Au
Si nous
ajoutons à ces compatriotes emprisonnés depuis lassassinat de Laurent-Désiré Kabila tous les autres soupçonnés davoir fomenté de « vrais-faux coups dEtat » davoir eu le tort de demander à leurs compatriotes de se mettre debout ou davoir attenté à la dignité de certains gouvernants, nous arrivons à un nombre impressionnant des nôtres vivant dans des conditions infrahumaines dans ces mouroirs abusivement appelés centres de rééducation. Et tant que le peuple congolais ne sest pas mis debout pour mettre fin à cette opprobre, le monde observe un silence affolant sur notre pays, cette prison à ciel ouvert, muni de plusieurs cachots !
Au début de ce mois de mars, quelques syndicats congolais ont organisé une marche pacifique, allant à lencontre de la décision prise à la dernière minute par le gouverneur de Kinshasa de linterdire. (La vidéo de cette marche peut être visualisée sur le site de Congomikili.) Et il est intéressant découter lune ou lautre intervention des marcheurs sur le nombre dannées ou de mois accumulés par les employés sans salaire.
Vers la fin de la première semaine de ce mois de mars, des échauffourées survenues entre la garde du musicien congolais Werrason, la police belge et quelques compatriotes décidés à ne pas laisser ce musicien se produire à Bruxelles ont créé un évènement à Kinshasa. Dans une vidéo dénommée « ça chauffe à Kinshasa : les fans de Werrason en colère contre Honoré Ngbanda et les bana poto », Congomikili (du 08 mars 2011) permet dentendre quelques points de vue des compatriotes vivant sur place à Kinshasa sur la misère sociale que connaît notre pays. Hier (07 mars 2011), quelques compatriotes (dont Serge Gontcho) sont revenus longuement, dans lémission Dialogue entre Congolais de la Radio Okapi , sur la flambée des prix sur le marché congolais.
De tout ce qui précède, il devient de plus en plus clair que le Congo dit démocratique est un pays où les droits sociaux et économiques nexistent presque pas. Et pourtant, dans le texte fondateur de la troisième République, la vie de lhomme, sa dignité sont déclarées sacrées. Comment dune part proclamer que la vie de lhomme est sacrée et de lautre pays, être incapable dassurer à cet homme le minimum requis pour quil vive dignement ?
Le minimum, cest-à-dire leau, le vêtement, le toit, lemploi, la nourriture, lécole et les soins de santé. Comment dune part proclamer que la vie de lhomme est sacrée et dautre part, éviter de créer des conditions qui lui permettent de vivre dignement ? Certains compatriotes croyant dans le discours mensonger du FMI sur les effets positifs de la suppression de la dette odieuse de notre pays étaient tombés dans le piège du pouvoir en place décrétant lannée 2010 « année du social ». Au grand dam de plusieurs naïfs dentre nous, le petit cercle des riches illégaux et illicites ne sest pas agrandi. Cela fait quau jour daujourdhui, plusieurs « armes de destruction massives » sont mises en place contre nos populations : ou cest linsécurité militaire ou cest linsécurité alimentaire ou cest linsécurité sanitaire ou cest linsécurité éducationnelle ou cest linsécurité vestimentaire, etc. qui tue plusieurs de nos compatriotes physiquement ou humainement. Toutes ces « armes de destruction massives » quand elles ne tuent pas lhomme congolais physiquement, elles tuent en lui et en sa progéniture le sens de lhumain et de la dignité. Elles le réduisent à létat sauvage. De temps à autre, le petit cercle des riches illégaux et illicites lui jette quelques graines de riz ou quelques petits billets de dollars sans que la question de ses droits économiques et sociaux soit prise en compte. Quand le sens de lhumain et de la dignité est tué en lui, les jeux et la musique obscène lui sont offerts comme drogues pour sa distraction.
(La dernière vidéo de Congomikili (du 08 mars 2011) est très bien éloquente à ce sujet : une différence de jugement est très bien perceptible entre les fans de Werra, enfants de « la rue » pour la plupart, et les autres. Pour rappel, « la rue congolaise compte déjà de grands-parents dans ses rangs !)
A lallure où vont les choses dans notre pays, la dérive autoritaire et sécuritaire risque de faire du cachot ou de la tombe les lieux de choix des compatriotes ayant atteint le fond de labîme creusée par la misère sociale (et anthropologique).
Un fait est vrai : le Congo nest pas une île. Il est pris dans la tourmente de la grande crise néolibérale. Tous les pays du monde sont dedans au point dinciter Susan George à écrire ceci : « Le plupart de gens ne lont pas encore remarqué, sauf une petite minorité : nous sommes tous en prison. Les gardiens ne sont pas idiots, ils nous laissent nous promener (et danser) librement au soleil et voir les films de notre choix, mais souvent, pour ce qui compte vraiment dans notre vie, nous ne sommes pas libres. » (S. GEORGE, Leurs crises, nos solutions, Paris, Albin Michel, 2010, p.9) Elle fustige « lincapacité manifeste de ces gouvernants (du monde) à comprendre ou à prendre au sérieux létat de lopinion, lindignation générale, lurgente nécessité dagir (…) » (p.10) Elle prône (et nous avec lui) la nécessité dune action interconnectée dans lurgence.
Pour elle, « les obstacles (à cette action) ne sont pas techniques, pratiques ou financiers mais politiques, intellectuelles et idéologiques. » (p.10) Un premier grand pas peut être déjà fait si nous comprenons que « cette crise nous a emprisonnés mentalement et physiquement et que nous devons nous libérer. » (p.10)
Trois ou quatre compatriotes intervenant sur la dernière vidéo de Congomikili donnent la nette impression davoir compris la nature de cette prison et la nécessité des actions à mener en synergie entre le pays et la diaspora pour démonter ses murs épais. Il y a là quelque chose dessentiel à capitaliser. (Les NTIC nous y aident !)
Contrairement aux propagandistes des « cinq chantiers » à travers les médiamensonges et sur Internet, la prise de parole par nos populations met à nu la descente douloureuse de notre pays en enfer. Dieu merci ! Il y en a, de plus en plus, qui estiment être prêts à tous les sacrifices pour éviter que le non-respect de leurs droits sociaux et économiques ne compromette durablement la dignité et la liberté des générations futures. Même si le copier-coller des révolutions tunisienne et égyptienne est difficile à réaliser en un clin dœil, il arrive que les manquements à la justice sociale atteignent un seuil insupportable pour un peuple donné. Là, il va signer eyoma ! Il va se dire : « Si je ne me bats pas pour ma liberté et ma dignité, je meurs. Si je me bats, je peux mourir ou renverser les rapports de force en ma faveur. » Là, il peut opter résolument pour une lutte multiforme jusquau jour où le minimum vital lui sera garanti. Le Congo a atteint ce seuil insupportable dinjustice sociale. De plus en plus, les cercles des « minorités organisées » sélargissent, sinterconnectent et les Congolais(es) risquent détonner le monde !
par Jean-Pierre Mbelu
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