Elections et crimes contre l’humanité. La guerre perpétuelle a encore de beaux jours au Congo-Kinshasa Par Mbelu Babanya Kabudi, analyste géopolitique.

En essayant d’apporter leur contribution
au dossier des ‘’indigents’’ enterrés dans une fosse commune à Maluku au mois
de mars 2015, certains membres de ‘’la majorité présidentielle essoufflée’’ ont
soutenu qu’il y avait d’autres fosses communes ailleurs dans la
ville /province de Kinshasa. Pour eux, enterrer  les
Congolais(es)   exclu(e)s  de toute justice sociale  et
chassé(e)s de leurs terres n’est pas un problème. Ces enterrements ne semblent
remettre pas en question leur ‘’pratique politique’’.

Face à cette ‘’inconscience politique’’,
certains membres de ‘’l’opposition politique’’ parlent de crimes contre
l’humanité. Ils souhaitent que cela puisse être établi, prouvé. Quel est ce
tribunal congolais qui pourra établir, après enquête, qu’il y a eu
réellement  commission des crimes contre l’humanité ?

Rappelons qu’après la publication du
rapport mapping de l’ONU en 2010, il avait été prévu la création des chambres
mixtes  pour juger les  crimes commis au Congo-Kinshasa depuis 2001.
Cela n’a jamais eu lieu jusqu’à ce jour.

En 2006 et en 2011, plusieurs compatriotes
ont accepté d’aller aux élections-pièges-à-cons avec certains des
criminels  issus des partis politiques fabriqués pour le besoin de la
cause par le Rwanda, l’Ouganda et leurs parrains.

A l’approche des élections de 2015 et
2016,  des crimes sont commis.  Et il se pourrait que certains ‘’responsables
 politiques’’ impliqués dans ces crimes, de près ou de loin, risquent de
se présenter à ces élections.  Une certaine opposition leur garantit de
devenir des ‘’sénateurs à vie’’ ; c’est-à-dire des politiciens couverts
par une immunité parlementaire et ne pouvant pas répondre de leurs forfaits,
‘’à vie’’.

Nous semblons voir, à tort ou à raison,
dans ce faux processus électoral fondé sur les crimes et les mensonges, un
arrangement entre deux camps composés d’une petite bourgeoisie compradore ayant
opté pour le statu quo et la prise en otage des populations congolaises dont la
dignité est en permanence  bafouée et l’humanité niée. Il est
incompréhensible que dans certains ‘’milieux politiques congolais’’, les
charniers de la ville/province de Kinshasa ne puissent pas rappeler ceux de
Muenga, Kasika et Mokobola. Que tout se passe comme si les assassinats de
Munzihirwa, Bapuwa Muamba, Floribert Chebeya, Fidèle Bazana, Armand Tungulu,
Mamadou Ndala, etc. ne faisaient pas partie d’une extermination systémique et
bien planifiée par ceux qui ont estimé, à un certain moment de l’histoire
collective de notre peuple, que le Congo-Kinshasa ne devrait pas appartenir à
ses filles et à ses fils.

Tuer les Congolais(es) en s’en prenant aux
meilleurs d’entre eux. Déstabiliser les familles en faisant du viol ‘’une arme
de guerre’’. Affamer les Congolais(es)  et les chasser de leurs terres en
adoptant les programmes d’ajustement structurel de la Banque mondiale et du
Fonds monétaire international. Vendre leurs terres aux multinationales et à
leurs ‘’chiens de garde’’ pour qu’ils deviennent un peuple atomisé et errant à
travers les bidons-villes et leurs autres pays du monde ; tout ceci
participe d’une guerre perpétuelle, d’une guerre d’usure à laquelle un faux
processus électoral ne peut pas mettre fin. Pourquoi ?

D’abord, parce que les commanditaires de
cette guerre ne croient pas dans les élections, la démocratie et les droits de
l’homme. Ils agissent en recourant au principe de la pure force.

Ensuite,  parce que le Congo-Kinshasa, comme
d’autres pays du monde regorgeant de matières premières stratégiques, est en
permanence dans la ligne de mire de ceux qui instrumentalisent le terrorisme
pour contrôler les terres, les mers et les océans afin de s’imposer comme
empire.(Sur cette question, il est important d’apprendre de George Fiedman
[1], directeur de la société de renseignement
et d’analyse du tink thank anglo-saxon, le mode opératoire de l’empire US.)

Enfin, parce que certains des
commanditaires de cette guerre perpétuent le mépris de Cecil Rhodes pour les
peuples noirs. Pour lui comme pour certains responsables politiques
anglo-saxons ayant bénéficié de sa bourse à l’université, les peuples noirs
font ‘’la honte de l’humanité’’ : ils peuvent être exterminés, sans gêne.

De ce qui précède, il ressort que la
guerre  menée contre le Congo-Kinshasa a des dimensions racistes,
économiques, géostratégiques et idéologiques qu’il importe de maîtriser pour y
mettre fin. Les élections-pièges-à-cons organisées par ‘’la nomenklatura’’ contribueront
à la perpétuer davantage. Pourquoi ?

D’abord, parce que  le vide
idéologique dans lequel nage cette ‘’nomenklatura’’ est entretenue par les
agences de sédition made in USA. Elles financent certains partis politiques et
certaines associations de la société civile chargées d’éduquer 
civiquement les Congolais(es) et de former les observateurs à ces élections.
L’histoire nous apprend que là où ces agences (USAID, NED, NDI, Open Society,
etc.) opèrent, le néolibéralo-parlementarisme se consolide et les élus sont
majoritairement ‘’les pro-occidentaux’’ ; c’est-à-dire une bourgeoisie
compradore au service des ‘’usurpateurs’’.

Ensuite, parce que ‘’les nouveaux
prédateurs’’, conscients des crimes commis depuis le début de la guerre de
l’AFDL  et ayant créé ‘’des indigents’’ vont recourir à la fraude, à la
tricherie, à la corruption, etc. pour  rester  aux ‘’commandes’’ du
pays.

Enfin, cette fausse réponse à la guerre
perpétuelle- les élections-pièges-à-cons- pourra conduire à la confrontation
entre les différents camps financés par les agences de sédition susmentionnées.
Les plus forts parmi ‘’les nègres de service’’ l’emporteront  aux dépens
des populations congolaises. (En finançant les uns et les autres, en
entretenant l’esprit partisan, les agences de sédition made in USA préparent
cette confrontation. Elles entretiennent et appliquent certains principes chers
à Brzezinski  et que semblent reconduire George Fiedman :
« Eviter la collusion entre vassaux et les maintenir dans un état de dépendance
que justifie leur sécurité ; cultiver la docilité des sujets
protégés ; empêcher les barbares de former des alliances offensives. 
[2]»

Sans une réorganisation sérieuse des
masses populaires par des ‘’patriotes éveillés’’  pour une lutte
d’émancipation politique, de souveraineté, du droit des Congolais(es) à
s’autodéterminer, de fraternisation, de solidarité et de justice sociale sur le
court, moyen et long terme, les prochaines élections risquent de n’être qu’un
gaspillage de temps et d’énergie. Il y a des ruptures profondes à opérer dans
l’approche de la guerre perpétuelle menée contre le Congo-Kinshasa, dans
l’identification de ses acteurs apparents et acteurs pléniers et dans
l’implication des masses populaires dans cette lutte psychologique, culturelle,
sociale, politique, économique et spirituelle.

 


[1] https://www.youtube.com/watch?v=emCEfEYom4A

[2] N. CHOMSKY, La doctrine des bonnes intentions,
Paris, Fayard, 2006, p. 61.

 

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