09.03.12 L'Observateur – Après la conclusion des négociations sur les modalités d'apurement
Les signataires de ce protocole d'entente sont Albert Yuma et Kaleb Nkand, respectivement Président du Conseil d'administration et Administrateur directeur général de la Gécamines Sarl et Christian Yoka, directeur de l'AFD pour la RDC. Les deux parties concernées ont signé solennellement ce protocole devant Olivier Huot, Chargé d'affaires de l'ambassade de France à Kinshasa. L'événement étant important, l'on y a noté la présence, entre autres, des Administrateurs et du Secrétaire général de la Générale des carrières et mines Sarl (Gécamines Sarl).
Dans son mot de circonstance, Olivier Huot a souligné qu'il s'agit d'une étape significative pour l'amélioration de la situation financière de la Gécamines aujourd'hui devenue une société commerciale. Rappelant au passage que l'AFD avait financé en 1986 le Programme quinquennal d'investissements de la Gécamines. Mais, il s'en est suivi une page douloureuse marquée par l'effondrement de la production et la perte des partenariats capitalistiques, financiers, industriels et institutionnels. Et cela en raison notamment du contexte politique et économique qui a prévalu en RDC à partir de 1990. Des turbulences politiques et économiques ont rendu la bonne marche de l'entreprise difficile. Conséquence : l'AFD a enregistré des impayés qui l'ont conduit à détenir à ce jour une créance totalisant 83 millions d'euros.
Plan stratégique de la GCM 2012-2016
L'engagement de la France aux côtés de la RDC, à travers l'AFD, se traduit, dira Olivier Huot, entre autres dans le vaste mouvement de restructuration des entreprises publiques transformées en Sarl. L'AFD a pu constater des avancées significatives enregistrées dans un premier temps dans ce processus de restructuration des entreprises publiques, processus soutenu par des partenaires techniques et financiers. Tout comme l'AFD a pu apprécier l'élaboration et la mise en œuvre du plan stratégique arrêté par la Gécamines Sarl sur la période 2012-2016 visant le redressement de cette société pour en faire une entreprise minière de grande envergure. Le chargé d'affaires de l'ambassade de France a loué le travail des négociateurs de la GCM Sarl et de l'AFD pour arriver à une version inclusive du protocole relatif à la restructuration de la dette. Il s'est félicité des efforts de la RDC et de la Gécamines Sarl pour avoir réussi le retour à la normalité. " La RDC peut compter sur l'aide de la France, comme dans le passé ", a promis Olivier Huot.
En ce qui le concerne, Albert Yuma fait remarquer que cette dette contractée par la Gécamines entreprise publique a duré 25 ans. Cette entreprise a connu une descente aux enfers. Aujourd'hui, il est question de sa transformation en société commerciale avec une gestion de type privé. Mais, le passif s'élève à 1,5 milliard de dollars US. Conséquence, la Gécamines n'a pas la capacité de rebondir. Il fallait trouver une solution avec les créanciers sur le passif. Cela passe notamment par la restructuration de la dette. Comme l'avenir de la RDC est tributaire de la santé du secteur minier, la Gécamines Sarl est un élément important de l'économie nationale. Et cela à travers des joint-ventures avec des partenaires, mais aussi ses propres opérations.
Ainsi, dernièrement à Indaba en Afrique du Sud, la Gécamines Sarl a présenté son plan stratégique. Ce plan va lui permettre de réaliser une production de 100 000 tonnes par an dans cinq ans. La réalisation de ce plan implique le concours financier et bancaire de partenaires de l'entreprise. La cérémonie de remise de dette par la France est une première étape. La France donne le signal que c'est par les mines que tout va redémarrer. Les mines sont un élément catalyseur qui permet d'investir dans d'autres secteurs. L'AFD ouvre une nouvelle ère avec de nouveaux engagements.
Dans l'échange avec la presse qui a suivi, il ressort de la prestation de Albert Yuma que le passif non assurable, c'est-à-dire la dette que l'entreprise n'est pas en mesure de payer, se chiffre à 900 millions de dollars US. Ainsi, dans le passif que l'entreprise est en mesure de payer il reste 600 millions de dollars US pour lesquels il fallait discuter avec les créanciers. Le créancier important est l'AFD avec qui il a été négocié un plan de restructuration de la dette. Il a été convenu une remise de 94 %. En ce qui concerne les 6 % restant à payer, ils représentent un montant de 4,8 millions d'euros. Ce montant sera payé en deux tranches, selon le protocole d'accord signé.
Relance de la prospection et modernisation de l'outil de travail
La première tranche sera payée lors de la signature du protocole et la seconde dans les 12 mois à venir. C'est la précision apportée par l'ADG de la Gécamines Sarl. Celui-ci est revenu sur le plan stratégique présenté il y a un mois à Indaba. Ce document articulé en six points a été élaboré après l'arrivée aux affaires de nouveaux dirigeants de la Gécamines Sarl. Ainsi, la restructuration de la dette est l'amorce de la relance de l'entreprise. Les autres axes sont, entre autres: la relance de la prospection pour anticiper sur les réserves en gisement, la réhabilitation et la modernisation de l'outil de travail. Toutes les étapes du plan stratégique vont prendre cinq ans. La production va aller croissant progressivement d'une année à l'autre : 35 000t/an, 50 000T/an, 75 000 T /an et à terme 100 000T/an. L'ADG Kalej Nkand estime que la Gécamines Sarl doit être accompagnée dans ce programme de relance de ses activités.
De son côté le directeur de l'AFD pour la RDC, Christian Yoka note que la restructuration des entreprises publiques du secteur marchand est très importante pour consolider la croissance économique. Ainsi s'explique l'intérêt manifesté par son agence pour les secteurs de l'eau, de l'électricité et des mines. C'est aussi pour cela que l'AFD a financé une étude sur la SCPT, ex ONATRA. Christian Yoka a émis le vœu de voir les entreprises publiques en transformation négocier auprès de leurs partenaires des conditions meilleures pour la restructuration de leur dette.
Pour mémoire, à en croire le communiqué rendu public, avant la signature du protocole d'entente l'AFD et le Gécamines ont mené ultérieurement des discussions sur les modalités d'apurement de la créance de l'AFD. Il a été convenu que l'AFD allait consentir une remise de sa créance à hauteur de 96 %. Quant au solde, il n'allait pas faire l'objet de l'abandon de créance et serait réglé selon un échéancier convenu sur deux années. Il est rapporté que le protocole conclu ce jour emporte déclarations d'intentions mutuelles de deux parties de soumettre à leurs instances de décisions respectives les termes de cette transaction.
" L'effort financier exceptionnel consenti dans le cadre de traitement de cette dette s'inscrit dans la volonté affichée par la France, à travers les actions de l'Agence Française de développement, de faciliter l'obtention, par la RDC, des meilleures conditions de restructuration des passifs des entreprises publiques désormais transformées en sociétés commerciales ", souligne la communiqué de presse. Et de renchérir qu'à travers cette opération, la Gécamines est encouragée à poursuivre une gestion de type privée avec comme objectif la recherche du profit pour accroître sa valeur, assurer son développement et dégager des bénéfices pour son actionnaire et l'ensemble de l'économie nationale.
A tout prendre, le geste posé par l'AFD est important. Cela revient à dire que l'assainissement des comptes de la Gécamines Sarl, avec à la clé l'allègement de son passif, est une voie obligée pour que cette entreprise redevienne compétitive et un fleuron de l'économie de la RDC, comme autrefois. C'est le pari visé à travers le plan stratégique de la Gécamines Sarl 2012-2016.
Didier Munsala Buakasa