23 09 16 DESC – Septembre rouge en RDC : Joseph Kabila dévoile son ADN politique sanguinaire –Par Jean-Jacques Wondo Omanyundu

La polarisation de la tension politique en République démocratique du Congo (RDC) atteint sa vitesse de croisière. Le pays, au bord du précipice[1], fait face à ses démons du passé. La RDC risque une descente aux enfers si rien n’est fait pour empêcher le président Joseph Kabila de se maintenir au pouvoir au terme de son mandat prévu le 19 décembre 2016.
La présente analyse se donne pour but de démontrer comment le président Kabila parvient subtilement à imposer aux congolais sa logique de règlement des conflits politiques par la voie armée. De ce fait, il n’est plus l’homme de la situation en RDC pour avoir failli à plus d’un titre à ses prérogatives constitutionnelles et mérite une sanction unanime nationale et internationale.
Un automne congolais noir prédit par les analystes mais sciemment ignoré par le régime congolais
Les événements apocalyptiques et sanglants des 19 et 20 septembre 2016 à Kinshasa, qualifiés du 11 septembre congolais par certains tabloïds de la capitale congolaise, répondent à toutes les inquiétudes et signaux d’alerte émises par les analystes sur la période consacrant la fin du mandat du président Kabila. Pourtant, nous ne sommes qu’au « début du commencement » d’un cycle politique infernal dont personne ne peut prédire avec exactitude l’issue. C’est l’une des raisons qui nous a poussé à publier une prospective présentant dix scénarii potentiels auxquels la RDC pourrait être confrontée durant cette période très critique de l’évolution politique. Et ce n’est pas pour rien que nous l’avions titré : « La RD Congo à la croisée des chemins : Les scénarios politiques autour du 19 décembre 2016 »[2]. D’autant que c’est effectivement sur les chemins, les rues chahutées de Kinshasa, que les événements politiques en RDC se sont emballés ce 19 septembre 2016.
HRW, International Crisis Group[3], le Département d’Etat américain, les experts des Nations-Unies, DESC[4] et bien d’autres think tank et institutions de renom, tous avaient émis avec crainte la très forte probabilité de voir les élections prévues en novembre 2016 être repoussées et les signaux très clairs que le président Joseph Kabila souhaite se maintenir au pouvoir faisant craindre de violents incidents dans les centres urbains. En effet, l’obstination évidente du régime de Kabila de ne pas organiser les élections dans les délais constitutionnels présente désormais un risque très élevé de conduire la RDC contre le mur et de la ramener à la situation qui prévalait à la fin du régime de Mobutu et des années 1990.
Là où tous émettaient ces menaces, seul le régime congolais avait malheureusement une autre lecture. Le président Kabila excelle en gouvernance belliciste et répressive, devenue une ressource politique pour imposer son impérium à la place d’une cohésion nationale pacifique. Rappelez-vous des propos du ministre des Communications, Lambert Mende, en janvier 2015 après la révolte populaire contre le projet de loi électorale. Il déclarait urbi et orbi que « le ciel ne tombera pas sur la tête si le mandat de Kabila est prolongé »[5]. Un message on ne peut plus clair qui laissait déjà transparaître à l’époque l’état d’esprit du régime de ne concéder aucune parcelle du pouvoir, surtout pas présidentiel, à la fin de la mandature des autorités actuelles. Pourtant, les manifestations anti-Kabila du 19 au 21 janvier 2015 contre un projet de loi controversé, qui voulait consacrer le glissement électoral par l’organisation d’un recensement de la population, ont occasionné au moins 40 morts, selon HRW[6].  
Pourquoi cette option brutale et armée ?
La réponse est à trouver dans la nature et la stratégie de Kabila qui a souvent déclaré recourir aux trois options politique, diplomatique et militaire pour faire face aux crises. Les premières options étant en train d’atteindre leurs limites, Kabila ne dispose plus de suffisamment de marge de manœuvre pour se maintenir au pouvoir. La violence ou la guerre deviennent ses ressources d’ultima ratio, c’est-à-dire ses derniers atouts politiques. D’autant que son dialogue, dont l’épilogue est écrit d’avance, n’attire plus finalement du beau monde pour lui assurer une légitimité politique, s’achemine sur les traces des concertations de 2013[7]. A ce propos, l’analyste Lomandja conclut dans une analyse qui décrypte les pièges du pouvoir à travers son dialogue : « le dialogue en cours ressemble beaucoup à un espace de légitimation d’un scénario écrit à l’avance. C’est pourquoi il ne faut pas en attendre grand-chose »[8]. Ainsi, face à l’impasse politique et isolé diplomatiquement[9], Kabila, qui ne se faisait d’ailleurs pas d’illusion, est déterminé à entraîner la RDC à la violence indicible mais planifiée, dans l’espoir d’en être le seul bénéficiaire politique. N’a-t-il pas, à plus d’une fois, fait référence au sang, devenu son empreinte politique, pour dissuader les contestataires à son projet du glissement ?
C’est ce que nous avons notamment rapporté dans l’analyse : « RDC : Joseph Kabila a-t-il perdu les pédales ? »[10] et d’autres analyses de DESC. Nous n’avons cessé de démontrer l’acquisition anormale d’un impressionnant lot de matériels militaires létaux et en formant notamment des unités spéciales de la Garde républicaine (Les fourmis et les abeilles de 2016)[11], injectés dans la police pour mater toute velléité de contestation du pouvoir, « même si la RDC doit être transformée en un grand cimetière », chantaient ces escadrons de la mort lors de leurs exercices de footing. 
Au cours des événements du 19 septembre 2016, nous avons pu nous entretenir par téléphone avec un haut gradé de la police congolaise. Il nous a avoué sans sourciller que « ceux qui massacrent gratuitement la population dans les rues de Kinshasa ne sont pas de policiers. Ce sont des tueurs de la GR. Quel gâchis pour la République ! ». Ces fourmis et abeilles de 2016 proviennent majoritairement du 15ème régiment commando de la GR, à majorité katangaise.
Ce même état d’esprit belliciste revient constamment dans les propos présidentiels ces derniers temps. C’est le cas de son dernier discours sur l’état de la nation du 14 décembre 2015 considéré par un de ses collaborateurs militaires de « discours de combat contre la population et de défiance envers la communauté internationale et l’opposition congolaise »[12]. « Le patron, conseillé par des faucons comme Kalev Mutond, Jean-Claude Yav et Ilunga Kampete, est enfermé dans une logique guerrière de l’affrontement et du chaos », nous disait-il.
Il y a lieu de rappeler que le président Kabila avait présidé une importante réunion de sécurité le 13 décembre 2015, à la veille de son discours sur l’état de la nation, dans sa résidence de l’immeuble GLM, situé non loin de la clinique Ngaliema. La rencontre avait réuni tous les principaux responsables militaires et policiers et civils de la sécurité de la RDC. Durant cette réunion, Joseph Kabila a assuré ses collaborateurs qu’il ne cèdera jamais le pouvoir à l’opposition politique. Faisant indirectement allusion à la rencontre de Gorée, Kabila a rappelé que « la RDC est un sous-continent qui n’a rien à avoir avec le Burkina Faso ou le Sénégal qui sont de micro-Etats et des sous-préfectures de la France ». Pour Kabila, nous précise encore notre source, « les opposants se trompent royalement comme ils se sont trompés en 2011 en comparant de façon grotesque la situation de crise postélectorale (post-électoral) en Côte d’Ivoire à celle de la RDC. Aujourd’hui les mêmes opposants comparent la RDC au Burkina Faso. » Et Kabila de déclarer : « Je n’ai peur ni du sang, ni de la sueur, ni des larmes et j’assumerai jusqu’au bout toutes mes responsabilités de tout ce qui va se passer dans les mois à venir ». Cette déclaration illustre à merveille la personnalité sociopathe de kamikaze politique de type djihadiste qu’est le président Kabila[13].
Ces faits confortent davantage cet ultime témoignage d’une autre source présidentielle qui déclarait qu’en cas d’un départ forcé, Kabila se prépare à instaurer le chaos en RDC : « Je t’avais dit que le boss et sa clique sont prêts à déclencher une guerre civile comme au Burundi et en Syrie pour conserver coûte que coûte le pouvoir. Et il faut tenir compte de cet état d’esprit du régime Kabila qui n’a jamais cru en une alternance démocratique«  [14].
Actes de provocation délibérée pour instaurer un désordre planifié et justifier la répression
Dans notre tour d’horizon du 20 septembre 2016 auprès de différents informateurs de DESC, cette stratégie du désordre planifié revient régulièrement des rapports reçus. Selon une source de la GR : « les combattants du Rassemblement se sont fait infiltrés par les anciens démobilisés manipulés par les services de sécurité de Kabila pour provoquer un énorme chaos. Le but est de discréditer à jamais l’opposition qui est présentée comme un conglomérat de perturbateurs violents, assoiffés du sang et mus par l’instinct de destruction aux fins de permettre aux forces spéciales de police de réprimer violemment les manifestants dans une stratégie de « moi ou le chaos », le dialogue ou la guerre civile. Ce qui laisse une faible marge de manœuvre à la communauté internationale qui prendra conscience du danger de toute déstabilisation de la RDC. Je confirme aussi que ce sont bien les forces spéciales de la GR, camouflées en policiers, qui ont commis cette répression disproportionnée ». « Ces représailles nocturnes qui ne sont pas prêtes à s’arrêter, ne sont que le début du chaos planifié, organisé ou la guerre civile que Kabila et ses proches préparent depuis 2014 pour s’accrocher au pouvoir. C’est une question de survie pour le raïs », nous affirme une autre source proche de la maison militaire présidentielle.
Pourtant, dans une analyse antérieure, nous avons évoqué cette stratégie de l’infiltration des manifestants par des ex-combattants démobilisés. Nous avions même invité les partis d’opposition à bien organiser leurs services d’ordre pour éviter ces infiltrations[15]. L’objectif ultime de ce chaos est d’instaurer un état d’urgence et nous l’avions déjà dénoncé dans nos analyses antérieures.
Un centre de commandement des opérations de type C2 où les opérations sur le terrain sont coordonnées
Dans le jargon militaire stratégique, un C2 est un centre de commandement et de contrôle (Command an Control) qui permet, sur le plan opératif, d’offrir des possibilités d’intervention rapide en facilitant la coordination des opérations tant militaire que policières et civiles. Dans la vision anglo-saxonne et dans l’OTAN, le « Command and Control » est « un concept défini comme l’exercice de l’autorité et de l’impulsion donnée par un chef désigné pour accomplir une mission avec des forces désignées. Le chef accomplit les fonctions de « Command and Control » à travers un système dit de commandement. «Il combine l’art de commander et la science du contrôle pour accomplir la mission assignée ».
Pour la RDC, ce centre est situé au Commissariat général de la PNC, (dans les locaux de l’ex-CIRCO sous Mobutu), il s’agit d’un centre qui devra coordonner les actions de la police, des services des renseignements militaires (DEMIAP) et civils (ANR) et des unités de l’armée. Le dispositif mis en place le 19 septembre 2016 a été supervisé par les généraux Charles Bisegimana, le Commissaire général de la PNC, Gabriel Amisi Kumba dit Tango Four, le Commandant de la 1ère Zone de défense[16], et Ilunga Kampete, le commandant de la GR. Ils devraient être désignés comme étant les premiers responsables hiérarchiques et fonctionnelles du carnage du 19 septembre. Ces autorités sont en bonne place pour se voir appliquer la jurisprudence Bemba sur le principe de « responsabilité de commandement ». Selon cette jurisprudence tirée du droit international humanitaire (DIH), les supérieurs ont une plus grande responsabilité que leurs subordonnés. En vertu de leur position dans la hiérarchie et du commandement qu’ils exercent sur lesdits subordonnés, les supérieurs ont l’obligation positive de garantir le respect des droits humains et de faire en sorte d’empêcher la commission des infractions de graves violations des droits humains commis par leurs subordonnés[17].
Les officiers qui ont conduit les opérations sur le terrain sont : le général Célestin Kanyama, « Esprit de mort » (Commissaire provincial de la PNC à la ville de Kinshasa), son adjoint le colonel Elvis Ngimbi (Il était spécifiquement stationné à Tshangu à l’est de Kinshasa) ; le colonel Viator Ilunga Banza (commandant des unités GR dans le secteur opérationnel de Kinshasa ouest (mais sa fonction actuelle au sein de la GR est celle de commandant adjoint du 14ème régiment de sécurité) ; le colonel Herickson Nyengele Bakati (commandant des unités GR secteur opérationnel Kinshasa-Est ; sa fonction actuelle est celle de commandant  du 15ème régiment commando de la GR). Le Coordinateur des unités spéciales GR intégrées dans la police anti-émeute (Fourmis et Abeilles de 2016) est le colonel Ilunga luyoyo, commandant de la LENI (Légion nationale d’intervention, ex-PIR), une unité de police formée dans le cadre du programme européenne EUPOL-RDC). C’est un mulubakat de Malemba-Nkulu, très proche du général John Numbi. Enfin, le colonel Nzomono, commandant adjoint chargé des opérations et renseignements de la LENI, a opéré au niveau du Palais du Peuple et « nettoyé le boulevard triomphal de tous les manifestants ».
Par ailleurs, le 21 septembre 2016 dans la matinée, le général Gabriel Amisi Tango Four a présidé, sans prévenir, la parade des militaires au  camp Luano, qui abrite notamment l’Ecole logistique des FARDC dans la commune de Ngaliema. Selon une source militaire, le général Amisi sermonné les troupes rassemblées pour le salut au drapeau en ces termes menaçants : « Vous, militaires du camp Luano, le président de la République m’a appelé au téléphone et m’a dit que vos femmes et vos enfants sont allés marcher contre lui ce 19 septembre 2016 avec les civils ». La question que toutes les épouses militaires du camp Luano se posent, nous dit notre source, est celle de savoir si elles n’ont pas ce droit. Puis d’ajouter : « Il y a maintenant pression sur ces femmes par le commandant du camp qui veut les expulser ».
Enfin, les sources présidentielles informent que le président Kabila a regagné Kinshasa ce 22 septembre à 6 heures locales. Il  tient depuis ce matin une réunion du Conseil supérieur de la défense élargi au commandement de la police ainsi qu’aux cadres des services des renseignements. La réunion se tient au Palais de la nation.
Joseph Kabila a atteint les limites de son action politique en RDC
Que peut faire encore Joseph Kabila à la tête du pays ? Quelle valeur ajoutée politique et socioéconomique pourra-t-il encore apporter à la RDC ? Rien !
Il paraît de plus en plus en plus évident que les événements en cours et à venir en RDC montrent les limites de l’action politique de Joseph Kabila au sommet de la RDC. Il ne pourra plus rien proposer d’innovant pour amener ce pays, potentiellement riche, à la paix, à la consolidation de la démocratie, de la cohésion sociale et nationale, et au bien-être des populations. Son bilan au terme de ses 15 ans d’exercice du pouvoir est largement négatif. Son mandat actuel finissant est un mandat de trop[18] qui devrait l’inviter à en tirer les conséquences. Point n’est besoin de démontrer que :
– Kabila s’est montré incapable de sécuriser la RDC en créant une armée républicaine et dissuasive. Les massacres à répétition à Beni, les 70 groupes armés et les frontières perméables à l’est du pays en témoignent.
– Kabila échoue à créer la cohésion nationale autour de sa fonction présidentielle et à consolider les institutions démocratiques
– Kabila n’a pas été au rendez-vous du social et poursuit l’œuvre kleptocratique de Mobutu. Sa gouvernance néo-patrimonialiste[19] est aujourd’hui le facteur principal de la rupture du consensus démocratique et social avec les Congolais[20].
Qui est responsable de cette impasse ?
C’est très effarant de lire çà et là que les responsabilités des violences du 19 septembre restent partagées entre les acteurs politiques, alors qu’aucune enquête indépendante n’a été diligentée pour les déterminer. C’est effectivement le piège vers lequel le régime voulait induire l’opinion publique[21].
Au vu des éléments susmentionnés de planification du chaos monté par le régime congolais et des articles alertant cette mise en scène macabre, il ne fait l’ombre d’aucun doute que le Gouvernement congolais reste le premier responsable de cette situation. Il mérite d’être sévèrement sanctionné par la population congolaise et l’ensemble de la communauté internationale. Cette dernière a également une responsabilité morale à assumer d’autant qu’elle n’a pas suffisamment déployé tous les moyens préventifs à sa disposition pour faire éviter aux Congolais cette effusion de sang inutile.
Pour DESC, la question de responsabilité reste intimement liée au principe du strict respect de la Constitution. Elle se résume en ces termes clairs émis par l’analyste Alain-Joseph Lomandja : « Au-delà de tout, une question s’impose: comment/pourquoi en est-on arrivé là? De la réponse à cette question dépendent les vraies solutions au problème: la violence physique apparente est presque toujours la conséquence des violences structurelles devenues insupportables. »
La communauté internationale placée face à sa « responsabilité de protéger » les Congolais
La crise congolaise, prévisible et évitable, met à nu le rôle ambigu de la communauté internationale. Cette dernière agit en géométrie variable et émet des signes contradictoires à l’égard de Kabila à cause du traitement différencié des situations au Burundi, au Rwanda, au Congo-Brazzaville, pour ne pas citer le Gabon. Ce notamment dans les domaines sécuritaire, politique, des droits humains ou dans le cadre du processus électoral.
En effet, sur le plan sécuritaire, la communauté internationale se montre hésitante et suppliante face aux caprices des autorités congolaises. Le Gouvernement de la RDC a suspendu puis repris timidement, sous conditions qui lui sont plus favorable, la coopération militaire avec la MONUSCO dans les opérations militaires à l’Est qui s’enlisent jour après jour. Certes, elle a adopté des résolutions à l’unanimité, question de se donner une bonne conscience, mais son engagement sur le terrain militaire reste très timide, à Beni notamment. On note très peu de réactions de sa part face à la sur-militarisation de grandes villes de la RDC, aux violentes répressions des populations civiles par les hommes en armes ou dans les achats d’armes non contrôlés selon les dispositions des Nations unies.
Sur le plans politique et des droits humains, cette communauté internationale peine à s’aligner sur une ligne diplomatique commune face à la crise congolaise. On constate une opposition d’approches entre les Etats-Unis et l’Union Européenne sur la posture à adopter. Même au sein de l’Union Européenne, sa diplomatie se montre incapable de dégager une posture commune entre ses différents Etats membres qui poursuivent des objectifs géopolitiques et des enjeux géo-économiques différents, parfois divergents. Cela s’illustre notamment par la mollesse dans ses protestations face aux expulsions des responsables du BCNUDH et de HRW, des contradictions évidentes sur les sanctions à prendre face aux violations massives des droits humains et aux entraves délibérées du processus électoral. On peut aussi indexer l’acceptation plus ou moins tacite d’un dialogue non consensuel et non inclusif dont on connaît les manipulations de la partie au pouvoir qui a tout verrouillé pour amener le pays vers le fait accompli du glissement. Cette mollesse est criante lorsque l’on lit les réactions timorées et mitigées face aux massacres des 19 et 20 septembre.
Enfin, sur l’axe électoral, on constate un intérêt relatif du suivi du processus, mais non appuyé par d’actes concrets de nature à ôter les prétextes du Gouvernement pour justifier le glissement planifié. Conditionner le financement à la publication d’un calendrier électoral, alors qu’on sait que le Gouvernement bloque cette publication pour gagner du temps, a été la pire stratégie de la communauté internationale. A cela, il faut ajouter l’adoubement d’un facilitateur visiblement partial et incompétent, prompt à adhérer à des conclusions d’un dialogue non inclusif et non objectif.
La communauté internationale qui s’est tant investie pour sortir la RDC d’un conflit meurtrier entre 1996 et 2003 vers un ordre politique constitutionnel en 2006, ne peut pas aujourd’hui se permettre d’imposer aux Congolais une solution politique qui enfreindrait la Constitution. Personne, ni Joseph Kabila, ni son dialogue, ni la communauté internationale, les Nations Unies en tête, ne peut déroger à la Constitution congolaise. La communauté internationale active en RDC, à la tête de laquelle les Etats-Unis, la Grande Bretagne, la France et la Belgique, ne cessent de nous donner les leçons de démocratie et de ses vertus n’a aucune raison de cautionner la violation de la Constitution. C’est la lecture qu’elle doit faire et retenir de l’expression populaire de ce 19 septembre 2016 en RDC. Une lecture qui démontre la fermeté du peuple congolais au strict respect de la Constitution. 
La communauté internationale doit pouvoir être en mesure de se poser la question suivante : « Que veut le peuple congolais et quel message veut-il transmettre au travers de la manifestation du 19 décembre ? ». La réponse à cette question devrait déterminer sa posture face à cette crise qui se profile et dont tout le monde risque d’être perdant. A commencer par la communauté internationale qui verra tous ses efforts de stabilisation du pays consentis depuis 1999 s’effondrer comme un château de cartes du fait des caprices d’un président autiste et sociopathe[22] à la fois. 
A cet effet, la communauté internationale doit intensifier la pression sur la personne de Joseph Kabila pour qu’il quitte le pouvoir dans les délais constitutionnels. Elle doit comprendre que le respect de la Constitution est non négociable, ne peut se transiger et ne fera l’objet d’aucune concession populaire ! C’est cela le message qu’elle doit décrypter pour l’amener à appliquer le principe de « responsabilité de protéger ». Un principe à laquelle le Conseil de sécurité des Nations Unis a  officiellement fait référence, en avril 2006, dans la résolution 1674 sur la protection des civils en période de conflit à caractère armé. Il veut qu’un État ne peut plus invoquer sa souveraineté pour refuser toute ingérence extérieure à l’intérieur de son territoire national et qu’il est de la responsabilité de la communauté internationale de protéger une population contre des catastrophes ou des violences lorsque l’État dont elle relève n’est pas disposé à le faire ou en est incapable.
Plutôt que de plonger un pays dans un chaos et une instabilité indescriptible, comme Lambert Mende, la communauté internationale doit aussi se dire que « le ciel ne lui tombera pas sur la tête si elle contraint Kabila, qui devient plus le problème que la solution du Congo, à quitter le pouvoir par tous les moyens à l’échéance de son mandat en cours ». D’autant qu’à partir du 19 septembre, du fait de la non convocation du corps électorale pour l’élection présidentielle, le peuple congolais se trouve dans son droit de faire appliquer, par tous les moyens, l’article 64 de la Constitution. Et personne ne peut le lui interdire.
Conclusion
Les événements des 19 et 20 septembre montrent la détermination des Congolais à vouloir à tout prix l’alternance politique le 20 décembre 2016. Par ailleurs, même si Kabila ne s’est jamais prononcé sur son avenir, les dernières 48h heures montrent qu’il compte bien s’accrocher au pouvoir, mais surtout par la force, faute d’adhésion populaire.
Ayant jeté ses derniers atouts dans la bataille, Kabila espère gouverner par défi et met au grand jour son ADN politique belliqueux en s’illustrant en ennemi du Congo. Ce kamikaze politique du type djihadiste doit comprendre qu’aucune arme puissante au monde ne peut tuer la volonté du changement d’un peuple. Par ailleurs, l’histoire nous a toujours démontré que : « Quelle que soit la force d’un homme, big man, le peuple aura toujours son dernier mot ». Pour un Facebooker : « Je suis en train de dire aux autorités congolaises qu’un peuple en colère est plus dangereux qu’une bombe atomique« 
Enfin Joseph Kabila doit comprendre une fois pour toutes que ce Peuple Congolais aujourd’hui debout, ayant relevé son front longtemps courbé, ne lui accordera pas une seconde de plus au-delà du 19 décembre 2016. Qu’il pleuve, qu’il vante ou qu’il neige sous les bombardements de sa Garde républicaine, le peuple résilient congolais sera sur son chemin pour lui barrer la route du glissement. Ayebela !
1] Tel titrait un Rapport de Human Rights Watch (HRW) paru le 19 septembre 2016. Ce rapport met en lumière la manière dont le gouvernement congolais a mené une répression systématique à l’encontre d’activistes ainsi que de dirigeants et membres de partis d’opposition qui se sont opposés à la prolongation de la présidence de Joseph Kabila au-delà de la limite constitutionnelle de deux mandats, qui prend fin le 19 décembre 2016. Voici le lien pour lire le rapport : https://www.hrw.org/fr/news/2016/09/18/la-republique-democratique-du-congo-au-bord-du-precipice-mettre-fin-la-repression-et. 
[2] http://desc-wondo.org/fr/la-rd-congo-a-la-croisée-des-chemins-les-scenarios-politiques-autour-du-19-decembre-2016-jj-wondo/#sthash.vvVRbtKu.dpuf. 
[3] https://www.crisisgroup.org/fr/africa/central-africa/democratic-republic-congo/katanga-tensions-drcs-mineral-heartland. 
[4] Cf : http://desc-wondo.org/fr/rdc-kabila-est-plus-quengage-dans-une-logique-guerriere-contre-les-congolais-jj-wondo/. http://desc-wondo.org/fr/rdc-joseph-kabila-a-t-il-perdu-les-pedales-jean-jacques-wondo/. http://desc-wondo.org/fr/rd-congo-2016-cette-election-vaut-elle-la-peine-boniface-musavuli/. https://desc-wondo.org/fr/rd-congo-2016-cest-la-guerre-qui-nous-attend-boniface-musavuli/. 
[5] https://www.youtube.com/watch?v=xvZ3j0U6FmE. 
[6] https://www.hrw.org/fr/news/2015/01/24/rd-congo-des manifestations ont fait-l'objet-dune-répression-sanglante. 
[7] Moins de 5% des résolutions issues des concertations ont été mises en exécution, malgré les promesses fallacieuses d’en faire sienne. 
[8] See more at: http://desc-wondo.org/fr/rdc-comment-le-dialogue-national-a-t-il-écarté-la-constitution-de-la-discussion-des-questions-relatives-au-processus-electoral-aj-omandja/#sthash.mSMRkyNo.dpuf. 
[9] Cf : http://desc-wondo.org/fr/joseph-kabila-un-president-resolument-seul-jj-wondo/. 
[10] http://desc-wondo.org/fr/rdc-joseph-kabila-a-t-il-perdu-les-pédales-jean-jacques-wondo/. 
[11] Kabila a formé au profit de la GR 5.000 éléments appelés « fourmis et abeilles de 2016» et a recyclé 3000 anciens militaires pour en faire des éléments de sa garde prétorienne. Pendant les exercices de footing (jogging), ces recrues chantaient et dansaient à la gloire du « raïs », les armes à la main, qu’elles verseront leur sang pour Kabila (le Boss) (pas pour la patrie), « même si la RDC doit être transformée en un grand cimetière » Pour plus de détails, lire : http://desc-wondo.org/fr/rdc-kabila-est-il-credible-dans-sa-proposition-de-dialogue-national-jean-jacques-omanyundu/.#sthash.H3mZ8DUn.dpuf. [12] http://desc-wondo.org/fr/rdc-joseph-kabila-a-t-il-perdu-les-pedales-jean-jacques-wondo/#sthash.H3mZ8DUn.dpuf. 
[13] Cf: http://desc-wondo.org/fr/rdc-kabila-est-plus-quengage-dans-une-logique-guerriere-contre-les-congolais-jj-wondo/#sthash.juKy6ERc.dpuf. 
[14] Cf: http://desc-wondo.org/fr/rdc-kabila-est-plus-quengage-dans-une-logique-guerriere-contre-les-congolais-jj-wondo/#sthash.juKy6ERc.dpuf. 
[15] Cf: http://desc-wondo.org/fr/les-manifestations-du-26-mai-2016-comment-le-regime-de-kabila-se-prepare-a-contrer-lopposition-jj-wondo/. 
[16] Cette zone réputée hostile au régime de Kabila comprend les anciennes provinces de l’Equateur, du Bandundu, du Bas-Congo et la ville de Kinshasa. 
[17] Cf: http://desc-wondo.org/fr/le-proces-bemba-aux-confins-de-la-justice-et-de-la-politique/#sthash.bxWTfwwa.dpuf. 
[18] Cf: http://desc-wondo.org/fr/les-sept-peches-capitaux-de-joseph-kabila-suite-et-fin-jj-wondo-o/#sthash.vX69R95K.dpuf.
[19] Selon Nic Cheeseman: “Neo-patrimonialism is not simply a synonym for corruption. Rather, it refers to the collision between pre-existing “patrimonial” forms of political organization and the “modern” colonial state. Patrimonialism refers to political systems in which leaders derived their authority from their position at the apex of family or an ethnic community. In such “traditional” forms of government, those in power were able to treat resources as their personal largesse, and were only constrained by local norms and expectations in the absence of effective formal institutions. When such forms of political organization were fused with modern state structures, both were radically transformed, which in turn made it necessary to develop a new theoretical framework: neopatrimonialism. The upshot of this symbiotic reshaping of the old and the new was a set of political systems that had the outward appearance of modern states – legislature, judiciary, and extensive bureaucracy – but the internal dynamics of personal rule. Consequently, the story of the postcolonial Africa quickly became one of strong presidents and weak institutions – significantly reducing the costs of repression”. Nic Cheeseman, Democracy in Africa. Success, Failures, and the Struggle for Political Refore, Cambridge University Press, 2015, pp.13-16.
[20] Cf: http://desc-wondo.org/fr/joseph-kabila-ses-sept-peches-capitaux-partie-i-jean-jacques-wondo/#sthash.EUftYcKX.dpuf. 
[21] Cf: http://www.france24.com/fr/20160920-rd-congo-rdc-opposition-pouvoir-violences-meurtrieres-heurts-kabila-udps-tshisekedi?
[22] En psychopathologie criminelle, branche de criminologie, les principales caractéristiques d’une personnalité sociopathe sont les suivantes :
un mépris de la loi et des mœurs sociales : Plusieurs analyses publiées par DESC démontrent que Kabila et son régime violent fréquemment la Constitution et la législation congolaises, par action et par omission et se sentent même au-dessus de la loi ;
une incapacité à reconnaître le droit des autres: Les fréquentes atteintes aux droits humains, le mépris et l’embastillement des opposants, des activistes des droits de l’homme en sont des illustrations les plus marquantes. ;
une indifférence et une incapacité à ressentir du remords ou de la culpabilité: Les viols massifs des femmes à l’est, les massacres continus de Beni dont il ne fait jamais allusion à ses discours… ;
une tendance au comportement violent comme lors des répressions de janvier 2015 et de septembre 2016.- Cf: http://desc-wondo.org/fr/rdc-joseph-kabila-a-t-il-perdu-les-pedales-jean-jacques-wondo/#sthash.jQsYMmzZ.dpuf.

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