06.02.12 L'Observateur – Mission résidente de la Banque mondiale à Kinshasa
Au fait, c'est quoi la gouvernance ? La gouvernance veut dire beaucoup de choses à la fois, a expliqué Eustache Ouayoro aux jeunes présents à la mission résidente de la Banque à Kinshasa. Au niveau de la Banque, des chercheurs ont mis au point des critères pour la gouvernance. Ce concept est entendu comme une gestion des ressources en bon père de famille, le fait d'accorder la parole aux populations, l'instauration de l'Etat de droit, la stabilité des règles qui s'appliquent à tous, la stabilité politique, l'absence de violences, l'efficacité des gouvernants à fournir des services publics aux populations,…
La gouvernance implique de prendre en compte la voix de la population, de rendre compte, la capacité des gouvernants à fournir des services. La gouvernance aide les gouvernements à être plus efficaces. Dans ce cas de figure, les ressources publiques ne peuvent pas servir des intérêts privés. La gouvernance renforce les capacités publiques mais donne aussi des capacités à la population pour demander des comptes. A ce niveau, la Société civile, émanation de la population, doit être bien formée. Ainsi, dans son action en RDC, la Banque mondiale fait de la Société civile congolaise un partenaire au même titre que le gouvernement, le secteur privé et d'autres bailleurs.
La Banque entend développer un dialogue de haut niveau avec le gouvernement et la Société civile pour l'amélioration de la gouvernance en RDC. Dans cette collaboration, il a été élaboré une matrice de bonne gouvernance comprenant des réformes structurelles à mettre en place. A ce propos, il y a eu des avancées avec la publication des contrats miniers et forestiers sur des sites Internet au nom de la transparence.
Par ailleurs, les recettes fiscales et parafiscales provenant des industries extractives sont désormais publiées grâce à l'initiative pour la transparence dans les industries (ITIE) extractives. La Banque accompagne la RDC dans le recrutement d'un vérificateur indépendant chargé de récolter les informations sur ces recettes et de les recouper avec celles des régies financières de l'Etat. A ce niveau, tout n'est pas parfait, mais il y a eu des avancées significatives en RDC qu'il faut consolider, note le directeur des opérations de la Banque mondiale. Celui-ci s'est réjoui en outre de la mise en place des mécanismes pour la passation des marchés publics. La gouvernance peut encore s'améliorer.
La gouvernance, un exercice difficile
Entre autres, dans le projet Promines financé par la Banque, une composante vise à accompagner la Société civile congolaise dans la surveillance des activités des exploitations minières. Dans le cadre de la décentralisation territoriale, la Banque appuie la RDC dans la meilleure utilisation de 40 % des recettes à caractère national rétrocédées aux provinces. Cela se fait à travers la transparence du budget de l'Etat, le renforcement des capacités dans la passation des marchés,…Le directeur des opérations a mis un accent sur l'appui aux institutions de contrôle, comme la Cour des comptes. Dans les projets financés en RDC, il y a des audits financiers systématiques pour s'assurer de la bonne utilisation des ressources allouées. A cela s'ajoutent les descentes régulières des chefs des projets sur terrain ; sans oublier la ligne verte ouverte à tous par la Direction de l'Intégrité Institutionnelle (INT) pour dénoncer la corruption et les cas de fraude. Tout cela est fait au nom de la gouvernace.
Pour Eustache Ouayoro, c'est bon que les jeunes soient intéressés par la problématique de la gouvernance. Il a expliqué que les jeunes sont frappés par le chômage et la pauvreté, alors qu'ils représentent l'avenir de la RDC et de l'Afrique en général. Cette situation difficile des jeunes est consécutive notamment aux problèmes de gouvernance (corruption, insuffisance de la desserte en eau potable, mauvaises décisions,….).La gouvernance et le leadership peuvent faire changer cette situation en Afrique et en RDC. Cela est important car, dira-t-il, sur 33 pays fragiles répertoriés 23 se trouvent en Afrique.
Cette fragilité de plusieurs pays africains est, entre autres, liée à la corruption. Par ailleurs, il y a souvent des conflits suscités par la présence des minerais dans le sous-sol. Le manque de transparence dans l'exploitation des mines et d'autres ressources naturelles alimente ainsi des conflits. Le manque de transparence est le fait d'un déficit de gouvernance. Celui-ci se traduit par des places peu reluisantes occupées par nombre de pays africains dont la RDC, en ce qui concerne l'indice pour le développement humain du PNUD, le rapport Doing Business de la Banque mondiale, l'indice sur la corruption de Transparerncy International,…, a fait savoir le directeur des opérations de la Banque mondiale pour la RDC et le Congo.
En définitive, dans le débat suscité par les échanges les jeunes Congolais ont notamment mis en exergue l'importance de la volonté politique pour l'amélioration de la gouvernance et le renforcement des capacités des acteurs de la Société civile de la RDC chargés de stimuler la population à s'approprier la notion de la bonne gouvernance. Ils ont aussi insisté sur l'importance du pacte social entre dirigeants et population, avec un monitoring et l'obligation des résultats. Le directeur des opérations a promis de faire parvenir les préoccupations des jeunes auprès du gouvernement, sur la création des emplois, la formation,….Et de conclure : " si la Banque veut être écoutée, elle doit être crédible et respecter nos partenaires. Mais, la gouvernance est un exercice difficile ".
Didier Munsala Buakasa