22 04 15 CongoNews – Prof André Mbata parle du « Grand Soir » du régime et du « Triangle du glissement » Ministère de lIntérieur-CENI-Cour constitutionnelle
C-News: Prof, comment
allez-vous ? On vous croyait condamné à lexil après votre agression en Afrique
du Sud !
AMB : Je vais bien et me voici de retour au pays. Cétait ne
pas me connaître que de me croire condamné à lexil pour avoir fustigé la
monarchisation du pouvoir présidentiel en Afrique et mêtre inscrit en faux contre
la révision de larticle 220 de la Constitution congolaise. Ce pays nous
appartient à nous tous et nul ne peut être condamné à lexil par une coterie au
pouvoir qui aurait tort de croire en être le propriétaire.
C-News: Que sest-il
bien passé en janvier dernier en Afrique du Sud ?
AMB:Je remercie dabord les medias indépendants dont Radio
Okapi, Congo News et Le Phare qui avaient aussitôt alerté lopinion sur
lagression dont javais été lobjet. Javais reçu des messages de sympathie et
dencouragement de plusieurs personnalités scientifiques africaines,
congolaises, européennes et américaines ainsi que ceux des responsables
politiques de lopposition et même de la majorité au pouvoir à Kinshasa. Je
navais jamais cru que jétais tant suivi et que le combat que je menais pour
le respect de la Constitution et lEtat de droit démocratique au Congo était en
réalité le combat de tout un peuple. Ce qui sétait passé en Afrique du Sud
était un attentat contre ma personne. La première réaction des auteurs de cet
attentat qui étaient armés de revolvers était de tirer sur moi et non dexiger
un quelconque bien. Ce qui a fait penser à un commando envoyé mais qui était
condamné de fuir suite à lintervention de la garde. Lenquête reste ouverte
contre des inconnus qui semblent avoir été en mission commandée.
C-News: Vous aviez eu
peur?
AMB : Bien sûr, mais cest depuis longtemps que jai dominé
la peur. En mopposant aux Léviathans, à leurs sbires, aux thuriféraires et aux
tambourinaires du pouvoir en Afrique et en enseignant un droit constitutionnel
autre que celui de l inanition de la nation dans un monde dominé par la
prostitution politique et intellectuelle, je ne me suis jamais douté que
jétais le constitutionnaliste le moins aimé des régimes autoritaires.
C-News: Vous
sentez-vous à laise au pays ?
AMB : On nest jamais mieux que chez soi. Et puis, si
ailleurs lassassin peut être cagoulé, ici au moins, tout le monde sait
facilement doù le coup viendrait. Et puis, jétais content de retrouver mes
étudiants de la Faculté de Droit de lUniversité de Kinshasa (UNIKIN).
C-News: Comment se
sont déroulées ces retrouvailles ?
AMB : Laccueil ne pouvait quêtre délirant. Mes étudiants
avaient été les premiers à minonder de messages de sympathie. LUNIKIN est en
effet lunique université du pays à bénéficier de mes services, ayant moi-même
été formé dans cette université. Cest ici que je remplis mon devoir
patriotique de contribuer à la formation des dirigeants congolais de demain qui
seront plus respectueux de la Constitution de leur pays et des droits de leur
peuple. Dailleurs, je viens de terminer avec eux mon cours de droit
constitutionnel.
C-News: Que leur
avez-vous dit ?
AMB : Bien de choses et surtout le respect de la Constitution, des droits
humains et des leurs propres devoirs comme citoyens de la République. Je
termine ce cours avec la conviction que tous les aspirants à la monarchie
présidentielle trouveront devant eux une génération nouvelle appelée à leur
barrer la route et qui ne tolérera plus dhérésies en matière constitutionnelle
comme celles qui leur avaient été servies, une génération qui ne saura plus se
nourrir des dogmes ni de slogans mais deviendra le premier rempart de la
Constitution et de lEtat de droit démocratique.
C-News: Prof,
pourriez-vous revenir sur certaines idée-force et certains concepts qui vous
sont attribués tels que la « monarchie présidentielle » et les «tambourinaires
du pouvoir »?
AMB : Pas trop de choses à la fois. Javais utilisé pour la
première fois lexpression de « la vie après la présidence » en 2007 lorsque je
présentais une communication inaugurale lors du Forum africain sur la
gouvernance qui se tenait à Ouagadougou au Burkina Faso au cours dune séance
présidée par Blaise Compaoré en présence de lancien président mozambicain
Joaquim Chissano et du président rwandais Paul Kagamé. Je la concluais en
invitant les Chefs dEtat africains, y compris Blaise Compaoré, lhôte du
Forum, à ne pas chercher à se cramponner au pouvoir et à quitter le pouvoir avant
que le pouvoir ne les quitte.
C-News: Quelle était
alors la réaction de Compaoré ?
AMB : Sa réaction était celle propre à tous les autocrates.
Il était si sûr de lui-même. Il doit à présent se mordre les dents dans son
lieu dexil où il est allé seul alors que tous ceux qui ne juraient que par son
nom ont disparu dans la nature.
C-News: Cest le même
conseil que vous aviez donné à Joseph Kabila dans une lettre ouverte datant de
septembre 2013 et à laquelle il na jamais répondu ?
AMB : Comme citoyen de la République, je lui conseillais de tirer les leçons de
lhistoire récente de notre pays et de lAfrique avec les dirigeants comme
Mobutu et Compaoré et de se retirer du pouvoir en 2016 après avoir fait ses
adieux au peuple congolais qui laura accepté à la tête de lEtat pendant 15
ans. Le peuple congolais et dautres peuples dAfrique ne toléreront plus. Il y
a une vie après la présidence.
C-News: Et la
monarchisation du pouvoir présidentiel ?
AMB : Des hommes généralement jeunes qui arrivent au pouvoir
à la suite du décès de leurs pères en violation des dispositions
constitutionnelles en la matière comme on la vu au Togo, au Gabon, et en RDC ;
des fils préparés pour succéder à leurs pères comme cétait le cas au Sénégal,
en Egypte, en Lybie et actuellement en Uganda, au Congo-Brazzaville ou en
Guinée équatoriale ; des sœurs, frères, cousins, cousines, oncles, tantes,
femmes et mères des présidents qui se comportent comme des membres dune
dynastie royale et qui ont préséance sur les membres du gouvernement ; des
Présidents qui croient séterniser au pouvoir par des violations
constitutionnelles et des fraudes électorales avec l aide dune armée de
courtisans ; cest à tout cela que renvoie le concept de « monarchie
présidentielle ».
C-News: Et qui
appelez-vous les « tambourinaires du pouvoir » ?
AMB : Il sagit en réalité des thuriféraires et des
flatteurs du pouvoir, des politiciens du ventre, des journalistes du ventre,
des intellectuels du ventre, des professeurs du ventre, des pasteurs et évêques
du ventre et de tous ces hommes et femmes sans scrupule qui ont vendu leur âme
au diable et sacrifié des valeurs sur lautel de leurs intérêts matériels en se
mettant au service des monstres qui gouvernent.
C-News: Que
pensez-vous de la justice dans notre pays ?
AMB : Le Congo nest pas seulement malade de sa classe
politique et intellectuelle, mais aussi de ses cours et tribunaux.
Contrairement au prescrit de la Constitution, il ny a pas de justice
indépendante. Elle interpelle, juge et condamne ceux que le pouvoir en place
voudrait interpeller, juger et condamner.
C-News: Un
commentaire sur la Cour suprême de justice?
AMB : Jamais dans lhistoire du Congo on na connu une Cour
aussi asservie au pouvoir et aussi incompétente que la Cour suprême de Justice
condamnée constitutionnellement à disparaître. On peut se souvenir de ses
arrêts iniques dans les contentieux électoraux de 2006 et 2011 lorsque cette
Cour avait validé des résultats frauduleux, allant même jusquà insinuer en
2011 que le droit ninterdisait pas à un candidat à une élection présidentielle
dobtenir plus de 100% de voix dans une circonscription ! En 2011, les
magistrats de la Cour suprême avaient été internés dans un hôtel de Kinshasa
pour décider du contentieux électoral.
C-News: Et lAffaire
Kamerhe ?
AMB : Ce procès de la honte de la justice aura révélé au
monde entier son instrumentalisation par le pouvoir en place et aussi
lincompétence des magistrats de la Cour suprême de Justice du Congo. Tout le
monde dans la MP comme dans lopposition sait que les élections de 2011 avaient
été un cocktail de fraudes et avaient été dénoncées par tous. Dans cette
affaire instruite par le parquet général sur injonction de lancienne Ministre
de la Justice, le Procureur général et lensemble des juges de la Cour se sont
accordé le pouvoir de juger Mr Kamerhe. Pourtant, même un étudiant de la
première année de la Faculté de Droit sait que Mr Kamerhe nest plus
justiciable de la Cour suprême depuis son départ de lAssemblée nationale.
Tenez, uriner en public est une infraction dattentat aux bonnes mœurs. Est-ce
pour autant que le Parquet va poursuivre ? Imaginez combien de gens seraient
alors poursuivis dans la Ville de Kinshasa ou ailleurs ! Aussi, il ny avait
aucune opportunité de poursuite contre Mr Kamerhe qui condamnait les fraudes
non pas à titre personnel, mais comme le responsable dun parti politique qui
est une personne morale.
Le Parquet agit sur injonction du Ministre de la Justice, membre du
gouvernement de la MP. Cest tout simplement un procès politique pour nuire à
celui qui est devenu lun des plus farouches opposants du régime. Sur un autre
chapitre, considérant une décision récente de la Cour africaine des droits de
lhomme et des peuples, je pense que notre droit qui reste dinspiration
coloniale est dépassé. Un gouvernement et un parlement responsables dans notre
pays devront le moment venu dépénaliser linfraction dimputations dommageables
à l endroit de la presse, des acteurs politiques ou des personnes publiques.
C-News: Que
pensez-vous de la Cour constitutionnelle ?
AMB : Elle sera présidée par un magistrat qui avait joué un
rôle important dans le contentieux électoral de 2006 quand il était juge à la
Cour suprême et dont certains ont considéré la nomination comme une récompense
méritée pour des services rendus. En regardant au passé de ses membres qui sont
tous des sociétaires de la Majorité présidentielle ou apparentés, il y a de
fortes inquiétudes au sujet de lindépendance de la Cour et de sa capacité de
contribuer à la promotion de lEtat de droit dans notre pays. Dautre part, le
contentieux constitutionnel est un contentieux très technique et rigoureux qui
na rien à avoir le contentieux des divorces, des conflits parcellaires, dabus
de confiance, de diffamation et de vol dans lesquels beaucoup de nos magistrats
se sont spécialisés. Un recyclage simpose pour les membres de la Cour
constitutionnelle. Je voudrais bien leur faire confiance et les voir démentir
tout le mal qui se dit à leur sujet en exerçant le « devoir dingratitude »
envers ceux qui les ont nommés et dont le mandat sarrête heureusement en 2016.
Laffaire Kamerhe sera un important test. Plus important encore sera la requête
pour la déclaration de linconstitutionnalité de la peine de mort que je viens
de déposer devant cette Cour.
C-News: Que
pensez-vous de lindépendance de la CENI?
AMB : Elle est constitutionnelle. Cependant, les membres de
la CENI et ceux du gouvernement en parlent tellement que de nombreuses
personnes ont fini par croire quils le font parce quelle nest pas en réalité
indépendante. La CENI qui nest même pas une institution constitutionnelle de
la République, mais un simple organe de lEtat ne saurait être plus indépendant
que lEtat congolais qui fonctionne actuellement comme un Etat failli sous
tutelle de la Communauté internationale, un Etat nourri aux mamelles de cette
Communauté, incapable de sécuriser son propre territoire sans elle, incapable
de financer une enquête internationale sur ses nombreuses fosses communes, de
se construire un « Palais de Justice », ou de financer ses propres élections.
LEtat congolais est même incapable de décider du départ des troupes étrangères
de son territoire comme on la vu lors du débat sur la prolongation du mandat
de la MONUSCO.
Les visites régulières des représentants de la Banque
mondiale et du FMI à Kinshasa apparaissent comme des visites dinspection des
organisations qui exercent la tutelle sur la fameuse « Troïka économique » du
gouvernement et la Banque centrale et qui en cas de besoin nhésitent pas de
convoquer les responsables congolais à Washington. On ne peut pas parler
dindépendance dans la dépendance ni de liberté et de souveraineté dans la
servitude. La CENI ne saurait donc être plus indépendante que lEtat congolais
qui ne lest pas.
C-News: Pour vous la
CENI nest donc pas indépendante ?
AMB : Sur papier oui, mais en réalité, elle na jamais été
indépendante. Elle ne létait déjà pas sous la direction du Pasteur Malu Malu
ni celle de lAbbé Malu Malu. Rien na changé pour quelle soit plus
indépendante avec le retour à sa tête de cet arrogant prélat catholique qui na
cessé dimportuner la Nation tout entière après avoir nargue la CENCO et le
Vatican et qui trouverait mieux sa place dans les rangs des communicateurs de
la Majorité présidentielle (MP) plutôt que dans un presbytère ou dans une
paroisse. Dans les faits, la CENI est sous la tutelle de la MP qui a nommé ses
membres et envers qui elle tient à rester loyale. Cette tutelle est exercée par
lAssemblée nationale dirigée par le Secrétaire général de la MP et le
gouvernement de la Majorité, plus spécialement le Vice-premier ministre et
ministre de lintérieur qui depuis longtemps partage la même loge que le
président de la CENI. On comprend que les communicateurs de la Majorité et le
porte-parole du gouvernement soient devenus aussi des porte-paroles de la CENI
et que toute critique contre la CENI soit ressentie comme une attaque contre la
Majorité. Comme la démontré la question orale de lHonorable Lutundula, le
discours sur lindépendance de la CENI et sa capacité dorganiser des élections
crédibles nimpressionne plus personne même dans les rangs des dindons (de la
farce), des pigeons (faucons et colombes) et dautres oiseaux de la basse-cour
de la ferme la plus célèbre du Congo.
C-News: Vous parliez
dune «loge» à laquelle appartiendraient le Vice-premier ministre Évariste
Boshab et lAbbé Malu Malu, le président de la CENI ?
AMB: Pas de « prima curia » comme du temps de Maréchal
Mobutu. Cependant, lorsque le livre du Prof Boshab présenté à lHôtel du Fleuve
était encore en discussion, javais affirmé que ce livre avait été soutenu par
la Cellule dappui à la politologie pour lAfrique, le Pacifique et les
Caraïbes (CAPAC) dirigée par le belgo-congolais Bob Kabamba. Le Prof Boshab et
lAbbé Malu Malu étaient parmi les éminents membres de cette cellule. Le
premier devait utiliser son savoir scientifique pour convaincre la Nation
daccepter la révision de larticle 220 de la Constitution pour donner un
troisième mandat au président en exercice pour ne pas être condamnée à mort ou
à l«inanition ». Quant à lAbbé Malu Malu, il avait mission de recourir à son
incontestable expertise en matière de fraudes électorales par la manipulation
du fichier électoral pour organiser un référendum et en proclamer les résultats
en faveur du régime. A périodes exceptionnelles, hommes exceptionnels. Il
existe depuis longtemps une complicité indéniable entre les deux hommes et ce
nest pas un pur hasard si lun dirige aujourdhui le puissant ministère de
lintérieur et que le prélat catholique qui avait déjà fait un excellent
travail en 2006 a été rappelé et maintenu à la tête de la CENI malgré toutes
les protestations de la CENCO. La mission est simple : multiplier les
stratégies (mise en place de nouvelles provinces, retard dans le dépôt du
projet de loi sur la répartition des sièges…) pour quen 2016 la CENI soit en
mesure de demander et dobtenir de la Cour constitutionnelle le report des
élections présidentielles et législatives avant dexercer le « ministère de la
fraude » lorsque ces élections auront finalement lieu. Le gouvernement à
travers le ministère de lintérieur, la CENI et la Cour constitutionnelle
nouvellement installée constituent le nouveau triangle du glissement du cycle
électoral en RDC.
C-News: Et le
calendrier de la CENI?
AMB : Sous pression de lOpposition et de la Communauté
internationale, cette CENI prétendument indépendante a fini par lâcher après
sêtre entêtée pendant plusieurs mois. Son calendrier est global certes, mais
les propos entendus dans les rangs de la Majorité et de lOpposition lui
dénient un caractère consensuel. Le calendrier est aussi irréaliste. Le
gouvernement qui vient de décider de la mise en place tardive des provinces na
pas les moyens de sa politique qui est en réalité celle de la Majorité. Lors du
débat de samedi dernier à lAssemblée nationale, lHonorable Bamporiki a
démontré sans être contredit par le Ministre de lIntérieur que depuis 2013, le
gouvernement qui viole la Constitution en ne rétrocédant pas les 40% des
ressources nationales aux provinces na même pas débloqué 15% du budget voté
pour les élections et quil ne pourra pas faire en trois mois ce quil na pas
pu faire en trois ans.
Il ny a pas de réelle volonté politique de terminer les
élections en 2016. Après avoir échoué à faire réviser la Constitution et à
obtenir le report des élections en le subordonnant au recensement de la
population qui pouvait prendre 4 à 8 ans, le gouvernement reste dans la même
logique en préparant le terrain pour le report des élections en violation de la
Constitution. LONIP dont on disait quil pouvait organiser le recensement dans
moins dun an nmême pas encore de bureau ni de personnel, preuve que ce
nétait quun bluff. Il ny a pas dargent pour organiser les élections locales
dans 67000 bureaux de vote repartis. Ces élections bien quimportantes qui
nont pas été organisées depuis 8 ans peuvent attendre 2017.
C-News: Ces
différentes stratégies de report des élections peuvent-elles réussir ? Et pour
vous, est-ce le temps de la fin du régime de la Majorité présidentielle ?
AMB : Je ne pense pas que notre peuple se laissera faire,
lui qui avait envoyé au mois de janvier un message clair à la Majorité qui
venait nuitamment de cracher sur la tombe de Patrice Lumumba, notre Héros
national, en votant une loi électorale en violation de la Constitution. Ce
message avait été capté 100% par son Autorité morale. Il ny a pas lieu de
faire marche arrière pour ne pas subir le sort de la femme de Lot dans la
Bible. Le Marechal Mobutu qui avait succombé aux conseils des tambourinaires de
son pouvoir en revenant sur ses promesses démocratisation davril 1990 en sait
quelque chose. Le mouvement est irréversible. Lhistoire a toujours fini par
écraser ceux qui ont osé aller dans le sens contraire. Pour la MP comme pour le
président, il y a un temps pour gouverner et un temps pour partir, un temps
pour travailler et un temps pour se reposer si on a bien travaillé pour son
peuple. Mon conseil : il ne faut rien forcer au risque de tout casser. Il y a
une vie après la présidence et après le pouvoir. Notre peuple a besoin de a MP
dans lOpposition.
C-News: Vous parlez
du « glas »qui aurait sonné pour emprunter le titre du livre écrit naguère par
Honoré Nganda ? Est-ce bien leschatologie ou le « Grand Soir » du régime ?
AMB : Un peu de tout cela. Mr Ngbanda qui avait été lun des
piliers de la dictature du Maréchal Mobutu était parmi les premiers à tirer sur
le monstre quils avaient servi avec loyauté et quils adoraient. Le MPR navait
pas survécu et la MP telle quon la connait actuellement ne survivra pas. Cest
bien le « Grand Soir » du régime, leschatologie. Le « coq » sapprête à
chanter pour amener au-devant de la scène des personnages comme Pierre qui
répéta plus dune fois quil ne connaissait pas Le Seigneur Jésus-Christ alors
quil mangeait et buvait avec lui. Cest le début du temps de la fin et celui
des reniements déjà vécu par les anciens dignitaires du régime Mobutu
aujourdhui dans le gouvernement de la majorité. Moins dune année après la
chute de leur « dieu », « Mulopo » ou « Mulopwe » Mobutu, Sakombi Inongo –paix
à son âme – le bouillant ministre de linformation – en réalité de la
désinformation – qui a son sosie bien connu dans le régime actuel se convertissait
en devenant « Frère Dominique » pour témoigner partout que Mobutu nétait quun
démon qui buvait du sang humain. Jespère vivement quaprès 2016, la MP
actuelle ne fera pas la même chose que le MPR en donnant naissance à un nouveau
converti (Frère, Pasteur, Prophète…) qui puisse raconter des bêtises en
prétendant que quelquun dans son sein buvait du sang… des fosses ou des tombes
communes ! Au Congo, lhistoire semble malheureusement se répéter avec des
personnages qui se ressemblent étrangement au point de vous donner des sueurs
froides et des crises cardiaques.
C-News: Un mot sur
les fosses ou tombes communes ?
AMB : La Bible dit que rien de ce qui se fait de nuit ne
restera caché. Cest incroyable que les gouvernants qui se réclament du peuple
puissent réserver un tel traitement inhumain à leurs compatriotes morts
indigents après quils les aient eux-mêmes condamnés à cette indigence. Une
enquête indépendante et internationale est nécessaire pour faire la lumière sur
cette affaire. La refuser serait une preuve que le gouvernement a des choses à
cacher, contrairement aux nombreux démentis de ses porte-paroles. En outre, les
indigents ne sont pas des inconnus. Sils nont pas été ramassés dans la rue
mais des parents les ont amenés à lHôpital avant de les abandonner faute de
moyens, ils étaient au moins enregistrés. Les fiches et certificats de décès
sont également nécessaires pour nous convaincre quil sagissait des indigents.
En outre, on devrait permettre lexhumation des corps. Le ministre de la justice
ne doit pas tromper le peuple en prétendant que celle-ci dépend des autorités
judiciaires lorsquil sait que le parquet qui instruit le dossier nest pas
indépendant et travaille sous ses instructions. Enfin, avons-nous des
dirigeants humains ? Quavons-nous fait des valeurs africaines qui nous
imposent le respect à la fois pour les vivants et pour les morts qui deviennent
nos ancêtres ?
Comment un gouvernement qui prétend avoir des millions de
dollars pour recenser la population, mettre en place de nouvelles provinces et
organiser des élections dans 67 000 bureaux de vote pouvait-il manquer moins
dun million de dollars pour payer des cercueils et enterrer dignement moins de
500 personnes au lieu de les jeter comme des chiens dans un trou ? Lexhumation
aura lieu tôt ou tard. Les victimes seront bien identifiées et les personnes
responsables subiront toute la rigueur de la loi en droit pénal national ou
international pour crime contre lhumanité qui est un crime imprescriptible et
que le temps ne peut donc pas effacer.
C-News: Avez-vous à
dire sur larrestation et puis la libération des militants pro-démocratie du «
Balai citoyen » et de « Y en a marre » et sur leur collègues du mouvement
Filimbi en prison?
AMB : Très mauvaise et honteuse publicité internationale
pour le pays. Preuve, sil en était encore, que nous sommes encore loin de
lEtat de droit démocratique où les droits et libertés sont garantis. Toutes
ces personnes devraient être libérées sans délai. Les qualifier de terroristes
serait simplement faire preuve de cécité et de surdité intellectuelles et
politiques. Comme dans lApocalypse, une forte trompette a sonné pour annoncer
la fin des régimes autoritaires et corrompus et le début dune ère nouvelle en
Afrique. Il serait mieux de lentendre pour échapper au « jugement dernier » et
ne pas rater lEnlèvement et la rencontre avec Le Seigneur.
C-News: Un mot la
question orale avec débat de lHonorable Christophe Lutundula à lAssemblée
nationale ?
AMB : Félicitations à Christophe Lutundula, un juriste
brillant et intègre qui navait pas toujours su défendre ses idées au sein de
la Majorité, mais mieux vaut tard que jamais. On la qualifié de « traitre » et
d«ingrat ». Jai entendu des gens qui ne lui arrivent même pas à la cheville
contester ses connaissances comme juriste et le traiter de tous les noms parce
quil a su sélever au-dessus de la basse-cour et du raisonnement de ses
applaudisseurs automatiques. Jai surtout apprécié sa conclusion : « si nous ne
réglons pas les problèmes, les problèmes finirons par nous régler les comptes
tôt ou tard ».
C-News: Et les
réponses du Vice-premier ministre Evariste Boshab ?
AMB : Je le connais depuis plus de trois décennies depuis
quil était notre ainé à la Faculté de Droit de lUNIKIN et le Maire du Home 30
sur le Campus. Evariste est resté égal à lui-même et ses réponses ne pouvaient
convaincre que la basse-cour. Cependant, on doit lui reconnaître le mérite
davoir su mettre son génie au service du régime et le poste de Premier
ministre aurait été une juste récompense du régime quil sert avec loyauté
depuis des années, multipliant des stratégies pour lui permettre de conserver
le pouvoir même jusquà ce que Le Seigneur Jésus-Christ revienne. En 2011, il
était lun des architectes de la révision constitutionnelle ayant supprimé le
second tour de lélection présidentielle. Lors des élections, pour assurer la
majorité à son parti, le PPRD, avec le concours du Prof Lumanu, le Ministre
PPRD de lIntérieur, il avait eu lintelligence de créer une constellation
denviron 300 partis politiques qui avaient présenté des candidats avant de
disparaître. Son livre « Entre la révision de la constitution et linanition de
la nation » navait comme objectif que de contribuer à la pérennisation du
pouvoir par son parti. Devenu ministre de lintérieur, il a joué un grand rôle
dans la mise en place de lONIP œuvrant sous la tutelle de son ministère et
dirigé par le Prof Lumanu. Linclusion du recensement comme préalable aux
élections dans le projet de loi électorale présenté à lAssemblée nationale au
mois de janvier dernier était également lœuvre de son génie. Le connaissant
bien depuis des années, jai toujours bien compris le Prof même lorsquil parle
à demi-mots ou lorsquil se tait tout simplement. Sa réponse à la question de
lHonorable Lutundula était claire et limpide et cest la réponse de la MP et
de son gouvernement qui reste dans la logique de la conservation du pouvoir et
du report des élections présidentielles en mettant précipitamment en place de nouvelles
provinces et en exigeant lorganisation des élections municipales et locales
tout en sachant bien que les finances nationales ne permettront pas
lorganisation de lélection présidentielle. LAbbé Malu Malu avait déjà dit
quil sadresserait à la Cour constitutionnelle si la CENI était incapable
dorganiser les élections dans les délais. Et si, en se fondant sur
linsuffisance de moyens financiers que le gouvernement ne lui donnera pas, la
CENI utilisait cet argument comme un cas de « force majeure » devant la Cour
constitutionnelle, celle-ci naurait aucun pouvoir pour la contraindre
dorganiser lélection présidentielle. Les membres de la Cour nauraient même
aucun intérêt à le faire eux qui ont une lourde dette morale à payer à la MP.
Toutefois, les choses ne sont pas si simples.
Il faudra éviter que le peuple souverain qui sest déjà
exprimé en janvier et qui reste en éveil ne se remette en action. Nul nest
plus grand que le peuple et nous ne devrions pas nous entêter en faisant
prévaloir nos intérêts partisans et égoïstes sur ceux de notre peuple. Il ny
aurait aucun problème si le gouvernement pouvait organiser toutes les
élections, des locales à la présidentielle en 2016. Cependant, comme il ne le
peut pas faute de moyens, préparons uniquement des élections parlementaires et
présidentielles crédibles en 2016 et les autres peuvent être organisées après.
C-News: Quavez-vous
à dire sur les attaques xénophobes en Afrique du Sud ?
AMB : Une honte pour lAfrique du Sud, pour lANC et pour le
gouvernement du Président Jacob Zuma qui avait allumé le feu en adoptant des
lois sévères sur limmigration et lattribution des visas après avoir bénéficié
du soutien dautres peuples africains dans la lutte contre l Apartheid.
Mandela devait se retourner dans sa tombe et les Sud-africains devraient avoir
honte et se sentir ridicules partout où ils se trouvent. Ils nattaquent pas
les Blancs qui les ont chosifiés durant lapartheid, mais leurs propres frères
et sœurs africains qui les avaient aidés à combattre ce système odieux. Le fils
de Zuma fait partie des instigateurs de ces attaques. Un gouvernement congolais
responsable aurait réagi comme la fait le Nigeria en envoyant un message clair
au gouvernement sud-africain. Président ou Premier Ministre congolais, je
naurais pas hésité dinterdire les vols SAA pendant tout le temps que les
sud-africains continueraient avec leurs attaques contre dautres africains.
Jaurais rappelé en consultation notre Ambassadeur à Pretoria tout en
convoquant celui dAfrique du Sud à Kinshasa et les sociétés sud-africaines
comme VODACOM recevraient un message de mon gouvernement à lintention du
peuple sud-africain.
C-News: Prof, quel
est finalement votre avenir politique, un universitaire ou un politicien ?
AMB : Un universitaire et un homme politique ou un homme
dEtat plutôt quun politicien dans le sens péjoratif que ce mot revêt au
Congo. Je reste un universitaire résolument engagé à la cause de son peuple,
partageant non seulement ses souffrances, ses peines et ses inquiétudes, mais
aussi ses espoirs et ses rêves pour le changement et le mieux-être. Chaque
chose a son temps. Je suis content dans ma peau de professeur des universités.
Je continue à enseigner les valeurs et les principes de lEtat de droit
démocratique aux hommes et femmes au pouvoir ou dans lopposition, aux
gouvernants comme aux gouvernés. Je verrai le moment venu quel autre rôle je
pourrais jouer pour continuer à servir notre peuple. En attendant, je ne peux
me réjouir avec lui de la victoire historique que nous avons remportée contre
les démons de la dictature, de lautoritarisme et de la monarchisation du
pouvoir en barrant la route aux partisans de la révision ou du changement de la
constitution. Cependant, a luta continua. Notre lutte pacifique pour
lavènement et la consolidation dun Etat de droit démocratique tel que
recherché par notre peuple doit se poursuivre car notre victoire nest pas
encore complète. Nous navons fait quun bout du chemin.
MTN