08.02.19 Un courrier sur la saisine de la Cour Africaine des Droits de lHomme par Martin Fayulu
La Saisine et la Soumission des cas devant la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples.
Cas de La plainte de Martin Fayulu et Coalition Lamuka.
Suivant la proclamation des résultats provisoires de l’élection présidentielle du 30 décembre 2018 par la commission électorale nationale indépendante de la RDC, les parties prenantes engagées dans la compétition électorale ont accueilli différemment les résultats électoraux.
Malgré la proclamation définitive des résultats par la cour Constitutionnelle, Lamuka la plate-forme qui soutient le candidat Martin Fayulu estime que son candidat aurait gagné les élections. C’est dans cette logique que Martin Fayulu et sa coalition électorale Lamuka se sont résolus de saisir la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples pour que la vérité des urnes soit rétablie selon eux.
A ce point, la question qui peut se poser est celle de savoir quelles sont les chances pour que la démarche envisagée par le camp Lumuka aboutisse à une réponse positive, soit le rétablissement de la vérité des urnes étant donne que Martin Fayulu se considère comme le gagnant des élections présidentielles du 30 Décembre 2018 en RDC.
Il sied de rappeler ici que la procédure de la saisine et de la recevabilité des cas et communications soumis à la Cour Africaine de Droits de l’Homme et des Peuples soit à la Commission Africaine de Droits de l’Homme et des Peuples est prévue aux articles 55 et 56 de la Charte Africaine de droits de l’homme et des peuples.
En ce qui concerne la saisine, l’article 55 de la Charte Africaine de droits de l’homme et des peuples dispose que: au début de chaque session, la Commission à travers son secrétaire met à la disposition des membres de la Commission la liste des communications outres que celles des Etats Parties à la Charte afin qu’ils en prennent connaissance avant de saisir la Commission. A ce point la Commission pourra être saisie sur la demande de la majorité absolue de ses membres.
En termes de recevabilité, l’article 56 de la Charte Africaine de droits de l’homme et des peuples insiste sur les faits ci-après:
1. l'identité de l’auteur de la requête ou de la communication déposée devant la Commission doit être connue. Par contre la procédure de la saisine de la Commission prévoit les conditions sous lesquelles un plaignant peut souhaiter à ce que sa communication soit enregistrée sous l’anonymat.
2. La communication doit être compatible avec la Chartre de l'Union Africaine ou avec la Charte Africaine de Droits de l’homme et des peuples. Ceci veut dire que la communication doit prendre en compte les dispositions et principes de la Charte Africaine de Droits de l’Homme et des Peuples et/ou de la Charte de l'Union Africaine qui sont supposés être violés.
3. La communication ne doit pas contenir des termes injurieux à l'égard de l'Etat mis en cause, ses institutions ou de l'Union Africaine.
4. La communication ne doit pas être fondée sur des allégations ou informations diffusées par les moyens de communication de masse;
5. La communication ne doit pas être antérieure à l'épuisement des moyens de recours internes sauf si le plaignant remarque que la procédure interne se prolonge d'une façon anormale.
6. La communication doit être introduite dans un délai raisonnable après l'épuisement de l’exercice des recours à l’interne;
7. La communication ne doit pas contenir des cas qui ont été résolus conformément aux principes ou dispositions de la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples, Charte de l'Union Africaine soit de la Charte des Nations Unies.
Cependant, la démarche du rétablissement de la vérité des urnes telle que entreprise par Martin Fayulu et la coalition Lumuka risque de ne pas aboutir au résultat attendu suite aux faits ci-dessous qui peuvent être considères comme obstacles à la recevabilité de la communication ou requête soumise:
1. La Cour Africaine de Droits de l’Homme et des Peuples n’est pas compétente en matière électorale en moins que le plaignant fonde sa requête ou sa communication sur base des violations des droits de l’homme. Ceci veut dire que le plaignant doit prouver à la Cour que son droit d’être élu lors des élections du 30 Décembre 2018 a été violé par l’Etat Congolais (RDC);
2. La RDC qui est mise en cause par M Fayulu n’a jamais ratifiée le Protocole relatif à la Cour Africaine de Droits de l’Homme et des Peuples;
3. La RDC n’a jamais dépose la déclaration autorisant ses citoyens de saisir la Cour Africaine de Droits de l’Homme et des Peuples conformément à l’article 34(6) du Protocole relatif à la Cour Africaine de Droits de l’Homme et des Peuples.
De ce point de vue, La saisine de Lamuka ne pourra pas être recevable sur base des éléments sus-évoqués y compris l'article 102(2) du Règlement intérieur de la Commission qui dispose qu’aucune communication concernant un Etat qui n'est pas partie à la Charte, ne sera reçue par la Commission ni inscrite sur une liste.
Marcel Muyamba Mangu, doctorant en Droits de l’Hommes a l’Université d’Afrique du Sud.
Dieudonné Tumba, activiste de Droits Humains/Chercheur associé au Centre for Governance and Policy Studies.
08.02.19