18 04 20/ REVUE DE LA PRESSE CONGOLAISE DE CE SAMEDI (Dialogue)
Sommaire
Les articles des médias congolais de ce samedi 18 avril 2020 s’intéresent essentiellement aux actes du gouvernement, qu’il s’agisse de l’état d’urgence ou de la lutte contre l’épidémie. La presse internationale évoque les mêmes sujets et se demande surtout si « l’affaire Kamerhe » prélude à une opération pllus large, dans le style « Balayer les Pourris » ou « Coup de Torchon ».
Etat d’urgence
Museza Cikuru explique, sur MediaCongo.net « le Gouvernement adopte le projet d’ordonnance portant prorogation de la durée de l’État d’urgence
« Le président de la République, Félix-Antoine Tshisekedi a présidé ce vendredi 17 avril 2020, par vidéo-conférence, un conseil des ministres restreint.
Il ressort de cette réunion qui s’est ténue à la Primature, sans le Président de la République qui n’intervenait qu’à distance, l’adoption du projet d’ordonnance portant prorogation de l’état d’urgence sanitaire qui expire dans 5 jours.
Il a également été adopté le projet d’ordonnance, portant mesures complémentaires nécessaires pour faire face à l’épidémie au Covid-19, rapporte le compte-rendu du ministre de la communication Jolino Makelele, porte-parole du Gouvernement.
Ont pris part à ce conseil, seuls le Premier Ministre Ilunga Ilunkamba, le VPM Ministre de la justice et garde des sceaux, le VPM du Budget, le Ministre d’Etat, ministre de la Décentralisation et Réformes Institutionnelles, le Ministre d’Etat, ministre de la Coopération Internationale, Intégration Régionale et Francophonie, le Ministre d’Etat, ministre de la Communication et des Médias, le Ministre de la Santé, le Ministre des Relations avec le Parlement, le Ministre des Affaires Sociales, le Ministre Délégué auprès du ministre de l’intérieur, Sécurité et Affaires Coutumières, ainsi que le Secrétaire Général du Gouvernement.
La dernière réunion du conseil des ministres avait eu lieu le 13 mars dernier en pleine pandémie de Covid-19. Le 20 mars, le président Félix Tshisekedi avait suspendu jusqu’à nouvel ordre les réunions du conseil des ministres.
Suite à ce projet de loi, il y a lieu d’exclure de plus en plus, la possibilité d’allégement des mesures, comme la rouverture des écoles, universités, églises, ou les frontières, pour une pandémie qui n’a pas reculé depuis sa déclaration en RDC, le 10 mars 2020.
Le comité de riposte a rapporté ce vendredi 20 nouveaux cas confirmés à Kinshasa, qui portent à 307 le cumul, avec 20 guéris et 25 personnes décédés.
Quatre provinces sont jusque-là touchées en dehors de Kinshasa, qui atteint seule 295 cas confirmés. Il s’agit du Nord-Kivu 5 cas, Sud-Kivu 3 cas, Ituri 2 cas et Kwilu 1 cas ».
Le Potentiel publie une Tribune de Claude MANGULI, Juriste installé à Paris « Étatl d’urgence : Pourquoi l’article 119 de la constitution est mal écrit ? »
« Pour faire face à l’épidémie Covid 19, le Président de la République a décrété l’état d’urgence le 24 mars 2020. Il est incontestable qu’aux termes de la Constitution, la proclamation de l’état d’urgence relève de la prérogative du Président de la République seul.
Le Président du Sénat, sans remettre en cause l’opportunité de l’état d’urgence, estime néanmoins que sa déclaration par le Président de la République était subordonnée à l’autorisation préalable du Parlement réuni en Congrès. Le Président de la Chambre haute du Parlement a basé son argumentation sur l’article 119 de la Constitution.
Il s’en est suivi une mini-crise institutionnelle et constitutionnelle au cours de laquelle des juristes de toutes branches du droit se sont escrimés avec un acharnement féroce, pilonnant l’opinion d’argumentations contradictoires, selon qu’ils étaient du bord présidentiel ou du camp parlementaire, et contribuant ainsi à embrouiller le débat, au lieu de l’éclairer.
Dans cette contribution, nous avons fait le choix de faire totalement abstraction des démonstrations partisanes des uns et des autres, et de ne nous focaliser que sur le texte de la discorde : l’article 119.
Et en examinant cet article sous toutes ses coutures, nous avons découvert, avec stupéfaction, que c’est lui le coupable de toute cette agitation : IL EST MAL ECRIT !
Il est mal rédigé en son point 2°, d’abord en ce qu’il opère un renvoi fâcheux, ensuite et surtout par la soumission erronée des situations qu’il vise au même régime d’autorisation. Et nous verrons que c’est cette double maladresse du Constituant qui est à la base de la crise actuelle.
Nous n’évoquerons pas dans ces lignes l’état de siège car, d’une part, tel n’est pas l’objet du débat, et, d’autre part, la Constitution l’assimile systématiquement à l’état d’urgence dans son traitement constitutionnel, bien que, dans la pratique, ces deux situations soient soumises à des modalités législatives et administratives différentes.
Le mauvais renvoi de l’article 119
Lorsqu’on lit attentivement l’article 119, on s’aperçoit que son unique objet se limite à énumérer mécaniquement les cas de tenue du Congrès.
En son point 2°, pour ce qui concerne l’état d’urgence, l’article 119 renvoie à l’article 85 de la Constitution. De ce point de vue, en ne conservant que les éléments du texte qui intéressent notre débat, la proposition de la Constitution peut s’écrire de la façon suivante : « Les deux Chambres se réunissent en Congrès pour… l’autorisation de la proclamation de l’état d’urgence… conformément aux articles 85 et 86 de la présente Constitution ».
Or, l’article 85, sur lequel l’article 119 prend appui pour justifier la réunion des Chambres en Congrès, ne mentionne aucunement… le Congrès. L’article 85, après avoir posé le principe de proclamation de l’état d’urgence par le Président de la République, se contente d’énumérer les personnalités avec lesquelles le Président de la République est appelé à se concerter. On ne trouve la moindre allusion au Congrès dans cet article 85 qui, en définitive, n’est pas pertinent pour la justification de la réunion des deux Chambres en Congrès.
La seule disposition constitutionnelle qui comporte l’organisation procédurale de l’état d’urgence incluant la réunion des deux Chambres en Congrès réside dans l’article 144, auquel le Constituant a oublié de faire renvoi dans l’article 119.
Car, c’est conformément à l’article 144 que les deux Chambres se réunissent en Congrès, et non l’article 85 !
Il s’agit là, assurément, d’une mégarde du Constituant, puisque l’article 85, auquel il est malencontreusement fait renvoi et qui ne pose pas de condition d’autorisation, entre immédiatement en conflit avec l’article 119 qui, lui, subordonne la proclamation de l’état d’urgence à l’autorisation du Congrès.
L’autorisation de proclamation
Nous rappelons que l’article 119 se contente de rassembler en un seul endroit les causes d’occurrence du Congrès déjà prévues et réglementées par d’autres articles disséminés à travers la Constitution. Ce qu’accrédite la répétition systématique de la formule « conformément à l’article… ou conformément aux articles… » contenue dans chacun des quatre cas recensés. Ainsi donc, l’article 119 ne crée ni ne réglemente, par lui-même, aucune cause pour la tenue du Congrès. Pour découvrir l’aménagement procédural d’un cas de Congrès, il convient donc de se reporter sur les articles auxquels renvoie l’article 119 pour chaque cas.
En ce qui concerne la déclaration de guerre, les articles 86 et 143 stipulent que cette prérogative appartient au Président de la République, avant de préciser expressément que celui-ci ne peut exercer ce pouvoir seulement « après autorisation » de l’Assemblée nationale et du Sénat, donc du Congrès.
En revanche, pour ce qui est de l’état d’urgence, son aménagement procédural qui réside, nous l’avons vu, dans l’article 144, ne prévoit aucun préalable d’autorisation pour sa proclamation par le Président de la République. La seule exigence d’autorisation que mentionne l’article 144 est celle que doit obtenir auprès du Congrès le Président de la République, avant toute prorogation de l’état d’urgence.
En stipulant que « Les deux Chambres se réunissent en Congrès pour…l’autorisation de la proclamation de l’état d’urgence ou de l’état de siège et de la déclaration de guerre… », l’article 119 sort de son rôle strict de simple énumération en soumettant, par erreur d’inadvertance du Constituant, l’état d’urgence et la déclaration de guerre au même régime d’autorisation, alors que les articles 143 et 144 qui réglementent de ces deux situations, prévoient deux régimes bien distincts.
Cette erreur d’inattention du Constituant, combinée avec le mauvais renvoi qu’opère l’article 119 vers l’article 85, conduit fatalement au conflit entre ces deux textes. Ce conflit qui aurait dû demeurer un cas d’école, a débordé la sphère théorique pour se concrétiser entre le Président de la République et le Président du Sénat à la faveur de l’épidémie Covid 19. Si nous osons dire…
Si la Cour constitutionnelle a mis fin à la crise en décidant que la proclamation de l’état d’urgence le 24 mars dernier par le Président de la République n’était pas inconstitutionnelle, le Président du Sénat n’est cependant pas à blâmer, loin de là, car il s’est basé sur un texte clair, mal rédigé certes, mais clair.
En effet le funeste article 119 stipule clairement et sans ambigüité que les deux Chambres se réunissent en Congrès pour l’autorisation de la proclamation de l’état d’urgence. Il y a donc, d’un côté, des juristes qui brandissent la règle selon laquelle on n’interprète pas un texte clair, on l’applique. De l’autre côté, il y en a ceux qui se prévalent de règles d’interprétation téléologique, contextuelle, etc.
Or une disposition de la Constitution ne devrait pas être confuse, ni prêter le flanc à interprétation, spécialement celles qui, comme l’article 119, associent temporairement des institutions pour la gestion de situations sensibles.
Les juristes devraient donc taire leurs préférences partisanes, redevenir hommes et femmes de droit et avoir le courage de reconnaître que le Constituant s’est trompé au sujet de l’article 119. Toujours au sujet de cet article 119, le Constituant s’est également trompé en oubliant d’inclure dans son recensement le cas de tenue du Congrès pour la mise en accusation du Président de la République et du Premier ministre conformément à l’article 166.
Puisque la décision de la Cour constitutionnelle s’est penchée du côté présidentiel, et pour en tirer toutes les conséquences, nous souhaitons que l’article 119 soit réécrit afin de préserver la Nation de ce genre de turbulences dans l’avenir. Il ne s’agira pas d’une révision constitutionnelle mettant en œuvre la lourde mécanique de l’article 218, mais d’une simple rectification de texte autour d’un consensus entre Juristes et Politiques.
Pour notre part, nous proposons la rédaction suivante pour le nouvel article 119, après avoir modifié le point 2° et ajouté le point 5° :
Article 119
Les deux Chambres se réunissent en Congrès pour les cas suivants :
la procédure de révision constitutionnelle, conformément aux articles 218 à 220 de la présente Constitution ;
l’autorisation de la déclaration de guerre et de la prorogation de l’état d’urgence ou de l’état de siège conformément aux articles 143 et 144 de la présente Constitution ;
l’audition du discours du Président de la République sur l’état de la Nation, conformément à l’article 77 de la présente Constitution ;
la désignation des trois membres de la Cour constitutionnelle, conformément aux dispositions de l’article 158 de la présente Constitution ;
la décision de poursuites ainsi que la mise en accusation du Président de la République et du Premier ministre, conformément aux dispositions de l’article 166 de la présente Constitution.
Par la même occasion, on en profitera pour redresser l’erreur matérielle contenue dans le cinquième alinéa de l’article 144, car le délai qu’il croit viser à l’alinéa 3 se trouve en fait à l’alinéa 4.
Et, dans la foulée, on corrigera également l’erreur de sémantique figurant à l’alinéa 1er de l’article 143 in fine : remplacer « autorisation de deux Chambres » par « autorisation des deux Chambres », car les Chambres dont il est question sont toutes bien déterminées et ne sont qu’au nombre de deux.
Pourvu qu’il n’y ait pas d’autres errements…
Lorsqu’on tarde à réparer les fissures dans un mur, celui-ci finira un jour par tomber sur vous ».
DigitalCongo titre « Assemblée Nationale : des preuves exigées à Kabund après ses propos sur le coût financier d’un congrès »
« Dans un communiqué signé ce vendredi 17 avril, le député MLC, Jean-Jacques Mamba demande au premier vice-président de l’Assemblée nationale de lui fournir un budget et autres éléments qui soutiennent ses propos.
Dans une interview accordée à Top Congo Fm le dimanche 12 avril dernier, le vice-premier de l’Assemblée nationale, Jean-Marc Kabund, s’alignant contre la convocation d’un congrès pour acter la mesure d’état d’urgence du chef de l’Etat comme le souhaitait le président du Sénat, a déclaré que ce rassemblement coûte au Trésor public 7 millions de dollars.
Cinq jours après, le député MLC, Jean- Jacques Mamba exige des justifications à Kabund.
» Considérant votre rang et qualités, considérant aussi que vous nous représenter valablement, je vous demande de nous fournir par courrier le budget et autres éléments qui soutiennent vos propos qui, dans une mesure non des moindres, ont affecté notre crédibilité collective au point de nous empêcher de débattre librement sur nos propres lois », peut-on lire dans une correspondance signée ce vendredi 17 avril par Jean-Jacques Mamba qui dit prendre très au sérieux les allégations de Kabund.
La cour constitutionnelle a fini par juger conforme l’ordonnance du chef de l’Etat sur l’état d’urgence sans passer par un congrès. Mais, visiblement, la page de cet épisode n’est pas totalement tournée ».
Covid-19
Mediacongo.net annonce que « le conseil de sécurité de Kinshasa propose le confinement total de Limete et Kintambo, après Gombe »
« Au cours de la réunion du conseil de sécurité de la ville de Kinshasa, tenu ce vendredi 17 avril 2020, il a été proposé le confinement total des communes de Limete et Kintambo, après celle de Gombe, a annoncé le porte-parole du gouvernement provincial de Kinshasa, Charles Mbutamuntu Lwanga.
Mais cette proposition devra être présentée au vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur, Gilbert Kankonde.
Il a été également abordé la question du port obligatoire du masque, l’instauration d’un couvre-feu de 20h à 5h ainsi que le déconfinement progressif, dès ce mardi 21 avril, de la commune de la Gombe.
Le gouverneur de la ville de Kinshasa, Gentiny Ngobila, devra donc faire rapport au Premier ministre et au vice-Premier ministre en charge de l’Intérieur qui devront analyser ces propositions, avant leur validation ».
Selon la même source: «L‘équipe de riposte se fixe l’objectif d’épargner le district de la Tshangu »
« L’équipe de riposte contre le covid-19 se fixe l’objectif ultime d’épargner le district populaire de la Tshangu, à l’Est de la ville de Kinshasa, jusque là non touchée par la pandémie.
C’est l’une des décisions qui a été prise ce vendredi 17 avril au cours d’une réunion présidée par le gouverneur de la ville de Kinshasa, Gentiny Ngobiila, le Coordonnateur de l’équipe de riposte Jean-Jacques Muyembe, le commissaire provincial de la police, Sylvano Kasongo et l’administrateur -délégué de la FEC, Kimona Kinonge.
Au cours de la même réunion, les participants ont aussi évalué le confinement de la commune de la Gombe, épicentre du covid-19 dans la capitale, déclaré le 06 avril dernier et étudié le moyen de la déconfiner progressivement.
L’équipe de riposte contre le Covid-19 dans la capitale sera reçue ce samedi 18 avril par le Premier ministre, Sylvestre Ilunga, afin de lever une option à ce sujet. Il sera également question de voir comment confiner les autres communes.
La RDC compte officiellement à ce jour, 287 cas de contaminations au covid-19. Au total, 23 décès ont été dénombrés et 25 personnes ont été guéries ».
Presse et documents internationaux
Des dirigeants africains rejettent les critiques de Trump et expriment leur soutien au chef de l’OMS
VOA Afrique – 08 avril 2020
Mercredi, des dirigeants africains ont repoussé les critiques du président américain Donald Trump à l’endroit de l’agence de la santé de l’ONU et ont exprimé ouvertement leur soutien à son chef, le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus.
Lors d’une conférence de presse la veille à Washington, le président Trump avait menacé de « geler fortement » les contributions américaines au budget de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Un certain nombre de sénateurs républicains ont ouvertement affiché leur soutien à ces critiques.
Les choses se sont passées autrement du côté africain.
La rétorque initiale est venue du président de la Commission de l’Union africaine, le Tchadien Moussa Faki Mahamat, qui a écrit sur son compte Twitter qu’il était « surpris » que les autorités américaines au plus haut niveau attaquent l’OMS plutôt que de mettre l’accent sur « la lutte collective contre le Covid-19 « .
Un geste inhabituel pour le fin diplomate tchadien, qui a ajouté sans ambages que l’Union africaine « soutient pleinement » l’OMS et le Dr Ghebreyesus.
Quelques minutes plus tard, c’est au tour du président namibien Hage Geingob de faire de même. Il répond au tweet de M. Mahamat: « Je suis d’accord avec vous, mon frère ». Le Dr Ghebreyesus, a-t-il ajouté, a fait de l’OMS « un véritable porte-étendard du multilatéralisme » à un moment crucial de l’histoire.
Selon le président namibien, la critique de Trump arrive au mauvais moment. « Concentrons-nous sur ce qui compte vraiment, à savoir sauver des vies », précise-t-il.
Le président du Rwanda, Paul Kagamé, s’est aussi impliqué. « Épargnez-nous la politisation à outrance, car l’Afrique n’en a pas besoin », écrit-il sur son compte Twitter.
Agé de 55 ans, Tedros Adhanom Ghebreyesus est un ancien ministre de la santé d’Ethiopie. Mi-médecin mi-politicien avisé, il n’a pas bronché face aux attaques du président Trump.
Des attaques au goût amer pour le Dr Ghebreyesus.
Mardi c’était justement la Journée mondiale de la santé. Un jour important dans le calendrier annuel de l’OMS. Ces attaques interviennent aussi au moment où l’OMS est sur le point de déclarer une victoire majeure dans la lutte contre l’épidémie d’Ebola en République démocratique du Congo.
Pour l’heure, aucune déclaration officielle de l’OMS ou de ses dirigeants concernant les propos du chef de l’Etat américain.
Kamerhe en prison: lutte contre la corruption et politique
Colette Braeckman – le Soir – le 9 avril 2020
Directeur de cabinet de Félix Tshisekedi, Vital Kamerhe est en prison
Les impératifs de la lutte contre la corruption peuvent aussi cacher des manœuvres politiques.
La convocation devant le parquet général de Kinshasa puis la détention provisoire d’un homme aussi puissant que Vital Kamerhe a sidéré les Congolais : réputé intouchable, le directeur de cabinet du président de la République a passé la nuit à Makala, la prison centrale de Kinshasa et cela alors même qu’un millier de détenus étaient élargis pour éviter la contamination par le coronavirus.
La journée d’interrogatoire avait été longue pour ce politicien chevronné, qui est aussi le président de l’UNC, (Union pour la nation congolaise), une formation très bien implantée au Kivu et qui a formé avec l’UDPS, le parti du président Tshisekedi la coalition CACH (cap pour le changement). Durant plusieurs heures le directeur de cabinet du chef de l’ Etat a du expliquer où étaient passés les budgets qui auraient du financer les grands travaux que le président a fait entamer dans la capitale et en particulier les contournements « saute mouton » qui ont paralysé la ville. Au titre de l’urgence, les contrats avaient été conclus par le directeur de cabinet du président, sans appel d’offres et dans une opacité complète. Une inspection ayant révélé en début d’année que les travaux étaient loin d’être terminés, la justice a été saisie de l’affaire et, convoqué au Parquet comme simple « renseignant », Vital Kamerhe a été interrogé sans ménagements puis mis en accusation.
Quelques jours auparavant, le patron de Safricas Congo, le DG de la Rawbank et plusieurs autres personnalités impliquées dans la construction des ouvrages d’intérêt public avaient eux aussi été mis sur la sellette et, pour certains, envoyés à Makala d’où ils sortirent moyennant le paiement de fortes cautions et, peut-être la communication de certains documents.
Quelle que soit l’issue de ses démêlés avec la justice et même s’il ne passe en détention qu’un temps limité, la mise en accusation de Vital Kamerhe aura de graves conséquences. Pour lui-même d’abord. En effet, cet homme politique brillant, habile, pouvait dire sans se vanter « j’ai fait Kabila, je ferai Tshisekedi ». En effet, c’est lui qui, alors président de l’Assemblée nationale, avait accompagné Joseph Kabila dans ses premières années à la présidence après avoir participé aux négociations de paix de Sun City qui avaient marqué la fin de la guerre en 2002. Par la suite, ayant rompu avec Kabila qui avait autorisé les troupes rwandaises à revenir au Kivu, Kamerhe démissionna de son poste avec fracas et se retrouva dans l’opposition. Lors de sa traversée du désert il se lia d’amitié avec Michel Rocard qui voyait en lui l’un des politiciens les plus prometteurs de sa génération, l’un des seuls à défendre un vrai projet politique.
Même si Kabila le considérait comme un traître, l’opinion se demanda toujours si les ponts avaient réellement été rompus entre le président sortant et celui que la presse appelait parfois « Kamerheléon » et qui demeurait populaire dans l’Est du pays. Il est certain en tous cas que Kamerhe pilota deux manœuvres de haut vol : l’alliance avec le parti UDPS de Tshisekedi à la veille des élections de décembre 2018 qui mena à la coalition CACH et, après le scrutin, la conclusion d’un accord de coalition avec la plate forme qui avait soutenu Kabila, le Front commun pour le changement. Un dénouement surprenant, qui mena Félix Tshisekedi à la présidence et Kamerhe au poste de directeur de cabinet, dans l’attente, peut-être, de pouvoir se présenter aux élections présidentielles de 2023.
Proche du sommet, Kamerhe commit cependant plusieurs imprudences : si son très coûteux mariage « bling bling » avec Amida Shatur, l’ex épouse de la star J.B. Mpiana aussi belle qu’intelligente, l’introduisit dans le milieu des musiciens de la capitale, il fut mal vu par les électeurs de base tandis qu’une première affaire, la disparition de 15 millions de dollars, défrayait la chronique.
Pilier de la coalition avec les FCC de Kabila, Kamerhe était aussi une cible : depuis longtemps les Occidentaux, Américains en tête, pressent Félix Tshisekedi de lutter plus énergiquement contre la corruption, fût ce dans ses propres rangs et de distendre les liens entre son régime et celui de son prédécesseur. Ces pressions se traduisirent par la mise à pied ou la disparition de plusieurs généraux , dont le général Kahimbi et l’interpellation de personnalités proches de l’ex président. Dans ce sens Kamerhe, au nom de la lutte contre la corruption, pourrait avoir été la victime d’un nouveau coup de balai, sauf que la probable mise à l’écart de ce politicien hors pair risque d’affaiblir le président lui-même, même si ce dernier a eu le courage de porter le fer dans la plaie.
Il faut noter aussi que, derrière le Parquet de Matete qui a emprisonné Kamerhe, se trouve le Ministre de la Justice Tunda ya Kasende, politiquement proche de Joseph Kabila et de son éphémère dauphin Emmanuel Shadary. Alors que sous le régime précédent des milliards de dollars se sont envolés, en toute impunité, la mise à l’écart de Kamerhe, pare-feu de Tshisekedi et artisan de la coalition CACH, pourrait aussi être interprétée comme « un coup de billard à trois bandes », autrement dit un coup tordu…
Covid 19: des masques à la demande
Colette Braeckman – le Soir – le 10 avril 2020
Des « surmasques » à la demande
Ils en ont eu l’idée, ils l’ont fait : au vu du manque de masques à la disposition des soignants, les « Fablabs » de l’ULB, d’Andenne et de Charleroi ont créé un modèle de « surmasque » sorte de visière intégrale qui se porte au dessus des masques chirurgicaux classiques. Les images télévisées montrent chaque jour que cette visière de plastique, qui couvre tout le visage et protège donc aussi les yeux et les muqueuses est aujourd’hui largement utilisée dans les établissements de soins. Ce que l’on sait moins, c’est que cette innovation ne résulte pas seulement de la conjonction de la recherche universitaire et du système D, mais qu’elle est aussi le produit d’un formidable bénévolat.
En effet, si 5000 masques de plastique ont déjà pu être distribués, c’est parce qu’au départ un organisme privé, la Fondation Michel Cremer (du nom d’un gastro entérologue de l’hôpital Erasme) s’est enthousiasmée pour le projet et a décidé d’y investir un premier montant de 10.000 euros. Cette somme a permis d’acheter, au prix coûtant, la matière première, c’est-à-dire des feuilles de plastique A 4, de ces feuilles que l’on utilise pour faire des « slides » sur les anciens rétroprojecteurs.
Aujourd’hui, animés par des bénévoles, les Fablabs tournent à plein régime, à raison d’un millier de masques par jour, répondant aux besoins des hôpitaux, des maisons de repos où des volontaires acheminent les visières au fil des demandes.
Cécile Sztalberg, directrice de la Fondation Michel Cremer, estime que la production et la distribution pourraient aujourd’hui aller plus loin : « certains fournisseurs ont mis à notre disposition les matériaux au prix coûtant, les bénévoles assurent la distribution gratuite et nous avons aussi les moyens d’aller au-delà des établissements de soins. Tous ceux qui, pour des raisons professionnelles estiment avoir besoin de cette visière protectrice peuvent en faire la demande en nous adressant un mail (covid@michelcremerfoundation.eu), mentionnant à quelle structure ils appartiennent, leur nom et adresse et le téléphone d’ un responsable. Ils recevront alors une visière, gratuitement. Quant à ceux qui souhaitent soutenir financièrement la fondation afin de lui permettre de couvrir les frais de fabrication et d’acheminement, ils sont évidemment les bienvenus… »
Comment le coronavirus risque de fragiliser encore le Kivu
KST – 10 avril 2020
(Ce billet de blog a été mis à jour mercredi 15 avril 2020 pour rendre compte la résurgence de l’épidémie d’Ebola).
Au cours des 20 derniers mois, l’Est du Congo a combattu la plus longue et complexe épidémie d’Ebola de l’histoire du pays. Elle a aussi été la plus meurtrière, fauchant 2 276 personnes.
Mais un nouveau mal transmissible est apparu : le coronavirus, ou COVID-19. Depuis le 29 mars, date de l’annonce des deux premiers cas confirmés à Bukavu, la pandémie touche à son tour officiellement le Kivu.
Cette analyse tente d’anticiper les effets que pourrait avoir cette nouvelle épidémie sur la paix et la sécurité dans le Kivu, même si peu de précédents permettent de fonder des prévisions. Le COVID-19 est la première pandémie à coronavirus de l’histoire. Elle n’en est encore qu’à ses débuts dans le monde et plus encore sur le continent africain. Surtout, elle n’a encore jamais touché de zone de conflit.
Si l’épidémie d’Ebola récente peut fournir des enseignements intéressants, les deux situations sont distinctes. L’épidémie d’Ebola n’a touché qu’une zone circonscrite aux provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri. Bien que sa létalité était très forte (plus de la moitié des malades décédaient) la maladie n’était transmissible que lors de l’apparition de symptômes spectaculaires aisément identifiables et donc traçables. Un vaccin a pu être utilisé pour aider à contrôler la contagion. Enfin, la RDC a reçu une aide de la communauté internationale importante pour y faire face : plus de 800 millions de dollars au total. Le personnel de santé est devenu une cible et la captation de ressources allouées par la communauté internationale un enjeu, qui semble avoir accentué les conflits.
A contrario, l’épidémie de COVID-19 n’a de cesse de s’étendre géographiquement et rien n’indique qu’elle restera cantonnée à certaines poches dans l’Est de la RDC. Les stratégies de contrôles par traçage et isolement sont extrêmement ardues face à ce virus, qui peut être transmis par des porteurs asymptomatiques et seuls quelques pays au monde (Singapour, Taïwan, la Corée du Sud, le Japon ou encore le Vietnam) sont provisoirement parvenus à les appliquer avec succès. Tous étaient des pays dotés d’États forts et il n’est pas certain que la RDC dispose de cette capacité, en particulier dans l’Est. Enfin, il s’agit d’une pandémie affectant tous les continents. Si la Chine et l’Union européenne se sont engagés à aider le continent (l’Union européenne a notamment annoncé qu’elle « garantissait » 15 milliards d’euros d’aide) cette assistance, consentie au continent dans son ensemble, sera nécessairement plus diluée que la riposte contre Ebola.
Dans ces conditions, toute analyse prospective est nécessairement spéculative et les tendances avancées ici ne peuvent être, au mieux, que provisoires.
Conséquences observables
L’arrivée du virus dans la région a toutefois, d’ores et déjà eu des conséquences observables dans le Kivu. Tous les Etats limitrophes ont fermé leurs frontières aux voyageurs : c’est le cas du Burundi depuis le 15 mars, du Rwanda depuis le 21 et l’Ouganda depuis le 23. Ces décisions ont coupé des voies de communications régulièrement empruntés par les Kivutiens, comme la route Bukavu – Goma via Kibuye au Rwanda, ou encore la route Bukavu – Uvira via le Rwanda et le Burundi. Une partie du trafic s’est donc reportée vers des routes en moins bon état et ou plus dangereuses, exposant les voyageurs à davantage de risques. Une hausse de l’insécurité a ainsi été constatée début avril dans la plaine de la Ruzizi, sans que l’on puisse directement la relier aux fermetures des frontières. Par ailleurs, les autorités provinciales ont décidé de fermer les voies d’accès aux principaux centres urbains de la région que sont Bukavu, Goma, Butembo et Beni.
Ces restrictions ne s’appliquent en principe pas aux marchandises. Néanmoins, certains témoignages recueillis par le KST indiquent que ces décisions sont interprétées de manière maximalistes et ont, dans les faits, ralenti le commerce. Une grande partie des échanges dans la région est, de surcroît, le fait de petits commerçants qui se déplacent physiquement avec leurs produits. Par ailleurs, ces frontières – notamment celle entre Goma et Gisenyi, au Rwanda, sont, en temps normal, traversées quotidiennement par des milliers de travailleurs journaliers.
La crise a donc déjà entraîné la perte de ces activités économiques ainsi que l’augmentation des prix des biens de première nécessité ce qui rogne le pouvoir d’achat des habitants. Le 26 mars, peu après la fermeture des frontières, l’inflation atteignait déjà entre 5 et 88% sur les produits de première nécessité selon les relevés du KST à Goma.
Mais la situation économique pourrait s’aggraver encore si les autorités locales adoptaient des mesures de confinement total, comme celles mises en place dans la commune de la Gombe, à Kinshasa depuis le 6 avril. Celles-ci pourraient avoir des conséquences dévastatrices sur l’emploi et les revenus dans des villes où le salariat est l’exception, le travail à distance rarement possible et le secteur informel représente l’essentiel des postes (le secteur informel urbain représentait 81,5% des emplois en 2012 en RDC). Si elles étaient décidées, ces mesures pourraient en outre générer des tensions en portant atteinte aux intérêts fondamentaux d’une partie significative de la population.
Par ailleurs, le ralentissement économique international touche également le Kivu. Comme lors des crises économiques précédentes, l’envoi de fonds par la diaspora, surreprésentée dans les couches les plus vulnérables des sociétés industrialisées, pourraient se tarir. Les prix des matières premières, sur les marchés internationaux, ont par ailleurs significativement baissé. L’impact est déjà visible, notamment, sur les cours de l’étain dont le minerais, la cassitérite, est notamment extrait des territoires de Walikale et de Shabunda.
Néanmoins, la valeur d’autres minerais produits dans le Kivu comme l’or, considéré comme une valeur refuge, s’est maintenue à un niveau historiquement élevé.
Les conséquences sécuritaires du ralentissement économique global restent toutefois difficiles à anticiper. Le marasme économique, en particulier lorsqu’il touche les jeunes, pourrait faciliter les recrutements par les groupes armés. Néanmoins la précédente crise financière mondiale, en 2008 et 2009, n’a pas eu d’impact clair sur l’ampleur des conflits. L’année 2009 a même été une année de relatif apaisement, avec notamment la signature des accords du 23 mars, mettant fin à la rébellion la plus puissante d’alors, le Congrès national pour la défense du peuple (CNDP). Ces accords s’expliquent toutefois bien plus par les reconfigurations régionales que par la crise économique internationale.
Mesures préventives
Surtout, les effets de l’épidémie de coronavirus ne se limitent pas à la sphère économique et affectent l’ensemble des acteurs de diverses manières. La mission de l’ONU en RDC (Monusco) est par exemple touchée de façon inédite par cette crise. Bien qu’aucun cas n’a été recensé à ce jour dans ses rangs (selon les déclarations de son porte-parole au KST) elle a pris des mesures préventives pour ne pas devenir un vecteur de l’épidémie.
Elle encourage son personnel à risque à retourner dans son pays d’origine. Ses civils restés en RDC doivent travailler à distance depuis leur domicile. Et les rotations de personnel en uniforme ont été suspendues pour une durée initiale de trois mois, ce qui pourrait peser, à moyen terme, sur le moral des troupes. Le réseau de liaisons aériennes régulières de la Monusco (le plus dense du pays) a été suspendu, ce qui pose des problèmes logistiques pour les nombreuses organisations qui y ont recours, y compris les FARDC.
Malgré ces précautions, les réactions hostiles des communautés locales à l’égard des agents de l’ONU pourraient se multiplier, le coronavirus étant pour l’instant largement vu comme un problème venu de l’étranger. Ce type de phénomène a notamment été observé par le KST à de nombreuses reprises lors de l’épidémie d’Ebola. Et des réactions hostiles à l’égard des étrangers ont également été constatés à Kinshasa depuis le début de l’épidémie de coronavirus.
Au cours des mois qui viennent, les pays donateurs de la mission, en troupe comme en financement, pourraient concentrer leurs ressources sur leur territoire, faisant passer la crise dans le Kivu au second plan de leurs préoccupations. Enfin, les initiatives de médiation et de démobilisation des groupes armés, qui nécessitent des voyages, des réunions et des regroupements, risquent d’être rendues plus difficiles par les mesures destinées à lutter contre la crise sanitaire. Certains camps où étaient regroupés des combattants ont déjà été fermés, comme à Mubambiro, près de Sake, avec de probables conséquences négatives pour la sécurité.
Il découle de ceci que l’efficacité de la Monusco devrait être réduite pour plusieurs mois. Sa capacité à maintenir la pression sur les groupes armés, déjà insuffisantes pour beaucoup de congolais, devrait être encore affaiblie.
Impact régional
Les pays de la région, souvent plus insérés dans l’économie internationale, devraient également être durement touchés par la crise. Le Rwanda, en particulier, a largement investi ces dernières années dans le transport aérien, le tourisme et les conférences. L’impact exceptionnellement important de la crise du coronavirus sur ces secteurs pourrait provoquer un choc conduisant au réexamen des priorités du pays.
Par ailleurs, si la crise y provoquait de la contestation dans les pays voisins, notamment au sein des élites, une focalisation vers l’extérieur – et notamment vers la RDC – pourrait être une stratégie de survie des pouvoirs en place. Ce choc intervient de surcroit dans une période où la défiance entre l’Ouganda, le Rwanda et le Burundi est exceptionnellement importante, malgré les efforts de la RDC pour les rapprocher.
La guerre par procuration que se livrent ces pays sur le sol congolais, notamment sur les hauts-plateaux du Sud-Kivu, pourrait en conséquence se maintenir, voire se renforcer. La maîtrise des circuits de contrebande, notamment pour les ressources ayant conservé leur valeur comme l’or, pourrait revêtir une importance plus grande encore au niveau régional.
Par ailleurs, les forces de sécurité congolaises risquent de faire face à des difficultés croissantes. L’imposition des mesures distanciation sociale risque de les obliger à affecter leurs ressources, très limitées, prioritairement aux espaces urbains. Par ailleurs, dans le Kivu, le maintien de l’ordre mène fréquemment à des abus, lesquels peuvent dégénérer en conflits locaux. Enfin, la crise budgétaire de l’Etat congolais, qui devrait s’accentuer notamment du fait du ralentissement économique global, devrait rendre le financement des opérations militaires plus ardu. Même si la Monusco entend tout mettre en œuvre pour continuer à appuyer les FARDC dans leur action contre les groupes armés – notamment les Forces démocratiques alliées (ADF) sur le territoire de Beni – l’affaiblissement des FARDC comme de la Monusco risque d’avoir un impact négatif sur ces opérations.
Les groupes armés et les milices, enfin, devraient être également touchés par la crise en cours. Même si elle est difficile à quantifier, une partie importante de leurs revenus provient de taxes imposées sur les barrages routiers, où l’activité a déjà décru, et ce de manière probablement durable.
Ceci pourrait inciter ces groupes à avoir recours à d’autres moyens, notamment violents, pour combler leur manque à gagner : les cas de kidnappings contre rançon, de pillage et d’enlèvements pourraient se multiplier. Par ailleurs, la maîtrise des circuits de contrebande pourrait devenir un enjeu plus important encore.
De plus, le développement des groupes d’autodéfense (Mai-mai ou Raia Mutomboki) a été historiquement lié à des menaces perçues comme extérieures, comme la présence des armées des pays voisins dans les années 1990 ou celle de rébellions soutenues par l’étrangers dans les années 2000 et 2010. Même si la pandémie de coronavirus est une menace de nature différente, les groupes armés pourraient exploiter ce besoin de sécurité en contrôlant par exemple les mouvements dans les communautés, ce virus étant pour le moment largement vu comme une menace venue de l’extérieur.
Enfin, la volonté de s’approprier une partie de l’aide internationale allouée à la lutte contre la maladie – que celle-ci s’avère finalement significative ou non – pourrait contribuer à entretenir l’insécurité, comme ce fut le cas lors de l’épidémie d’Ebola.
Paralysie de la communauté internationale, renforcement des conflits régionaux, affaiblissement de l’Etat… Si elles se confirment, ces tendances pourraient favoriser l’émergence de nouvelles milices et groupes armés, accélérant la fragmentation du paysage sécuritaire dans le Kivu. En une décennie, le nombre de groupes armés recensé est passé de 30 à plus de 130. Ils pourraient être plus nombreux encore au sortir de la crise du coronavirus.
ANTHROPOLOGIE DE L’IRRESPONSABILITE ECONOMIQUE EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO.
Patience Kabamba – LE MOT DU WEEKEND – 11 Avril 2020)
En ce weekend pascal doublement historique pendant lequel les chrétiens commémorent la résurrection du Christ, le MDW présente à ses lecteurs les vœux de voir disparaitre la pandémie du coronavirus et l’angoisse existentielle qu’elle traine avec elle.
Que le monde nouveau ressuscite des cendres du Covid-19 alors que nous vivons dans l’espérance que nos bien-aimés emportés par cet invisible virus monocellulaire ressusciteront avec le Christ !
Je disais que ce weekend pascal était doublement historique dans ce sens que depuis que l’Eglise Catholique post-tridentine existe et depuis que les fêtes pascales ont été instituées, c’est la première fois que les célébrations pascales se font sous confinement à cause de la pandémie covd-19 ; pas des grandes, solennelles et longues célébrations pascales auxquelles nous sommes habitués.
Le deuxième élément historique qui marque ce weekend pascal est la détention préventive du Directeur du cabinet du Président de la République soupçonné des détournements des deniers publics. C’est en effet la première fois que dans un pays habitué aux enrichissements illicites des politiques, on met en prison l’homme de confiance du Président de la République Démocratique du Congo.
Alors que nous vivons ces moments historiques dans une ambiance morose que la pandémie coronavirus nous impose, le MDW voudrait plancher sur l’expérience historique congolaise de l’arrestation du Directeur du Cabinet du Président de la République.
La grande majorité des Congolais, mis a part quelques militants fanatiques de l’Union Nationale des Congolais (UNC), a trouvé dans l’arrestation de Mr. Vital Kamerhe une raison de jouissance. La base de cette joie populaire dans l’arrestation du Président de l’UNC est morale. Il a détourné les deniers publics, il a volé, il est donc moralement correct qu’il soit mis aux arrêts. Notre culture africaine évangélisée par le judéo-christianisme nous exige de condamner ces actes immoraux de détournements. C’est la source de notre condamnation de l’acte que Kamerhe a commis. Notons qu’il bénéficie encore d’une présomption d’innocence tant que le jugement final n’a pas encore était rendu.
L’épisode de Kamerhe ne devrait pas simplement être regardé du point de vue moral. Tout le monde le fait parce que nous ne comprenons pas la base des transactions monétaires dans notre pays. Beaucoup de gens ont renoncé à avoir une maitrise sur la création des valeurs dans notre pays. Qui décide de ce qui a valeur ou de ce qui n’a pas de valeur ? Qui décide des salaires et sous quel soubassement détermine-t-on que tel groupe doit recevoir tel montant en reconnaissance de leur personnes en tant que créateurs des valeurs ? Qui gère ces salaires ? Pourquoi ne pas réclamer une gestion associative d’une partie du PIB ? Pourquoi sommes – nous totalement en régime de capitalisation étatique ?
Tout notre PIB est géré par l’Etat. Nous nous sommes laissé imposer ce qu’est la valeur par le capital qui, en fait, s’en fout de qu’on produit, mais ne considère que la rentabilité des valeurs marchandes. Notre travail est contrôlé par ceux qui nous imposent leur définition de ce qui a valeur et de ce qui n’a pas valeur.
Le problème pour moi, n’est pas le détournement de l’argent par Kamerhe ou une autre personne, mais c’est le contrôle du travail et la définition de ce qui vaut et de ce qui ne vaut pas. Ceux qui ont le pouvoir ne sont intéressé à l’argent que comme conséquence du travail qu’ils contrôlent. Ils définissent la fin et les moyens de travail. L’alternative c’est de Controller la production de nos valeurs marchandes et non marchandes. A ce stade-la, personne ne saura détourner les deniers publics. Nous serons souverains par rapport a la valeur que nous produisons. Nous allons au moins gérer une partie du PIB, nous allons désétatiser une partie de la valeur marchande et non marchande pour la gérer nous-même. La grande partie des Congolais, chercheurs ou non, ne voient l’argent que vers la fin, nous ne saisissons ni sa production ni son évolution qui aboutie dans nos comptes en banques.
Pour que nous puissions socialiser une partie de la valeur nationale comme je le préconise, il nous faut une responsabilité économique que nous n’avons pas. Nous ne sommes pas socialisés à la responsabilité économique. L’argent reste un étranger dans nos mentalités académiques et sociales. Nous avons grandi dans l’anthropologie de l’irresponsabilité économique. Ainsi la seule chose que nous pouvons mobiliser devant la situation de flagrant détournement des deniers publics c’est la morale judéo-chrétienne du bien et de mal, et rien d’autres car nous sommes formés dans une anthropologie de l’irresponsabilité économique. La responsabilité économique est étrangère à notre socialisation. Nous ne comprenons même pas la justesse économique provenant du fait de gérer nous-mêmes une bonne partie la valeur nationale. Il nous faut nécessairement aboutir à une gestion socialisée d’une partie de la valeur par nous-mêmes. Pour cela, il faut une responsabilité économique de la part des Congolais. Il est de notre devoir de comprendre le marché de travail et l’affectation des salaires à telle ou telle catégorie sociale. La gratuite des enseignements, les pensions et les soins médicaux peuvent être payés par nous-mêmes à travers la gestion socialisée d’une bonne partie du PIB (Produit Intérieur Brut). La condition sine qua non est de socialiser les Congolais dans la responsabilité économique.
Cela nous permettra de ne pas simplement condamner Kamerhe mais de comprendre la ou les choses se sont gâtées entre détourneurs pour que le Directeur de cabinet soit traduit en justice. En remontant, nous devrions aussi comprendre d’ou provient la valeur monétaire et non-monétaire de notre pays, jusqu’ à connaitre celui qui contrôle les salaires dans notre pays. Nous pourrions ainsi entrevoir les possibilités de socialiser une partie de la valeur que nous produisons. La seule condition de réussite dans notre entreprise est d’acquérir une responsabilité économique afin de désétatiser la valeur nationale. L’arrestation de Kamerhe doit nous conduire au-delà du bien et de mal, vers la souveraineté sur notre PIB.
Pandémie.
À Canton, en Chine, les Africains soupçonnés d’être “porteurs
du virus” sont pris pour cibles
Courrier
International – le 12 avril 2020
Selon plusieurs médias, la communauté africaine vivant dans cette ville du sud-est de la Chine aurait fait l’objet de mesures discriminatoires allant des tests généralisés aux quarantaines forcées, jusqu’à l’expulsion de leurs logements. Une politique sanitaire sur base “ethnique” dont Pékin se défend. Canton (ou Guangzhou) est la troisième ville la plus peuplée de Chine et comme l’explique la CNN, “elle abrite depuis longtemps la plus grande communauté africaine du pays”. La taille de cette population est difficile à jauger, explique le site de la chaîne de télévision américaine, “mais en 2017, on estimait qu’environ 320 000 Africains sont entrés ou ont quitté la Chine via Guangzhou”. Une communauté qui, ces derniers jours, a fait l’objet de nombreuses vexations et abus, selon le récit de la CNN.
“Le 7 avril, les autorités de Guangzhou ont déclaré que 5 Nigérians avaient été testés positifs au Covid-19, rapporte le média. Effrayées par la possibilité qu’un cluster de contaminations se développe dans cette communauté, les autorités ont augmenté le niveau de risque dans les quartiers peuplés d’Africains de ‘bas’ à ‘moyen’.”
Des bars et restaurants fermés aux Africains
Pire, selon le site de la chaîne de télévision américaine – qui rapporte les déclarations du consulat des États-Unis à Canton – “la police a ordonné aux bars et aux restaurants de ne pas servir les clients d’origine africaine. De plus, les autorités ont lancé une campagne de tests au Covid-19 obligatoires pour tous ceux qui seraient rentrés en contact avec des Africains, sans prendre en considération les éventuelles périodes de quarantaine effectuées précédemment.”
Des mesures exceptionnelles qui s’expliquent par la volonté affichée de Pékin d’éviter une deuxième vague de contaminations “importées” de l’étranger, mais qui sembleraient ne s’appliquer qu’aux Africains, comme l’explique le média en ligne Quartz Africa : “Selon les statistiques publiées cette semaine par les médias d’État chinois, les Britanniques, les Américains et les Philippins représentent plus de la moitié des étrangers vivant à Guangzhou ayant contracté le virus. Toutefois, il ne semble pas que ces personnes aient fait l’objet d’expulsions comme les Africains.”
Outre les mesures “discriminatoires” des autorités, les Africains de Canton semblent devoir aussi faire face à l’hostilité d’une partie de la population. Ainsi, la CNN rapporte de nombreux témoignages affligeants, comme celui du commerçant nigérian Chuck, revenu à Canton (où il vit) le 21 mars “une semaine avant que la Chine ne ferme ses frontières à la plupart des étrangers”. “On lui a dit qu’il fallait qu’il se mette en quarantaine à l’hôtel pendant deux semaines, raconte le site, mais lorsqu’il est sorti – même s’il disposait d’un certificat qui attestait de sa bonne santé – il a été refusé par tous les hôtels et est pratiquement devenu un sans-abri.”
D’autres histoires sont racontées dans l’article de CNN, celles d’Africains expulsés de leurs logements sans-explication par leurs bailleurs. Des histoires auxquelles s’ajoutent les images qui ont circulé sur la toile d’Africains dormant dans la rue, à côté de leurs bagages, mais aussi des vidéos de la police “harcelant” des personnes noires dans la rue.
“le gouvernement chinois traite tous les étrangers en Chine de la même manière”
Face à cette situation délicate, une première réaction des autorités africaines est à enregistrer, puisque le “jeudi 9 avril, le ministre nigérian des Affaires étrangères, Geoffrey Onyeama, a déclaré dans un Tweet qu’il avait invité l’ambassadeur de Chine au Nigeria, Zhou Pingjian, pour lui faire part de ‘la grande préoccupation de son gouvernement devant les accusations de mauvais traitements infligés à ses compatriotes à Guangzhou.”
Coronavirus: un avion militaire belge achemine du matériel sanitaire en RDC avec l’aide de l’UE
Belga – le 12 avril 2020
Une cargaison de matériel sanitaire essentiel à la lutte contre le coronavirus en République démocratique du Congo (RDC) doit arriver dimanche à Kinshasa en provenance de Belgique, a annoncé dimanche la Fondation d’utilité publique Unicef-Belgique.
Cette cargaison d’aide humanitaire d’un volume de 63 m3 comprenait notamment des concentrateurs d’oxygène, du matériel chirurgical de base, des stéthoscopes, des antibiotiques, des articles nutritionnels, des kits pour les sages-femmes et des articles pour la santé maternelle et néonatale, a précisé Unicef-Belgique dans un communiqué.
Elle a été acheminée à bord d’un avion militaire qui a décollé samedi après-midi de l’aéroport de Melsbroek pour Kinshasa en vue de rapatrier des Belges bloqués en RDC par la suspension des vols internationaux en raison de la pandémie de Covid-19, avec le soutien financier de l’Office humanitaire de la Commission européenne (Echo).
Le vol vers Kinshasa est co-financé à 75% par l’Union européenne, via son mécanisme de protection civile auquel la Belgique a fait appel pour rapatrier de RDC ses ressortissants et des ressortissants d’autres pays de l’UE.
Cette aide sera distribuée aux centres de santé, où elle est nécessaire de toute urgence pour répondre aux épidémies qui touchent la RDC (rougeole, choléra et paludisme et désormais aussi coronavirus). Ces fournitures soutiendront l’action humanitaire de l’Unicef (le Fonds international des Nations unies pour l’enfance) pour les enfants et les familles en RDC, ainsi que les efforts de prévention de la pandémie de coronavirus en coordination avec la réponse plus large de l’ONU, souligne le texte.
« C’est un excellent exemple de solidarité mondiale en ces temps difficiles et un moyen de maximiser nos ressources. Au moment où l’UE travaille dur pour ramener les citoyens de l’UE du monde entier, nous sommes heureux que ces vols puissent également être utilisés pour soutenir nos partenaires humanitaires tels que l’UNICEF », a déclaré le commissaire européen à la gestion des crises, Janez Lenarcic, cité par le communiqué.
Dans son dernier bulletin quotidien, datant de samedi soir, l’Institut national de Recherche biomédicale (INRB) a fait état de 234 cas confirmés de coronavirus, dont vingt décès, et seize personnes guéries.
7 points clés pour comprendre ce que le Covid-19 va coûter à l’Afrique
Le Point Afrique (FR) – le 13/04/2020
Récession, chômage… L’Afrique subsaharienne, déjà fragile, va subir de plein fouet les conséquences économiques de la pandémie de coronavirus, même si le continent est encore peu touché sur le plan sanitaire. Certains secteurs clés connaissent déjà un fort ralentissement en raison de la pandémie. Le tourisme, le transport aérien et le secteur pétrolier sont directement touchés. Cependant, les impacts visibles ne sont attendus que dans plusieurs mois en fonction de la durée de la pandémie sur le continent africain. Même si l’Afrique a toujours été exposée aux chocs extérieurs, cette fois, il semble que toutes les prévisions soient remises en cause.
Plusieurs institutions financières ont rapidement esquissé des pistes de solution. Il est notamment conseillé aux pays africains d’opter pour une approche politique à court terme prenant en compte les spécificités de leur économie. En particulier, le poids de l’emploi informel (89 % de l’emploi total), la précarité des emplois, la prédominance des petites et moyennes entreprises qui constituent 90 % des unités commerciales et sont le moteur de la croissance. La plupart des gouvernements doivent déjà imaginer un contexte de reprise post-pandémie.
1. Récession économique en Afrique subsaharienne
Pour la première fois en 25 ans, l’Afrique subsaharienne va connaître une récession économique, prévoit la Banque mondiale (BM). Après une croissance de 2,4 % en 2019, la récession devrait se chiffrer en 2020 entre – 2,1 % et – 5,1 %.
Les économies africaines sont victimes de la chute brutale de la croissance de leurs principaux partenaires commerciaux (particulièrement la Chine, la zone euro et les États-Unis), des cours des matières premières, de la baisse de l’activité touristique, ainsi que des effets des mesures de lutte contre la pandémie, comme le confinement, analyse la BM. La Banque africaine de développement (BAD) est moins pessimiste, avec une prévision de récession entre – 0,7 % et – 2,8 %.
2. Des dizaines de millions d’emplois menacés
Selon l’Union africaine (UA), « près de 20 millions d’emplois, à la fois dans les secteurs formel et informel, sont menacés de destruction ».
Pour l’ONU, ce nombre pourrait aller jusqu’à 50 millions. « Il n’y a plus de recettes, les gens hésitent à prendre le taxi de peur d’être contaminés par ce maudit virus », affirme Issa Djibril Batada, un des 8 000 chauffeurs de taxi de Lome
3. Transferts de la diaspora en baisse
Le chômage et le ralentissement économique touchent aussi les travailleurs africains de la diaspora et leurs transferts de fonds – souvent vitaux vers leurs pays d’origine – s’effondrent. Pour le Sénégal, ces transferts représentaient 10 % du PIB en 2018, et 5,5 % pour le Mali, selon le cabinet d’analyse Bloomfield Investment.
4. Matières premières en chute libre
Les deux principales économies d’Afrique subsaharienne vont subir de fortes récessions (6 à 7 %, selon la BM) à cause de la baisse des prix des matières premières qu’elles exportent : métaux précieux pour l’Afrique du Sud, où le confinement réduit au chômage 450 000 mineurs, et pétrole pour le Nigeria (70 % des recettes publiques). Idem pour l’Angola, deuxième exportateur pétrolier africain.
Les cours du pétrole sont tombés à entre 20 et 30 dollars le baril. Soit proche « du coût de production au Nigeria », ce qui a entraîné l’arrêt des investissements, puisque continuer à produire « n’a pas de sens à long terme », explique le patron d’une compagnie privée.
L’or, traditionnelle valeur refuge et l’un des principaux produits d’exportation de pays comme le Burkina et le Mali, n’est pas à l’abri. « La perturbation du transport aérien et l’arrêt de l’activité de certaines raffineries devraient limiter les exportations d’or », selon Bloomfield Investment.
5. Tourisme et secteur aérien touchés
Interdiction de voyager et confinement ont mis le tourisme et le trafic au point mort sur le continent.
En Afrique du Sud, pays le plus touristique de la zone avec un chiffre d’affaires de 21,5 milliards d’euros en 2018, « l’épidémie a déjà impacté très négativement le secteur, et ça va continuer », s’alarme Hlengiwe Nhlabathi du ministère du Tourisme. Quelque 1,5 million d’emplois sont en jeu.
La crise du secteur touristique va se répercuter sur toute « la chaîne d’approvisionnement : agriculture, pêche, banques, assurances, transports, culture et divertissement », relève-t-elle. « On a tout arrêté parce qu’on n’a plus de client. On a libéré les deux tiers des employés, soit une vingtaine de personnes », déplore Sidiki Dramane Konaté, gérant du complexe hôtelier Le Bambou au Burkina Faso.
Pour le Maroc qui a connu en 2019 un nombre record de touristes, avec 13 millions de visiteurs, en hausse de 5,2 % par rapport à l’année précédente, dépassant pour la première fois la barre des 12 millions, c’est un coup dur. Les recettes touristiques avaient atteint 78,6 milliards de dirhams (7,41 milliards d’euros), contre 73,04 milliards de dirhams (6,89 milliards d’euros) une année auparavant.
Avec 95 % de la flotte africaine clouée au sol, les compagnies sont en péril, faute d’un soutien financier rapide, selon l’Association des compagnies aériennes africaines.
6. Café et cacao menacés
En Éthiopie, premier producteur africain de café, les exportateurs subissent d’ores et déjà un « choc dévastateur », selon Gizat Worku, directeur de l’Association des exportateurs de café éthiopien.
Les principaux pays importateurs, Allemagne, Italie, États-Unis, France, sont à l’arrêt, explique le directeur général de l’Autorité éthiopienne du café et du thé, Adugna Debela.
Le café représente 5 % du PIB du pays et emploie directement et indirectement 25 millions de personnes (sur une population d’environ 110 millions), selon l’Autorité.
À court terme, la crise du coronavirus n’aura pas d’impact important sur le marché du cacao, selon le directeur de l’Organisation internationale du cacao, Michel Arrion, car les grands pays importateurs (Europe, États-Unis) disposent de 1,8 million de tonnes de stock, soit 4 à 5 mois de production.
Mais « il y a une réelle inquiétude chez les planteurs d’une baisse de prix à long terme », souligne Moussa Koné, président du Syndicat national agricole pour le progrès en Côte d’Ivoire, premier producteur mondial avec 40 % du marché. L’« or brun » représente un tiers des exportations ivoiriennes et fait vivre 5 à 6 millions de personnes.
7. Endiguer la crise
Plusieurs pays africains ont annoncé des plans de soutien économiques et sociaux.
Mais « avec moins de 20 % de la population employée dans le secteur formel, avec des systèmes de protection sociale inexistants pour le secteur informel, sans régime d’assurance chômage, avec des possibilités très restreintes de soutien de l’économie par les finances publiques, la situation est particulièrement critique pour l’Afrique », souligne le cabinet d’analyse Finactu.
Les pays africains demandent un soutien massif de la communauté internationale et une réduction de leur dette. Il faut un « plan Marshall » pour l’Afrique, résume le président nigérien, Mahamadou Issoufou.
(VIDÉO. Les prévisions d’avant la crise sanitaire promettaient de bons taux de croissance. Le Covid-19, qui les a toutes contrariées, va faire payer à l’Afrique un lourd tribut. https://www.lepoint.fr/afrique/7-points-cles-pour-comprendre-ce-que-le-covid-19-va-couter-a-l-afrique-13-04-2020-2371167_3826.php (
Les criminels en col blanc et le virus.
Jean-Marie Lelo Diakese – Congoindépendant – le 14 avril 2020
Pour ceux qui avaient encore des doutes sur la responsabilité personnelle de nos médiocres dans les désastres que connait notre pays, le virus va cette fois nous ouvrir les yeux de manière brutale.
Nous connaissions déjà leur responsabilité dans la disparition de l’état de droit et de l’émergence de la violence comme seul mode de gestion de la cité et de règlement de conflits. En effet, ils sont responsables de la majorité des cas de détournement et autres crimes économiques. Ils parasitent et paralysent toutes les institutions qu’ils animent et dirigent y compris celles qui sont censées assurer sécurité et justice. Ils s’assurent ainsi une impunité totale dont bénéficient aussi les militaires et leurs supplétifs aussi appelés « bandes armés » ou « présumés ADF». Ces violences ont fait des dizaines de milliers de morts et de blessés et des millions de déplacés. On est désormais dans le domaine des crimes contre l’humanité et un tribunal de type Tribunal international spécial RDC les enverrait en prison à vie.
La pandémie qui est en train de se développer en RDC va jeter une lumière crue sur la responsabilité de nos médiocres dans la situation difficile que traverse notre pays
Leur désintérêt pour la santé des populations a créé une situation sanitaire désastreuse pour la majorité de nos concitoyens. L’espérance de vie inférieure à 50 ans en est un triste témoignage. La résurgence mortelle de plusieurs maladies infectieuses : choléra, tuberculose,peste bubonique, et même la rougeole qui a fait plus de 7.000 victimes déclarées en un an touchant les enfants en bas âge qui n’y survivent pas
Malgré les leçons apprises avec l’épidémie Ebola et le lourd tribut payé par la population, nous sommes au niveau zéro de la préparation pour une nouvelle épidémie. Aucun budget n’a été accordé pour faire face à une possible résurgence de l’épidémie qui nécessiterait des moyens considérables. La plupart de nos hôpitaux sont dépourvus de fournitures élémentaires et de matériel de protection pour les soignants (le malade doit apporter le nécessaire). Ne parlons pas des postes de réanimation, de respirateurs ou de scanners ni même de bonbonnes d’oxygène qui sont une denrée rare.
Comment en est-on arrivé là ?
Une fois de plus, la même explication : la cupidité, l’égoïsme et l’incompétence de nos dirigeants/politiciens ainsi que les dysfonctionnements des institutions qu’ils animent et dirigent.
Par leur cupidité et leur incompétence ils sont responsables de la gestion prédatrice de nos ressources et d’une forme de « privatisation partielle» – à leur profit – de nombreux services publiques. Ils interceptent ainsi une grande partie des montants dus à l’état qui lui ne dispose plus que d’un budget insignifiant dont ils accaparent également une grande part.
Année après année, les budgets de la présidence et de quelques autres institutions sont gonflés et dépassés au détriment des secteurs sociaux. Priorité est donnée au partage de la marmite et plus particulièrement des « postes-accès-à-la-marmite ». Une fois les postes distribués on assiste à la course effrénée et scandaleuse aux avantages et retraites plantureuses des ministres et autres dignitaires du régime.
Non contents de détourner une bonne partie des budgets de la nation, ils font des dépenses de centaines de millions de USD non budgétisés pour des éléphants blancs comme Bukanga Lonzo. ($200millions), programme 100 jours (plusieurs centaines de millions de $) etc. Dans ces conditions il ne reste que des miettes pour les autres secteurs dont celui de la santé.
Le banditisme, la corruption et l’impunité qui règnent dans le gouvernement et dans l’administration des villes ont mené à la bidonvilisation et l’insalubrité totale de la plus grande partie des villes dont seule une minorité a accès à l’eau potable et l’électricité. Dans les énormes cités dortoir à la périphérie de Kinshasa, les familles vivent dans une promiscuité totale. Les grands marchés urbains censés approvisionner la population en denrées alimentaires de base, les marchandises y sont vendues à même le sol et souvent dans la boue. Dans ces conditions toute mesure d’hygiène est quasiment impossible.
L’agriculture a été scandaleusement négligée au profit d’importations permettant un enrichissement rapide de nos criminels en cols blanc mais entrainant un exode rural sans précédent.La petite réserve de sécurité que représentaient les cultures vivrières est en voie de tarissement, faute d’entretien des dessertes agricoles et du racket des militaires sur ces transports.
Jusqu’à présent seul les démunis, ceux qui vivent avec 1ou 2 $ par jour, c’est-à-dire la majorité de la population sont les victimes de nos criminels en cols blancs.
Comme nous le répétons depuis plusieurs années, la responsabilité des médiocres est sans appel et cette fois, cette crise pourrait être le départ d’une mise en cause radicale des fossoyeurs de l’Etat.
Les initiatives de la plateforme « Le Congo n’est pas à vendre » (CNPAV) composées d’un grand nombre d’ONG nationales et internationales sont peut être les prémices d’une poursuite à terme des prédateurs de tout bord https://corruptiontue.org/dossiers
Le CNPAV a diffusé ces jours-ci un communiqué de presse qui a évoqué une série d’affaires dont Bukanga Lonzo, la Rawbank et les affaires judiciaires pour lesquelles, Vital Kamerhe a été mis en détention provisoire avec quelques autres personnalités du monde des entreprises publiques, de la politique et des affaires.
Pour l’instant, ce à quoi nous assistons, c’est juste un règlement de comptes entre « corrompus ». La justice est encore loin d’y trouver son compte, néanmoins les affaires y sont cette fois ci citées dans les documents du CNPAV, il y manque encore le nom des responsables, connus de tous, j’y reviendrai très vite dés que les fils de ces affaires auront été tirées
En Afrique, si le pire est à venir… il n’est pas certain…
Colette Braeckman – le Soir – le 14 avril 2020
Alors que, jusqu’à présent, l’Afrique semble le continent le moins touché par le coronavirus, c’est à son propos que s’expriment les inquiétudes les plus vives : l’OMS « se prépare au pire » le CICR attire l’attention sur les camps de réfugiés et les migrants, le Docteur Mukwege qui, à Bukavu a pris la tête du comité de crise et préconise le confinement des plus de 60 ans, évoque le risque d’une « hécatombe »…A Paris, une note publiée par un centre d’analyse et de prévention dépendant du Quai d’Orsay et largement répercutée estime que, pour de nombreux Etats africains, « il s’agît là d’une « crise de trop » face au discrédit des élites politiques… » Autrement dit, dans la foulée de l’épidémie, des renversements de régime sont à redouter tandis que, pour lutter contre la pandémie, de nouveaux acteurs capables de mobiliser les foules devraient être sollicités, autorités religieuses, entrepreneurs économiques, artistes populaires…
Il est certain que, sur deux plans au moins, le constat est accablant : minées par les guerres, la corruption, les politique d’austérité imposées, les infrastructures médicales sont largement insuffisantes, d’autant plus que les meilleurs médecins, au Cameroun, au Zimbabwe, en RDC et ailleurs ont depuis longtemps choisi d’exercer en Europe, où se trouvent aussi des dizaines de milliers de soignants dans les homes et les hôpitaux… Il ne s’agît que d’une moyenne : l’ Afrique compte un médecin pour 5000 habitants et les pays du continent ne consacrent que 5% de leur produit national brut aux soins de santé…
Par ailleurs, la crise économique frappera l’Afrique de plein fouet : la note du Quai d’Orsay relève que dans des pays comme le Cameroun, le Gabon, le Congo Brazzaville, l’Angola, la rente pétrolière risque de s’effondrer, poussant des opérateurs comme Total à quitter les lieux. Dans des pays comme la Zambie ou la RDC (Congo Kinshasa), la rente minière risque de s’effondrer et, inévitablement, l’ « évaporation » des revenus du cuivre, du cobalt, du coltan sera amèrement reprochée aux élites politiques tandis que le rapatriement des bénéfices des sociétés minières nourrira également le ressentiment à l’égard des expatriés…
Un troisième danger est plus évident encore -et il se fait déjà sentir dans les quartiers pauvres des villes européennes- : le confinement des populations sera tout simplement impossible à appliquer. « Mourir du Covid, ou du « poch vid ? » se demande-t-on déjà à Kinshasa, comme dans toutes ces mégapoles où les gens vivent au jour le jour, obligés de sortir pour trouver du travail dans un secteur informel qui occupe 80 % de la population. Non seulement les classes moyennes verront leurs revenus s’effondrer mais dans les cités populaires les pénuries, en eau, en électricité, en nourriture, seront inévitables. Ce qui pourrait mener à des soulèvements politiques mais plus probablement encore à des pillages dont seront victimes les classes favorisées tandis que les expatriés, entrepreneurs privés ou même humanitaires seront accusés, comme c’est déjà le cas au Sud Soudan, d’avoir importé le virus.
Dans l’immédiat, on constate que les Etats les plus solides sont ceux qui s’en sortent le mieux : le Sénégal, l’Afrique du Sud où la fermeté du président Ramaphosa est très appréciée, le Rwanda où le confinement est total, mais assorti de distributions de vivres dans les quartiers pauvres de Kigali.
Par contre, les campagnes africaines, si longtemps délaissées, pourraient devenir un refuge : dans bien des pays, la Côte d’Ivoire par exemple, les gens ont tendance à rentrer au village car là au moins les cultures vivrières permettent de ne pas mourir de faim. Cependant ce retour des citadins est lourd de dangers et il pourrait contribuer à disséminer le virus dans les milieux ruraux, même si la faible densité de population peut « diluer » le risque….
Les leçons d’Ebola
Emmanuel Boutiau, professeur à l’Institut de médecine tropicale d’Anvers, refuse cependant de céder à l’afro pessimisme. Rentré de Guinée à la veille de l’épidémie actuelle, il constate qu’en Afrique de l’Ouest, « les populations ont tiré les leçons de la crise d’Ebola : dans de nombreux villages, des bâtiments ont été construits, destinés à ceux qui devaient être isolés pour éviter la propagation d’Ebola. Ces locaux pourraient servir à nouveau. En outre, les « gestes barrière »évitant tout contact physique et imposant la distance sont connus de tous à la suite des campagnes de sensibilisation. En Afrique centrale, la pratique du lavage des mains a été largement répandue à la suite de l’épidémie d’Ebola et les gens en ont gardé le réflexe… »
La pyramide des âges dément également les prévisions apocalyptiques : « Ebola et le HIV Sida à ses débuts se sont avérés beaucoup plus meurtriers que le Covid 19. Ce dernier, sur une population de moins de 50 ans, ne s’avère pas plus dangereux qu’une grosse grippe et le processus d’ immunité collective se mettra sans doute plus rapidement en place qu’en Europe… »
Cet « atout démographique » est confirmé par l’Organisation mondiale de la santé : « en Afrique noire, la population dépassant les 50 ans représente 19,7% de la population totale, contre 38,4 % en Chine et 43,1 en Europe. » Avec cependant un sérieux bémol exprimé par Emmanuel Boutriau « les jeunes sont vulnérables à la malnutrition, l’anémie, la malaria, le HIV, qui peuvent représenter des facteurs de comorbidité.. »Prudent, le chercheur souligne : « le corona est un virus nouveau, et on est loin d’en connaître avec précision tous les effets. Par contre, s’il se répand en Afrique, les plus agés, qui représentent tout de même une importante catégorie de la population, risquent fort d’être emportés. » Ce qui frappera aussi la classe politique…
Il faut relever aussi, en plus de la démographie et de l’étendue des territoires, que l’Afrique présente encore d’autres atouts, peu étudiés jusqu’à présent : des systèmes immunitaires plus résistants car fonctionnant dans des milieux moins aseptisés, des organismes habitués à la chloroquine, un médicament de base largement utilisé contre la malaria, le recours à des remèdes traditionnels méprisés par la médecine occidentale mais qui pourraient se révéler efficaces…Dans la province minière du Lualaba, en RDC, le gouverneur Mueij, a imposé un confinement rigoureux mais aussi autorisé des protocoles de traitement fondés sur la chloroquine…
Si la note du Quai d’Orsay suggère le recours aux leaders religieux pour sensibiliser les populations, cette arme pourrait s’avérer à double tranchant : en Ouganda les réunions de prières se sont poursuivies, au Sénégal des fidèles ont protesté contre la fermeture des mosquées, en Tanzanie les lieux de culte sont restés ouverts…Et en RDC, les pasteurs des églises de réveil ont fait savoir à leurs fidèles que si les offices étaient suspendus, il restait toujours la possibilité d’envoyer un chèque…
L’armée rwandaise en RDC «constitue une violation de l’embargo sur les armes» (GEC)
Sonia Rolley – RFI -le 15/04/2020 – 20:39Modifié le : 15/04/2020 – 22:34
Y a-t-il des militaires rwandais qui opèrent sur le sol congolais ? La société civile et des députés du Nord-Kivu dénoncent aujourd’hui ce qu’ils qualifient d’envahissement. Ils en appellent aux chefs d’État de la région et demandent à ce que le mécanisme de vérification mis en place par la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL) vienne constater cette présence. Le Groupe d’études sur le Congo (GEC) et Human Rights Watch ont régulièrement signalé à travers leur plateforme de surveillance, Kivu Security Tracker, ces allégations. Jason Stearns est le directeur du GEC, centre de recherche de l’université de New York. Il répond aux questions de Sonia Rolley.
RFI : Avez-vous pu confirmer la présence de militaires rwandais en ce moment sur le sol congolais ?
Jason Stearns : Nous avons reçu des rapports des différents points focaux que nous avons sur le terrain et de nos interlocuteurs au sein de la société civile d’une présence des militaires rwandais, les RDF, dans le Rutshuru dans les opérations, en soutien aux opérations FARDC contre les FDLR là-bas (ndlr : rebelles hutus rwandais). On ne sait pas exactement l’échelle de cette présence ou de ce soutien. Mais on s’imagine que cela fait partie d’une série d’opérations que l’armée rwandaise a menée avec les FARDC contre les FDLR ou du groupe dissident des FDLR, le CNRD. Et ces opérations ont lieu depuis l’année passée.
Ça veut dire que la présence rwandaise serait régulièrement sur le sol congolais depuis un an ?
Alors, c’est un peu compliqué de parler de la présence des militaires rwandais dans l’est du Congo parce que si on regarde bien, cette présence n’a presque jamais cessé depuis la fin de l’occupation officielle par l’armée rwandaise qui s’est terminée en 2002. C’est-à-dire que depuis cette époque, il y a souvent une présence rwandaise et notamment un soutien rwandais aux différents groupes armés dans l’est du Congo, avec des périodes d’intensification comme à l’époque du M23. La présence rwandaise était principalement en appui au M23 contre le gouvernement congolais.
Ce qu’on a constaté depuis lors, c’est un revirement dans la nature de cette présence. C’est-à-dire que depuis 2014 environ, l’armée rwandaise est là en collaboration ou avec l’accord tacite de l’armée congolaise et du gouvernement rwandais. Et là aussi, avec des périodes d’intensification. Ce qu’il faut constater, c’est que depuis l’arrivée au pouvoir du président Tshisekedi, on a vu une de ces périodes d’intensification avec plusieurs opérations de l’armée rwandaise sur le sol congolais depuis l’année passée.
Mais est-ce que ce soutien à l’armée congolaise ne devrait pas être signalé au Conseil de sécurité de l’ONU ?
Cette présence de militaires rwandais constitue en principe une violation de l’embargo sur les armes des Nations unies. Tous les États membres des Nations unies devraient notifier toute fourniture d’assistance militaire au gouvernement congolais. Donc évidemment, ça n’a pas été le cas. Le Conseil de sécurité n’a pas ce constat, même si le personnel des Nations unies sur le terrain est informé pas seulement de cette présence aujourd’hui, mais aussi dans le passé.
Qu’est-ce que vous recommandez aujourd’hui ?
Il y a plusieurs niveaux de problèmes par rapport à la présence de l’armée rwandaise au Congo. Le premier, c’est le manque de transparence. Cette armée est là. On ne sait pas exactement combien ils sont, on ne sait pas non plus vraiment ce que ces militaires sont en train de faire. Mais ils mènent des opérations d’envergure sur le sol congolais depuis un certain temps, avec l’aval des autorités congolaises. Je pense qu’il serait beaucoup mieux si cette collaboration était officielle et pas tacite. Comme ça, on pourrait demander une certaine redevabilité. On pourrait savoir ce qu’ils font, combien ils sont et pourquoi ils sont venus opérer sur le sol congolais.
L’autre niveau de problème, c’est la manière dont ils opèrent en RDC. Par exemple, il y a des allégations crédibles de massacres conduits par l’armée rwandaise contre la population réfugiée rwandaise dans le territoire de Kalehe, des dependants de rebelles du groupe armé CNRD. Donc ce n’est pas seulement qu’ils sont là pour opérer contre les rebelles rwandais, mais cela a des répercussions considérables sur les populations civiles et réfugiées.
Affaire des 100 jours : Pour l’accusation les indices de culpabilité contre Vital Kamerhe sont là
Sonia Rolley, Pascal Mulegwa – RFI – le 17.04.2020,
Vital Kamerhe, le directeur de cabinet de Félix Tshisekedi, restera en prison, c’est le tribunal de Grande Instance de Kinshasa-Matete qui en a décidé ainsi en réponse à l’appel de la défense de Vital Kamerhe protestant contre la mise en détention préventive de leur client. L’accusation cherche à obtenir la documentation officielle pour étayer ses charges. Retour sur les derniers éléments dans ce dossier.
Le chef de cabinet soupçonné de détournements des fonds alloués au programme d’urgence du président Félix Tshisekedi restera encore pendant au moins 10 jours entre quatre murs pendant que l’accusation cherche à obtenir la documentation officielle pour étayer ses charges.
Que ce soit pour l’accusation ou pour les deux tribunaux qui ont refusé d’accorder la liberté provisoire à Vital Kamerhe : les indices de culpabilité persistent. L’une des causes de ce refus, selon des sources judiciaires, serait la fuite du neveu de Vital Kamerhe, Daniel Shangalume alias « Masaro », ce que l’avocat du directeur de cabinet dément, assurant que cela n’a jamais été mentionné.
Ce neveu, connu comme un simple conseiller au ministère du Budget piloté par un haut cadre du parti de Kamerhe, est, selon l’accusation, la personne intermédiaire par qui certaines transactions et opérations de rétro-commissions ont été opérées dans l’affaire de livraison des maisons préfabriquées.
Vital Kamerhe n’a été jusque-là confronté qu’aux membres de la coordination du programme dit des « 100 jours ». Selon des sources judiciaires, tous, excepté Nicolas Kazadi, l’ancien coordonnateur du programme ont soutenu, lundi dernier, que le directeur de cabinet n’avait effectivement pris aucune part dans l’attribution des marchés et qu’aucun document en ce sens ne porte sa signature.
Mardi, le parquet général près la cour de Kinshasa – Matete, a entendu Justin Bitakwira, ancien ministre du développement rural [ Sous Joseph Kabila]. L’audition a tourné autour du contrat avec la société Samibo Congo Sarl, qui avait conclu, en avril 2018 avec le gouvernement congolais pour la livraison des maisons préfabriquées.
« mon innocence sera prouvée »
Les confrontations sans doute les plus déterminantes n’ont toujours pas eu lieu, que ce soit avec l’homme d’affaires Jammal Samih impliqué dans l’affaire des maisons préfabriquées ou avec l’ancien directeur de la RawBank, Thierry Taeymans. Cette banque, selon l’accusation, est la plaque tournante de toutes les transactions avec les entreprises mises en cause, même si du côté de l’établissement bancaire, on assure n’avoir fait que respecter les instructions des titulaires de comptes.
Une mise en détention dont s’offusque son avocat, Me John Kaboto. « On ne voit pas quelles sont les motivations pour que monsieur Vital Kamerhe garde sa cellule jusqu’à ce jour. D’autant plus qu’il pouvait bénéficier au moins d’une liberté provisoire, afin de coopérer et de continuer à coopérer et collaborer avec la justice. Parce que le souci de monsieur Kamerhe est que la vérité soit éclatée. Et comme vous le savez, c’est un pionnier qui a toujours prôné pour un État de droit. Et toutes les conditions qui pouvaient motiver le juge, de lui accorder une liberté provisoire, sont réunies. Mais nous ne comprenons pas pourquoi cet acharnement de le garder toujours en détention. »
Après la décision de son maintien en détention, depuis sa cellule, Vital Kamerhe a néanmoins appelé ses partisans à rester calmes et a assuré que dla Justice travaillait en toute indépendance. Avant de conclure : « mon innocence sera prouvée ».
Des masques made in Belgium
Colette Braeckman – le Soir – le 17 avril 2020
Un bout de tissu enserrant deux feuilles de papier…S’est on jamais imaginé que ce petit accessoire, si courant dans les villes surpeuplées d’Asie du Sud Est, puisse devenir chez nous un enjeu de vie ou de mort ?
Tel est cependant le destin du masque protecteur, si rare, si convoité… Le public le réclame, les machines à coudre sont réactivées, les milieux hospitaliers ne sont pas encore approvisionnés à hauteur de leurs besoins et le dénuement des maisons de repos fait hurler de rage et d’impuissance.
Face à la pénurie, les initiatives privées se multiplient, où la générosité se conjugue avec le savoir faire.
C’est ainsi qu’à Rhode Saint Genèse, dans la banlieue de Bruxelles, un groupe de personnes, emmenées par le chirurgien Philippe Hoang, a mis au point un masque de protection réutilisable, avec la collaboration de plusieurs industriels belges. Sa particularité, c’est qu’en fonction des besoins (soignants en milieu hospitalier ou simples particuliers) des filtres différents peuvent être installés.
De tels masques pourraient, avec la collaboration de plusieurs entreprises, être produits en Belgique, très rapidement et en grand nombre. Plusieurs mécènes, en liaison avec le Rotary Club de Rhode Saint Genèse, ont déjà manifesté leur intérêt et tous les dons sont les bienvenus.
Un obstacle subsiste cependant : la certification. Les créateurs de ce masque réutilisable, simple dans sa conception mais rigoureusement conforme aux normes, tiennent à ce que leur découverte soit dûment certifiée, afin de lever tous les doutes éventuels et d’inspirer pleine confiance aux utilisateurs.
C’est là que jusqu’à présent le bât blesse : les masques made in Belgium n’ont toujours pas été homologués officiellement et, alors que le chiffre des morts augmente chaque jour, le Docteur Hoang et ses amis s’impatientent et se disent prêts à passer d’office à la phase de production…
Jacques De Decker était là. Il l’est encore.
Colette Braeckman – le Soir – le 17 avril 2020
Comment croire que Jacques De Decker ait pu nous quitter ainsi, au milieu d’une dernière course en taxi, alors qu’on avait encore tant de rendez vous, tant d’occasions de se revoir, de se faire la bise avec ou sans distanciation, de reprendre le fil de nos souvenirs là où nous l’avions laissé, à l’Académie, chez notre ami Yvon Toussaint où Monique a maintenu la porte ouverte, aux Beaux Arts ou ailleurs…
On aurait tort de dire que Jacques était partout. La réalité, c’est qu’il était là. Avec ses yeux pétillants de malice, son sourire bienveillant, sa main tendue et toujours ses bonnes idées, qu’il s’agisse d’un article, d’un projet de livre, d’une manifestation culturelle et, plus sûrement encore, d’une amitié. Au long cours.
Jacques était là. Au premier rang du Théâtre Poème, à écouter les artistes, les écrivains découverts par Monique Dorsel. Au Festival d’Avignon, à courir partout pour applaudir, encourager les auteurs, les comédiens venus de Belgique. Il était là, à la rédaction du Soir, où nous sommes entrés à la même époque. Dès le début, son érudition était stupéfiante. Il avait lu, traduit, compris. Il nous parlait des écrivains belges francophones mais surtout, avant Béatrice Delvaux, il allait voir de l’autre côté de la barrière linguistique et il nous ramenait des pépites. Des stars comme Cees Nooteboom, d’autres aussi…Yvon Toussaint, qui n’aimait guère démêler les embrouillamini politiques à la belge, l’encourageait à garder le contact, à ouvrir les fenêtres vers cette Flandre qui prenait le large, emmenant avec elle ses talents multiples, ces écrivains dérangeants, ces danseurs, ces plasticiens qui allaient se retrouver en Avignon avant même d’être invités dans les Ardennes ou au sud de Bruxelles…
Jacques, lui, était là. Promeneur infatigable, il semblait flâner, mais il avait l’opiniâtreté d’un coureur de fond. Il allait et venait, et on découvrait qu’il avait, en même temps, dirigé de main de maître le service culturel du Soir, animé des débats, rédigé des chroniques, découvert des talents, pris le temps d’un déjeuner amical. Combien d’heures y avait-il dans ses journées ? Cet homme là ne comptait pas son temps. Il était là. Fidèle. Amical. D’apparence fragile mais en réalité insubmersible. Discret, mais omniprésent.
D’autres feront l’énumération de ses talents multiples, de son don des langues (il était licencié en philologie germanique), des multiples fonctions qu’il occupa, depuis la rédaction du Soir où il fut chef du service culturel avant de livrer une chronique régulière, toujours brillante, toujours caustique, à un quotidien où il avait laissé un pan de lui-même, jusqu’ à l’Académie.
D’autres témoigneront de sa générosité, de la manière dont il misait sur le talent des plus jeunes, de sa fidélité en amitié. Qu’il pleuve ou qu’il vente, Jacques était là. Il souriait. Il encourageait. Il disait sa foi dans la littérature, dans le talent. Dans le journalisme aussi, qu’il n’avait jamais vraiment quitté. Il rappelait aussi, discrètement, ses valeurs, la liberté de pensée, la démocratie, l’ouverture aux autres.,
Jacques était là, mais son sourire généreux masquait aussi ses blessures. Les amours qui se terminent, la carrière qui bifurque, les fragilités qui apparaissent. Les failles et les coups. Jacques n’aurait jamais avoué qu’il pouvait souffrir pour lui-même, et surtout, il ne disait pas que, derrière son apparente carapace, il souffrait aussi pour les autres. Pour ses amis, et puis aussi pour son frère qu’il aimait tant. Car là aussi, aux côtés d’Armand, Jacques était là. Lucide, sans complaisance, mais solidaire. Les coups, lui aussi les encaissait, à l’instar de l’entraîneur muet d’un boxeur envoyé au tapis. Les trahisons, il en prenait la mesure, avec plus de lucidité encore que son frère. La justice, il en mesurait la rigueur et, en silence toujours, se déchirait lui aussi sur son glaive.
Même s’il était brisé, Jacques restait debout. Il honorait ses rendez vous, ses engagements, ses amitiés, tournait les pages d’un agenda bien loin de se refermer. Et puis soudain, comme chantait la Barbara du Théâtre Poème, il s’est éclipsé. Sans un adieu, sans un je t’aime.
L’au revoir n’était pas nécessaire, cher Jacques. Car tu nous laisses une certitude : grâce à ton talent, à ta sensibilité, ta constance , grâce à cette amitié si longtemps partagée, tu es là. Tu restes avec nous. Merci.
Les juges sont les artisans du grand coup de balai de Tshisekedi
Colette Braeckman – le Soir – le 17 avril 2020
C’est une décision sans appel : la Cour constitutionnelle a estimé qu’en décrétant l’état d’urgence, en raison de l’épidémie de coronavirus, le président Félix Tshisekedi n’avait pas enfreint la loi. Alors qu’en janvier 2019, la plus haute instance du pays avait été soupçonnée de pencher en faveur du « camp Kabila », le collectif de hauts magistrats a cette fois donné raison au président, déjouant ainsi une manœuvre qui aurait pu mener jusqu’à sa destitution. En effet, en accord avec Jeanine Mabunda, la présidente de l’Assemblée, Alexis Tambwe Mwamba, l’ancien ministre de la Justice aujourd’hui président du Sénat, avait décidé de réunir les deux Chambres en congrès extraordinaire. L’objectif avoué était de débattre de la légalité de l’état d’urgence, mais, disposant d’une majorité écrasante dans les deux Assemblées, le FCC (Front commun pour le Congo) plate forme soutenant l’ex président Kabila, aurait pu aller beaucoup plus loin et voter la destitution de l’actuel chef de l’Etat. Malgré les protestations de l’UDPS, le parti de Tshisekedi, il était déjà question de désinfecter à grands frais le Palais du Peuple afin que les représentants de la nation puissent s’y réunir. Si manœuvre il y avait –ce qui est fort probable- elle a échoué, et le chef de l’Etat, cantonné dans sa résidence de la N’Sele où il a reçu les présidents des deux Chambres, est sorti renforcé de l’épreuve.
En réalité, la manœuvre visait moins à contrer l’état d’urgence, sanitaire ou non, qui va donc être maintenu que de paralyser l’extraordinaire coup de balai qui, en pleine épidémie, envoie devant les juges ou à la prison de Makala de très hauts personnages, jusqu’à présent réputés intouchables. Directeurs d’entreprises privées, anciens premiers ministres comme Augustin Matata Mponyo ou Bruno Tshibala, ministres de l’enseignement et de la santé publique, épouse de hautes personnalités comme Amida Shatur -épouse Kamerhe- ainsi que sa sœur, Lydie Omanga, porte parole de la présidence, gouverneur de la Banque centrale du Congo, DG de la Foner (fonds d’entretien des routes), la liste de ceux qui sont convoqués pour des auditions est exhaustive et certaines auditions pourraient déboucher sur des mandats d’arrêt provisoire. Même en province, le couperet tombe : à Goma, l’homme d’affaires Modeste Makabuza, «Mode », directeur de la société SOCOC et importante personnalité de la place, a été mis aux arrêts. Il faut dire que, dans un pays où la capitale Kinshasa ne dispose même pas de 50 respirateurs pour 10 millions d’habitants, la hauteur des fonds évaporés laisse pantois une opinion cependant blasée : Vital Kamerhe, l’ex directeur de cabinet de Tshisekedi, le premier à ouvrir la voie vers la prison de Makala, doit s’expliquer sur la disparition de 470 millions de dollars ! Un pactole qui aurait du financer, sans appel d’offres, de grands travaux d’infrastructures, dont des aménagements routiers, des logements sociaux, des écoles…
Si le détournement devait se confirmer, -ce que l’intéressé nie avec énergie- cette somme colossale aurait en réalité été destinée à financer la campagne électorale de Vital Kamerhe au cas où il se serait porté candidat aux élections présidentielles de 2023. Ce que prévoyaient les accords ayant permis de créer la coalition Cap pour le changement, conclus entre l’UNC, le parti de Kamerhe et l’UDPS de Tshisekedi.
Même si la Cour constitutionnelle a déjoué le premier piège, la lutte contre la corruption, présentée comme l’objectif numéro un de Félix Tshisekedi, rencontrera encore bien des obstacles : Kamerhe et son parti sont demeurés populaires dans l’Est du Congo où les manifestations de soutien sont nombreuses et nombreux sont ceux qui croient encore que l’intelligence politique du directeur de cabinet, sa longue expérience du pouvoir, l’auraient empêché de se lancer dans une telle aventure. En outre, les «intouchables », bien ancrés dans le système, ont encore les moyens de se défendre, sur le plan judiciaire ou autrement.
De plus, on ignore toujours la position de l’ex- président Kabila, dont les proches et les alliés politiques ont, tout au long de son mandat, été accusés de détournements monumentaux et il ne faudrait pas négliger non plus les complices étrangers de tant de malversations. Cependant, des pays voisins, comme le Kenya, ont déjà salué l’initiative tandis que le Rwanda et l’Angola conseillaient la prudence sinon la clémence à l’égard de Kamerhe, un haut dignitaire de l’Etat, un homme politique d’envergure. Quant à la population congolaise, d’autant plus attentive à la politique qu’elle se trouve confinée et qui a dépassé le premier moment de surprise ou de doute, elle soutient largement, via la presse ou la société civile, ce « grand nettoyage ». D’autant plus que, s’il est mené à terme, il marquera, soixante ans après l’indépendance, la fin d’une époque.