04 01 20/ REVUE DE LA PRESSE CONGOLAISE DE CE SAMEDI (Dialogue)

Sommaire

En ce samedi 04 janvier 2020, les médias de Kinshasa ont pour vedette incontestable le Cardinal Fridolin Ambongo, pour ses propos énergiques sur la situation à l’Est. Fait remarquable : cette annonce vaut aussi pour la presse internationale. La fin de l’exonération de la TVA sur les mines fait aussi parler d’elle.

Ambongo et l’Est

Ouragan FM annonce « Nord-Kivu: Nous regrettons qu' »après le changement du régime, les massacres des civils à Beni continuent” (Cardinal F.Ambongo)

« Le nouveau cardinal congolais, monseigneur l’archevêque de Kinshasa ,Fridolin Ambongo s’est dit choqué de la continuité des massacres des civils dans la partie nord de la province du Nord-Kivu(Beni,Butembo) à l’est de la République démocratique du Congo, malgré l’arrivée du nouveau régime à la tête du pays.

Cet homme de Dieu l’a dit à la presse ce vendredi 27 décembre 2019 ,en transit dans la ville de Goma, pour Beni dans le Nord-Kivu, le cardinal Fridolin Ambongo s’est dit être choqué des massacres des civils à Beni, ce, après le changement du régime en République démocratique du Congo.

D’après ce prélat catholique, la population congolaise a cru qu’à l’arrivée du nouveau président à la tête du pays, les tueries allaient s’arrêter.

Nous tous avons cru ainsi, malheureusement, nous faisons le même constat que les tueries se sont même amplifiées et là ça nous récolte profondément et cette situation ne peut pas continuer comme ça, il est temps que cela s’arrête, il faut que les responsables soient identifiés et que le peuple puisse enfin vivre en paix ” a déclaré cardinal Fridolin Ambongo.

L’archevêque de Kinshasa, Fridolin Abongo, crois par ailleurs à l’amélioration des conditions de vie de la population congolaise.

Cet homme de Dieu met l’accent particulièrement sur la situation sécuritaire dans l’Est de la République démocratique du Congo.

Nous espérons à une amélioration globale de la situation de notre peuple, particulièrement la question de la sécurité ici à l’Est “, a précisé Fridolin Abongo.

L’archevêque de Kinshasa lance un message de paix, d’espérance à tous les fidèles chrétiens catholiques .

Il y a quelques jours que Dieu est venu habiter en nous au milieu de nous pendant cette période de Noël, et celui qui est née au milieu de nous, il nous apporte un message de paix nous avons aussi à disposer nos cœurs à poser des actes conséquents pour que cette paix que le Messi nous apporte puisse devenir une réalité dans notre vie de tous les jours” a déclaré Fridolin Ambongo.

Il a exprimé également sa fraternité aux évêques qui sont au quotidien au côté du peuple qui souffre dans cette partie est de la RDC.

Je suis en route pour Beni-Butembo pour la situation que vous connaissez, de ce qui se passe dans ces régions, je sais bien que la situation sécuritaire n’est pas vraiment propre à Beni -Butembo, c’est pratiquement tout l’Est du pays depuis Bunia en passant par Beni-Butembo, Goma Bukavu jusqu’à Uvira et la nous portons cette souffrance de notre peuple dans nos cœurs des pasteurs donc mon passage ici, c’est d’abord, le passage d’un pasteur qui va à la rencontre de ses brebis qui souffrent et ma présence, c’est pour témoigner de notre sollicitude pastorale vis-à-vis de ce peuple au nom de Dieu pour dire malgré la souffrance qui est la votre maintenant Dieu ne vous abandonne pas “ajout-t-il.

Monseigneur l’archevêque de Kinshasa, Fridolin Ambongo s’est exprimé à la presse ce vendredi 27 décembre 2019, en transit pour Beni et Butembo, ou il est attendu cet après-midi.

Beni et Butembo, deux villes de la province du Nord-Kivu qui font face à la maladie à virus Ebola et à l’insécurité perpétrée par des rebelles Ougandais ADF qui tuent dans ces régions depuis plus de 5 ans.

Le cardinal Ambongo va compatir avec la population longtemps meurtrie par les groupes armés négatifs qui ont élu domicile dans cette contrée de l’Est de la RDC ».

Le même site poursuit «  » Nous commettrions une erreur en jétant déhors la Monusco » ( F. Ambongo) »

« L’archevêque métropolitain de Kinshasa ne partage pas l’idée selon laquelle la Mission de l’organisation des Nations Unies pour la stabilisation du Congo (Monusco) doit quitter le territoire congolais.

Pour le cardinal, mettre déhors cette force onusienne, c’est une erreur que commettrait la République Démocratique du Congo (RDC).

Il l’a dit au cours d’une conférence de presse, tenue vendredi 03 Janvier 2020, à Kinshasa. Le cardinal Fridolin Ambongo pense que chasser la Monusco qui fait partie de la communauté internationale, donnerait une mauvaise image du pays.

 » La MONUSCO, c’est la communauté internationale. Ça serait une erreur de notre part et je l’ai dit à la population de Beni et de Butembo. Nous commettrions une erreur en jetant dehors la MONUSCO. Si nous jetons la communauté internationale dehors, quelle image nous donnerions de notre pays ? « , s’est interrogé l’archevêque métropolitain de Kinshasa

Par ailleurs, le cardinal Fridolin Ambongo pense que la Mission de l’organisation des Nations Unies pour la stabilisation du Congo n’a pas accompli complètement sa mission telle que définie par le Conseil de sécurité de l’ONU.

« Je n’ai pas dit que la MONUSCO est en train de favoriser la balkanisation du pays. J’ai dit que la MONUSCO a une mauvaise perception à l’Est parce que sa première mission qui consiste à protéger la population civile, cette mission n’est pas complétement assumée », a précisé le prélat.

Il faut noter que plusieurs organisations de la société civile exigent le départ de cette force onusienne qu’elles accusent de complicité avec les groupes armés. Le Mouvement citoyen Lutte pour le Changement (Lucha) a appélé les 15 pays membres du Conseil de sécurité de l’ONU à mettre fin au mandat de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation du Congo (Monusco), qu’il juge passive face aux tuéries des civils dans la partie Est de la RDC ».

Radio Okapi commente « La RDC est en danger, alerte le Cardinal Ambongo »

« La RDC est en danger », alerte le Cardinal Fridolin Ambongo, lors d’une conférence de presse tenue vendredi 3 janvier à Kinshasa. Le prélat catholique pense qu’il y a risque de la partition du pays, si l’on n’y prend garde. Il a tiré cette sonnette d’alarme lors de la séance de restitution de sa tournée de paix effectuée dans le Nord-Kivu, en vue de réconforter les populations meurtries des atrocités.

Le Cardinal déplore l’absence de l’autorité de l’Etat dans l’Est de la RDC, à la base d’un plan réfléchi de balkanisation du pays.

« On ne peut pas fêter l’an 1 de l’alternance démocratique au pouvoir critiquable, pendant que dans l’Est de la RDC les gens meurent. Nous devons être de communion avec eux », recommande le prince de l’église catholique.

Selon le Cardinal, des populations d’origine rwandophone et ougandophone sont en train d’être déversées dans l’Est et occupent des champs et maisons abandonnés par des autochtones qui fuient la guerre.

« C’est remarquable quand vous êtes sur le terrain. Le constat montre très clairement que l’objectif de tous ces comportements, c’est la balkanisation de notre pays », a-t-il dit.

Mais comment se vérifie ce plan de balkanisation ?

« Cela se vérifie à travers le remplacement des populations déplacées par généralement des populations rwandophones ou ougandophones et ça se complique, parce que nous à une frontière non pas du type naturel », répond le Cardinal Ambongo.

Il a aussi indiqué que l’armée est infiltrée par des étrangers, les frontières sont poreuses, les chefs coutumiers sont dépossédés de leurs pouvoirs.

Fridolin Ambongo interpelle la MONUSCO, la communauté internationale et le gouvernement en ces termes :

« Il appartient aux autorités de Kinshasa de prendre en charge ce genre des questions. Donc, le grand problème pour nous, c’est de renforcer les fonctions régaliennes pour pouvoir protéger nos frontières dans l’Est et éviter qu’il y ait de nouveaux venus qui soient déversés chez nous ».

Mines

Zoom-Eco titre « Levée de la mesure suspendant la perception de la TVA des miniers d’ici à mars 2020 ! »

« Le Gouvernement congolais s’apprête à lever la mesure portant suspension de la perception de la Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) des sociétés minières d’ici à mars 2020. Il s’agit d’un engagement formel pris avec le Fonds monétaire international (FMI) devant ouvrir la voie à des négociations, dès fin mai, pour la conclusion d’un Programme économique à moyen terme.

Pour y parvenir, le premier ministre, Sylvestre Ilunga Ilunkamba devra implémenter deux mesures urgentes, au plus tard le 31 janvier 2020.

La première mesure consiste à responsabiliser la Direction générale des impôts (DGI), par voie d’instruction du ministre des Finances, pour le remboursement, par jeu d’écriture à sommes nulles, de la Taxe sur la valeur ajoutée payée par les miniers.

En effet, c’est plus de 1,5 milliards de dollars que le Gouvernement doit aux opérateurs miniers au titre de TVA remboursable.

« La recommandation principale : Le FMI sait qu’il y a beaucoup de crédits de TVA que l’Etat ne peut pas payer du coup parce que le Gouvernement n’a pas assez d’argent. Cependant, il peut bien titriser cette dette-là. Quant aux nouveaux crédits de TVA, dès l’instant où le processus recommence à fonctionner normalement, doivent être rembourser », a déclaré Philippe Egoume, directeur pays du FMI en RDC, lors de son dernier entretien avec la presse.

La nécessité de rétablir la situation à la normale oblige la DGI à reprendre la main pour payer les crédits de la TVA aux sociétés minières via un compte séquestre alimenté par une allocation des recettes de TVA perçues par la DGDA (qui collecte la plus grande partie de TVA à la porte d’entrée) auprès des sociétés minières et part une fraction de la TVA perçue à l’intérieur par la DGI.

La deuxième mesure vise, pour le Gouvernement, à s’assurer du reversement de la TVA collectés par les entreprises publiques. L’objectif étant notamment d’augmenter le niveau des recettes de l’Etat.

Si cela passe par la numérisation de la chaîne de collecte de cette recette publique pour plus de transparence, la mise en œuvre de cette mesure permettra au Gouvernement de mettre fin aux détournements à grande échelle de ces revenus par des entreprises du portefeuille assujettis qui les captent sans pour autant les reverser au Trésor et/ou carrément les reversent de moitié ou encore partiellement.

Il sera également question de supprimer des exonérations de TVA généralisées pour les sociétés minières et d’interdire la pratique de compensation des crédits d’impôts.

A tout prendre, le succès de ces mesures gouvernementales dont l’exécution bénéficiera de l’appui technique du FMI, va permettre à la TVA de rapporter de plus des recettes comme cela était le cas lors de son lancement en Rd Congo.

D’aucuns se rappellent que la TVA rapportait environ 4% du PIB en termes des recettes. Mais actuellement, ses revenus avoisinent le 1,6% du PIB, malgré le fait que les activités ne cessent de croître autant que les assujettis à travers le pays.

Si les recettes provenant de la TVA ont fortement baissées, cela se justifie par le fait qu’à un moment donné, le système a cessé de fonctionner comme cela se devait.

En effet, les recettes de la TVA ont été versées dans un compte bloqué duquel les remboursements devraient s’effectuer. Malheureusement, déplorent des analystes, ce compte a été vidé par le Gouvernement jusqu’en avril 2016.

Conséquence : la DGI s’est retrouvée incapable de rembourser les crédits de la TVA qui se sont accumulés se sont accumulés. Cette difficulté a contraint le Gouvernement à suspendre la perception de la TVA remboursable et à privilégier la compensation qui s’est généralisée au point où certains impôts ont été compensés à d’autres impôts.

Dès l’instant où les règles n’ont pas été respectées, cela a entrainé le dérapage qui a conduit au dysfonctionnement et à la complication que le Gouvernement a connu dans le cadre de la perception de la TVA remboursable. D’où, la nécessité de revenir à la situation normale.

Eric Tshikuma ».

Radio Okapi annonce« Shabunda : activités paralysées après arrestation d’un leader de la société civile »

« La société civile de Shabunda réclame la libération sans condition de son représentant à Lulingu, arrêté par le parquet. Ce dernier est accusé d’avoir incité les opérateurs économiques du secteur minier au non-paiement de la taxe du Comité national de protection contre le rayonnement ionisant (CNPRI). En guise de protestation, les activités sont paralysées dans ce territoire du Sud-Kivu. Pour la société civile locale, cette taxe est illégale et donc personne ne peut être inquiété pour l’avoir contestée.

Lulingu est l’une des zones minières les plus réputées au Sud-Kivu, avec un trafic très intense. Le président de la société civile de Lulingu, Joseph Mpeseni, avait été accusé au parquet par un agent de la division des mines, au motif qu’il avait incité les opérateurs miniers à ne pas s’acquitter de certaines taxes.

Pour la société civile de Shabunda, leur collègue de Lulingu n’a commis aucune infraction. La taxe qu’il combat est illégale et, par conséquent, non payable.

Joseph Mpeseni soutient la démarche de la population de Shabunda, qui réclame la libération sans condition du défenseur des droits humains à Lulingu.

«A Shabunda, dans l’ensemble du territoire, il y a paralysie d’activités commerciales et de tous les autres services. Cela est dû à l’arrestation du président de la société civile noyau de Lulingu. Il avait annoncé une suspension de la perception illégale d’une taxe de service du CNPRI, qui demandait 10 USD par Tone. Cette taxe n’a pas été perçue à Shabundu, parce qu’on a constaté que c’était une taxe illégale, qui n’a même pas de preuve de paiement ».

La division des mines est restée injoignable pour justifier la légalité de la taxe qui pose problème ».

Presse et documents étrangers

Ituri: l’armée congolaise dénonce des complicités locales

Colette Braeckman – Le Soir – le 26 décembre 2019

Dans l’Est du Congo, l’armée congolaise est déployée sur deux fronts : le Nord et le Sud Kivu où elle traque des groupes de réfugiés hutus rwandais dont 1800 combattants et dépendants ont été ramenés à la frontière de leur pays et l’Ituri, dans le « Grand Nord » du Nord Kivu, un vaste territoire voisin de l’Ouganda. La guerre en Ituri s’avère beaucoup plus complexe et surtout beaucoup plus meurtrière que les offensives menées plus au sud. En effet, en contrepoint des mouvements militaires, elle s’accompagne de tueries qui ont déjà fait plus de 200 morts.

Ces massacres à l’arme blanche, ces décapitations, ces enlèvements de femmes et d’enfants, ces prises d’otages correspondent à une politique de terreur qui a pour but de frapper l’opinion, de dissuader les FARDC de poursuivre leur offensive, mais aussi de jeter le discrédit tant sur l’armée nationale que sur les forces de la Monusco. Ces dernières sont accusées d’impuissance face à des groupes armés dont le nom générique est devenu « ADF » (Allied defense forces) un mouvement originaire d’Ouganda, dont les membres sont de confession musulmane et qui appartiendrait à la nébuleuse de l’Etat islamique. Déstabilisée par les massacres, doutant de tous les politiciens, abreuvée de rumeurs, la population ressent une méfiance qui s’étend aux FARDC, à la Monusco et même aux équipes de la riposte Ebola, dont les véhicules ont été attaqués à plusieurs reprises.

C’est pourquoi le porte parole de l’armée, le général Kasonga, a tenu à donner le bilan des dernières actions de l’opération « Sukola » et surtout à présenter un groupe composé de 37 rebelles identifiés comme des ADF. La composition de ce groupe tend à confirmer le côté international des ADF : sont ainsi apparus 18 Ougandais, 3 Tanzaniens, 3 Kenyans, un Burundais, et un Centrafricain. Faisant partie d’une « vague d’assaillants », ces hommes armés ont été capturés lors de la conquête de leurs bastions dans le Mayangose, à Mwalika, Chochota, Mapobu, Kidiwe…

Joint par téléphone, le général Sylvano Kasonga nous a confirmé que « 500 rebelles se trouvent entre les mains de l’armée congolaise, et ont permis à nos services de recueillir des informations importantes, à savoir que si ceux qui tuent en Ituri sont pour la plupart d’origine étrangère, les responsables du désastre sont des politiciens, des hommes d’affaires, des jeunes militants, aussi bien Congolais qu’étrangers. La plupart d’entre eux sont hors du pays mais d’autres sont présents à Beni, Butembo, Lubero, Kinshasa et d’autres pays de la région. Les tueurs sont totalement radicalisés : c’est ainsi que nous avons capturé une femme d’origine ougandaise, qui a préféré supprimer son bébé devant nos soldats, afin d’éviter que l’enfant soit un moyen de l’obliger à parler… »

Quelles pourraient être les motivations de ces Congolais qui commanditeraient ainsi le massacre de leurs compatriotes ? Pour le général Kasonga, « elles sont essentiellement politiques : d’aucuns, par la terreur, elles voudraient obliger les populations à fuir, afin que l’Ituri puisse devenir une nouvelle entité administrative et politique. Cette perspective fait l’affaire de pays voisins (ndlr. Il fait allusion à l’Ouganda et au Rwanda), plus peuplés, et qui pourraient avoir envie de transférer des populations dans une espace « libéré » où les ressources sont importantes : or, minerais, bois précieux, terres fertiles. »

Ces accusations du général Kasonga font écho à plusieurs publications issues de l’ethnie des Nande, un groupe nombreux et dynamique qui se trouve en concurrence commerciale et démographique avec des Hutus, d’origine rwandaise ou congolaise, eux aussi en expansion. Le général Kasonga assure que ces « terroristes » envisageraient aussi d’attaquer des personnalités en vue, comme, par exemple, le maire de Beni. » Il précise que « nos militaires ont également arrêté des combattants Mai Mai congolais, dont un « général autoproclamé » dont les troupes… portent des uniformes volés à l’armée… » congolaise… » Le porte parole militaire insiste auprès de la population « pour qu’elle dénonce les lieux où se cachent les groupes terroristes : « sa collaboration est la meilleure chance de succès de notre armée qui n’a pas besoin d’interventions étrangères à ses côtés… »

Une année et six défis pour Félix Tshisekedi

Colette Braeckman – Le Soir – le 28 décembre 2019

Un an après les élections du 31 décembre 2018, « Fatshi Béton » a multiplié les promesses. La population attend les résultats.

Voici un an, à la veille d’élections qui avaient été déjà retardées de deux ans et que le Congo comptait financer sur ses fonds propres, à hauteur de 500 millions de dollars, tous les voyants étaient au rouge et les ambassades multipliaient les consignes de prudence. Le 31 décembre cependant, le pire ne s’est pas produit : la « machine à voter » coréenne a tourné à plein régime, les électeurs congolais se sont déplacés en masse et dès le soir des élections il apparaissait que le « dauphin » de Joseph Kabila, Emmanuel Shadary, ne serait pas élu.

Trois semaines plus tard, la Cour Constitutionnelle rendait son verdict : Félix Tshisekedi était proclamé vainqueur même si Martin Fayulu, le « candidat unique » de l’opposition défendait sa victoire. A la tête de CaCh, Coalition pour le changement, le fils d’EtienneTshisekedi, opposant légendaire et obstiné, devenait le 5eme président de la République démocratique du Congo. La population, au lieu de se soulever, acceptait de donner sa chance à cethomme de 58 ans. Ayant passé une bonne partie de sa vie en exil, il incarnait soudain une notion jusqu’alors inconnue dans le turbulent Congo : une cohabitation « pacifique et civilisée » avec son prédécesseur Joseph Kabila, qui devenait ainsi le premier chef d’Etat congolais à quitter le pouvoir sans avoir été chassé ou assassiné.

Ayant nommé au poste de directeur de cabinet Vital Kamerhe, un politicien chevronné qui avait accompagné les débuts de Joseph Kabila avant de passer à l’opposition, Félix Tshisekedi se mit en devoir de relever de multiples défis. Il tenta, à la fois, de répondre aux attentes de la population, de la communauté internationale, des pays voisins. Mais il veilla aussi à éviter le conflit avec un prédécesseur aguerri qui avait gardé la main sur plusieurs leviers du pouvoir : une majorité à l’Assemblée nationale et au Sénat capable de démettre le nouveau chef de l’Etat, le contrôle des forces armées et de sécurité, ainsi que des finances, et last but not least une coalition, les FCC (Forces congolaises pour le changement) composée de politiciens expérimentés ayant déjà en vue les élections de 2023.

Pour conforter sa légitimité, le nouveau président se lança sur plusieurs terrains.

1. La diplomatie. Multipliant les voyages, (et dépassant largement le budget prévu) Félix Tshisekedi s’employa à rassurer les pays voisins : le Rwanda, l’Angola, puis l’Ouganda, l’Afrique du Sud, le Congo Brazzaville, quitte à multiplier les gages économiques : la compagnie Rwandair dessert désormais le Congo, le pont reliant Kinshasa à Brazzaville sera construit, l’or du Congo est raffiné en Ouganda… L’offensive diplomatique se poursuivit aux Nations Unies, culmina avec un accueil triomphal à Bruxelles, très positif à Paris et Washington où, en matière de lutte anti terroriste, le président multiplia les promesses souhaitées par ses hôtes.

2. L’Etat de droit. Le respect des libertés publiques, dont les droits de la presse, le retour des exilés (dont Moïse Katumbi) ,la libération des prisonniers politiques, l’autorisation des manifestations, représenteun acquis incontestable. Sur le plan politique, le nouveau président veilla, lien après lien, à se délier de l’emprise de Kabila et des siens: quoique issu du camp d’en face, son Premier Ministre Ilunga Ilunkamba apparaît comme un politicien expérimenté.Cependant, si la lutte contre la corruption a été décrétée, aucune sanction n’a encore été prise.

3. L’armée et les forces de sécurité. Le domaine militaire demeure le fief de Joseph Kabila, et François Beya, l’un des hommes de confiance de ce dernier, assure la sécurité du nouveau président tandis que Christian De Schryver, proche de l’ancien chef de l’Etat gère toujours la flotte présidentielle. Le crash d’un avion de la suite présidentielle qui reliait Goma à Kinshasa a d’ailleurs suscité bien des questions…Au Kivu, en Ituri, l’armée mène des opérations d’envergure afin d’éradiquer les groupes armés d’origine étrangère (Hutus rwandais, opposants burundais, musulmans ADF venus d’Ouganda, de Somalie, du Kenya et s’entraînant dans les forêts congolaises). Au Nord et Sud Kivu, des succès militaires sont enregistrés mais en Ituri, les rebelles traqués ont répliqué en assassinant plus de 200 civils. Cependant, les forces armées demeurent une forteresse intouchable : des officiers de haut rang, frappés de sanctions internationales ou soupçonnés, en vrac, de trafics divers, de complicité avec l’ennemi, voire de massacres et crimes contre l’humanité sont toujours en poste, sans doute protégés par l’ex président et jouissent d’une impunité dénoncée par les défenseurs des droits de l’homme.

4. Le peuple d’abord. Fidèle à son slogan de campagne, Félix Tshisekedi multiplie les promesses sur le plan social et il s’est engagé, le temps de son mandat, à sortir 20 millions de ses compatriotes de la pauvreté. Il promet d’améliorer le quotidien des militaires, lance à Kinshasa de grands travaux, les « saute mouton », viaducs censés fluidifier la circulation. C’est qu’il y a urgence : 73 % de la population vit toujours dans l’insécurité alimentaire, le taux de pauvreté est de 63%, et, dans le pays du barrage d’Inga, 10% de la population est alimentée en électricité. Mais le budget ne suit pas : avec 7 milliards de dollars, « Fatshi Béton »ainsi nommé à la suite de ses promesses de bâtisseur ne peut aller très loin. JokOga, analyste politique et financier constate que « les investisseurs ne concrétisent pas leurs promesses, comme s’ils attendaient encore, la Gécamines est embourbée dans les scandales… »Quant à la diaspora, qui multiplie les retours au pays, elle va, vient et regarde, mais sans se lancer dans de grands projets. Paralysée par les embouteillages, les inondations dues à la crue du fleuve et aux rivières encombrées d’immondices, Kinshasa est à l’image du pays, elle vibre d’espoir mais n’a pas encore vu le changement annoncé.

5. La gratuité de l’enseignement primaire.

Décréter, au milieu de l’été, à quelques semaines de la rentrée, que l’enseignement primaire serait gratuit et que les parents seraient désormais déchargés de « frais scolaires » pouvant osciller entre 300 et 400 dollars par an, voilà qui représentait un « coup politique » fumant, répondant parfaitement aux aspirations d’une majorité de Congolais privés d’enseignement gratuit depuis la moitié des années 80. La fréquentation scolaire explosa, mais…les enseignants du réseau catholique (80% des écoles) multiplièrent les grèves, redoutant de perdre leurs « sursalaires » ! Si la mesure de gratuité représente 26 millions de dollars par mois, il apparut assez vite que le gouvernement avait peut-être surestimé la générosité et la promptitude des bailleurs dont la Banque mondiale qui renâcla à débourser le milliard de dollars escompté. Quoique bien inspirée, la mesure, décidée sans planification préalable, risque de se fracasser sur les dures réalités congolaises.

6. Le sablier du temps. Accédant au pouvoir Félix Tshisekedi s’était donné cent jours pour frapper les esprits et lancer ses réformes. Mais l’analyste Jean-Claude Mputu constate que le temps file vite : « le président, qui a multiplié les voyages, s’est surtout cantonné à la représentation, aux mesures d’annonce, sans diriger de réelles réunions de travail avec son cabinet. Or la première année est déjà « consommée », sans véritables résultats tangibles. Et avant la prochaine échéance, celle de 2023, la dernière année sera consacrée à la campagne, elle ne comptera donc pas. Restent trois ans pour convaincre et surtout pour réaliser… » Ce délai est d’autant plus court que tous les observateurs estiment que Joseph Kabila n’a pas renoncé à revenir au pouvoir : sa coalition des FCC demeure en ordre de marche, et lors de ses rares apparitions publiques il lui arrive d’être applaudi par ceux qui hier le conspuaient ! Si ses premiers mois au pouvoir ont permis au nouveau président de surprendre, de convaincre et de ranimer l’espoir, « Fatshi Béton » est désormais confronté au défi de réaliser, de construire. A nouveau, il y a urgence.

Violences faites aux femmes: violée à 7 ans, Emmanuella fait de son traumatisme sa force pour briser les tabous en RDC

Emmanuella Zandi. Patricia HUON – RTBF – le 31 décembre 2019

« Quel âge as-tu, Brenda ? 7 ans ? Eh bien, vous voyez, moi, quand j’avais l’âge de Brenda, j’ai été violée », dit Emmanuella Zandi, devant quelques dizaines de personnes rassemblées dans le quartier populaire de Kinbanseke, dans la capitale congolaise Kinshasa.

Emmanuella Zandi, 22 ans, est une survivante. Quand elle n’était qu’une petite fille, elle a été violée par des soldats près de la ville de Goma, dans l’Est de la République démocratique du Congo, une région meurtrie par plusieurs conflits successifs. Quelques années plus tard, c’est un cousin qui abuse d’elle. « J’ai tenté de me suicider plusieurs fois. Je ne voyais plus de raison de rester en vie », raconte-t-elle.

« Des enfants étaient battus parce qu’ils jouaient avec moi »

Dans une société conservatrice et patriarcale, Emmanuella doit aussi faire face à la stigmatisation que subissent souvent les victimes de violences sexuelles. Elle devient une paria au sein de sa communauté : « J’ai été rejetée, dit-elle. Certains parents battaient leurs enfants parce qu’ils jouaient avec moi ».

Mais un jour, l’adolescente décide de partager son expérience dans une émission diffusée par une radio communautaire. « Ça a été le début de ma guérison », confie-t-elle.

A Kinshasa, elle fonde « Ma voisine », une association qui vise à sensibiliser sur les violences faites aux femmes et au sexisme qui gangrène la société. Emmanuella et ses collègues font du porte à porte dans les rues de la capitale. Elles parlent à tous ceux qui veulent bien les écouter.

En racontant ouvertement son histoire, la jeune femme brise le tabou et devient une source d’inspiration pour beaucoup d’adolescentes, pour qui elle met en place des groupes de parole auxquels participent aussi des garçons. « Parler de ce qui ne va pas, en discuter ouvertement, sans gêne, est la première étape pour améliorer les choses », dit-elle.

Contribuer à l’émancipation des femmes

Mais rapidement, Emmanuella veut aller plus loin. Et proposer des solutions concrètes pour contribuer à l’émancipation des femmes. « La santé reproductive reste également un tabou en RDC, dit-elle. Les difficultés d’accès aux protections hygiéniques, par exemple, ont un impact important sur la scolarité des filles. Une fille ne peut pas aller à l’école pendant ses règles sans protection efficace. Or beaucoup n’en ont pas les moyens. »

Emmanuella a transformé son appartement en atelier et a lancé sa propre entreprise, « Nkento », qui signifie « Femme » en lingala. Elle y emploie six femmes qui fabriquent des serviettes hygiéniques réutilisables, lavables, en coton biologique. « C’est économique, explique-t-elle. Ces serviettes peuvent supporter jusqu’à 400 cycles de lavage, donc cela veut dire plus d’une année, voire même deux ans, avec la même serviette. »

Les serviettes hygiéniques ne sont qu’une première étape. Emmanuella tente aussi de convaincre des médecins de la soutenir dans sa démarche. Elle voudrait conclure des partenariats avec des cliniques et hôpitaux, afin de proposer des consultations gynécologiques gratuites pour les jeunes filles dans le besoin.

Emmanuella a fait de son traumatisme sa force. En quelques années, elle a déjà parcouru un long chemin dans la poursuite de son rêve d’améliorer la vie des femmes et des filles dans son pays. Et elle espère que d’autres la rejoindront sur cette voie.

La RDC, le Burundi et la Tanzanie bientôt reliés par un chemin fer

ACP – 01.01.2020,

La République démocratique du Congo, le Burundi et la Tanzanie seront reliés dans un proche avenir par un chemin de fer à écartement standard qui partirait d’une ville de la Tanzanie pour connecter les trois pays, indique la cellule de communication du cabinet du ministre des Transports et voies de communications reçu mardi 31 décembre 2019 à l’ACP.

Selon la source, des experts de ces trois pays se sont réunis conjointement à Burundi et à Uvira dans la province du Sud-Kivu, du 20 au 21décembre 2019 pour étudier les tracés identifiés. Elle a précisé également qu’au cours de ces assises une feuille de route a été élaborée pour la matérialisation de ce projet.

Cette feuille de route, note la source, devra être soumise aux décideurs de ces trois pays pour approbation lors de la réunion tripartite prévue au mois de janvier 2020 à Bujumbura au Burundi.

A l’issue de cette séance de travail, les experts ont effectué une visité de prospection, une descente sur le terrain pour se faire une idée des travaux préalables à exécuter.

M. Kayeye, conseiller juridique et fiscal du ministre des Transports et voies de communications Didier Mazenga Mukanzu, qui a conduit la délégation congolaise à ces assises, a indiqué que ledit projet va contribuer et susciter une impulsion devant booster le développement économique et social des populations de ces trois pays, d’autant plus, a-t-il ajouté, que ces pays seront connectés avec une cohésion pacifique et un climat d’affaires serein.

Il a fait savoir que ledit projet a un caractère intégrateur qui rencontre les préoccupations de l’Union Africaine, car il va relier trois pays d’une région, soulignant à cet effet que le chemin de fer constitue une voie des transports la plus sûre pour l’évacuation des marchandises destinées à l’importation et à l’exportation.

De son côté M. Dieudonné Dukundane, secrétaire exécutif de l’Agence de facilitation du transport du corridor central (AFTCC), a salué la détermination des gouvernements de ces pays qui tiennent à la concrétisation et à la matérialisation de ce projet.

Il s’est dit satisfait du fait qu’endéans un mois les délégués des trois pays ont produit les termes de référence pour l’actualisation des études des sections de Bujumbura au Burundi et à Uvira en RDC.

« On n’est pas sur le marché à Kinshasa »: les propos racistes d’un contrôleur de train IZY

Patrick Michalle et JCV – RTBF – le 02 janvier 2020

« On n’est pas sur le marché à Kinshasa. » Ces propos à connotation raciste ont été tenus par un contrôleur à bord d’un train IZY, la formule « low cost » du train Thalys Paris-Bruxelles. L’un des passagers a filmé la scène avec son smartphone.

Le contexte de l’incident concerne l’imposition d’une surtaxe pour l’un des enfants d’une passagère. Après la contestation du montant à payer, le contrôleur fait grimper le montant à payer de 10 euros à 49 euros. La cliente demande alors à voir le règlement écrit qui stipule la nécessité de payer pour un jeune enfant. Le ton monte alors dans le chef du contrôleur jusqu’à entendre ceci cette remarque sur le « marché de Kinshasa ».

Une passagère qui a filmé la scène, choquée par ce qu’elle a vu et entendu nous a confirmé par téléphone les propos du contrôleur. Ce témoin précise qu’elle ne met pas en cause la légitimité du contrôleur à réclamer un éventuel surcoût à un voyageur. Mais bien ses propos faisant allusion à l’origine ethnique de la cliente contrôlée.

Une forme de racisme décomplexé qui étonne dans le chef d’un contrôleur du groupe Thalys. Contacté par nos soins, le porte-parole du groupe a pris connaissance des faits. Sa direction devrait réagir dans le courant de la journée.

Des chefs coutumiers du Tanganyika dénoncent la « dictature » de Zoé Kabila

Marie-France Cros.- La Libre – le 2 janvier 2020

Trois chefs coutumiers et trois chefs de groupement de la province du Tanganyika (issue du découpage du Katanga) ont écrit au président Félix Tshisekedi, le 20 décembre dernier, pour protester contre le fait que « la province du Tanganyika et plus particulièrement le territoire de Kalemie » – dont les six sont originaires – « sont pris en otages par Monsieur Zoé Kabila avec son directeur de cabinet ».

Copie de la lettre est parvenue à La Libre Afrique.be de source katangaise. Selon les six signataires – les chefs Benze, Tumbwe, Rutuku, Moni, Lukwangulo et Kasabondo – « toutes les activités économiques » sont « complètement paralysées » par le gouverneur de la province, Zoé Kabila, jeune frère de l’ancien chef de l’Etat, ce qui entraînerait, selon eux, l’appauvrissement de la population. Ils affirment que Zoé Kabila aurait pourchassé essentiellement les petits commerçants, y compris les pêcheurs du lac Tanganyika qui longe la province sur son côté oriental, « alors que depuis nos ancêtres, nos enfants ont toujours pratiqué la pêche ».

Les six signataires dénoncent en particulier l’activité répressive du directeur de cabinet du gouverneur, « le tyran Kitwanga », qui fait emprisonner des personnes « sans passer par les cours et tribunaux ». « Nous vivons vraiment dans un régime de terreur ».

Affairisme et négligence de la province

La lettre accuse Zoé Kabila de « bloquer » les importateurs de ciment gris alors que lui-même serait devenu « dépositaire de toutes les compagnies (cimenteries) de la Tanzanie », où a grandi la fratrie Kabila.

Les signataires affirment également que l’administration provinciale ne fonctionne pas, que le gouverneur « a limogé presque tout le personnel », et qu’il reçoit ses interlocuteurs chez lui et non à son bureau. Précisons ici que le démantèlement des provinces, en 2015, avait été décidé par Joseph Kabila pour détruire la puissance du Katanga et de son rival politique Moïse Katumbi, qui en était le gouverneur; non préparé, il a créé de nouvelles provinces sous-équipées.

Les six chefs accusateurs déplorent par ailleurs l’absence d’ »évaluation de l’action gouvernementale », un seul conseil des ministres provinciaux ayant été réuni par le gouverneur en sept mois. Ce dernier, ajoutent-ils, « n’a jamais visité un seul territoire » de la province; « quel est alors le sens de la décentralisation? » Zoé Kabila n’a « jamais rencontré » les membres du conseil de sécurité de la province, ni les militaires et policiers sous son administration, ni « les différentes couches de la population », ni « les différents services de l’Etat » provincial. « Il est toujours gardé par les GR (NDLR: Garde Républicaine, la garde prétorienne de Joseph Kabila lorsqu’il était Président) et les policiers commis à sa garde sont négligés ». Il n’a participé « qu’à un seul forum organisé par le gouvernement central »; aux autres, « il a brillé par son absence » alors qu’ils étaient « présidés par le chef de l’Etat », Félix Tshisekedi.

Quant au vice-gouverneur, il fait de la « figuration », le chef de cabinet du gouverneur assurant l’intérim en cas d’absence de ce dernier.

« Détournement de fonds publics » et « expropriations »

Les six signataires s’inquiètent également du « détournement de fonds publics », assurant que « toutes les recettes locales » sont retirées directement par le directeur de cabinet du gouverneur et gérées de manière « opaque », alors qu’il a divisé « par deux ou trois » les salaires payés par la province. Ils accusent aussi Zoé Kabila de « gabegie dans les entreprises minières et autres sociétés du Tanganyika ».

Dans plusieurs territoires, accusent les chefs, des terres « sont expropriées et spoliées » à des paysans, des religieuses catholiques, la communauté musulmane. « Plus de 4000 âmes » vivant sur les îlots Kibizye et Bilila, sur le lac, viennent d’en être chassés sans relogement alors qu’une Ferme Espoir de Kabwela, de « 15.000 km2 » (la moitié de la Belgique!) serait en cours de création après « expropriation ». Des villages de la chefferie Rutuku « doivent être délocalisés ». « Que devient le territoire de Kalemié, dépouillé de toutes ses terres? »

Si l’Etat n’agit pas, nous le ferons

Les signataires terminent en appelant la population de la province à braver « la peur, l’oppression, la dictature. Défendez vos terres et vos richesses jusqu’au sacrifice suprême ». « Si l’Etat n’agit pas vite, nous allons nous-mêmes nous prendre en charge », menacent-ils.

Ils demandent au président Tshisekedi de visiter la province « le plus tôt possible » pour constater le mécontentement de la population; d’envoyer une commission indépendante enquêter sur les spoliations de terres; et d’ordonner à la Cour des comptes et aux inspecteurs des Finances de faire des audits sur la gestion de la province.

La diplomatie pour les nuls: nulle part ailleurs qu’au Congo!

Commentaire par Marie-France Cros – La Libre – le 3 janvier 2020

On se souvient que les élections présidentielle, législative et provinciales du 30 décembre 2018 au Congo-Kinshasa ont abouti à un partage du pouvoir non légitimé par les résultats électoraux, les bulletins de vote n’ayant jamais été produits pour l’appuyer: à Félix Tshisekedi la Présidence; aux kabilistes une hyper-majorité à l’Assemblée nationale et dans les assemblées provinciales (donc au sénat et parmi les gouverneurs de province, élus par ces dernières).

Cela n’avait pas empêché les séances de “validation des mandats”, à l’issue desquelles 31 membres de l’Assemblée nationale avaient été validés en mai et juin derniers, puis invalidés par de nouveaux arrêts de la même Cour constitutionnelle en juillet, après des protestations. Ces 31 validés-invalidés s’étaient trouvé un porte-parole, Louis d’Or Balekelayi, qui avait multiplié les protestations. En vain, avait assuré, le 23 août, la présidente de l’Assemblée nationale, Jeanine Mabunda, qui s’était tout de même engagée à trouver une solution politique.

Comme celle-ci se faisait toujours attendre après Noël, les 31 validés-invalidés avaient menacé, le 28 décembre dernier, de demander des sanctions contre Kinshasa à l’Union interparlementaire. La menace – ou l’éloquence à la Saint-Jean Bouche d’Or de Louis d’Or Balekelayi – aurait porté ses fruits: les 31 validés-invalidés seront, selon leur porte-parole, payés par le Trésor public et bénéficieront de tous les avantages reconnus aux députés, tout en ne siégeant pas au Palais du Peuple.

Louis d’Or Balekelayi affirme que cette décision a été communiquée aux 31 validés-invalidés par les plus hautes instances, qui auraient précisé que le mode opératoire de cette mesure inédite autant que non-orthodoxe sera fixé au cours de la réunion inter-institutionnelle prévue ce mois-ci. Le porte-parole des validés-invalidés a déjà remercié publiquement le président Félix Tshisekedi et son prédecesseur, le “Président honoraire”, Joseph Kabila, pour cette solution. Celle-ci, qui ferait des 31 validés-invalidés des crypto-revalidés, revient donc à les faire payer par l’Etat sans qu’ils travaillent, alors que des milliers d’autres Congolais (enseignants, agents électoraux, employés d’entreprises publiques, etc… travaillent pour l’Etat sans être payés.

Pourquoi pas? Kinshasa ne vient-il pas d’adopter un budget 2020 de 11 milliards de dollars, alors que les prévisions les plus optimistes fixent ses recettes à 6 milliards de dollars maximum? Et le Fonds monétaire international n’a-t-il pas décidé le mois dernier d’octroyer au Congo un prêt d’urgence de 368,4 millions de dollars pour renflouer sa Banque centrale?

L’archevêque de Kinshasa pour l’arrêt de l’arrivée de ressortissants de pays voisins

La Libre, Belga & AFP – le 3 janvier 2020

L’archevêque de Kinshasa, Mgr Fridolin Ambongo, a appelé vendredi les autorités congolaises à convaincre les dirigeants de trois pays voisins « d’arrêter de déverser » leurs ressortissants dans l’est troublé de la République démocratique du Congo (RDC), affirmant que le pays ‘est en danger ». « Il appartient au gouvernement d’assumer ses responsabilités pour convaincre » par les voies diplomatiques « les pays voisins particulièrement l’Ouganda, le Rwanda et le Burundi d’arrêter de déverser (leurs) populations au Congo », a déclaré le cardinal Ambongo lors d’une conférence de presse à Kinshasa.

Les Congolais d’origine rwandaise ou ougandaise qui sont là depuis des années, « personne ne peut contester leur nationalité congolaise. « Ce qui fait problème, c’est le déversement des autres qui arrivent, et on essaie de les faire passer comme des Congolais », a affirmé le prélat.

« Le cas le plus criant [est celui des] immigrés rwandais qui ont été chassés de la Tanzanie il y a quelques années et on a fini par les déverser au Congo » créant un « sentiment de frustration, de colère » ce qui, selon l’archevêque, « confirme qu’il y a un plan de balkanisation derrière » ces actes.

« On ne peut pas fêter l’an 1 de l’alternance démocratique au pouvoir critiquable, pendant que dans l’est de la RDC les gens meurent », a-t-il dit en référence à la date du 24 janvier, qui marquera le premier anniversaire de l’arrivée au pouvoir du président Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, qui a succédé au président Joseph Kabila au terme d’élections contestées.

Mgr Ambongo a effectué une visite la semaine dernière dans la région de Beni-Butembo dans la province du Nord-Kivu, zone en proie aux violences depuis 25 ans.

« La situation de la population est dramatique. A cause de l’insécurité, la population a dû abandonner champs, villages, maisons, plantations », a détaillé le prélat.

Plus de 200 civils ont été tués les deux derniers mois dans cette région au cours de massacres attribués aux ADF, plus d’un millier depuis octobre 2014.

« Il faut une prise de conscience au niveau national sur le fait que notre pays est en guerre, que le pays est en danger », a insisté le prélat, appelant ses compatriotes à soutenir les militaires congolais qui se battent contre des dizaines de groupes armés locaux et étrangers.

Parmi ces derniers, se trouvent les milices ougandaises des Forces démocratiques alliées (ADF), les Forces démocratiques pour la Libération du Rwanda (FDLR) et les rebelles burundais des Forces nationales de Libération (FNL).

Fin décembre, l’ancien Premier ministre devenu opposant Adolphe Muzito avait appelé Kinshasa à « faire la guerre au Rwanda » et même à « l’annexer » pour rétablir la paix dans l’est congolais.

La RDC entretient des relations difficiles avec ses voisins du Rwanda et de l’Ouganda notamment. Kinshasa accuse ces deux pays de vouloir la déstabiliser, quand ces derniers considèrent la RDC comme une base arrière de milices hostiles à leurs régimes.

L’INCONSCIENT DE L’INCONSCIENT ET SON EXPRESSION SYMBOLIQUE : LA LUTTE DES CLASSES CONGOLAISE !

Patience Kabamba – LE MOT DU WEEKEND – le 4 Janvier 2020

BONNE ANNEE 2020 !

Notre premier MDW de cette année et de cette décennie se concentrera sur la méthodologie fondamentale qui va guider notre réfection au courant de cette année 2020. Méthodologie vient du Grec, meta hodos, “au-delà du chemin,” le chemin de clarification pour mieux comprendre notre vie quotidienne. Comprendre, c’est prendre avec nous, assumer notre vie émotionnellement, socialement et localement. Notre être est par définition jouissance ; de l’ESSE latin au EINAI Grec, être signifie croissance, agrandissement, jouissance.

J’utilise le mot inconscient dans le titre. Il signifie ce qui est éloigné de la conscience et dont dépend la conscience selon la définition de l’inconscient chez Freud. C’est tout un continent, l’inconscient disait Althusser. Mais, cet inconscient de Freud a un autre inconscient, c’est à dire ce qui nous fait agir et qui est en même temps très éloigné de nous. C’est la lutte des classes : les prolétaires contre ceux qui confisquent leur production.

L’inconscient de l’inconscient est donc en rapport avec l’économie.

Le propre de l’inconscient c’est de s’exprimer, de s’extérioriser. Le Lapsus est l’inconscient qui s’échappe, le refoulé qui revient en force et souvent nous embarrasse. Il en est de même de l’inconscient de l’inconscient qui est la lutte des classes. Elle s’exprime symboliquement dans la vie quotidienne.

En Occident, cet inconscient s’exprime à travers des mouvements identitaires, des mouvements racistes et anti-étrangers, de la xénophobie. Le malaise économique s’exprime à travers ces problèmes sociétaux comme le genre, le racisme ou le sexisme, etc. Tous ces mouvements en Occident sont des traductions symboliques de l’inconscient qu’est l’économie. Dans le monde musulman, on voile la femme, on voile la réalité économique d’une distribution injuste. L’obéissance soumise du Samouraï japonais traduit symboliquement le même inconscient économique.

Au Congo, l’inconscient se vit sous forme religieux et ethnique. Le foisonnement des églises de réveils et l’excès de piété dans des églises catholiques et protestantes traditionnelles sont des expressions symboliques de l’économie ambiante, de la lutte des classes.

Le symbolisme est la manière humaine d’exprimer les relations interhumaines. La scolarité est prisonnière des méthodes des sciences de la nature ou le principe de causalité règne en maître. Tout ce que nous étudions à l’école est le rapport y = f(x). Y est fonction de x. Nos études établissent les rapports de causalités. Mais, dans toute notre vie, c’est le rapport de signe et de signification qui domine. C’est cela le domaine humain et symbolique. Dans les rapports symboliques on retrouve les rapports humains fondamentaux.

En conclusion, je dirai que pour comprendre ce que vit l’homme, il faut découvrir les rapports symboliques qui le caractérisent. L’inconscient de l’inconscient de ces rapports symboliques c’est l’économie.

Pourquoi, même lorsque nous avons très faim après un long voyage, au lieu d’aller chercher logiquement de la nourriture, on va d’abord visiter la grand-mère malade. Pour l’homme, même devant la nécessité biologique il va choisir ce qui est socialement et symboliquement le plus important. La relation a l’autre est symboliquement la plus importante. Nous sommes des êtres sociaux. La société est notre biologie naturelle. Elle ne vient pas du dehors. Nous sommes la société. Tout ce qui s’exprime symboliquement traduit ce que nous sommes véritablement.

Donc au cœur du cœur de nos comportements symboliques se trouvent l’économie, la lutte des classes.

C’est ainsi que nous parviendrons à comprendre qu’au cœur du monde moderne il y a l’extorsion, le vol de ce que le travailleur produit.

A défaut d’être frontale à travers des révolutions sanguinaires, la lutte des classes congolaise s’extériorise par l’identité religieuse, ethnique et tribale.

Ce Mot du Week end peut paraître un peu difficile, mais il veut dire que les Congolais qui naturellement veulent vivre heureux dans la jouissance cosmique se sentent contraints par une situation ou une poignée d’individus confisque leur vie à travers le pouvoir de la monnaie. Le désir de reprendre sa vie par la lutte des classes s’enfuit dans l’inconscient. Mais les choses cachées de l’inconscient sont faites pour s’extérioriser, s’exprimer. Au Congo cela s’exprime symboliquement par le religieux, l’ethnique, et le tribal.

Je voudrais amener les lecteurs du MDW à comprendre qu’à travers la ferveur religieuse, l’attachement ethnique et tribal, les Congolais expriment symboliquement leur lutte contre ceux qui confisquent leur production économique et qui rendent leur vie invivable. La lutte des classes est donc au cœur des nos dévotions et nos attachements ethniques et tribaux.

Ceci n’est pas aussi évident car c’est enfoui dans notre inconscient. C’est l’inconscient de l’inconscient Freudien : l’économie, la production.

La formation académique à la causalité nous détourne de cette compréhension de la fonction symbolique car elle est l’allié du capital. Le capital détourne l’attention pour que nous ne comprenions pas qu’il nous dévore et confisque notre jouissance.

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© Dialogue, le samedi 04 janvier 2020

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