Nord-Kivu – Le Projet PASA-NK, une volonté politique pour relancer la filière café en RDC (Le Potentiel)

KINSHASA / GOMA – Le Projet d’appui au secteur agricole du Nord-Kivu est une intervention du Gouvernement congolais. Il est cofinancé par le Fonds international pour le développement agricole (FIDA) à la hauteur de 63,8% ; le Fonds pour le développement international (OFID) contribue avec 18,3% ; le Gouvernement congolais avec un 11,2% et la participation des bénéficiaires directs est évaluée à 6,7%.

Lancé le 29 novembre 2018 à Kinshasa, et le 06 décembre 2018 à Goma (Nord-Kivu), son siège opérationnel, l’objectif du PASA-NK est d’appuyer principalement quatre filières agricoles dans la province. Il s’agit du maïs, le riz, la pomme de terre ainsi que le café.

Au cours d’un atelier organisé du 24 au 26 juillet 2019 à Goma, par le PASA-NK, en collaboration avec son partenaire, chef de file, l’Ong belge Rikolto, les délégations venues de plusieurs horizons ont échangé autour de la question liée à la promotion du café Nord-Kivu ainsi que des stratégies de financement durable de la filière. Ce, en créant un cadre de concertation multi-acteurs et parties prenantes sur la stratégie d’accès au financement durable de la filière café, pour répondre effacement à la demande du marché tant sous régionale, nationale qu’internationale.

La vision se profile aussi dans la promotion de la consommation provinciale, nationale et mondiale du café arabica congolais, atout indéniable du développement socio-économique de la RDC.

Contexte

De la production à la consommation du café arabica de la province du Nord-Kivu, il a été constaté des contraintes identifiées par les participants, sous la facilitation du responsable de la composante Secteur privé de PASA-NK, avec Rikolto qui ont la responsabilité de catalyser les changements des systèmes des marchés à différents niveaux des maillons de la chaîne de valeurs dans une approche gagnant-gagnant.

Les échanges au cours de cet atelier ont essentiellement tourné sur la stratégie d’accès au financement et aux crédits agricoles qui passent par la collaboration entre les Institutions des micro-finances, des banques et les différentes organisations des producteurs, les coopératives de caféiculteurs pour le développement intégral du secteur agricole en RDC.

À ce jour, le financement agricole conduit partout au monde à l’autofinancement de l’agriculture familiale et c’est reconnu depuis la crise alimentaire de 2007 et 2008. La problématique majeure commune aux quatre filières de PASA-NK réside, non seulement dans le dysfonctionnement des services économiques le long des chaines de valeurs respectives. Mais aussi, dans l’inefficacité des infrastructures des dessertes agricoles et des opérations post-récolte, notamment, le stockage et le développement des marchés rémunérateurs.

D’où, l’importance de cet atelier qui a permis d’analyser le besoin en financement et l’appréciation de la réponse qui en découle, dans le but d’améliorer les services économiques des Coopératives œuvrant dans la filière café arabica au Nord-Kivu.

Objectif visé

« L’objectif primordial de cet atelier est de mettre ensemble les différents acteurs de la chaine des valeurs café au Nord-Kivu, pour essayer de définir les stratégies d’accès au financement durable. La filière café est d’une grande importance socioéconomique au niveau de la province. Notre idée était de mettre ensemble les banquiers, les institutions des Micro-finances, les coopératives et les producteurs afin d’identifier les défis majeurs au niveau des différents maillons de la chaine des valeurs, pour voir de quelle manière la collaboration entre les producteurs, les agriculteurs et les Institutions bancaires peuvent trouver des solutions appropriées pour que cette filière soit rentable », a expliqué Théo Mbugha Mbayi, chargé du Secteur privée PASA-NK.

Il a fait remarquer qu’il se pose également les problèmes liés à l’accès aux intrants de qualité, aux semences et au renouvellement des plantations au niveau de la production. Théo Mbugha Mbayi ajoute qu’au niveau post-récolte, les participants ont voulu réfléchir, non seulement, sur l’amélioration de la qualité du café, mais aussi, sur les infrastructures de stockage, de transformation et de traitement du café qui restent encore des défis majeurs à relever. « Il faut donc un appui financier conséquent qui implique l’intervention des acteurs qui sont les banques d’abord, et les Institutions des Micro-finances », a-t-il estimé.

Des résultats attendus

A l’issu de cet atelier de haut niveau, les organisateurs s’attendent, notamment, à l’appropriation, par les acteurs privés du secteur financier, d’une logique d’intervention du projet et la souscription à la demande des services financiers qui devra être exprimée par les acteurs et parties prenantes aux chaines de valeur de la filière café ». Le Projet souhaitait aussi le démarrage de processus de contractualisation entre les coopératives et les acteurs du secteur privé pour l’Intermédiation financière et les ventes groupées des produits agricoles.

« Les attentes avant la tenue de l’atelier sont réalisées à 80% mais, le gros reste à faire. Nous allons donc continuer le travail de mise en relation entre les coopératives des agriculteurs et les banques pour mobiliser davantage les fonds dans ce secteur », a reconnu Theo Mbugha Mbayi.

Pour sa part, le Fond international pour le développement agricole (FIDA) qui finance à 63% ce projet, émet le vœu de voir des actions concrètes sur terrain.

« Nous, FIDA, nous allons au-delà du financement disponibilisé pour ce Projet, en faisant le suivi du travail marketing du Café arabica sur le plan national et International. Il est possible que le Café arabica du Nord-Kivu soit consommé partout en RDC et au monde. Nous y travaillons puisque le FIDA a comme mandat spécial le financement de l’agriculture et le développement durable, en appuyant les petits producteurs avec des financements et des circuits de vente des produits agricoles, dans le but d’améliorer la sécurité alimentaire », a indiqué aux participants, Ephraïm Balemba Gubandja, Chargé de programme – Pays de FIDA en RDC

Recommandations

Selon PASA-NK, l’accent est mis sur le café parce que c’est une culture pérenne, durable et permet aux producteurs de stabiliser leurs revenus. « Le café arabica de la RDC est consommable mondialement et c’est à l’Est de la RDC et dans la Région des Grands Lacs que se trouve ce café. Raison pour laquelle nous voulons promouvoir ce café car cela représente des avantages économiques pour les petits producteurs également », a souligné Bruno Kazadi Bukasa, coordonnateur national de PASA. Il précise que c’est une agriculture qui exige des opérations ponctuelles, avant d’insister sur la mise en pratique et le partage des résolutions de cet atelier.

La plus grande des recommandations des participants à cet atelier est que le modèle de financement de la filière café du Nord-Kivu puisse tenir compte de la chaine de valeur. « Aujourd’hui, nous devons aller de la commercialisation à la production car, il existe des invendus et il faut que ceux-ci trouvent d’abord un marché. Ceci va encourager les petits planteurs et la filière café pourrait avoir de l’élan sur le plan national et international », a recommandé le député provincial, Bertrand Kakule.

En outre, les participants ont appelé aussi à la restructuration et à la redynamisation de l’Office national pour la production agricole au Congo (ONAPAC), pour bien accomplir ses diverses missions d’accompagner les cultivateurs du Café

Ouverture aux investisseurs

Le Secrétaire général de l’Agriculture, Évariste Bushabu qui a représenté le Gouvernement congolais à ces assises, s’est réjoui de l’implication de PASA-NK dans l’améliorer du secteur agricole au Nord-Kivu.

« L’agriculture est parmi le secteur générateur des ressources en RDC. Le Gouvernement de la RDC à travers le Ministère de l’Agriculture appuie cette démarche de PASA Nord-Kivu dans la promotion de café et d’autres produits agricoles. C’est une occasion d’ouvrir la porte aux investisseurs qui apprécient surtout le café arabica congolais. L’État sera présent dans toutes les actions qui seront posées quant à ce, pour une réussite totale de ce Projet », a déclaré Évariste Bushabu.

D’après le FIDA, l’implication de l’État serait aussi de veiller à la diminution des importations de cafés venant des pays étrangers, ce qui conduira à la consommation locale et à l’exportation du café de la RDC vers d’autres destinations.

La Vice-gouverneur du Nord-Kivu, Lumoo Kahombo qui avait ouvert les travaux de cet atelier, a salué le travail réalisé par toute l’équipe du PASA-NK. « Nous rassurons à vous tous ici que les ateliers prévus dans le même sens pour d’autres filières dans d’autres villes et territoires de la Province seront sécurisés par le Gouvernement Provincial. Nous allons aussi réhabiliter les structures habilitées pour la transformation de café en Province. Notre programme quinquennal va appuyer en grande partie, le secteur agricole qui va booster l’économie de la Province », a-t-elle rassuré.

Par ailleurs, le projet PASA-NK couvre cinq territoires de la province du Nord-Kivu : Beni, Lubero, Rutshuru, Nyiragongo et Masisi. Il vise à atteindre dans 7 ans, un total de 28.400 ménages des petits producteurs agricoles en province. D’autres ateliers sont prévus également par PASA-NK durant fin juillet et début août 2019, dans la ville de Beni sur la filière Riz ; dans la ville de Butembo sur la filière pomme de terre ; et sur la filière maïs, dans le territoire de Rutshuru.

Défis et Conclusions

Parmi les défis qui sont signalés dans ce secteur agricole, on cite notamment, le problème lié à l’enclavement de certaines zones de production du café en province. Les consommateurs du café arabica du Nord-Kivu ne sont pas très profondément informés sur les vertus de la consommation du café. Au Nord-Kivu, il existe cependant très peu d’usine de transformation de café. Les questions de marketing et les matériels adéquats constituent également les défis.

« L’analyse et le développement des chaines de valeur vont sûrement nous pousser à des améliorations des conditions de vie de la population rurale et contribueront à la sécurité alimentaire et l’amélioration durable des revenus. Nous devons retenir que les éléments importants dans tout ça restent la connaissance d’un sous-secteur qui s’établit peu à peu en son sein, la confiance qui se crée entre certains acteurs et la dynamique qui en découle. La volonté d’attirer les opérateurs privés se traduit ainsi par la mise en place des nouveaux instruments de financement et des réformes pour améliorer le climat des affaires et les politiques y voient une opportunité de palier à la faiblesse des financements publics et de transformer les agriculteurs africains », a conclu, Théo Mbugha Mbayi.

Il sied de noter qu’au cours de cet atelier de Goma, les participants ont eu également l’occasion de visiter une usine de production du café arabica (Sotraki), située dans le quartier Keyshero. Ce, afin de palper du doigt le travail qui se fait dans cette filière café à Goma et dans toute la Province du Nord-Kivu. D’autres rencontres sont prévues dans les jours avenirs pour évaluer la mise en pratique des recommandations issues de cet atelier.

« Cette série d’ateliers démarre donc un processus qui doit amener le PASA NK à se rassurer que les producteurs, à travers leurs coopératives agricoles de café, ont accédé au financement, ont signé des contrats de livraison du café , ont livré réellement du café aux grands acheteurs, et des revenus monétaires sont rentrés directement dans les ménages agricoles des petits producteurs de café en province du Nord Nord Kivu, », a déclaré Daniel Bunambo, responsable de planification, suivi évaluation de PASA – NK

© Le Potentiel, 30.07.19

Images – source: Oxfam-Magasins du Monde, Rikolto

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