ronde politique de Bruxelles. De tous
ces pionniers de lindépendance du Congo, il nen reste plus que dix,
qui sont aujourdhui très âgés. Le constat est amer. En effet, lorsquon
parle des pionniers de lindépendance, seuls quelques noms sont cités,
principalement ceux de Joseph Kasa-Vubu et de Patrice Emery Lumumba, président et chef du premier gouvernement du Congo indépendant.
Le Potentiel