09 06 13 Agence Ecofin -« Un journaliste pauvre est un danger pour la démocratie », selon le ministre des TIC


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Agence
Ecofin : Vous avez fermé il y a quelques mois une dizaine de radios qui
émettaient en RD Congo parce qu’elles ne respectaient pas toute la
réglementation. N’y avait-il pas moyen de pratiquer une tolérance
administrative ?

Tryphon Kin-Kiey Mulumba :
Je vais vous expliquer. Je ne sais pas combien de radios vous avez au
Cameroun. Nous avons aujourd’hui au Congo 100 radios, 100 télévisions,
100 journaux. C’est inacceptable ça.

AE : Inacceptable ?

TKKM :
Ecoutez, je m’adresse au journaliste que vous êtes. Ces 100 radios, ces
100 télévisions, combien payent-elles un journaliste ? Est-ce qu’elles
ont un compte d’exploitation ? Est-ce qu’elles génèrent des
ressources ?  Non. Au contraire, elles participent à la création du
chômage. Parce que, les journalistes ne sont jamais payés, ces radios
n’ont pas du cash flow.

Cela
ne me regarde pas, ça regarde le ministre de la Communication qui
devrait pouvoir les amener à se mutualiser. À mutualiser leurs moyens
pour qu’elles puissent être des radios et des télévisions puissantes.
Parce qu’il faut bien qu’il y ait de la puissance dans ces radios. Vous
savez bien qu’un journaliste pauvre est un danger pour lui-même, un
danger pour la société. Un journaliste pauvre est un danger pour la
démocratie. Parce qu’il va passer son temps à aller inventer des 
articles, à aller injurier les hommes politiques. L’indépendance est
aussi le fait d’une puissance, d’une aisance matérielle.

En
tant que percepteur d’impôts, je suis « ministre d’assiette » qui a
reçu pour mission de vendre des fréquences. Les fréquences sont des
ressources rares. On ne peut pas les laisser comme cela. Les distribuer à
n’importe qui. Dans notre pays au Congo, il y a des radios et des
télévisions qui, parce qu’il n y a pas d’organisation, sont en train
d’émettre sur des fréquences des pays voisins, du Congo Brazzaville par
exemple. Cela me cause un problème au niveau diplomatique. Il faut
aujourd’hui normaliser cela. Il faut professionnaliser ces radios.

AE : Une professionnalisation qui passe aussi par la fermeture des radios…

TKKM :
La professionnalisation du secteur de la presse passe par une certaine
aisance matérielle. Je pense qu’aujourd’hui, on ne peut pas accepter que
des entreprises fonctionnent dans un pays et quelles ne payent pas les
impôts. Simplement. On a fermé ces neuf stations, mais on va en fermer
d’autres, parce qu’elles ne sont pas à mesure de payer les impôts, parce
que ce sont des entreprises en faillite. Il faut regarder  CNN.
Regardez toutes ces grosses entreprises privées que vous connaissez. Ce
sont des industries de la culture et il faut qu’elles produisent de
l’argent. Mais, si ces entreprises de communication passent leur temps à
reprendre des programmes d’autres chaînes internationales, je dis que
là, il y a  une désorganisation. Mais, encore une fois, je fais une
grande différence entre ce travail qui doit être fait par le Ministère
de la presse et des médias et le travail qui doit être fait par le
ministre d’assiette que je suis. Moi, je suis un service d’assiette, je
vends les fréquences qui sont une ressource rare et il ne faut pas que
l’on puisse les laisser dans la rue au service d’entreprises non
performantes, parce que cela représente une perte pour le Trésor public.

Propos recueillis par Beaugas-Orain Djoyum, à Genève

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