13 10 12 Radio Okapi -Didier Burkhalter : « S’il y a une réelle stabilité en RDC, il y aura plus d’investisseurs suisses »


 

 


 

 

Radio Okapi : Monsieur le ministre, vous représentez la
Suisse au 14e sommet de la Francophonie à Kinshasa. Quel est l’apport
de votre pays à ce grand rendez-vous ?

Didier Burkhalter : Avant toute chose, ce qui importe
pour la Suisse c’est son apport au peuple congolais. Nous avons un engagement
que nous comptons renforcer dans ce pays et dans la région des Grands lacs. Ce
qui nous importe, et moi personnellement, c’est d’avoir la possibilité d’un
contact avec la population.

Le
sommet des chefs d’Etat est une bonne chose mais il est aussi très important
d’avoir un lien d’amitié, un lien d’encouragement, un lien d’appui, une
construction positive sur le long terne entre
les peuples.

Le précédent sommet a été organisé en Suisse, à
Montreux. Quelles sont vos premières impressions concernant  l’organisation du
présent sommet de Kinshasa ?

Ça
se passe très bien. Pour comparer, en Suisse on se fait beaucoup de souci. On
veut que tout soit prêt à la seconde près. Ici en République démocratique du
Congo, on sent la volonté de bien faire mais de faire avec la culture qui est
ici dominante et ça se passe très bien. Je me sens très à l’aise et je trouve
que la population est très chaleureuse par le contact que nous avons eu avec
tous les Congolais de manière générale. Je suis très reconnaissant pour cet
accueil et je pense que tout ira bien pour le sommet des chefs d’Etats qui va
bientôt commencer.

Lors du 13e sommet de la Francophonie
organisé en 2010 à Montreux, le président Congolais Joseph Kabila, s’était
engagé à lutter contre l’impunité dans son pays. Quel est votre constat
maintenant que vous êtes sur place à Kinshasa. A-t-il tenu sa
promesse ?

Non, la promesse n’a pas été tenue. Il y a encore
beaucoup à faire. Je crois que devant les difficultés du monde et des pays comme
la République démocratique du Congo, on peut voir les choses de deux manières.
On peut voir ce qui ne va pas ou on peut essayer de voir le potentiel dont
dispose le pays pour améliorer les choses.

Et
si on a un peu d’optimisme, on peut essayer de travailler avec les contributions
qu’on peut donner, de manière à voir réellement des améliorations. Ici alors, il
y a beaucoup de potentiel, il y a beaucoup d’amélioration à faire mais ça va
trop lentement.

Nous formulons le vœu d’être là dans cette région que
nous estimons très fragiles en matières de droits de l’homme pour pouvoir
apporter notre aide avec des projets pour la sécurité des personnes en soutenant
les organisations actives sur terrain.

Le 14e sommet de la Francophonie se tient
dans un pays agressé par un de ses voisins. Quelle est la position de la Suisse
sur l’agression dont la RDC est victime?

Je
crois qu’il faut faire attention avec les termes en la matière. Nous sommes
clairement d’avis que l’intégrité du territoire congolais doit être respectée.
Nous sommes aussi conscient des difficultés qui existent dans cette région avec
toute la problématique des industrie d’extraction minière. Le passé est très
lourd également, ce que la Suisse veut faire, c’est aider autant que possible,
en matière de développement malgré les difficultés actuelles. Elle veut aussi
aider directement les collectivités locales et la population et essayer de
contribuer à la stabilisation et à la paix.

La
situation de l’Est du Congo nous inquiète beaucoup et inquiète beaucoup de gens.
Ce que nous voudrions c’est qu’elle ne s’étende pas et surtout qu’il n’y ait pas
une situation qui rappelle le passé.

La communauté internationale envisage l’envoi d’une
force internationale neutre à la frontière entre la RDC et le Rwanda. La Suisse
va-t-elle y contribuer ?

La
Suisse contribue par des projets très concrets. Elle soutien très largement la
Monusco. Elle a également des projets avec le Congo, avec le Rwanda et le
Burundi. Au Rwanda, ce sont des projets qui vont directement aux collectivités
locales et ne passent pas par l’Etat central.

Et
de manière générale, nous allons continuer cette politique là et s’il doit y
avoir une force neutre d’intervention supplémentaire, cela sera décidé par les
Nations unies et l’Union africaine.

La Francophonie peut-elle devenir aussi un espace
économique viable comme le Commonwealth ?

Je
pense que ce sera assez difficile. La Francophonie est avant tout un réseau qui
permet de se soutenir et de défendre des valeurs communes. De là, arriver à une
véritable unité économique, je crois qu’il y a un grand pas. Néanmoins, je crois
que les aspects de développement économique, de gouvernance économique ainsi que
la manière dont on conçoit le développement du monde en matière économique et en
matière environnementale sont des éléments où la Francophonie peut jouer un
rôle. La Francophonie représente plus d’un tiers des pays membres de l’Onu et
pas loin d’un milliard d’habitants et ceci constitue une force considérable. Le
problème : la Francophonie n’est pas très unie, c’est un réseau avec beaucoup de
divergences.

Mais sur le plan des relations bilatérales avec la RDC,
les investissements Suisses en RDC sont très maigres. La multinationale Suisse,
Nestlé a récemment inauguré à Kinshasa, une fabrique de bouillon aux cubes magie
pour la cuisine. Peut-on s’attendre à d’autres investissements plus
importants ?

C’est assez simple et difficile à la fois. Les
entreprises suisses investissement beaucoup dans le
monde.

Mais elles investissent là où elles ressentent une
réelle stabilité. S’il y a une réelle stabilité en RDC, il y aura évidemment
beaucoup plus d’investisseurs. Il est donc très important de construire d’abord
une réelle stabilité et une réelle sécurité dans la région des Grands
lacs.

Ce
qui n’est malheureusement pas le cas, décourageant ici les investissements dans
cette région. C’est d’autant plus important que la Suisse officielle, par le
biais du Parlement qui vient de le confirmer, s’engage à aider pour
l’amélioration de la sécurité. C’est seulement après qu’on peut espérer avoir
des investissements privés suisses.

Monsieur le ministre, vous êtes dans le studio de Radio
Okapi, une radio financée par le gouvernement suisse et qui fonctionne dans un
pays aussi vaste que toute l’Europe occidentale. Est-ce que nous pouvons nous
attendre à plus de financement de la part de la Suisse pour le prochain
budget ?

Vous pouvez vous attendre à un soutien considérable qui
a été confirmé régulièrement. Ce qui est au fond important pour nous, c’est la
liberté d’expression et d’information. Elle accorde la parole à tout le monde et
donne la possibilité à un véritable débat démocratique.Ce que fait Radio Okapi
correspond aux valeurs de la Suisse. C’est pour cette raison que notre
gouvernement lui apporte son soutien.

Quels sont vos sentiments au moment où vous vous visitez
Radio Okapi, un projet des Nations Unies et de la Fondation Hirondelle, une
fondation de droit suisse ?

J’ai beaucoup de plaisir. D’abord je voudrais signaler
la grande jeunesse de toute l’équipe qui est autour de nous maintenant dans ce
studio. Toutes ces personnes très jeunes et passionnées qui travaillent dans le
cadre de cette radio et permettent d’envoyer des messages libres dans un pays
qui doit se construire sur le plan des droits individuels. Je pense que ce qui
se fait ici est quelque chose de merveilleux et
d’indispensable.

Pour moi, c’est un sentiment de gratitude que je ressens
à l’heure actuelle à l’égard de toute l’équipe de Radio
Okapi.

Cet
entretien a été réalisé par Innocent Olenga.

Radio Okapi

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