Etienne Tshisekedi : « Le Mandela Congolais »

 

 

« Le Mandela Congolais »

Homme d’Etat, Démocrate, Humaniste et Pacifiste

Notre Leader et notre Patrimoine National

I. La signification du nom « Tshisekedi »

Dans l’Onomastique (Etude et la signification du nom », le nom dans la société négro-africaine n’est pas une étiquette familiale comme en Occident. La personne humaine, tout en vivant dans la société, a une place unique. « Nommer » comporte un programme de vie que l’individu doit réaliser lui-même et non par procuration. Le nom indique l’historicité de chacun dans sa singularité et son unicité non communicable et non réitérable. Il marque chaque individu dans sa réalité ontologique ; indique l’essence d’une personne et ne peut être cité à la légère ; lui désigne sa place dans la société et lui trace sa mission et sa vocation à remplir . 

Dans la langue Luba dont Etienne Tshisekedi est originaire, le nom « Tshisekedi » signifie littéralement et originairement : « Le Lieu où les hommes rient et sont heureux »

 

Le 2ème exemple : Nelson Mandela

 

Nelson Mandela a écrit dans son livre ( Autobiographie) intitulé « Un long chemin vers la liberté » ( Fayard, 1994, page 7) ceci : En plus de la vie, d’une forte constitution et d’un lien immuable à la famille royale Thembus, la seule chose que m’a donnée mon père à la naissance a été un nom, Rolihlahla. En xhosa, Rolihlahla signifie littéralement « tirer la branche d’un arbre ». Mais dans la langue courante sa signification plus précise est « « celui qui crée des problèmes ». Je ne sais pas si les noms déterminent la destinée ou si mon père a deviné mon avenir d’une façon ou d’une autre, mais, plus tard, des amis et des parents attribueront en plaisantant à mon nom de naissance les nombreuses tempêtes que j’ai déclenchées et endurées. On ne m’a donné mon prénom anglais ou chrétien « Nelson » plus connu qu’au premier jour d’école.

 

II. Les similitudes entre la culture xhosa et la culture Luba

 

1. La culture xhosa

 

Plus loin dans le même livre, pp 8-9, Nelson Mandela écrit ceci au sujet de la tribu xhosa dont il est originaire : Les xhosa sont un peuple fier et patrilinéaire avec une langue expressive et mélodieuse et un attachement solide aux lois, à l’éducation et à la politesse. La société xhosa appartient à un clan qui indique son ascension jusqu’à un ancêtre spécifique. Je suis du clan Madiba, d’après un chef thembu qui régnait dans le Transkei au 18ème siècle. On m’appelle souvent Madiba, mon nom du clan, ce qui est un terme de respect.

 

Les xhosa appartiennent au peuple Nguni qui a vécu, chassé et pêché dans la région riche et tempérée au sud –est de l’Afrique du Sud, entre le grand plateau intérieur au nord et l’océan indien au sud, depuis au moins le 19ème siècle. On peut diviser les Ngunis en un groupe du Nord – les Zoulous et les Swazis – et un groupe du sud composé des amaBaca, des amaBonyana, des amaGcaleka, des amaMfenfu, des amaMpodomis, des amaMponde, des abeSotho et des abeThembu qui ensemble, forment la nation xhosa.

 

2. La culture Luba

 

Les Auteurs du mouvement migratoire des Bantous à partir du Nord vers le Sud, la culture, les mentalités, l’intransigeance morale, l’organisation politique et sociale ainsi que les coutumes et les traditions chez les Luba, décrivent des similitudes et des affinités très frappantes dans ce que Mandela vient de dire et les Luba dont est originaire Etienne Tshisekedi quant à la signification du nom, aux caractéristiques du peuple Nguni, particulièrement les Zoulous, les Xhosa et les Thembus. Nous ne faisons pas l’amalgame. Les Luba sont aussi un peuple fier et patrilinéaire avec une langue expressive et mélodieuse et un attachement solide aux lois, à l’éducation et à la politesse. Un éminent expert et analyste en cette matière, le Professeur Patrice Mufuta Kabemba, a eu des preuves supplémentaires des similitudes de langue et de culture lors d’un colloque en Linguistique au cours duquel il a eu des échanges très édifiants avec un professeur de Malawi. 

 

III. Similitude de deux épisodes

 

1. Episode « Mandela-Rousseau » le 5 décembre 1956

 

Plus loin dans le même livre, à la page 240 et 242, il y a un épisode intéressant et frappant. Mandela décrit comment le matin du 5 décembre 1956 il a été arrêté chez-lui dès l’aube pour « Haute trahison » par deux policiers amenés par le Commissaire Rousseau. Ils l’ont amené. Les policiers sont descendus dans une prison pour surveiller les autres prisonniers membres de l’ANC.

 

Mandela considéré comme le meneur et le plus dangereux devait être isolé et emmené seul dans un cachot lointain. Mandela et le Commissaire Rousseau se sont retrouvés seuls à deux dans le véhicule. Les mains de Mandela n’étaient pas menottées et donc libres. A un moment donné, le Commissaire a emprunté une route qui traversait une zone non habitée.

 

Alors Mandela a fait remarquer au Commissaire Rousseau son imprudence de se croire trop sûr de lui pour se retrouver ainsi seul avec lui sans mains menottées et sur une zone non habitée. Rousseau est resté silencieux. Mandela lui a demandé : Que se passerait-il si je sautais sur vous et si je vous maîtrisais ?

Rousseau a eu l’air mal à l’aise et il m’a dit en me regardant : Mandela, vous jouez avec le feu.

Je lui ai répondu : J’en ai l’habitude.

Il m’a dit d’un ton menaçant : Si vous continuez sur ce ton, je vais être obligé de vous mettre les menottes.

Je lui ai répondu : Et si je refuse ? 

 

Nous avons continué ainsi pendant quelque temps à nous surveiller comme chien et chat dans le véhicule jusqu’à arriver dans une zone habitée et sur une route assez fréquentée.

Quand nous sommes arrivés tout près du Commissariat de Langlaatgte, Rousseau m’a paru rassuré et soulagé et m’a dit : Mandela, je vous ai bien traité, j’espère que vous allez en faire autant avec moi. Je n’aime pas vos plaisanteries.

 

2. Episode « Tshisekedi-Mobutu » le Lundi 19 novembre 1979 suite aux incidents mortels survenus à Katekelayi, dans le Kasaï Oriental

 

Comparez cette scène à celle qui s’est passée entre Mobutu et les Parlementaires du Kasaï Oriental en général et en particulier avec Etienne Tshisekedi à propos des massacres survenus à Katekelayi juillet 1979.

 

2.1. Les incidents de Katekelayi

 

En juillet 1979, la session parlementaire n’avait pas encore terminé quand de graves incidents survinrent à Katekelayi, au Kasaï Oriental, incidents au cours desquels il y eut des heurts entre les creuseurs du diamant de la Région et les forces armées. Ces incidents firent des victimes en vies humaines. Selon la version officielle de Mobutu et de son Gouvernement, il y avait eu trois victimes. Mais en réalité, plus de deux cents personnes avaient trouvé la mort dans cet incident à la suite d’une fusillade meurtrière et d’un mouvement de panique qui provoqua plusieurs noyades. Le récit détaillé de ces événements est relaté dans le document intitulé « Les massacres de Katekelayi et de Lumuela, Kasaï Oriental », in Politique Africaine, II, 6 mai 1982, pp. 72-106.

 

Les Parlementaires et les Personnalités politiques de la Région présentèrent ouvertement leur indignation à la suite de ces événements tragiques.

 

Cinq Parlementaires du Kasaï – MAKANDA, MILAMBU, NGALULA et TSHISEKEDI – adressèrent le 23 juillet 1979 une lettre à M. Joseph Ileo, Président du Conseil Législatif, lettre dans laquelle ils désapprouvaient avec véhémence les agissements des forces armées, se plaignaient des brimades et tracasseries constantes contre les populations de la Région, proposaient une solution durable à ce problème récurrent et réclamaient la constitution immédiate d’une commission d’enquête sur la question de l’exploitation du diamant au Kasaï en dehors du périmètre de la Concession officielle de la Miba.

 

Voici in extenso la Lettre des Parlementaires adressée le 23 juillet 1979 à M. Joseph Ileo, Président du Conseil Législatif :

 

Citoyen Président,

C’est avec une très grande tristesse et une grave consternation que nous portons officiellement à votre connaissance, en notre qualité d’élus de la Région du Kasaï Oriental, les lugubres nouvelles qui nous sont parvenues à partir du samedi 21 juillet courant sur les tueries perpétrées dans la journée du vendredi 20 juillet 1979 sur la population, à Mbujimayi, par la Gendarmerie Nationale et qui ont amené une tension et une haine dans la Région susceptible de conduire à un soulèvement de la population.

 

Selon les informations en notre possession, ces tueries auraient été perpétrées au-delà de la localité de Tshikama sur les personnes des jeunes gens qui procédaient au creusement du diamant sous l’encadrement d’un premier groupe de militaires, comme s’en est devenu une habitude que nous n’avons cessé de dénoncer dans nos rapports de vacances, surtout celui d’octobre 1978.

 

Le second groupe de militaires, surtout femmes militaires arrivées sur le lieu, auraient immédiatement procédé à tirer sur ces creuseurs sans aucune sommation, ni avoir procédé aux arrestations comme le prescrit la loi.

 

Toujours selon les informations en notre possession, il y aurait ainsi plus de 180 tués, selon les uns, voire 230 selon les autres. Il semble même qu’un commerçant et homme d’affaire important de Mbujimayi, le Citoyen MUKEBA Tshilombola, aurait été simplement abattu en pleine ville dans la nuit de ce même vendredi à la faveur de tous ces événements.

 

En vous adressant cette lettre, nous tenons :

 

a) à attirer votre meilleure attention sur le fait qu’il est devenu une coutume de procéder sans vergogne à des tueries des populations dans la Région du Kasaï-Oriental, toujours pour raison d’exploit ation clandestine du diamant, même en dehors du polygone Miba, même pour des gisements que la Miba ne pourra jamais exploiter, parce que non industriellement rentables, mais qui peuvent être exploités artisanalement. Nous croyons que, en cas de flagrant délit d’exploitation clandestine des matières précieuses, la loi prescrit l’arrestation et non la tuerie, sans aucun jugement qui constitue une barbarie et un déni de justice et de droits de l’homme.

 

b) à attirer votre meilleure attention en tant que Président d’un Organe sensé représenter le peuple du Zaïre, sur le fait que malgré nos rapports de vacances proposant des solutions justes et utiles tant pour l’intérêt du fisc, donc de l’Etat, que pour celui de la population, parce que toute la Région du Kasaï-Oriental, soit 72.000 kilomètres carrés est déclarée Zone A. L’Exécutif n’a pas trouvé nécessaire de renoncer aux méthodes de tueries et d’instaurer une structure d’exploitation vraiment profitable à la nation au coût le plus bas. Les tueries ordonnées au profit des exploitants étrangers n’est pas une solution dans l’intérêt national.

 

c) à vous faire remarquer que malgré l’existence d’une résolution du Congrès du MPR, premier organe du Parti en qui tout le monde reconnaît la compétence d’élaborer la politique générale du Pays, sur la création des comptoirs d’achat de diamant au Kasaï Oriental, malgré que, à l’occasion de la rencontre de Gbadolite entre le Président de la République et la Commission des 50, le Président Mobutu ait opportunément accepté et reconnu le bien fondé de cette résolution dont l’exécution devrait être urgente, le Bureau du Conseil Législatif n’a pas cru urgent d’inscrire au calendrier des dernières sessions, une proposition lui présentée pour la modification de la législation sur la zone A, pour des raisons qui nous sont restées obscures jusqu’à ce jour.

 

d) à vous rappeler que plus d’une fois nous avons attiré l’attention de la Nation à travers ses élus et celle du Président de la République sur l’injustice qui est faite aux populations du Kasaï Oriental et l’état psychologique qui s’en est suivi au point qu’elles sont arrivées à se considérer comme une population entièrement à part au lieu d’être des Zaïrois à part entière.

 

En effet, combien n’a-t-on pas parlé de fraude ! fraude de café dont on connaît la liste et les adresses des opérateurs, voire même les fortunes qui en sont résultées ! Ces citoyens n’ont été ni inquiétés, ni déférés devant la justice, ni à fortiori tués ! Fraude de l’ivoire, fraude de l’or, fraude de peaux de crocodiles, de léopard et d’autres reptiles ; fraude de malachite, voire fraude de cuivre, de cobalt, de bois, de mercure et dernièrement fraude de salaire à grande échelle ! Aucune répression, aucune tuerie ! Des citoyens qui ont enlevé des millions de Zaïres des comptes de l’Etat au vu et au su de tous sont tranquillement préservés même du simple regard du public ; ils vivent dans des villas d’Etat, à ses frais ! Pas d’inquiétude, pas de tuerie ! Donc seul le diamant enrichit le privé et uniquement sa fraude appauvrit l’Etat ! Quelle est cette forme de justice nationale ?

 

e) à vous prier d’attirer l’attention de l’Exécutif sur le fait qu’excédée par cette injustice nationale, d’autant plus que cette fameuse fraude incriminée l’est souvent avec la complicité de l’Armée elle-même, au point qu’on peut se demander à juste titre dans la Région qui est fraudeur, et qui ne l’est pas, la population du Kasaï Oriental ne soit acculée à se soulever, à se rebeller un jour, sous l’entière responsabilité de ses gouvernants, nationales par ailleurs !

 

Citoyen Président,

Permettez-nous de vous dire qu’au nom de la loi, nous demandons au Bureau du Conseil Législatif d’ordonner de toute urgence une Commission Parlementaire d’enquête qui doit faire la lumière sur cette situation et proposer une solution salutaire destinée à mettre définitivement fin à cette situation qui trop perduré.

 

Nous suggérons que des Commissaires du Peuple originaires de la Région fassent partie de cette Commission, étant donné qu’il ne s’agit pas d’un problème qui oppose des fractions parmi la population, mais qui concerne plutôt toute la nation et une de ses régions.

 

Nous vous prions de croire, Citoyen Président du Conseil Législatif, à l’assurance de notre haute considération.

 

Cette lettre, dont les copies avaient été adressées à toutes les Instances étatiques de l’époque y compris au Président de la République, M. Mobutu, n’entraîna aucune réaction de la part de toutes les Autorités interpellées et tenues informées jusqu’au moment où l’affaire a dû resurgir en pleine lumière en novembre 1979 avec la parution de communiqués émanant du Comité Zaïre (Belgique) et de la Fédération Internationale des Droits de l’Homme (Paris) sur la gravité des événements qui s’étaient produits au Kasaï, tout juste au moment où Mobutu et son régime étaient en quête des fonds auprès des Bailleurs internationaux pour son Plan Mobutu.

 

 C’est alors que Mobutu, fâché, convoqua le lundi 19 novembre 1979 une rencontre avec les Parlementaires du Kasaï Oriental pour les obliger par des menaces à rédiger une autre lettre démentant le contenu de leur lettre et confirmant la version officielle des Autorités congolaises. Ce fut le tout premier affrontement frontal et direct de ce genre entre Mobutu et les autres Congolais depuis qu’il était au pouvoir de façon général et avec M. Etienne Tshisekedi en particulier.

  

2.2. Premier Affrontement frontal et historique « Tshisekedi-Mobutu » le lundi 19 novembre 1979   

 

Le lundi 19 novembre 1979, l’ensemble des Elus du Kasaï Oriental furent convoqués par Mobutu au Camp militaire Tshatshi. C’est dans ce Camp situé sur le Mont Ngaliema dans la Commune de Ngaliema que se trouvait le Palais Présidentiel.

 

La communication de cette convocation fut faite aux Elus du Kasaï Oriental au Parlement par le Président du Parlement, M. Joseph Ileo.

 

Il leur fut demandé de laisser là leur véhicule personnels et de monter dans un bus. Les Elus refusèrent catégoriquement de monter dans le bus. Finalement il leur fut permis d’utiliser leurs véhicules.

 

Ils furent reçus par Seti et Kengo respectivement administrateur du CND (Centre National de Documentation, Sûreté d’Etat) et Procureur Général de la République, c’est-à-dire Le Sommet du Pouvoir Judiciaire du Pays).

 

Après un temps d’attente, Mobutu arriva. Il entra dans la Salle. Sans saluer les Parlementaires, il commença à les toiser l’un après l’autre et à arpenta la pièce de long en large pendant plusieurs minutes, sans dire un mot, pour intimider ses interlocuteurs. Son regard croisa par hasard le regard d’Etienne Tshisekedi assis au premier rang parmi ses interlocuteurs, ce dernier le dévisagea tout droit d’un air dédaigneux, sarcastique et moqueur comme s’il lui disait : « Mobutu, tu es un farceur ».

 

Mobutu a comprit trop vite que ses mouvements de va-et-vient n’impressionnaient personne ni n’intimidaient aucun Parlementaire mais le rendaient au contraire ridicule. Il s’assit devant eux, entre Kengo, Seti et Ileo.

 

Il prit la parole pour dire que les Baluba l’avaient trahi ; qu’il venait de prendre connaissance, via une ambassade étrangère, de la lettre envoyée par les élus du Kasaï Oriental à Ileo, fin juillet et qu’il en était indigné ; qu’il croyait n’avoir des ennemis qu’à l’extérieur du Zaïre et qu’il venait de constater en avoir également à l’intérieur du pays….

 

Il s’attaqua tout particulièrement à Tshisekedi, l’accusa d’ « être en tant que juriste, auteur de la lettre »

 

Il tint contre lui des propos menaçants :  Vous voulez ma peau, vous ne l’aurez pas ou vous le paierez très cher car moi je peux avoir votre peau quand je veux et comme je veux ».

 

Il exigea des élus du Kasaï Oriental qu’ils signent une lettre de démenti selon lequel les incidents de Mbujimayi n’avaient fait que 3 morts. (…).

 

Beaucoup d’Elus du Kasaï Oriental se sentirent très mal à l’aise à cause du ton utilisé par Mobutu.

 

Un Député du Sankuru fut le premier à prendre la parole pour répondre à Mobutu. Il déclara que l’affaire de Mbujimayi n’était pas une affaire de Baluba seuls, mais de toute la Région du Kasaï oriental, voire même de toute la République : « Qui dit que parmi les personnes tuées, ne figurent pas les ressortissants de l’Equateur ? Leurs parents auraient-ils eu le temps de constater leur disparition et d’être partis vérifier parmi les cadavres si les leurs n’y étaient ? »

 

Les Elus du Kasaï oriental firent remarquer qu’il n’était pas possible que Mobutu n’ait pu prendre connaissance de leur lettre que ces derniers jours car la copie de cette lettre envoyée au Président du Conseil Législatif avait été transmise au Président Mobutu M. Joseph Ileo, Président du Conseil Législatif, et que les autres copies avaient été envoyées à tous les Responsables politiques nationaux et régionaux ainsi qu’à toutes les Sections régionales du Conseil Législatif. Mobutu nia publiquement en avoir reçu une copie.

  

Tshisekedi, directement mis en cause, fixa tout droit Mobutu dans les yeux et déclara avoir signé la lettre en tant que représentant d’un peuple. Il réclama qu’une enquête ait lieu. Il affirma que sur base des informations dont il disposait le nombre de morts s’élèvait approximativement à 250. Il demanda à Mobutu à quels documents il se réfère pour prétendre qu’il n’y a eu que 3 morts.

 

Mobutu prétendit qu’il avait mené son enquête.

 

Tshisekedi lui demanda à quel titre a-t-il mené cette enquête, quel texte juridique l’autorisait à mener une enquête. Où sont les documents relatifs à cette enquête, lui demanda-t-il ? Il demanda également à Mobutu comment pouvait-il concilier ce chiffre de 3 morts avec le chiffre de 23 avancé par le Gouverneur de province de Mobutu basé à Mbujimayi M. Efambe lors de la réunion des « notables » du Kasaï Oriental tenue à Mbujimayi à la fin de juillet et le chiffre de 80 cadavres repêchés signalés par la phonie de Lusambo ?

 

En conclusion, les élus du Kasaï Oriental déclarent être prêts à signer un document fixant le nombre de morts à 3 à condition qu’une enquête soit menée et qu’elle aboutisse à cette conclusion.

 

Ngalula déclara : Si nous vous avons envoyé copie de notre lettre, c’est que nous pensions que vous n’étiez pas en cause et que les vrais coupables étaient la « soldatesque ». Le fait de vous envoyer cette lettre vous « disculpait », pourquoi alors prenez-vous la défense de cette soldatesque ?

 

Seti étant intervenu plusieurs fois au cours de la discussion, Tshisekedi demanda à Mobutu à quel titre le responsable de la sécurité s’adressait à eux, si les élus du Kasaï Oriental devaient déjà se considérer comme des prisonniers interrogés par le C.N.D. ?

Mobutu alors ordonna à Seti de se taire.

 

Des échanges très houleux eurent lieu au cours desquels, Mobutu, au Sommet de sa puissance et de sa gloire, dut pour la première fois durant tout son pouvoir faire face à un tel affront mené par Etienne Tshisekedi avec maîtrise, courage et arguments par un juriste, un homme de lois, un homme de culture, un véritable représentant du peuple et un homme déterminé.

 

La séance se termina en queue de poisson. Alors qu’au début de la séance Mobutu était trop sûr de lui, ce fut plutôt un Mobutu méconnaissable, défié, démystifié, terrassé qui quitta précipitamment la Salle comme un aigle déplumé et mouillé, un léopard vaincu, terrassé, dépouillé de sa peau, échine courbée et fuyant le champ du combat la queue entre les pattes.

 

Humilié devant ses gardes de corps ahuris et ses très proches collaborateurs Kengo et Seti, tous les deux à la fois décontenancés et apeurés, Mobutu s’en alla tête baissée et le regard vide comme s’il avait compris par un éclair métaphysique et intuitif qu’Etienne Tshisekedi venait de signer la feuille de route du début de la fin de son règne.

 

Ce fut pour la toute première fois que cela arrivait à Mobutu. Dans sa fuite, il vociféra contre un Etienne Tshisekedi demeuré imperturbable, calme et serein quelques menaces de mort d’un ton vague sans y croire lui-même.

 

Ceux qui ont lu les échanges houleux qui se sont passés ce jour-là entre Mobutu et les Parlementaires du Kasaï Oriental en général et entre Mobutu et Etienne Tshisekedi en particulier peuvent établir des rapprochements frappants avec ce que nous venons de lire sur Nelson Mandela.

 

Tous les experts et analystes étrangers et congolais sont unanimes pour affirmer que c’est à partir de ce jour-là que Mobutu perdit sa légitimité politique, débuta une réelle descente aux enfers, tel un léopard dépouillé de sa peau ; qu’Etienne Tshisekedi gagna ses Galons au prix d’un courage rare et inédit et face à un danger réel et imminent de mort et devint le Chef de file de l’Opposition démocratique congolaise.

 

Fait à Bruxelles, le 2 Mars 2011.

Dr François TshipamAba Mpuila

Coordonnateur

GSM 0032-485-270-866 ; E-mail : tshipambampuila@yahoo.fr

 

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