29.07.10 Le Potentiel – Cinq questions à Ndolamb Ngokwey (*)

 

1. Comment êtes-vous entré aux Nations Unies?

Je peux dire que je suis entré par hasard aux Nations unies vers la
fin de mes études doctorales à l’Université de Californie à Los Angeles,
où j’ai eu à travailler comme assistant d’un professeur de la Faculté
de Santé publique qui était consultant à l’UNICEF. Ce fut mon premier
contact direct avec les Nations unies. La présentation a été très bien
reçue. Je suis rentré à Los Angeles et quelques mois plus tard, avec mes
diplômes en poche, de retour au Congo, j’ai enseigné les sciences
sociales, la médecine sociale et la santé publique à l’Université de
Lubumbashi, où j’ai aussi dirigé le Centre Interdisciplinaire pour le
Développement. Deux ans plus tard, j’ai reçu une offre pour travailler à
l’UNICEF au Niger. Je l’ai déclinée. Quelques mois après une autre
offre, cette fois pour le Cap Vert et au grade approprié, m’a été
faite. J’ai demandé au Recteur de m’autoriser à prendre un congé
sabbatique. Et voila qu’il dure depuis …vingt-cinq ans!

2. Quels souvenirs gardez-vous de l’Université de Lubumbashi?

Comme étudiant, assistant ou professeur, j’en garde des souvenirs
excellents. C était une université pleine de vitalité et stimulation
intellectuelle. Comme étudiant, j’ai eu des grands professeurs tels que
les professeurs Ngoma, Munzadi, Payanzo, Mwabila, Bola, Bwakasa,
Vanstenkiste, Nguyen Van Chien, Van Parys, Hornsbostel, Fabian, etc. Ils
m’ont non seulement enseigné la science et la recherché, mais m’ont
surtout donné le goût des études. Ils restent pour moi des géants
intellectuels et des modèles. J’ai eu des contacts avec des professeurs
d’autres Facultés à travers leurs conférences. Il s’agit des Professeurs
Ndaywell, Mudimbe, Hountondji, Laleye, Léon de St Moulin, Bangoura.
C’est en tant qu’étudiant Kassapard que j’ai connu mes grands amis, tels
que les professeurs Bongeli, Shomba, Osokonda, Kalele, Eloko a Nongo,
Longandjo et bien d autres qui ne sont pas dans le monde académique,
notamment Jean Lando avec lequel j’ai partagé des moments inoubliables.
J’avais aussi à Lubumbashi mon ami d’enfance, le Professeur Paul Tete.
Comme assistant, j’ai travaillé principalement sous la direction du
Professeur Payanzo, un intellectuel de classe et d’une grandeur d’âme
rare. Comme Professeur, j ai côtoyé de grands maîtres et de grands
amis, par exemple le Professeur Mushi. Aujourd’hui, certains de mes
étudiants brillent dans le monde académique ou occupent de hautes
fonctions nationales ou internationales. Quand j’étais assistant à la
Faculté des sciences sociales, je me suis inscrit aussi en graduat en
Histoire, où j’ai eu le privilège de suivre les cours des sommités comme
le professeur Ndaywell !

3. Après cette expérience universitaire au Congo, vous avez été au Mozambique. Qu’avez-vous fait dans ce pays ?

Voila un pays qui, peu après son indépendance en 1975, a connu une
guerre meurtrière et destructrice de plus de 10 ans. Il est
aujourd’hui présenté comme un exemple de reconstruction post-conflit
après les accords de paix signés il y a 15 ans. Depuis, pas un seul
coup de feu n’a été tiré par les parties belligérantes qui luttent
maintenant sur le terrain politique dans un Etat qui est à sa troisième
élection présidentielle. Le pays a eu une croissance économique
soutenue de 8 % en dix ans consécutifs. Les conditions de vie de la
population sont en amélioration constante. Cependant, des défis
importants demeurent pour consolider la démocratie, pour assurer la
croissance économique en faveur des plus pauvres, pour lutter contre le
Sida, pour profiter davantage de son voisinage avec le géant
sud-africain, pour réduire sa dépendance financière extérieure, pour
développer son agriculture et pour prévenir la malédiction des
ressources naturelles. Mais le pays se bat et les partenaires au
développement l’aide et l’encourage. Pendant mes 4 années, j’ai
co-présidé avec le représentant de la Banque Mondiale, le groupe de
tous les partenaires au développement. Et j’ai apporté ma pierre à un
appui plus coordonné des Nations unies aux efforts du Mozambique,
choisi comme un des 8 pays pilotes au niveau mondial pour la reforme des
Nations Unies. J’ai visité le pays en profondeur et développé de très
bonnes relations avec les autorités, la société civile et le secteur
prive. J’ai beaucoup appris au Mozambique et je me propose d’écrire sur
le miracle mozambicain.

4. Parlez de votre passage au Conseil d’administration de l’UNICEF…

C était une expérience unique qui me plaçait dans l’équipe de la
direction de l UNICEF à New York tout en étant au service du Conseil
d’administration. C’était un poste stratégique au sein duquel évoluent
les pays qui représentent cinq groupes régionaux: Asie, Europe
occidentale, Europe orientale, Amérique latine, Afrique. Ces groupes
ont parfois des points de vue différents sur la gestion et la direction
politique de l’organisation; ils ont parfois des intérêts divergents
aussi. Ce conseil a pour rôle d’orienter et de contrôler l’UNICEF grâce à
un consensus. Dans les coulisses, j ai dû souvent jouer le rôle de
facilitateur et de médiateur. En plus, je devais me faire accepter par
ces groupes qui n’avaient jamais vu un africain à ce poste depuis la
création de l’UNICEF.

5. Que dire de vos activités scientifiques ?

J’avais promis à un de mes professeurs à Los Angeles, Dr James
Coleman, que je ne renoncerais jamais à mes activités scientifiques. Et
il m’avait encouragé à continuer à publier même si je quittais le monde
académique. J’essaie d’accomplir cette promesse. Mes publications
portent généralement sur les questions du développement, de la
globalisation, sur la sociologie et l’anthropologie de la santé, de la
maladie, etc. Mon tout dernier livre, écrit en portugais, est sous
presse et porte sur la « Culture, droits de l’homme et développement ».

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