TIE RDC : entre la conformité et la radiation.
I. Le sort des pays candidats qui ne satisfont
pas à deux validations successives.
Depuis 2005, année de son adhésion à
lITIE, la RDC est toujours pays candidat. Aux termes des nouvelles règles
de lITIE, édition 2011, tout pays candidat dispose dun délai de 18 mois pour
publier un rapport ITIE et dun délai de deux ans et demi pour soumettre un
rapport de Validation final approuvé par le groupe multipartite, au Conseil
dadministration de lITIE. Dans certains cas, le délai de candidature peut être
prolongé dune période de 12 mois supplémentaires. Si la conformité
nest pas atteinte à la fin de cette période, le pays est
radié.
Cette règle a été assouplie lors de la réunion du Conseil
dAdministration de lITIE tenue à Oslo en février 2013, en ce que le Conseil a
décidé de suspendre de la liste des pays mettant en œuvre lITIE, tout pays
candidat qui na pas atteint la conformité mais qui a réalisé des progrès
significatifs. Un délai supplémentaire de 12 mois est accordé au
pays suspendu pour se faire valider. Si au terme de ce délai
supplémentaire, le pays dont les progrès ont été reconnus ne devient pas
conforme, il sera radié. Une autre prolongation ne peut lui être
accordée.
Cest dans cette situation que la République se retrouve
pour avoir raté la validation de 2010 à cause du dépôt de son rapport ITIE
2007 au-delà du délai qui lui était imparti. Elle a raté encore la
validation de 2012 pour navoir pas satisfait aux exigences 9, 11, 12, 13, 14 et
15.
Reconnaissant les progrès significatifs réalisés par la
RDC, le Conseil dAdministration la suspendue[1] de la mise en œuvre de
lITIE pour une période de 12 mois. Elle ne peut réintégrer le processus
quen prenant des mesures correctives dans la publication du rapport
ITIE 2010 supplémentaire ou du rapport ITIE 2011.
II. Les Mesures correctives exigées par le
Conseil dadministration.
Il y a lieu de signaler que les raisons qui ont
conduit à la suspension temporaire de la R.D.Congo ne sont pas dordre
politique, elles sont exclusivement dordre
technique. Elles concernent principalement la définition du
périmètre, lexhaustivité et la fiabilité des données.
Ces mesures correctives exigées par le Conseil
dAdministration sont à la fois une opportunité pour améliorer le processus et
un défi qui doit être pris au sérieux. Si on ne sy prend pas avec
compétence et sérieux, il est aussi possible que la RDC ne soit pas validée au
17 avril 2014. Nous nen sommes pas encore là, car la RDC
conserve encore toutes les chances de se faire
valider.
III. Que faire pour réaliser
les mesures correctives exigées ?
Pour réaliser les mesures correctives exigées par le
Conseil dAdministration, il y a des actions à court terme qui doivent
être faites, alors que pour améliorer tout le processus et rendre le Secrétariat
Technique performant, des actions à long terme doivent être aussi
envisagées. Dans ce document, nous parlerons seulement des actions à court
terme, car celles à long terme feront lobjet dun autre article que nous
publierons dans les prochains jours.
Les actions à court terme.
Les actions à court terme sont à mener principalement dans
le but dobtenir la conformité de la R DC dici le 17 avril 2014. Ces actions
doivent être faites en tenant compte des délais fixés par le Conseil
dAdministration. A ce propos, les deux délais importants à
rappeler sont :
– Le Rapport ITIE 2011 doit être déposé au
Secrétariat International de lITIE au plus tard le 31 décembre 2013
;
– La suspension de la RDC court jusquau 17 avril
2014.
Le non respect de ces délais peut compromettre
les chances de la RDC dêtre déclarée pays conforme au plus tard le 17 avril 2014.
A ce
sujet, les actions à court terme à mener sont
:
§ La détermination du seuil de matérialité.
La détermination du seuil de matérialité vise la
satisfaction des exigences 9 et 11 de lITIE. Pour déterminer un seuil de
matérialité réaliste et sérieux, une étude de cadrage du périmètre est
nécessaire.
A ce niveau, il est important de signaler que le
Comité Exécutif a pris une bonne décision en recrutant le Cabinet Fair Links
pour réaliser cette étude de cadrage.
Létude de cadrage permettra de définir un seuil de
matérialité réaliste qui permette de déterminer de manière claire
et pertinente les entreprises et les flux qui doivent être pris en compte dans
lélaboration du Rapport ITIE 2011.
Pour arriver à une étude de cadrage sérieuse, la
contribution de toutes les parties prenantes est nécessaire. Le
Gouvernement est appelé à fournir les moyens financiers nécessaires, mais
aussi à donner lappui politique conséquent pour que les
entreprises et les régies financières fournissent les données qui permettent de
définir le seuil de matérialité dans un temps raisonnable.
La société civile devra veiller à ce que les éléments
fournis par les régies financières et ou les entreprises permettent de prendre
en compte tous les revenus et toutes les industries extractives
significatifs. Toutes les parties prenantes sont appelées à faciliter
ce contrôle citoyen de la part de la société
civile.
Etant donné que le Comité Exécutif est responsable de la
définition du seuil de matérialité, il devra disposer suffisamment de temps et
recourir à toutes les expertises voulues pour analyser et adopter le draft du
rapport de cadrage qui sera fourni par Fair Links. Les erreurs[2] qui
ont été commises lors de lanalyse et de ladoption du rapport de cadrage du
périmètre fait par le cabinet Hart Group doivent être
évitées.
§ Fournir des données exhaustives.
Lexhaustivité des données vise la satisfaction des
exigences 14 et 15 qui veulent que toutes les industries extractives
du périmètre et les régies financières divulguent la totalité de leurs
paiements et ou revenus significatifs à laide dun formulaire de
déclaration convenu.
Pour réaliser cette exigence, létude de cadrage est un
préalable. Dès que létude de cadrage sera disponible, il sera
question de définir le modèle de formulaire de déclaration qui doit servir aux
régies financières et aux industries extractives pour communiquer au
conciliateur les flux financiers du périmètre.
Il sera nécessaire que toutes les parties prenantes
participent à lélaboration du formulaire de déclaration pour sassurer que la
totalité des revenus retenus dans le périmètre seront déclarés et pour en
faciliter le remplissage. Il sera aussi important que les formulaires soient
vulgarisés auprès de toutes les régies et industries extractives du périmètre.
Lexhaustivité des données passe aussi par la publication
de tous les contrats miniers et pétroliers dans la mesure où certains contrats
contiennent données fiscales qui doivent faire lobjet de déclaration.
Lors des ateliers dévaluation de lITIE
organisés aux mois de mars et de juin 2013, la société civile avaitt
insisté sur la déclaration de tous les revenus provenant de la cession
des actifs.
§ Fournir des données fiables.
La fiabilité des données vise la satisfaction des
exigences 12 et 13 qui veulent que les données déclarées viennent des comptes
audités par des experts indépendants pour les industries extractives et
par la Cour des comptes pour les régies financières. En ce qui concerne la RDC,
cest lInspection Générale des Finances qui a été retenue pour certifier les
déclarations des régies financières.
A ce niveau la grande faiblesse de la RDC est quil
nexiste pas une loi qui oblige les industries extractives de procéder
annuellement à laudit externe de leurs comptes[3]. Avant la
certification des déclarations par les auditeurs externes, il est important que
les données des industries extractives proviennent des comptes audités
selon les normes internationales.
Toutes les données qui proviennent des comptes non audités
et qui sont certifiées par les organes internes de lindustrie extractive (le
Comité de gestion, les Commissaires aux comptes, lAssemblée Générale et les
auditeurs internes…) ne peuvent pas être considérées comme fiables. Cest
lun des reproches qui ont été faits au rapport ITIE
2010.
Pour assurer la fiabilité des données du rapport ITIE
2011, lobligation doit être faite à toutes les industries extractives du
périmètre de procéder sans délai à des audits externes[4] et de
faire certifier, le moment venu, leurs déclarations par des auditeurs externes.
Sans le respect de ces deux conditions, les données déclarées ne
seront pas fiables et lexigence 12 ne sera pas remplie.
Pour les données des régies financières (DGRAD, DGDA, DGI,
DRKAT), cest lInspection Générale des Finances(IFG) dont lexpertise,
lindépendance et lobjectivité ont été appréciées pour le Rapport ITIE 2010 qui
devra procéder encore à la vérification de leurs sincérité et fiabilité. Il est
nécessaire que lIGF fasse son travail encore avec indépendance et objectivité.
Cela permet de connaitre les problèmes de gestion et de fonctionnement qui se
posent dans les régies financières, dune part, et de prendre des mesures qui
simposent pour procéder aux améliorations.
Si avec la DGDA et la DGI, il ny a pas beaucoup de soucis
à se faire, il faut signaler cependant que pour la DGRAD[5] et la DRKAT[6], il
est nécessaire de se prémunir de toutes les précautions pour que leurs
données soient disponibles à temps.
Dans le souci de concilier la fiabilité des données avec le
respect des délais fixés par le Conseil dAdministration et ceux fixés dans la
feuille de route relative à lélaboration du Rapport ITIE 2011, il est
nécessaire que lIGF ait des moyens financiers à temps et quelle procède à la
certification des données des régies financières après ladoption du rapport de
létude de cadrage par le Comité Exécutif.
IV. La disponibilité des moyens matériels et
financiers.
Depuis lavènement du Gouvernement actuel, les efforts ont
été fournis pour mettre à la disposition du Comité Exécutif des moyens matériels
et financiers nécessaires à la mise en œuvre de
lITITE.
Vu que, sur 8 mois impartis à lélaboration et
à la publication du Rapport ITIE 2011, nous avons déjà perdu 3 mois sans
produire les outils nécessaires (Etude de cadrage, modèle de formulaires de
déclaration…), il est urgent que le Gouvernement mette des moyens
matériels et financiers à la disposition de lIGF pour la certification
des données et du Comité Exécutif pour la réalisation effective des étapes
de la feuille de route. Tout retard dans la mise à la disposition de lIGF
et du Comité Exécutif des moyens matériels et financiers entrainera des
conséquences fâcheuses sur la production du rapport ITIE
2011.
Au-delà des moyens matériels et financiers à fournir,
lappui politique du Gouvernement reste nécessaire pour que les régies
financières et les industries extractives produisent les données de
qualité dans le délai.
Entre la conformité et la radiation de la RDC, nous
choisissons la conformité mais nous devons tous savoir quil y a des actions qui
nécessitent lappui politique, la disponibilité, les moyens matériels et
financiers, lexpertise et les compétences qui doivent être faites.
Chacun doit tout faire pour prendre part au jeu.