09 08 13 Interview de L’Envoyée spéciale du Secrétaire générale des Nations Unies pour la Région des Grands Lacs, Mary Robinson à Radio Okapi, le 8 Août 2013

Mary Robinson : D’abord, permettez-moi de remercier Radio Okapi pour cette
> opportunité d’échanger sur ce sujet très important. Par rapport à votre
> question, il me parait important de lever toute équivoque en ce qui
> concerne ma position. Je soutiens totalement la Résolution 2098 du Conseil
> de sécurité des Nations Unies dans son intégralité. C’est une résolution
> très claire qui offre une vision et une approche holistique et globale de
> promotion de la paix et de la stabilité en RDC. A mon avis, elle ne laisse
> place à aucune ambiguïté Il ne s’agit pas de favoriser une composante au
> détriment d’une autre ; la résolution mandate aussi bien la Brigade
> d’intervention, qu’elle en appelle au lancement d’un processus politique
> global dans la recherche de la paix en RDC. Ce sont deux piliers qui vont
> ensemble ; l’un n’exclut pas l’autre, bien au contraire ».
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>
> R.O : Mais Madame, une partie de l’opinion publique congolaise estime qu’en
> faisant des négociations avec les forces négatives pro-rwandaises du M23,
> l’axe fort de votre stratégie, cela en contradiction avec la Résolution
> 2098 qui recommande le désarmement forcé des forces négatives y compris le
> M23, vous contribuez non seulement à protéger ce groupe armé mais aussi le
> Rwanda, accusé par tout le monde de le soutenir.
>
>
> M.R : Non pas du tout. Les Nations Unies poursuivent un seul objectif : la
> paix durable. En tant qu’Envoyée spéciale du Secrétaire général des Nations
> Unies, je n’ai aucun autre agenda personnel que celui d’aider ce pays de la
> région à retrouver la paix pour que les populations et le pays puissent
> aller de l’avant. La RDC a trop souffert et pendant trop longtemps. Les
> populations et particulièrement les femmes et les enfants, sont les
> premières victimes de ce conflit. Il est temps que les violences cessent,
> il est temps que les exactions contre les populations civiles prennent fin.
>
>
> La région a connu près de deux décennies de conflit avec des conséquences
> humanitaires tragiques. Cela suffit. Il faut absolument mettre fin au cycle
> de la violence. Une victime congolaise de plus, c’est une victime de trop ;
> un déplacé congolais de plus, c’est un déplacé de trop et, un réfugié
> congolais de plus, c’est un réfugié de trop.
>
>
> La RDC a besoin de paix et de développement. Je compte travailler avec les
> autorités et la Société civile de ce pays, et celles des pays signataires
> de l’accord pour parvenir à cet objectif, qu’il faut absolument réaliser.
> Vous savez, je suis originaire d’un pays, l’Irlande qui a connu un conflit
> violent pendant longtemps. C’est fort de cette expérience personnelle que
> je travaille avec toute mon énergie et en partenariat avec le Gouvernement
> de la RDC, la Société civile ainsi que les autres pays signataires de
> l’Accord-cadre. Et, la MONUSCO a donné une chance à la paix. Cette fois, il
> faut réussir.
>
>
>
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>
> R.O : Mais, selon la presse congolaise, vous apparaissez opposée à
> l’ultimatum de la MONUSCO lancé aux détenteurs illégaux d’armes à Goma et
> autour de cette ville. N’y a-t-il pas là un point de friction entre votre
> mission et celle de la MONUSCO, notamment sur la question de la Brigade
> d’intervention ? Et, pouvez-vous expliquer votre mission et sa spécificité
> par rapport à la mission de la MONUSCO ?
>
>
> M.R : Il y a en effet une perception erronée de ma position que je souhaite
> clarifier et replacer dans son contexte. Je réitère encore mon adhésion
> totale à la Résolution 2098 et à l’approche globale qu’elle propose, ainsi
> que mon soutien à la MONUSCO. Je compte travailler étroitement avec le
> nouveau Représentant spécial, Martin Kobler, pour soutenir les efforts de
> la MONUSCO. Nous avons déjà une relation très bonne. Nos mandats sont en
> parfaite symbiose. Nous allons agir de façon complémentaire et synergétique
> pour soutenir le Gouvernement et le peuple congolais dans la poursuite de
> la paix.
>
>
> Je ne voudrai pas m’étendre sur le sujet. Mais, la Brigade d’intervention
> vient d’arriver, elle est en train de s’établir et de mettre en place les
> mesures de manière progressive, en collaboration avec les autorités pour
> aider à faire face à la situation sur le terrain. Elle est déterminée à
> mettre en œuvre son mandat et elle fait tout pour cela. Mais, cela
> nécessite naturellement du temps. La Brigade fait partie intégrante de
> l’approche globale que la Communauté internationale a mise en œuvre à
> travers la Résolution 2098 pour mettre fin durablement au conflit à l’Est
> de la RDC.
>
>
>
> R.O : Madame, vous avez encouragé récemment, dans votre discours à Nairobi,
> toutes les parties à clôturer les pourparlers de Kampala le plus vite
> possible. Pour vous, les négociations de Kampala sont-elles la solution de
> la crise ?
>
>
> M.R : Je crois qu’il est important de rappeler que les pourparlers de
> Kampala précèdent une initiative des Chefs d’Etats. Le sommet de la
> Conférence des Grands Lacs a, dans sa déclaration, entériné une
> recommandation émanant des ministres de la sous-région, appelant à une
> conclusion rapide de ces pourparlers.
>
>
> La déclaration a également appelé la Communauté internationale à faciliter
> le processus, notamment à travers les efforts conjoints de l’Envoyé spécial
> des Etats-Unis, Russ Feingold ; du Représentant spécial du Secrétaire
> général en RDC, Martin Kobler et de moi-même.
>
>
> Je suis personnellement prête à explorer toutes les voies possibles et
> acceptables pouvant mener à une solution durable de la crise. C’est cela
> qu’il faut.
>
>
>
> R.O : Madame, comment voyez-vous le retour de la paix dans la région des
> Grands Lacs ? Y a-t-il aujourd’hui une solution durable ?
>
>
> M.R : C’est la question essentielle, n’est-ce pas ? La situation est
> complexe. Je ne pense pas qu’il y ait une solution miracle. La paix durable
> nécessitera une combinaison de plusieurs facteurs.
>
>
> D’abord et avant tout, elle exigera comme préalable une forte volonté
> politique soutenue de tous les leaders de la région, et je compte sur
> cela ; un climat apaisé pour restaurer la confiance entre les Etats ; une
> détermination à mettre en œuvre les engagements souscrits dans
> l’Accord-cadre ; la recherche des solutions aux causes structurelles et
> profondes du conflit ; la cessation des autres hostilités afin de mettre au
> cycle de la violence ; créer les conditions propices au retour des réfugiés
> et des déplacés ; la justice et l’équité ainsi que le soutien financier,
> technique et coordonné de la Communauté internationale. En somme, il faut
> une solution politique globale et, je crois que c’est pour cela que je
> parle de l’ « Accord de l’espoir ». Cette fois, il faut que cela réussisse.
> C’est pour cela que je travaille chaque jour.
>
>
>
>
>
> R.O : C’est pour cela que vous travaillez chaque jour, Madame Robinson.
> Merci d’avoir répondu à nos questions.
>

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