16.05.12 Le Potentiel – Cinq questions à Steve Mbikayi (*)

1. Qu’est-ce qui justifie votre choix d’appartenir au groupe parlementaire UNC et alliés, alors qu’on vous reconnaît proche de l’UDPS ?

Logiquement, j’aurai dû être dans le groupe parlementaire Forces acquises au changement (FAC). Malheureusement, cette plate-forme n’a pas pu réunir le nombre des députés requis pour se constituer en groupe parlementaire. Et je devais logiquement être membre de l’UDPS-FAC. Tenant du compte du fait que les députés de l’UDPS ne sont pas en harmonie avec leur parti politique. Ce dernier dit les avoir exclus. J’ai estimé qu’il n’était pas important d’appartenir à un groupe dont certains membres sont contestés au niveau de leur parti. Je fais le choix d’un groupe où je me sens plus à l’aise. L’UNC et alliés. Je choisis ce groupe après avoir pris langue avec le président Vital Kamerhe. Avec lui, je pense que nous fournirons des efforts pour préparer l’avenir. On ne fait pas la politique pour le passé, on la fait au présent pour préparer l’avenir.

2. Que proposez-vous au niveau interne de l’Opposition pour renforcer son action et la rendre plus entreprenante ?

Il y a des problèmes parce que nous sommes dans un système où les gens ont vraiment intériorisé les élans dictatoriaux. Comment voulez-vous que dans des partis politiques qui se présentent pourtant démocratiques, on ne tolère pas de contradictions. On veut que tout le monde s’aligne, même sans réfléchir derrière un seul point de vue. Donc, on prêche la démocratie, mais dans le comportement on est dictateur. On doute de cette démocratie. Sinon, il y aurait eu des courants. On sait le voir partout ailleurs, dans un même parti des gens qui sont pour tel ou tel autre courant. Mais quand ils vont aux élections face à un autre camp ils sont unis. Aujourd’hui, l’Opposition congolaise n’est pas seulement faible, elle est aussi disparate. Et pour que nous puissions redevenir forts, il nous faut faire la cohésion. La cohésion doit être faite autour d’un homme. Celui-là sera le porte-parole de la plate-forme. Nous devons en arriver là. Et cela permettra qu’on ait des cogitations, des concertations avant d’aborder toutes les questions importantes qui nécessitent la prise de position de l’Opposition. Ce porte-parole doit être quelqu’un qui ne doit pas confondre les choses. Il ne sera pas le chef de l’Opposition pour nous dicter, nous engager. Par contre, il sera notre porte-voix, et à ce titre avant de parler il faudra que ce qu’il dira émane de nous après concertation. Et après cette étape, je pense qu’on pourra refaire l’unité de l’Opposition et mettre en place des stratégies qui permettront d’affronter utilement le camp d’en face qui, en mon point de vue, n’est pas aussi si organisé que cela.

3. Qui peut être le porte-parole de l’Opposition, pour refaire cette unité, selon vous ?

La désignation du porte-parole se fera par élection au niveau des parlementaires. Parmi les personnes en présence actuellement, je pense que s’il faut voir les qualités de souplesse, de modernité, de courtoisie envers les uns et les autres, s’il m’est demandé de choisir le porte-parole, suivez mon regard.

4. Vous parlez d’E. Tshisekedi ?

Non, le président Etienne Tshisekedi est le chef naturel de l’Opposition congolaise. Nous le plaçons comme chef de fil de l’Opposition, même si certains cadres de son parti le ramènent au niveau simplement du président de l’UDPS. Aujourd’hui, la logique est telle que M. Tshisekedi c’est quelqu’un très déterminé dans ses prises de position. Il a gagné les élections. Il a été élu par le peuple. Et je ne le vois pas se rabattre pour venir se contenter du rôle de porte-parole de l’Opposition. C’est pourquoi il va falloir un critérium pour savoir qui d’autre pourra assumer ces fonctions.

5. Comment avez-vous apprécié le programme quinquennal du gouvernement ?

Ce que le Premier ministre Matata a présenté à l’Assemblée nationale n’est pas un programme. Il a plutôt présenté ses ambitions pour le Congo. Il a présenté une litanie de choses qu’il souhaitait faire pour le pays. Cela aurait été un programme s’il y avait des chiffres qui auraient accompagné cette volonté, et un chronogramme qui nous aurait permis, nous députés, de le juger au fur et à mesure. Comment comprendre que, quelque part il dit, les ambitions présentées seront chiffrées plus tard. Et plus loin, il dit que pour l’année 2012, on va mobiliser environ 7 milliards de dollars. En cinq ans ça fera 48 milliards de dollars. Pourtant, cette hauteur financière est nettement insignifiante par rapport aux ambitions affichées. C’est pourquoi, intervenant au prétoire de l’hémicycle, je lui ai dit qu’il devait corriger sa copie pour nous présenter un document avec diagrammes, graphiques et tableaux reprenant toutes les dépenses de productions, sociales…, de sorte que pendant cinq ans le Parlement soit à mesure d’évaluer l’action du gouvernement. Malheureusement, cela n’a pas été fait. La Majorité présidentielle a tenu à aller vite en besogne. Et ce programme voté tel quel n’inspire rien de réalisme dans sa suite. Conséquence, le peuple n’a pas grand-chose à attendre de ce gouvernement. Vous savez que, même si ce programme était présenté avec chiffres et chronogramme comme nous l’avons souhaité, il n’aurait toujours pas bien marché au regard de la configuration actuelle de choses. Le système est truffé de corruption, d’influences politiques, de détournements, il ne pourra rien faire à moins de commencer par réformer le système. La même Majorité est là, avec les mêmes principes, je ne vois pas comment dans ces conditions un Premier ministre pourra réussir.

Propos recueillis par Pitshou Mulumba

(*) Député national

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