15/01/11 / MMC – « Premier ou Second tour, le Président Joseph Kabila sera réélu aux élections de 2011 », prédit le Professeur John Francis Mbala

Dans
un entretien exclusif consacré aux questions de l'heure, le Professeur
John Francis Mbala (JFM) s'est prêté avec digitalcongo.net à un jeu de
question- réponse qui se révèle édifiant.  JFM que l'on ne présente
plus, familier de digitalcongo, politologue de son état est un analyste
politique sérieux qui apparaît désormais comme une véritable réserve de
la République au moment où le dernier virage vers les élections est
amorcé. Le Professeur John Francis Mbala est Docteur en Science
politique, Chercheur associé CURAPP-CNRS, Faculté de Droit de
l'Université de Picardie Jules Verne. Il preste à Académie d'Amiens en
France et à la Faculté de droit de l'Université Protestanet au Congo à
Kinshasa.

Multi média congo (MMC) : Bonjour Professeur, comment
entrevoyez-vous les enjeux politiques en cette année électorale alors
que des débats houleux entourent le projet de réviser la constitution ?

John Francis Mbala : Merci à nouveau d'avoir pensé à me
solliciter pour recueillir mon analyse sur les questions qui agitent la
classe politique, l'opinion publique congolaise en Rd Congo mais aussi
nos nombreux compatriotes, frères et sœurs disséminés à travers le
monde.

Comme vous le savez, le silence est précieux et je n'en sort que
lorsqu'il faut vraiment m'exprimer pour une meilleure lisibilité des
enjeux sinon valoriser notre pays tel que lors des festivités du cinquantenaire
sinon concernant la bonne nouvelle qu'a été le choix de notre pays pour
organiser le XIVème Sommet de la Francophonie en 2012 à Kinshasa.

J'accepte de sortir de mon silence car l'heure est grave et
contrairement aux précédentes interviews je serais un peu plus long.
Pour entrer dans le vif du sujet, je pense que la question reste :
Faut-il, peut-on réviser la Constitution ?

Un clivage net met en présence d'une part la Majorité parlementaire qui a
déposé une proposition de loi portant révision de la Constitution du 18
février 2006 d'une part et l'opposition parlementaire voire extra
parlementaire d'autre part.

Il me semble utile de présenter au préalable les arguments de
l'Opposition politique puisque celle-ci a décidé de faire obstruction à
la proposition de loi qui fait l'objet d'une controverse qui nous
incitera à mobiliser diverses approches tant les débats dépassent le
cadre strictement juridique.

Dès lors, il serait inconcevable de faire l'économie des approches
Sociologique, de Science politique, celle-ci étant ma spécialité.

Avant d'étayer mes arguments sur les questions de l'heure souffrez que
je précise d'ores et déjà qu'il ne s'agit point ici d'une publication
scientifique mais nous sommes plutôt dans le cadre d'un entretien qui
doit être accessible au grand public même si nous effleurerons certaines
théories ou publications pour rappel dès lors que des éminentes
personnalités font preuve d'une cécité intellectuelle volontaire.

L'Opposition politique est dans son rôle, celui d'être un contrepoids,
force de proposition qui aspire à une alternance politique pour quitter
la périphérie et intégrer, exercer le pouvoir et/ou gérer les affaires,
la res publica.

Qu'elle s'oppose à une proposition émanant de la Majorité parlementaire,
quoi de plus normal ? La Constitution du 18 février 2006 reconnaît
l'Opposition politique et lui accorde des prérogatives sans précédents
et c'est une avancée juridique indéniable.

Mais cette même Constitution balise l'étendue des pouvoirs exercés par
l'exécutif bicéphale, le Législatif bicaméral et le pouvoir Judiciaire
et donc il n'y a pas de place à l'improvisation et la domination
politique si nous devons évoquer Max Weber doit rester
légale-rationnelle. L'Opposition politique estime que réviser la
Constitution aujourd'hui apparaît inopportune mais encore une tricherie
serait prévue, envisagée, par la Majorité politique actuelle au pouvoir.

En outre, elle estime que les dépenses relatives au processus électoral
2011 ont été budgétisées et l'argument selon laquelle, il y aurait
probablement difficulté à réunir les ressources financières nécessaires à
la bonne tenue des élections est plutôt fallacieux.

Mais au juste, quel est le contenu de la proposition de loi portant
révision de la constitution ? Il comporte plusieurs aspects (8 articles
soumis à examen pour révision) mais la pomme de discorde reste la
question relative au mode de scrutin, à savoir l'article 71.

La Constitution actuelle met plutôt en exergue le scrutin majoritaire à
deux tours. Or, pour des raisons que nous analyserons ultérieurement, la
proposition de loi précitée présentée par un candidat de la Majorité à
l'Assemblée nationale met l'accent sur l'intérêt d'opter pour un scrutin
majoritaire à un tour.

D'où une série de questions. Sans aucune exhaustivité : Faut-il, peut-on
réviser cet article de la Constitution ? Pourquoi cette proposition
émerge-t-elle maintenant alors qu'il y a eu plusieurs législatures? La
Constitution du 18 février 2006 en son article 71 stipule : « Le
Président de la République est élu à la majorité absolue des suffrages
exprimés. Si celle-ci n’est pas obtenue au premier tour du scrutin, il
est procédé, dans un délai de quinze jours, à un second tour.

Seuls peuvent se présenter au second tour, les deux candidats qui ont
recueilli le plus grand nombre des suffrages exprimés au premier tour.

En cas de décès, d’empêchement ou de désistement de l’un ou l’autre de
ces deux candidats, les suivants se présentent dans l’ordre de leur
classement à l’issue du premier tour.

Est déclaré élu au second tour, le candidat ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés».

Contrairement à ce que l'Opposition politique tend à laisser penser ou
véhicule dans l'opinion publique, il est tout à fait possible et surtout
légal de procéder à la révision de la constitution même s'il faut
souligner d'ores et déjà que certaines matières sont verrouillées.

Si la Constitution est la loi suprême, la loi des lois, qu'elle traduit
la volonté du souverain primaire puisque c'est à la suite d'une
consultation du peuple, le référendum de 2005 qu'elle a été adoptée, il
s'agit d'une œuvre humaine et en ce sens elle est perfectible et ne
saurait être un texte immuable.

Sans développer une approche trop juridique et risquer de tomber dans
une sorte de juridisme rappelons simplement que les faits sociaux
précèdent le droit.

Le droit ne vient que normaliser une déviance sinon combler un vide
juridique. En son article 218, la Constitution du 18 février 2006 est
claire et énumère les personnalités et/ou institution qui sont en droit
de proposer une révision de la Constitution :

« L’initiative de la révision constitutionnelle appartient concurremment :

1. au Président de la République ;

2. au Gouvernement après délibération en Conseil des ministres ;

3. à chacune des Chambres du Parlement à l’initiative de la moitié de ses membres ;

4. à une fraction du peuple congolais, en l’occurrence 100.000
personnes, s’exprimant par une pétition adressée à l’une des deux
Chambres.

Chacune de ces initiatives est soumise à l’Assemblée nationale et au
Sénat qui décident, à la majorité absolue de chaque Chambre, du bien
fondé du projet, de la proposition ou de la pétition de révision.

La révision n’est définitive que si le projet, la proposition ou la pétition est approuvée par référendum.

Toutefois, le projet, la proposition ou la pétition n’est pas soumis au
référendum lorsque l’Assemblée nationale et le Sénat réunis en Congrès
l’approuvent à la majorité des trois cinquième des membres les composant
».

Au vu de ce qui précède, il est établi que la proposition de loi portant
révision de la Constitution n'est pas en porte à faux avec la légalité.
Il convient donc d'avoir une autre lecture des déclarations de
l'Opposition politique, déclaration tendant à fustiger le recours à la
proposition qui fait l'objet d'une controverse sans précédent tel
qu'au-delà des joutes oratoires et altercations verbales violentes un
pugilat a été observé dans l'hémicycle le mardi 11 janvier dernier, des
députés s'étant exercés aux biceps.

Une honte pour des représentants du peuple. Cela démontre seulement que
certains sont incapables de gymnastique intellectuelle et à court
d'arguments, l'opposition politique s'illustre dans une fuite en
essayant de croiser le fer, mieux, pousser la majorité à l'Assemblée
nationale à la faute.

Celle-ci a cependant intelligemment esquivé ce piège et la séance s'est
poursuivie en dépit du fait que de nombreux députés de l'opposition
politique avaient déserté leurs bancs.

Au final, une majorité claire soit 334 députés sur les 337 voix exprimés
s'est prononcée pour la suite du processus relatif à l'examen de la
proposition de loi portant révision de la Constitution tandis qu'il y a
eu 1 non et 2 abstentions.

La navette législative a suivi son cours et il appartenait à la Chambre
haute autrement dit le Sénat de se prononcer ce qu'elle a fait jeudi 13
janvier 2011. Mais là aussi, cela était prévisible,  une majorité de
sénateurs proches de la famille politique de l'initiateur de la
proposition de loi qui défraye la chronique, l'AMP-PALU ont donné 
quitus à la poursuite du processus dont l'objectif principal reste la
modification de l'article 71 pour y inscrire le scrutin majoritaire à un
tour pour la désignation de l'institution qu'est le Président de la
République. Sur 108 membres qui composent le Sénat, 81 sénateurs ont
pris part au scrutin et la répartition du vote a été celle-ci : 71 oui, 1
Non, 9 Abstentions. Par conséquent, le Président du Sénat a annoncé
l'évolution vers la prochaine étape, la tenue d'un Congrès.

Dès lors, nous pouvons imaginer la suite et l'opposition n'aura aucune
voie légale de recours : Le Congrès se réunit à savoir les deux chambres
au même moment et la proposition est adoptée par un vote réunissant le
3/5 des votants; les nouvelles dispositions adoptées seront soumises
ensuite pour promulgation dans un délai précis au Président de la
République.

Le scrutin majoritaire à un tour ainsi adopté sera publié au journal
officiel, la loi entrera en vigueur et effectivement la prochaine
élection présidentielle sera celle d'un scrutin majoritaire à un tour et
le processus suivi pour arriver à cette décision ne sera entaché
d'aucune illégalité.

Pour rappel l'article 119 de la Constitution du 18 février 2006 qui
régit les institutions de la IIIème République stipule : « Les deux
Chambres se réunissent en Congrès pour les cas suivants :

1. la procédure de révision constitutionnelle, conformément aux articles 218 à 220 de la présente Constitution ;

2. l’autorisation de la proclamation de l’état d’urgence ou de l’état de
siège et de la déclaration de guerre, conformément aux articles 85 et
86 de la présente Constitution ;

3. l’audition du discours du Président de la République sur l’état de la
Nation, conformément à l’article 77 de la présente Constitution ;

4. la désignation des trois membres de la Cour constitutionnelle,
conformément aux dispositions de l’article 158 de la présente
Constitution».

A mon sens, le débat reste ouvert sur la question de la légitimité d'une
telle démarche et nous tombons ipso facto dans la contrainte de
différencier légalité et légitimité.

Sans nous appesantir sur une définition précise et échapper à des
querelles sémantiques ou de chapelle, mieux confronter différentes
approches, auteurs nous pouvons brièvement rappeler que la légalité
suppose une conformité à la norme juridique, essentiellement la loi
tandis qu'il faut tenir compte d'une acception plus large pour la
légitimité dès lors que celle-ci englobe la légalité et met l'accent sur
la reconnaissance.

S'agissant d'un système politique, de nos jours la légitimité est
acquise par l'élection, une majorité de voix qui illustre l'assentiment
du peuple.

Qu'il s'agisse d'une petite ou d'une grande majorité, il reste que c'est
le candidat qui dégage la majorité des voix qui dans le cas d'une
élection présidentielle accèdera à la magistrature suprême.

Nonobstant, il est plutôt souhaitable que le candidat ainsi élu
recueille une frange non négligeable des voix pour mieux asseoir sa
légitimité. Nous en venons donc aux conséquences du scrutin majoritaire à
un tour.

 Selon certains ténors de l'opposition avec ce mode de scrutin un
Président qui recueille par exemple 20% des voix exprimés voire moins
soit 10% et pourquoi pas 5% serait mal élu et avançant de tels argument,
ils font allusion à une mauvaise réélection du Président Joseph Kabila,
une réélection qui souffrirait selon eux d'un déficit de légitimité
manifeste.

C'est ici que nous disons, certes l'issu de la prochaine élection réside
dans le secret des dieux selon l'expression consacrée mais
personnellement, je ne vois pas comment le Président Joseph Kabila qui
avait réalisé 58,5 % lors de l'élection présidentielle de 2006 à l'issu
du scrutin majoritaire à deux tours pourrait passer subitement de 58,5
de % à 20% voire moins.

C'est théoriquement impossible, voire une aberration car non seulement
le Président Joseph Kabila a un bilan, certes tous n'est pas parfait,
mais encore par le jeu des alliances, il ne peut réaliser des
pourcentages aussi insultants.

C'est donc là un faux débat qu'il faut aussitôt escamoter pour ouvrir
sur des questions cruciales, à savoir quelles sont les véritables enjeux
politiques et/ou stratégies au-delà de l'approche juridique. Du point
de vue de la Science politique, la démarche de la Majorité parlementaire
est tout à fait justifiée.

Souffrez de découvrir dans mes arguments une analyse froide dans le sens
où c'est sans complaisance que nous allons illustrer le fait qu'une
politique morale arque bouter sur la dichotomie bien/mal reste un
objectif quelquefois loin d'être atteint dans le champ politique où l'on
observe des trahisons, des retournements de veste, des transfuges ici
ou là. En somme, un monde de requins, de loups dans lequel si certains
discours sont enrobés de préceptes moraux, voire philosophiques sinon
religieux sur le bien et/ou l'intérêt général en réalité ces discours
mielleux sont quelquefois d'un cynisme inouïe.

Il ne s'agit point de promouvoir une conception pessimiste de la
politique mais de relever que le politique – l'homme politique- élabore
des stratégies et celles-ci ne sont guère loin des théories avancées par
Thomas Hobbes dans le Leviathan qui estimait que « l'homme est un loup
pour l'homme ».

Si nous n'évoquerons pas Le prince de Machiavel c'est pour relever qu'il faut distinguer cet auteur du machiavélisme.

Fermons cette parenthèse qui peut ennuyer certains eu égard à la complexité des théories relatives à la philosophie politique.

Compte tenu du schéma ivoirien et notre vécue, les institutions de la
République ébranlée dans l'entre deux tours en 2006 avec pour paroxysme
les affrontements de triste mémoire en mars 2007 entre les forces
loyalistes et celles de l'ancien Vice-président qui fut candidat à la
Présidence de la République en l'occurrence l'actuel sénateur emprisonné
à La Haye, Jean-Pierre Bemba, il me semble que la Majorité
parlementaire à estimé qu'à situations exceptionnelles, mesures
exceptionnelles. En outre, elle estime que le fait d'instaurer un
scrutin majoritaire à un tour permettra de dégager une économie de 350
millions de dollars là où il fallait dépenser 750 millions pour les deux
tours.

« Le scrutin majoritaire à un tour entrainera un émiettement de
l'Opposition politique et certains comme d'habitude se retireront du
processus électoral »

A situations exceptionnelles, mesures exceptionnelles dites-vous. Pouvez-vous être plus explicite ?

Oui, cette hypothèse prend en compte le changement de la donne à la
veille de l'élection présidentielle prévue en 2011, à savoir la
confirmation de la participation de l'UDPS dont le candidat a été
désigné officiellement en la personne du leader politique Etienne
Tshisekedi.

Ce à quoi il faut ajouter l'émergence de l'UNC, parti politique dirigé
par Vital Kamerhe même s'il ne fait l'ombre d'aucun doute que lui
également sera candidat à la Présidence de la République.

Voyez-vous la conjugaison de tous ces éléments doit être pris en compte
par les actuels gouvernants et il n'est pas interdit pour ceux-ci
d'élaborer des stratégies politiques.

Avant d'évoquer le schéma ivoirien, j'attire l'attention de l'opinion
publique sur le fait qu'un des arguments de l'Opposition politique
consiste à fustiger le fait que ce n'est qu'à la veille de l'élection
présidentielle que la majorité parlementaire propose de réviser la
constitution pour selon eux imposer le scrutin majoritaire à un tour.

Nous avions prouvé que contrairement à ce qu'affirme l'opposition
politique, il ne s'agit pas d'un passage en force puisque la légalité
est respectée et ce conformément à la Constitution qui prévoit en son
article 218 sa possible révision.

 Pour ouvrir sur la Côte d'Ivoire, si ce pays a opté pour le scrutin
majoritaire à deux tours et qu'un débat reste sur la nature politicienne
ou pas des décisions prise par leur CEI d'une part et la Cour
constitutionnelle d'autre part, les faits sont là : risque de résurgence
voire amplification de crise identitaire, partition géographique de
fait du pays et guerre civile à l'horizon.

Fort de tous ces éléments, à savoir l'expérience connue dans notre pays
dans l'entre deux tours de l'élection présidentielle en 2006 mais
surtout en 2007, la majorité parlementaire a estimé que le scrutin
majoritaire à un tour présentait moins de risque que celui à deux tours.

Maintenant qu'on ne se le cache pas en science politique, des stratégies
visant à désorganiser l'adversaire ne sont pas exclus et l'histoire
nous renseigne que ces stratégies ne font pas abstraction de différentes
tactiques.

Si la Majorité parlementaire a estimé qu'à l'occasion d'un second tour,
l'Opposition politique peut se réunir autour d'un candidat unique de
l'Opposition tel qu'en Côte d'Ivoire et surtout qu'un report de voix
peut être effectif, il n'est pas exclu de penser qu'elle préfère un mode
de scrutin à un tour pour empêcher l'Opposition politique de coaliser
autour d'un candidat unique de l'Opposition et ce calcul politique
relève bien des stratégies dont sont capables les politiques pour
conserver le pouvoir. Maintenant, tout ceci milite t-il en faveur de
l'intérêt général ?

A mon avis, si la paix sociale peut être préservée au prix d'une
élection présidentielle à un tour pour éviter une situation analogue à
la Côte d'Ivoire ce type de stratégie peut être soutenu du moment qu'il n
y a pas mort d'homme. L'opposition politique, à mon sens, n'a pas à
prendre peur car rien ne lui empêche de coaliser ou conclure des
alliances avant l'élection du Président de la République selon le mode
de scrutin qui sera inéluctablement adopté à mon avis : Le scrutin
majoritaire à un tour. Seulement, l'opposition politique congolaise est
consciente de son imperfection, sa faible culture voire la vénalité de
ses composantes.

Mieux, plutôt que de ne pas perdre de temps et organiser la désignation
d'un candidat unique tant inexorablement nous nous acheminons vers la
révision de l'article 71 de la constitution du 18 février 2006, elle se
perd en fioriture, versatilité et verbiage quand elle ne distille pas
des propos haineux et veut manipuler l'opinion publique.

C'est qu'en réalité, ni Etienne Tshisekedi, ni Vital Kamerhe ou d'autres
candidats qui se déclareront le moment venu ne veut céder et
n'accepteront que difficilement le fait que tel est mieux placé pour
rivaliser face au Président Joseph Kabila.

Les exemples illustrant les divisions de l'Opposition politique sont
légions et à ce jour elle est incapable de fédérer autour d'une
personnalité à désigner pour assumer le rôle de porte parole de
l'opposition.

Il est un fait, l'élection selon le mode de scrutin majoritaire à un
tour entrainera un émiettement de l'Opposition politique et parti en
ordre dispersé, certains comme d'habitude se retireront du processus
électoral ou s'ils restent les querelles intestines seront telles que le
fiasco sera au rendez-vous, mieux, la « gifle politique » du Président
Joseph Kabila leur sera infligée.

De toutes les façons, je ne vois pas pourquoi l'on se perd dans des
polémiques sur cette question quand l'on sait que la plupart des pays de
la planète intègrent dans leur système politique le mode de scrutin
majoritaire à un tour, l'Allemagne, la Grande-Bretagne, les Etats-Unis
d'Amérique pour ne citer qu'eux et en Afrique le Gabon, sinon le Togo
par exemple.

Pour revenir à l'option qui a été probablement levée par la Majorité
parlementaire de tenir compte de la participation de l'UDPS, l'émergence
de l'UNC et donc privilégier le scrutin majoritaire à un tour, en
science politique, selon une analyse froide, ce genre de stratégies
s'observe ici ou là et l'expression adéquate est : «  c'est de bonne
guerre ».

Sortons donc d'un angélisme tendant à laisser penser que les hommes
politiques se font des cadeaux notamment en période électorale et
rappelons comme le soutenait déjà Aristote, « l'homme est un animal
politique ».

A mon avis, il n'y a pas illégalité sur le choix de proposer une
révision de la constitution en cette période, soit la veille de
l'élection présidentielle car nulle part dans la constitution il n'est
écrit qu'une telle procédure ne peut être enclenchée ou du moins est
interdite en fonction d'un délai précis.

Voyez-vous, il faut prendre de la hauteur et dans l'analyse politique se
départir de toute complaisance et opter pour un débat dépassionné en
sachant relire les faits récents pour mieux cerner l'avenir.

Mon humble avis est qu'en réalité quel que soit le mode de scrutin,
premier tour ou second tour le Président Joseph Kabila Kabange sera
réélu.

« Rien n'interdit de penser que finalement le probable candidat Vital
Kamerhe fera son méa culpa pour faire alliance avec le Président actuel
de la République »

N'est-ce pas prétentieux d'affirmer dès à présent « Premier tour ou
second tour, le Président Joseph Kabila Kabange sera réélu » ?

Mais non, il suffit de se rappeler qu'en 2006 la personnalité
emblématique du Palu, Antoine Gizenga était dans l'Opposition et surtout
candidat à la Présidence de la République avec pour adversaire le
Président Joseph Kabila Kabange.

L'alliance entre le Président en place et des leaders de l'Opposition a-t-il été impossible après le premier tour ?

S'il ne faut pas écorcher la personnalité du patriarche Antoine Gizenga,
relevons un agenda caché de nombreux partis de l'Opposition politique.

Leur combat est celui ci : Actuellement, certains se battent becs et
ongles pour le maintien du deuxième tour ou le scrutin majoritaire à
deux tours afin que dans l'entre deux tours, bien qu’écarté de la
course, ils puissent marchander leurs maigres voix contre monnaies
sonnantes et trébuchantes auprès de l'un des deux candidats retenus pour
le second tour.

Ainsi, en 2006 déjà, les politiques congolais avaient pour certains fait
le pied de grue soit devant l'état major de campagne du Président
Joseph Kabila , soit de celui de Jean-Pierre Bemba, tous deux alors
candidats à la Présidence de la République. Si le mode de scrutin
majoritaire était maintenu en l'état et que la proposition de loi
portant révision de la constitution du 18 février 2006 restait lettre
morte, le Président Joseph Kabila à mon avis sera toute de même réélu.
La politique est dynamique et rien n'interdit de penser que finalement
le probable candidat Vital Kamerhe fera son méa culpa pour faire
alliance avec le Président actuel de la République.

Ceci peut être incongrue pour certains mais rappelons que ces deux
personnalités ne sont pas des ennemis mais plutôt des adversaires
politiques et par ailleurs la politique est dynamique.

En outre, l'Opposition politique congolaise repose plutôt sur des
fondements fissurés, lézardés tels que il ne sera pas étonnant de
constater des volte-face et donc des ralliements contre toute attente en
faveur du Président Joseph Kabila.

Dans l'hypothèse la plus probable, celle d'une adoption de la
proposition qui verrait dans la Constitution l'inscription du mode de
scrutin majoritaire à un tour pour l'élection présidentielle, le
Président Joseph Kabila l'emportera également et sera réélu.

Voyez-vous, au sein de l'UDPS en dépit d'un rappel à l'ordre, des voix
discordantes participent à son affaiblissement tandis qu'au sein du MLC,
un combat des chefs couve et se profile à l'horizon un affaiblissement :
qui de Fidèle Babala, Clément Kanku par exemple ou François Muamba
sinon tel autre cadre du MLC doit être désigné pour l'élection
présidentielle ?

Quant au transfuge du PPRD qu'est Vital Kamerhe, il a assené de
terribles coups à l'Opposition politique en 2006, participant ardemment à
la victoire du Président Joseph Kabila et l'Opposition, à moins d'avoir
la mémoire courte n'est pas prête de l'oublier.

En clair, une méfiance latente existe à l'égard de l'UNC de Vital
Kamerhe et la Majorité parlementaire, pour mieux désorganiser la
possible coalition de l'ancien speaker numéro 1 de l'Assemblée
nationale, ancien secrétaire général du PPRD ne se gênera pas de
rappeler à ses nouveaux camarades de l'Opposition ses « hauts faits
d'armes » et qu'il serait même une sorte de cheval de Troie.

Il ne s'agit point ici d'avoir l'esprit tordu mais de relever que dans
le champ politique le cynisme est tel que tous les coups semblent permis
et l'expression, « c'est de bonne guerre» a dans ce champ toute sa
place.

A mon humble avis, le seul leader capable de rivaliser vraiment avec le
Président Joseph Kabila est le Sénateur Jean-Pierre Bemba mais les
procédures de la CPI ont plombé ses ambitions.

En mars 2007, après les affrontement j'avais anticipé (lire :
http://www.digitalcongo.net/article/42261 )sur son arrestation par la
CPI et j'avais été traité de tous les noms d'oiseaux. En 2008, il a été
appréhendé en Belgique.

Aujourd'hui les faits me donnent raison. De la même manière, je ne
serais pas surpris que demain la CPI qui reste une instance judiciaire
discutable voire pour certains politisée libère, blanchisse le sénateur
Jean-Pierre Bemba à quelques mois à peine de l'élection présidentielle
en Rd Congo.

Encore une hypothèse absurde, saugrenue avancerons certains mais en 2007
tout justement ce que je déclarais passait pour absurde et il est
aujourd'hui emprisonné à La Haye tandis que la guerre des chefs au MLC
que j'annonçais est maintenant un fait avéré même si l'unité affichée
reste une façade comportant des fissures.

En dépit d'une telle hypothèse, la libération du leader du MLC, il lui
apparaîtra difficile de changer la donne politique et prétendre
l'emporter face à l'actuel chef de l'Etat qui à pris une longueur
d'avance non négligeable.

Abordons à présent la question du social, n'est-ce pas un bilan plus que mitigé, cette année 2010 qui vient de s'écouler ?

En annonçant que 2010, serait l'année du social le Président de la
République était animé de bonne volonté, il était sincère mais il est un
secret de polichinelle certains acteurs du champ politico-administratif
chargé de procéder à la matérialisation des Cinq chantiers ont eu une
gestion plus que opaque de la chaîne des dépenses ainsi qu'en témoignent
les retards pris dans les délais initialement fixés et le brusque
enrichissement personnel de certains.

Il nous souviendra à tous que le Chef de l'Etat estimait qu'avec
seulement une poignée de collaborateurs qu'il aurait voulu trouver, il
ferait beaucoup.

Relevons qu'il ne s'agit point de souligner que tous ses collaborateurs ont démérité.

Selon la vision du Chef de l'Etat, il me semble que tout en mettant
l'accent sur l'objectif d'atteindre le point d'achèvement des PPTE, le
chantier des infrastructures devait connaître une avancée significative
afin que les routes de dessertes agricoles soient mieux aménagés pour
l'approvisionnement des grandes villes mais tout justement les anti
valeurs et la corruption ont la peau dure et l'exécution des projets n'a
pas été quelquefois conforme aux prévisions annoncées.

Les critiques sur les finances de l'Etat et les dysfonctionnements
relatifs à la politique de redistribution insérée dans un circuit
économique accusant des signes d'essoufflement, critiques émises par
l'Opposition politique et même certains membres de l'AMP ne doit pas
cacher le fait que la crise économique est mondiale et la situation du
social est également tributaire des enjeux internationaux, notre pays
subissant les fluctuations engendrées par la mondialisation des
échanges.

Le paradoxe de notre pays est celui d'être un pays extrêmement riche ou
l'on rencontre une pauvreté inadmissible. La solution prônée a été et
reste la bonne gouvernance.

Mais celle-ci risque de rester une expression creuse voire vider de sa
substance si un réel toilettage n'est pas effectué dans la classe
politique de manière concomitante à un véritable début de changement de
mentalité.

Au-delà de certains acteurs au sein des gouvernements successifs qui ont
brillé par leur incompétence, au sein des entreprises publiques,
l'amorce d'une modernisation conjuguée à des procédés managériaux sont
des signes encourageants.

« Je reste un militant de base qui active divers réseaux au sein de la diaspora en général et au sein du PPRD »

Vous êtes membre du PPRD, pensez-vous jouer demain un rôle politique
majeur alors qu'un renouvellement de la classe politique s'impose ?

Comme beaucoup le savent maintenant, je suis un intellectuel engagé et
je défends les couleurs du parti politique auquel j'appartiens, le PPRD.
Certains collègues Professeurs sont dans l'Opposition politique et
c'est ma liberté d'être proche de la Majorité présidentielle.

Maintenant pour répondre précisément à votre question, lors des
élections législatives à venir, 2011 ne sera pas une répétition de 2006
pour certains parlementaires de l'opposition et même ceux de la majorité
tant la population a intégré la leçon : le décalage entre les promesses
et la réalité sur terrain, certains parlementaires étant littéralement
coupé de leur bases électorales. S'il y a lieu, la question de me
présenter aux législatives sera mûrie. Elle est en gestation.

Au-delà des élections législatives, c'est vrai que mon nom a circulé par
moment pour entrer au gouvernement mais il s'agit là d'un pouvoir
discrétionnaire du Chef de l'Etat et je me constitue en réserve de la
République, prêt à servir la Nation le moment venu.

Dans l'immédiat je reste un militant de base qui active divers réseaux
au sein de la diaspora en général et au sein du PPRD en particulier pour
que celui qui incarne à mon sens une avancée politique de par la paix
acquise- bien que fragile- soit réélu, j'ai cité le Président Joseph
Kabila Kabange.

Il y a encore beaucoup à faire dans notre pays mais le Chef de l'Etat
manifeste une bonne volonté et il est dans la bonne direction.
Personnellement, j'apprécie son silence face aux provocations en tout
genre car il pare au plus pressé, l'intérêt supérieur de la nation et il
a bien raison car « time is money ! »

Votre mot de la fin Professeur car l'on ne peut épuiser tous les sujets
de l'heure et comme vous le dites si bien « time is money ».

Ces derniers temps, j'échange en cette année électorale avec mes
camarades au sein du PPRD mais aussi avec nos compatriotes les Congolais
de l'extérieur qui n'appartiennent à aucun parti politique et si vous
me posez la question : êtes-vous Congolais de la diaspora ? Je vous
répondrai: Les Congolais de la diaspora me reconnaissent comme tel.
Maintenant, je n'ai pas coupé le cordon ombilical avec la mère-patrie
car je reste Professeur de Science politique au sein de la Faculté de
droit de l'Université Protestante au Congo (UPC) à Kinshasa.

Personnellement, j'invite tous les Congolais à résister aux distractions
de certains hommes politiques, mieux des politiciens, en s'appropriant
cette pensée du Président John Fitzgerald Kennedy : «  Ne te demandes
pas ce que ton pays peut faire pour toi mais demandes toi ce que tu peux
faire pour ton pays ».

Dans ce sens, bien que résident en France aussi, enseigner et éduquer à
Kinshasa comme je le fais depuis quelques années déjà en qualité de
Professeur d'Université n'est-ce pas participer aux cinq chantiers
notamment celui de l'éducation ? Nous avons tous à faire un travail sur
soi, intrinsèque voire d'introspection tel que l'une des priorités reste
de changer les mentalités pour ne pas plomber l'élan démocratique
enclenché vers un développement que nous souhaitons durable. J'ai dit et
je vous remercie.

Daniel Nzuzi Muanda/MMC

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