L’immense enjeu et problème de l’accès à l’électricité (Radio France Internationale)
KINSHASA / MATADI – Le premier forum sur l’énergie électrique en RDC s’est achevé ce jeudi 22 août à Matadi. A l’ouverture de ce forum le président Tshisekedi a promis de faire de l’électrification de son pays « la priorité économique » de son mandat. Les défis sont colossaux.
« Nous avons une responsabilité historique », a déclaré le chef de l’Etat. Et le chantier est de taille. Car malgré un immense potentiel hydroélectrique, la RDC affiche l’un des taux d’accès à l’électricité les plus faibles de la planète : seul 8% des habitants y ont accès selon les estimations fournies par la présidence, dont 1% en milieu rural, contre 42% en moyenne sur le continent africain, selon les chiffres de la Banque mondiale.
C’est l’un des nombreux paradoxes de la RDC. Le pays dispose d’un potentiel hydroélectrique parmi les 5 plus importants au monde, estimé à 100 mégawatts. Et pourtant, selon la Banque mondiale, si l’électrification se poursuit au rythme de ces 10 dernières années, 80% de la population vivra toujours sans accès au réseau électrique d’ici 2030.
Et pour cause, « la RDC n’a plus connu d’avancée significative dans le développement de sa production électrique depuis 1982 » selon le président Tshisekedi, alors que sa population a quasiment triplé dans le même temps. A cela s’ajoute un réseau de distribution en mauvais état et carrément inexistant dans la majorité du pays.
Pour venir à bout de ce paradoxe, la RDC avait voté en 2014 la libéralisation du secteur, mais elle n’a été que très partiellement mise en œuvre, ce qui a dissuadé les investisseurs. La réforme prévoyait notamment la création d’une agence de régulation et d’une autre pour l’électrification rurale, toujours inexistantes. Tout comme les mesures fiscales incitatives annoncées à l’époque.
Le controversé projet Inga 3
Sans oublier le projet de méga-barrage hydroélectrique Inga 3, qui tarde à voir le jour et reste très controversé. Fin 2018, les autorités avaient annoncé un « accord » pour confier le projet à un consortium hispano-chinois. Mais du côté de la société civile, Emmanuel Musuyu, secrétaire exécutif de la CORAP (coalition des ONG pour le suivi des réformes de l’action publique) craint qu’un projet aussi vaste tarde à bénéficier aux populations, et appelle les autorités à privilégier le développement des énergies renouvelables et la création de micro-barrages plus proches de communautés.
En attendant, plus de 90% de l’énergie consommée dans le pays provient du bois, ce qui menace les forêts congolaises. Sans oublier les conséquences sur l’économie. « Une entreprise sur deux considère l’électricité comme un obstacle majeur à sa croissance » selon la Banque mondiale.
Parmi les recommandations formulées à l’issue de ce forum sur l’électricité figure notamment la mise en œuvre des mesures d’application de la loi sur la libéralisation du secteur de 2014, l’adoption d’une planification de l’électrification province par province, encore inexistante et une réforme de la SNEL, la Société nationale d’électricité.
© Radio France Internationale, 22.08.19
Image – source : Podcast Journal