Déjà 100 jours en prison pour l’activiste congolais Joseph Lokondo (Human Rights Watch)
KINSHASA – L’un de ses amis l’avait pourtant averti qu’il risquait d’être arrêté, mais Joseph Lokondo n’a pas eu peur d’affronter la justice. « Je me suis dit – s’ils veulent m’arrêter pour mes opinions, qu’ils le fassent », a-t-il récemment confié à Human Rights Watch. Aujourd’hui, cela fait 100 jours que cet activiste de 26 ans est détenu à Mbandaka, dans l’ouest de la République démocratique du Congo.
Lokondo a été arrêté le 20 janvier, en sortant d’une tribune d’expression populaire sur les élections locales. L’initiateur de la campagne « Équateur mérite mieux », il dénonçait ce qu’il considère comme une « mégestion » de la province par son gouverneur, Dieudonné Boloko, appelant le parlement provincial et le président de la République à le relever de ses fonctions. Lokondo se dit motivé par son souhait de « voir les politiques travailler pour le bien de la population en améliorant leurs conditions socio-économiques. »
Le 27 mars, Lokondo a été déclaré coupable d’« outrage au membre du gouvernement » et d’« imputation dommageable » et condamné à 13 mois de prison. Le poursuivre pour avoir critiqué un responsable gouvernemental constitue une violation de son droit à la liberté d’expression, pourtant consacré par la constitution congolaise et les normes internationales relatives aux droits humains.
Après une nuit en garde à vue au commissariat de police, Lokondo avait été placé dans un cachot insalubre du tribunal. « J’y ai passé deux nuits dans des conditions inhumaines », a-t-il déclaré. « On y était 40 détenus dans une cellule prévue pour 10 personnes, où l’on était obligé de manger et d’uriner. » Lokondo a ajouté que des policiers l’avaient tabassé.
Lokondo, marié et père d’une fille, a ensuite été transféré à la prison de Mbandaka, où l’eau et la nourriture manquent en permanence. Et désormais, le Coronavirus est aux portes de cette prison.
L’avocat de Lokondo a fait appel du jugement.
Lokondo a notamment fait partie de dizaines de jeunes activistes pro-démocratie qui se sont battus pour obtenir des élections libres lorsque l’ancien président congolais, Joseph Kabila, s’accrochait au pouvoir au terme de son deuxième mandat. Il avait été arrêté le 31 décembre 2017 et brièvement détenu.
Peu après son arrivée au pouvoir en 2019, l’actuel président, Félix Tshisekedi, avait ordonné la libération des prisonniers politiques, après des années de répression sous Kabila. Cependant, la police continue d’arrêter et de détenir arbitrairement des manifestants pacifiques.
Les autorités devraient immédiatement libérer Joseph Lokondo et le laisser, ainsi que toute autre personne, exprimer pacifiquement leurs opinions, et démontrer ainsi qu’elles ont réellement rompu avec les méthodes répressives de l’administration Kabila.
Source : communiqué de presse Human Rights Watch, 29.04.20
Image : Joseph Lokondo
Source : Human Rights Watch