09.01.12 Les Dépêches de Brazzavillle – Interview : Tony Bolamba : « Privilégions les intérêts de la patrie et non ceux des partis »

Installé en France, l'Initiateur du Mouvement pour le Congo (Moco) scrute l'avenir de son pays sur la base des faits politiques actuels qu'il tente de décrypter en toute impartialité.

Les Dépêches de Brazzaville : Quelle appréciation faites-vous du déroulement du scrutin présidentiel et des résultats qui l'ont sanctionné ?

Tony Bolamba : Les élections étaient libres mais pas transparentes. Quant aux résultats, ce n'était pas une surprise pour moi vue que la Céni avait œuvré pour que le président Kabila puisse être réélu. Je l'avais déjà prédit. Heureusement que la suite des évènements ne m'a pas contredit. Raison pour laquelle je ne contesterai pas la qualité de président de la République à Joseph Kabila qui reste, à mes yeux, un président mal élu. Toutefois, à chaque être humain, il y a une partie de l'humanité. C'est au président d'humaniser sa gestion de la cité.

LDB : D'après vous, les revendications d'Étienne Tshisekedi dénonçant un hold-up électoral sont-elles fondées ?

T.B. : Je ne saurais ici répondre à sa place car j'avais déjà prédit la défaite des challengers de Joseph Kabila. Toutefois, ne confondons pas la masse à l'électorat. La politique recommande l'analyse et la vision.

LDB : Quelle valeur juridique accordez-vous à sa prestation de serment?

T.B : M.Tshisekedi est juriste, je crois qu'il sait que sa prestation de serment est nulle mais peut-être avec quelques effets !

LDB : Le spectre du dédoublement des institutions plane sur le pays. Comment s'en sortir ?

T.B. : Je pense que nous devons tous privilégier le dialogue, nous devons faire en sorte que nos divergences puissent trouver une issue tendant vers une convergence pour l'intérêt de notre peuple. Nous devons tous privilégier les intérêts de la patrie que les intérêts des partis. Personne ne doit être exclu. L'amnistie des ex-FAZ doit aussi faire partie du dialogue, leur présence dans certains pays voisins est souvent source de conflit. Je fais confiance à Joseph Kabila et à Étienne Tshisekedi. Ils ont, à leur actif, géré des crises plus graves que l'actuelle. Kabila dans la transition 1+4 et Tshisekedi après la Conférence nationale. En plus, leurs partis politiques respectifs sont d'obédience socialiste. C'est déjà un point commun à capitaliser.

LDB : Une nouvelle transition avec un gouvernement d'union nationale devant déboucher sur la tenue de nouvelles élections est-t-elle souhaitable ?

T.B. : Je suggérerais plutôt un gouvernement d'ouverture. L'ouverture n'est pas le débauchage. Une transition nous ramènera dans la situation qu'avait connue l'ex-Zaïre de 1991 à 1997. Après, nous avons tous vu ce que cela nous a coûté : l'avènement de l'AFDL ! On ne doit plus se permettre de répéter cette erreur !

LDB : L'opposition ne paie-t-elle pas là les frais de son manque de lucidité dans le combat ?

T.B. : En RDC, comme ailleurs, l'opposition est souvent plurielle. Chez nous, certaines oppositions pensent qu'elles ont plus de droit que les autres. C'est vraiment dommage !

LDB : Le FMI a décidé de conditionner tout décaissement en faveur de la RDC au respect de l'État de droit ? Qu'en dites-vous ?

T.B : Je suis un libéral, pas seulement pour les libres marchés mais je le suis aussi pour les libertés individuelles avec un idéal républicain. Je vous avais dit, lors de notre dernier entretien, que je voyageais partout dans le monde afin d'alerter l'opinion internationale sur les dérives du régime de Kinshasa. Je pense que je n'avais pas prêché dans le désert !

LDB : Qu'est-ce qui s'est passé avec votre candidature à la présidentielle ?

T.B. : Je m'étais retiré du processus pour trois raisons. Primo, suite au refus d'octroi de droit de vote aux Congolais de la diaspora qui sont citoyens congolais à part entière. Secundo, suite au silence de la Céni à ma requête de la révision du fichier électoral après constat des enrôlements des mineurs et tertio, suite à l'acceptation des candidatures des Congolais détenant une double nationalité et des personnes ne remplissant pas les articles 10, 72, 102 et 106 de la Constitution. On ne peut pas jouer au basket-ball avec les règles du football.

LDB : Comment comptez-vous aujourd'hui mener votre politique ?

T.B. : En continuant d'offrir des propositions crédibles pour le bien de notre pays car je déteste les clivages partisans. On fait de la politique pour trouver des solutions aux problèmes du peuple et non pour commenter leurs problèmes. Mes camarades me font confiance pour assurer une rupture.

LDB : Votre dernier mot…

T.B. : Je demande à mes amis du Moco qui estiment qu'on est seul de ne pas s'inquiéter. La solitude est le plus grand des investissements. L'homme, c'est le temps et l'esprit. Je serai à Kinshasa avant la fin de ce mois.

Propos recueillis par Alain Diasso

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