16.08.10 Cinq questions à Jean-Pierre Kimbuya (*), par St. Augustin Kinienzi

 

1. Les syndicats du secteur public ont initié des
concertations avec la partie gouvernementale. Quels en étaient les
termes de référence ?

Il était question de faire le point de différentes revendications
des agents et fonctionnaires de l’Etat, notamment l’uniformisation du
barème salarial qui devait être concrétisé depuis 2009 lorsqu’on se
réfère au protocole d’accord du 14 novembre 2007 entre l’Intersyndicale
nationale du secteur public et privé et le ministre du Budget d’alors,
actuel Premier ministre. Ce protocole n’a jamais été appliqué. Il y
avait aussi la revendication à la mécanisation des enseignants de
l’EPSP, la titularisation de certains agents et fonctionnaires au sein
de l’administration centrale. Le gouvernement doit essayer d’augmenter
les salaires des agents et fonctionnaires de l’Etat au regard du point
d’achèvement de l’IPPTE qui lui donne une certaine marge de manœuvre
pour revoir le social. L’Intersyndicale n’a pas voulu aller au-delà,
consciente de difficultés de l’Exécutif.

2. Qu’est-ce que la partie syndicale a pu arracher du gouvernement ?

Nous avons pris connaissance du protocole d’accord signé le 15
juillet. L’Intersyndicale a pu arracher du gouvernement la possibilité
de mécanisation de plus de 12.000 enseignants de l’ EPSP. C’est encore
théorique. Il y a aussi cette promesse de participer à l’élaboration du
budget pour l’exercice 2011. Ce n’est pas la 1ère fois et cette
initiative ne me convainc pas pour avoir déjà participé à ce genre de
travaux. C’est du bluff ! Et la possibilité d’octroi d’un forfait de
transport de 8.000 Fc qui n’est du reste pas encore officiel. Il y a
aussi d’autres aspects liés au dialogue social où l’Intersyndicale
devait être permanente dans le cadre d’une commission paritaire qui
devra être budgétisée et le paiement des syndicalistes qui se retrouvent
dans la commission technique de recours aux dernières ordonnances du
chef de l’Etat portant mise à la retraite et révocation de certains
agents et fonctionnaires de l’Etat.

3.On constate qu’après avoir dégagé des ressources
additionnelles de l’IPPTE, Kinshasa n’est pas encore à mesure
d’améliorer les conditions salariales des agents et fonctionnaires de
l’Etat. Qu’en dites-vous ?

Il est clair que le gouvernement donne l’impression de n’être pas
disposé à allouer un salaire décent aux agents et fonctionnaires de
l’Etat. 2010 a été déclaré par le chef de l’Etat année du social. En
tant que syndicaliste, représentant du contre-pouvoir syndical, nous
sommes convaincu que les collaborateurs du chef de l’Etat ne sont pas
capables de matérialiser sa vision par rapport au social. Et en amont,
les animateurs des institutions politiques du pays s’étaient déjà servis
gracieusement. A chaque budget, ils gonflent leurs émoluments, ce qui
n’a fait que creuser l’écart entre les agents et fonctionnaires de
l’Etat au bas de la pyramide et ces politiciens. En plus ces
institutions s’octroient de plantureux frais de fonctionnement. Il
aurait été juste que le président de la République donne un mot d’ordre
pour corriger ce hiatus et redistribuer le surplus en faveur du social
des agents et fonctionnaires de l’Etat, enseignants, policiers,
militaires…
Au jour d’aujourd’hui, malgré l’atteinte du point d’achèvement de
l’IPPTE, les agents et fonctionnaires de l’Etat attendent encore
l’uniformisation qui avait pourtant été promise mais aussi
l’augmentation des salaires au regard du barème des secrétaires généraux
qui leur alloue 936 283 Fc depuis la paie de mars 2010.

4. On parle de plus en plus d’un décret du chef de l’Etat
portant annulation de ce barème salarial discriminé. En avez-vous
connaissance ?

C’est la rumeur. En tant que syndicaliste, je dois tabler sur un
élément matériel. Ce décret n’existe pas. Le seul à notre connaissance
c’est celui du 21 mai 2010 qui reconduisait les salaires payés depuis
2007 pour la suite de l’année 2010. C’est comme s’il n’y a pas de
volonté réelle dans le chef du gouvernement de payer un nouveau salaire
aux agents et fonctionnaires de l’Etat. Et nous croyons que
syndicalement il ne faut pas qu’on induise le chef de l’Etat en erreur.
Les droits acquis doivent être préservés en temps de récession. Nous
organisation syndicale, nous lutterons pour que les droits de
secrétaires généraux soient préservés et qu’on aligne les autres agents
et fonctionnaires de l’Etat par rapport à ce barème-là.

5. Finalement, quelle est la position du Syeco par rapport aux négociations

Le Syeco est une grande machine interprofessionnelle,
interconfessionnelle tant à l’Enseignement primaire et secondaire qu’à
l’Enseignement supérieur et universitaire. A l’assemblée générale du 17
juillet dernier, la base a rejeté en bloc ce protocole d’accord. Membre
du Conseil syndical des services du secteur public et privé (Cossep), le
Syeco était représenté par son vice-président en qui nous faisons
encore confiance et attend qu’il en fasse officiellement rapport. Les
enseignants et personnel de l’Education de Kinshasa et des provinces
affiliés au Syeco attendent du gouvernement d’engager des concertations
véritables et crédibles au niveau de l’EPSP. Car, c’est quand même le
secteur névralgique et peut-être le secteur de prédilection pour des
changements sociaux au pays. Ce secteur emploie plus d’agents que tous
les secteurs de l’Administration publique en RDC. Le Syeco a tiré la
sonnette d’alarme depuis juillet pour qu’avant la rentrée scolaire, les
enseignants recouvrent leurs droits. Ils ne sont prêts à continuer à
travailler pour ce salaire indécent. Dans la mesure où la prise en
charge, qui était une innovation en quelque sorte, a été
institutionnalisée sauvagement et de façon incontrôlée ; permettant
l’enrichissement des gestionnaires, les détournements de fonds dans
beaucoup d’écoles aussi bien de Kinshasa que des provinces. Et tout cela
se fait au grand silence de l’Eglise du Congo, des associations des
parents.
Du gouvernement, on attend des concertations crédibles et sincères pour
que l’enseignant se retrouve dans ses droits parce que c’est lui
l’artisan de la République et le chantier prioritaire, à notre sens, est
l’éducation, car c’est le socle du développement durable de la nation.

Droits de reproduction et de diffusion réservés © Le Potentiel 2005

Usage strictement personnel.
L'utilisateur du site reconnaît avoir
pris connaissance de la licence de droits d'usage, en accepter et en
respecter les dispositions.

Laissez un commentaire

Vous devez être connectés afin de publier un commentaire.