06.12.10 Le Potentiel : Cinq questions à Stephen Nzita di Nzita

Par St. Augustin Kinienzi

1. Les personnalités devant constituer le bureau de la CENI ont été désignées, mais rien ne se met en place. Vous avez prévu ce cinéma depuis bien longtemps. Prophète ou visionnaire ?

Non. C’est juste un observateur qui est là depuis 1990, il connaît la scène politique congolaise et qui a étudié la psychologie et l’administration. Je réitère ce que j’avais déclaré récemment dans le journal Le Potentiel. Non seulement qu’ils ne seront pas capables de nous produire une CENI mais aussi ils ont, de manière délibérée créer un problème artificiel, c’est-à-dire ils veulent nous produire une nouvelle définition d’une personnalité indépendante, Opposition et AMP, les deux groupes ont agi de manière délibérée afin de ne pas donner au peuple la chance d’avoir des élections. Regardez le temps que cela a pris pour désigner les candidats. Je pense que pour le bonheur de notre pays, il va falloir que nous trouvions une personne indépendante. Le représentant spécial du secrétaire général de l’ONU a l’obligation morale de ne pas permettre que le cycle démocratique du Congo soit bloqué par un groupe d’individus. Il doit donc intéresser la communauté internationale et proposer aux Congolais un candidat neutre l’instar de la Guinée. Ceci ne retranche rien à notre souveraineté.

2. Et puisque cela prend du temps, comment entrevoyez-vous la suite du processus électoral en RDC ?

Une fois de plus, j’avais proposé un calendrier réaliste qui démontre que dans les 120 jours il est possible non seulement d’organiser les élections en RDC mais aussi d’installer les préalables que sont les 25 provinces plus la ville Kinshasa. En 120 jours, nous sommes non seulement capables de réaliser ce que Malumalu fait illégalement mais aussi de donner à ce peuple la chance d’aller aux urnes et entreprendre ce que la Constitution a prévu, càd d’installer les 25 provinces + Kinshasa.

3. A scruter la liste des personnalités proposées au bureau de la CENI, avez-vous l’impression que cette CENI sera réellement nationale et indépendante ?

Elle ne le sera pas du tout. Imaginez que nous parlons de la parité, mais il n’y a aucune femme proposée à ce bureau. La femme qui n’a pris part à aucune guerre dans ce pays est simplement exclue du jeu politique. De cette façon, la CENI sera politique et incapable de trancher les litiges post électoraux. Chaque membre se retournera vers son camp et malheur au peuple congolais qui n’aura pas quelqu’un de neutre pour mettre en avant plan ses intérêts. Pour cela, il faut que la communauté internationale qui a mis beaucoup de moyens pour que la RDC arrive à se démocratiser, le financement des Nations unies est le plus important au Congo, ne tolère pas que ses efforts accouchent d’une souris. Respectons le calendrier et surtout ne donnons pas à Joseph Kabila l’occasion de commettre l’erreur. Ce qu’il possède de plus précieux, c’est la légitimité du peuple. Si les élections se déroulent hors délai, il perdrait sa légitimité.

4. Que préconisez-vous pour voir des élections démocratiques et transparentes ?

La première chose c’est le pression internationale parce que les gens au pouvoir (majorité et opposition) se confortent dans leur position. Ils pensent que le peuple ne dit rien par rapport au jeu en présence. Que la communauté internationale leur rappelle que sans son concours, ils ne seraient pas aux affaires. La deuxième, si cette communauté internationale n’avait pas fermé les yeux, la majorité se trouveraient derrière le barreau, car la plupart ont de dossier pénal ou judiciaire, surtout qu’ils ont violé la Constitution du pays en faisant la guerre. La troisième : je leur ai proposé un calendrier de 120 jours. Je l’ai soigneusement préparé avec mon équipe depuis 1993 quand Mobutu révoquait l’idée de la tenue des élections. Mobutu avait néanmoins réservé une réponse à ce calendrier. Ce même chronogramme que j’ai modifié pour l’adapter au contexte et répondre aux besoins actuels. La 4è chose, c’est la libération des médias publics qui doivent recevoir un droit d’antenne aux partis de l’opposition. La cinquième, il faut qu’une vraie campagne d’éducation civique soit menée en faveur du peuple pour lui dire par exemple que la violence n’arrange rien en démocratie. Si rien n’est fait d’ici le 25 décembre, le peuple va initier une pétition pour amener ces acteurs à se déterminer par rapport à la question de la CENI. Nous y travaillons déjà.

5. Quelle est votre appréciation du procès Bemba en cours à la Cour pénal internationale ?

Le procès Bemba intéresse les Congolais au plus haut point. Car pour la 1ère fois, on comprendrait le discours inter rebelles. Avec des frontières poreuses, on a des rebelles transfrontaliers. Les Congolais auraient eu la chance de savoir ce que Patassé et Bemba s’étaient dit à la frontière Oubangui. Ce procès aurait donné aux Congolais l’occasion de connaître sous quel uniforme les hommes de Bemba avaient opéré en Centrafrique, qui avait financé l’opération. Mais tout cela devient impossible par le fait que, par tactique, le procureur de la CPI n’a pas convoqué un acteur majeur du drame centrafricain : Ange-Félix Patassé. Celui-là même qui avait invité les troupes de Bemba à intervenir en RCA. Et puis, les méthodes du procureur Moreno ne nous convainquent pas surtout dans le choix des témoins. On n’oublie pas que dans cette Afrique à feu, les gens ont faim. Et qu’un Africain est prêt à témoigner contre son frère surtout quand il se retrouve à l’étranger. C’est ce que j’appelle témoins ou opposants d’immigration. La preuve c’est que le 1er témoin a été douteux dans sa déposition. C’est vrai que Luis Moreno Ocampo a abattu un travail appréciable de traque des narcotrafiquants en Argentine. Et cela pendant des années. Mais la réalité africaine est différente et cette erreur de jugement l’a conduit à se faire une caricature biaisée de Bemba, homme riche et qui doit résider dans son pays, où il a un rôle majeur à jouer. On se souviendra qu’avant d’intervenir en RCA, Bemba avait écrit à l’Union Africaine. Mais on ne nous dit pas ce que l’UA avait réservé comme réponse à la lettre de Bemba. Non, je suis d’avis que Moreno n’a pas compris la psychologie et la sociologie africaines. La responsabilité incombe à la juge chargée du dossier de faire éclater la vérité.

Propos recueillis par St Augustin K.

Président du Parti du peuple pour la Progrès, PPPC.

Laissez un commentaire

Vous devez être connectés afin de publier un commentaire.