07.03.12 Le Potentiel – Production du pétrole congolais : un trou noir


Un vrai mystère plane sur la production pétrolière de la République démocratique du Congo. En RDC, le pétrole est une forteresse bien protégée, presque un secret d’Etat que nul ne connaît…, sauf ceux qui squattent les allées du pouvoir. Pays situé sur la ceinture du Golfe de Guinée, la RDC est la seule nation à afficher une production du brut quasi inchangée depuis plus d’un demi-siècle.

Pire, cette production, dont la moyenne se situe autour de 25 000 barils là où d’autres pays du Golfe, comme le Nigeria, dépassent les millions de barils, est en baisse depuis 2010. En témoigne le rapport annuel d’activités de la Société congolaise des industries de raffinage (Socir) pour l’exercice 2011.

Où va finalement le pétrole de la RDC ? Est-ce l’Etat congolais a un droit de regard sur les activités de Perenco, seule entreprise pétrolière en activité en RDC, plus précisément dans le Bas-Congo ? Autant de questions qui renseignent sur le gros nuage noir couvrant l’industrie pétrolière congolaise.

Le mystère

Dans un chapitre qu’il consacre à la production pétrolière, la Socir pose de très belle manière le problème du secteur pétrolier congolais. En effet, selon cette société, «la RDC a un important potentiel pétrolier». Le pays dispose de trois bassins sédimentaires, dont le plus important– le seul en exploitation– est le bassin côtier dans lequel opère le français Perenco. Le deuxième bassin, timidement en exploration, est la Cuvette centrale. Le troisième est celui constitué par la ceinture de l’Est, avec le Graben Albertine qui part du Lac Albert à la frontière ougandaise jusqu’au lac Tanganyika dans la province du Katanga.

Malgré ce potentiel, la RDC est presque inexistante dans la nomenclature des pays africains producteurs du pétrole. Les bribes d’informations sur la production réalisée dans le Bas-Congo témoignent de l’opacité dans laquelle baigne le secteur pétrolier de la RDC. Dans son rapport, elle épingle de graves contradictions. «Il est temps, pense-t-elle, de revoir les choses de fond en comble et mettre en place un programme cohérent d’exploration pétrolière avec, au besoin, l’aide de la Banque mondiale». Est-ce une façon de reconnaître l’incapacité du gouvernement à mettre de l’ordre dans ce secteur ? Pas forcément. Mais, l’on n’est pas loin de cette évidence, au regard de l’absence de volonté réelle du gouvernement de lever le voile qui couvre l’industrie pétrolière de la RDC.

Dès lors, comme expliquer que des pays comme la Guinée Equatoriale, nouveau venu dans les rangs des pétroliers du Golfe de Guinée, affiche des productions impressionnantes là où la RDC peine à dépasser la barre journalière de 25 000 barils. Il y a véritablement un mystère sur l’industrie pétrolière ; mystère que se doit inévitablement d’éclaircir le gouvernement au nom du principe de la transparence dans les industries extractives (ITIE), initiative à laquelle la RDC est partie prenante.

Plus loin dans son rapport, la Socir, sans doute consciente de la gravité du problème, estime qu’«en ce qui concerne les conventions d’exploitation pétrolière (Ndlr : comme celle liant à ce jour la RDC à Perenco), il est largement temps d’élaborer un contrat-type à proposer aux partenaires». Prenant en compte la nécessité de remettre de l’ordre dans le secteur, elle pense que « sans ces préalables, la RDC restera le jardin de quelques aventuriers faisant miroiter aux uns et autres des tonnes d’illusions, des mirages en zones tropicales». Ce qui se rapproche bien de fortes tribulations dans la mise en valeur des potentialités pétrolières de la partie orientale de la RDC.

C’est le cas, par exemple, du pétrole enfoui dans le lac Albert pour lequel la RDC se retrouve totalement court-circuitée par son voisin, l’Ouganda, en raison d’un certain nombre de pesanteurs politiques qui ont plombé ce dossier. A cause justement de ces pesanteurs politiques, l’Ouganda est en train d’exploiter le pétrole du Lac Albert pendant que la RDC se fourvoie dans les préalables ou se perd en conjectures pour des raisons inavouées.

Même scénario pour le pétrole du Graben Albertine à hauteur du parc national des Virunga, très convoité par la Britannique Soco International.

Une forteresse imprenable

Décidément, le secteur pétrolier congolais est une forteresse imprenable. En effet, rien ne se fait au grand jour. Tout est classé «secret défense, secret d’Etat». Dans la gestion du pétrole, l’Etat congolais est presque mis à l’écart. Le secteur est l’apanage d’un groupuscule de gens, bien placé dans le circuit de décisions. Malheureusement, lorsqu’il s’agit de prendre une décision, l’intérêt général est relégué au second plan au profit des intérêts individuels, bafouant à souhait le principe de base de l’ITIE. Ainsi, dans le budget de l’Etat, aucune ressource publique ne tirait ses origines de l’exploitation pétrolière. Les seules recettes tirées du secteur pétrolier sont les maigres impôts, droits et taxes perçues par l’Etat – sur la base, rappellent certains analystes, des données biaisées qui ne correspondent nullement au niveau réel de production.

Comme l’a si bien rappelé la Socir dans son rapport, il est plus que temps de remettre de l’ordre dans le secteur, en privilégiant, notamment le seul intérêt de l’Etat, seul propriétaire d’immenses, mais insuffisamment exploitées, réserves pétrolières de la RDC. Il n’y a pas de raisons que la RDC soit en queue de peloton des pays pétroliers du Golfe de Guinée alors qu’elle partage la même nappe avec l’Angola, le Gabon, le Congo/Brazzaville, la Guinée Equatoriale, le Nigeria. Il n’y a donc aucune explication au maigre niveau de production pétrolière en RDC, à peine 25 000 barils – encore en chute libre depuis quelques années – là où d’autres nations alignent des millions de barils par jour.

Avec une production de 4,5 millions de barils par jour, le Golfe de Guinée est devenu une région prometteuse. Le Nigeria produit 1,76 million de barils par jour (ce qui fait de ce pays le premier producteur africain) et l’Angola 1,15 million de barils par jour.

La RDC doit déployer un programme ambitieux pour la mise en valeur de ses ressources pétrolières. Le projet est réalisable. Mais, tout dépend d’une réelle volonté politique du gouvernement pour donner la chance, enfin, au peuple congolais de jouir de son pétrole.

En effet, il est renversant de continuer à pleurnicher sur le manque de moyens financiers, de tendre la main, de façon permanente, aux institutions de Bretton Woods pour quelques millions de dollars alors que le pétrole congolais est une solution durable à portée de main. ENCADRE

La RDC et les Etats-Unis réaffirment le «renforcement» de leur coopération militaire

Lég : Le ministre Charles Mwando Nsimba (d) s’entretenant avec l’ambassadeur américain James Entwistle (c) dans son cabinet de travail au Mont Ngaliema

L’ambassadeur américain, James Entwistle, et le ministre congolais de la Défense et des Anciens combattants, Charles Mwando Nsimba, ont échangé sur le «renforcement» de la coopération bilatérale entre les Etats-Unis et la RDC le lundi 5 mars 2012 au Mont Ngaliema.

Au cours de leur entretien, les deux personnalités ont aussi fait un tour d’horizon de la coopération militaire entre Kinshasa et Washington.

Interrogé par la presse sur la question de la subvention des projets agricoles des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC), le diplomate américain s’est voulu rassurant quant à leur effective réalisation avec le concours de Borlaug Institut. Celui-ci partage son expérience avec l’armée congolaise depuis plusieurs années dans le domaine de l’agriculture au camp militaire Base de Kisangani, en Province Orientale. «Ce sera aussi bientôt au plateau des Bateke à Menkao, dans la ville de Kinshasa», a ajouté une source ministérielle.

La première expérience de Borlaug Institute en RDC a été réalisée au camp militaire Base, à Kisangani, par la mise en activité de 45 étangs piscicoles, d’un élevage de 43 têtes de bétail, dont 21 porcs, d’un champ de 11 hectares de riz récoltés en 2011 et de 5 hectares de manioc en cours de récolte ainsi que de 2 zones de production de légumes par hectare. On signale également la présence des machines pour la transformation des produits agricoles et d’un tracteur. Le camp Base dispense aussi une formation aux techniques et à la gestion agricoles.

Angelo Mobateli

Ajouter un Commentaire

Laissez un commentaire

Vous devez être connectés afin de publier un commentaire.