04 09 12 Le Potentiel – Cinq questions à Gaspard-Hubert Lonsi Koko, porte-parole du Rassemblement pour le Développement et la Paix au Congo (RDPC)

 


1. En tant qu’acteur politique Congolais et ancien cadre du parti
socialiste français, comment réagissez-vous à la participation de
François Hollande au sommet de la Francophonie de Kinshasa ?
Je ne peux qu’apprécier le courage politique de François Hollande, ainsi
que sa volonté de tout dire partout en Afrique. J’espère que sa
participation au XIVe sommet de la Francophonie sera l’occasion de
décliner la nouvelle politique africaine de la France et de faire
oublier le discours de Dakar de Nicolas Sarkozy. Ainsi devra-t-il
absolument conditionner l’aide de la France à un système représentatif,
aux élections libres et transparentes, à la liberté de la presse, à
l’indépendance de la magistrature, au refus de la censure, au droit de
se syndiquer, au respect des droits fondamentaux de la personne humaine…

2. Certains membres de l’opposition et de la société civile
congolaise ont souhaité ardemment la délocalisation de ce sommet dans un
autre pays. Avez-vous compris cette prise de position ?
La divergence au sein de l’opposition congolaise et de la société
civile, s’agissant de la tenue du sommet de la Francophonie à Kinshasa,
fait partie du jeu politique. Mais cela ne doit en aucun cas nous
obliger à sombrer piteusement dans la pensée unique. Nous ne pouvons pas
revendiquer, à juste titre, les principes démocratiques et diaboliser
systématiquement ceux qui soutiennent une opinion contraire. La
délocalisation de ce sommet aurait certes fragilisé et isolé le régime
de Kinshasa. En revanche, elle aurait encouragé davantage quelques pays
voisins dans leur tentative de balkaniser la République du Démocratique
du Congo. Nous devons retenir la leçon de ce qui s’est passé récemment
au Mali. Nous ne devons pas oublier que nous continuons de payer très
cher l’aide de nos voisins relative au départ de Mobutu du pouvoir. Nous
devons avoir la sagesse de protéger notre pays contre les menaces
extérieures, et la capacité de régler nos problèmes internes entre nous.

3. Ce débat autour de la présence de François Hollande à Kinshasa
avait-il vraiment lieu d’être surtout lorsqu’on sait que les relations
entre les Etats sont basées sur les intérêts et rien d’autre ?
Il est vrai que les affaires d’État ne se gèrent pas sur la base des
sentiments. En confirmant sa présence au sommet de Kinshasa, François
Hollande avait à l’esprit la géopolitique en cours. Il ne pouvait pas
faire abstraction des lois de la realpolitik. Si l’Afrique est un
continent prometteur sur le plan économique, la République Démocratique
du Congo représente un enjeu énorme sur le plan géostratégique. La
polémique est toujours stérile quand elle n’est couronnée d’aucune
proposition constructive. Il me semble que les Congolais de France
doivent faire de François Hollande leur porte-parole afin d’exprimer « avec force et vigueur », devant les chefs d’État et de gouvernement francophones, leurs aspirations concernant le respect des valeurs universelles.

4. A votre avis, quel sera l’impact de ce sommet sur la politique intérieure de la RD Congo ?
L’impact de ce sommet ne peut qu’être considérable, surtout au regard de
la situation régionale. En effet, les autorités congolaises doivent
profiter de la présence à Kinshasa de différents chefs d’État et de
gouvernement pour solliciter leur soutien en vue de la sécurisation de
la partie orientale de la République Démocratique du Congo et de la
pacification de la région des grands lacs africains. Ce sera l’occasion
de poser les problèmes ayant trait à la présence des éléments des Forces
Démocratiques de Libération du Rwanda (FDLR) dans le territoire
congolais et à l’instrumentalisation des éléments armés par les pays
limitrophes pour déstabiliser notre pays. Pour ce qui est de la
politique intérieure, cela peut être l’occasion de défendre des
positions privilégiant la cohésion nationale susceptible de garantir le
processus démocratique.

5. Quel message, selon vous, devrait adresser le « président normal » aux autorités congolaises ?
François Hollande ne doit surtout pas apparaître comme un moraliste au
regard des autorités congolaises, au risque d’être vu comme un
néocolonialiste à l’instar de ses prédécesseurs. Il doit au contraire
tenir un discours favorable aux seuls intérêts des populations et à
l’État de droit. On attend de lui une vraie rupture avec les méthodes du
passé, c’est-à-dire la novation au détriment de l’immobilisme.

 

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