15.09.12 Le PoCinq questions Stephen Nzita-di-Nzita (*) tentiel –

1. La dernière sortie médiatique du ministre rwandais de la Défense laisse croire que la présence des troupes rwandaises au Nord-Kivu s’expliquerait par des accords secrets passés entre Kinshasa et Kigali. Quelle lecture faites-vous de cet épisode au PPPC ?

Dans la science de la guerre, les protagonistes ont souvent recours à la désinformation dans le but de déstabiliser, décourager, démotiver et détruire. Et puisqu’on est en situation de guerre, il faut faire attention de prendre à son compte les informations en provenance du camp ennemi. Pour le moment, je ne suis pas surpris de voir que le Rwanda soit animé de beaucoup de bonne foi pour dévoiler à l’opinion congolaise l’existence des accords secrets. A mon avis, il ne faut pas accorder trop d’importance à ces bruits de sirène. Curieusement, l’opposition politique a mordu à l’hameçon de la distraction des hommes forts de Kigali. C’est la guerre psychologique. Le Rwanda, dans une position très inconfortable sur l’échiquier international, a intérêt à brouiller les pistes.

Le Congo n’est pas opposé au Rwanda mais contre la politique étrangère d’actuels dirigeants rwandais qui pensent qu’ils ont reçu mandat de devenir « faiseurs de roi » en RDC. Et ils doivent comprendre que la Congo est fatiqué de payer le frais d’un Rwanda incapable de gérer ses contradictions internes et qui utilise le territoire congolais comme un champ au règlement de ses problèmes socio-politiques et démographiques.

Dommage que dans ce jeu se trouve impliqués des Congolais qui, par déficit de moralité, pensent que le pouvoir s’obtient de l’étranger. Pour le Parti du peuple pour le progrès du Congo et la Majorité morale (sa plate-forme) estiment que c’est le moment de se focaliser sur un seul objectif : la défense de l’intégrité du territoire national avant toute chose. Nous n’épousons pas les thèses du Rwanda ni les turpitudes de l’Opposition, à la recherche d’on ne sait quoi, qui pense qu’il faut aller au Parlement déposer une motion de haute trahison. Pour mnous, la décision de l’Opposition n’est pas bien mûrie, elle est illogique, irréfléchie et incohérente.

2. Quelle est alors l’attitude qui vaille face à l’agression rwandaise ?

La seule chose qui vaut la peine pour l’instant est l’unité nationale et la sauvegarde de l’intégrité territoriale. Le Congo est agressé et ce problème dépasse le simple cadre national. Il relève désormais de la compétence des Nations unies parce qu’il s’agit d’un Etat membre de l’ONU qui est agressé par une coalition de forces. C’est pourquoi nous disons aux nations amies comme les Etats-Unis d’Amérique, l’Allemagne, l’Angleterre, la France, la Hollande, la Belgique et autres du monde libre) que le Congo est en train de subir un holocauste, avec plus de 9 millions de morts. Nous voulons mettre fin à cette culture de tuerie en Afrique centrale.

3. Comment dès lors obtenir cette cohésion en interne lorsque le pouvoir et l’opposition ne ratent l’occasion de se tirer dessus ? Lorsque l’opposition crie à la haute trahison, le pouvoir répond avec le feuilleton « Lumbala ».

En homme politique légaliste, je commente rarement le dossier judiciaire, surtout quand le dossier judiciaire se mêle d’intrigue politique. Parce qu je ne connais pas un Etat qui s’est bâti sur base de rébellion. Un rebelle, par définition, réalise des choses non conventionnelles. Le rebelle ne donne pas au peuple ce qu’il veut. Un sage congolais a posé le postulat des besions du peuple. Que demande le peuple ? Pas assez, « le manger, le boire, le vêtir et ce qu’il faut pour scolariser les enfants et leur procurer des soins de santé ». Aujourd’hui, on propose à ce peuple tout sauf ce qu’il demande.

4. Force internationale neutre à déployer aux frontières, sommets de la CIRGL à répétition… autant d’initiatives sans grand résultat. Comment résoudre l’équation du Kivu ?

L’équation du Kivu ne se réduit pas en une force internationale qui doit se mettre en place. Quand on entre dans le fond, l’équation c’est le Congo qui doit défendre son intégrité territoriale. Alors, ce pays ne ferait-il pas partie de cette force neutre ? Au-delà de tout le plus important est qu’il faut qu’on passe par le Parlement pour toute décision, sinon organiser un débat national. Aujourd’hui, le pouvoir décide trop à la place du peuple.

Sans le débat, sans interroger le Parlement, le pouvoir doit éviter de tomber dans le vrai piège de haute trahison. La force neutre à mettre en place ne résoudre pas la crise dans la sous-région les Grands Lacs, où se pose le problème de cohabitation Hutu-Tutsi qu’on retrouve au Rwanda, Burundi, Kenya, Tanzanie, Ouganda et en RDC. Dans ce jeu, l’Ouganda est très mal placé pour régler la crise du Kivu.

Le Parti du peuple pour le progrès du Congo avait appelé à la tenue d’une conférence internationale sur la paix à Kinshasa et ce, avant le Sommet de la Francophonie d’octobre prochain. En interne, la RDC devrait organiser une réconciliation parce que les cicatrices causées par les élections sont encore fraîches. La majorité a intérêt à intérioriser le discours d’investiture du président Joseph Kabila par lequel il exprimait son désir de « travailler avec tous les Congolais qui ont la passion du Congo ». Quand un peuple est soudé, il est fort et peut affronter n’importe quel ennemi. Or, ce qui soude un peuple ce sont les idées. Au Congo, on a besoin des idées de justice, de paix et de justice sociale parce le pays souffre de trop d’injustices, de rébellions et de misère sociale des populations.

5. Mais la guerre du Kivu est une agression. Ne pensez-vous que c’est au niveau externe que la RDC doit continuer à batailler et parlementer avec la Communauté internationale ?

La guerre du Kivu relève de l’externe, c’est exact. Car nos arbres dans l’Est du pays ne produisent pas d’armes. Comme pour dire qu’il y a quelqu’un qui achète les armes, finance les expéditions militaires, paye les militaires. Il y a une main noire quelque part. Mais le problème, c’est aussi cette succession de rébellions (1997, 2002, 2004, 2006 et 2012). A la base, il y a cette cupidité des Congolais qui, sachant qu’ils sont très mal aimés au pays, vont chercher le pouvoir ailleurs.

Et puis, au sujet de la communauté internationale, laissez-moi vous dire qu’en réalité, elle n’existe pas. Elle n’existe que s’il y a intérêt et que les pays forts sont vos alliés. Pour que cette communauté internationale de définisse, il faut que les Etats puissants viennent à votre rescousse. La RDC doit comprendre qu’il n’existe pas de bureau de la communauté internationale, il existe des pays clés avec lesquels il faut composer. Le Rwanda l’a compris et joue sa carte : il est membre du Commonwealth, a un conseiller gratuit britannique. A l’opposé, la RDC s’attaque aux pays forts pour nous allier des Etats faibles.

(*) Président du PPPC

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