Procès 100 jours de Kamerhe, les plaidoiries commencent ce jeudi 11 juin (Zoom Eco)
KINSHASA – Les plaidoiries des avocats dans le procès Vital Kamerhe et consorts débutent ce jeudi 11 juin 2020, à Kinshasa. Cette 4ème audience et 2ème depuis l’installation du nouveau président après la mort du juge YANYI, remplacé par le juge Pierrot Bakenda Mvita, s’annonce très ardue. Si jusque-là, la partie défense insistait sur la liberté provisoire de son client car rien ne montrait encore son implication dans ce présumé détournement, la journée de ce jeudi permettra de démontrer cette prétendue implication. Retour sur la dernière audience qui a consistait à l’audition de témoins.
La dernière audience a permis de faire passer tous les témoins prévus par ce Tribunal de grande instance de Gombe, siégeant en chambre foraine à la prison de Makala.
Le premier, le directeur général ai de la Direction Générale de Contrôle de Marché Publics, DGCMP, qui a affirmé que le marché public requiert est un contrat écrit. La loi ne reconnaît pas de contrat verbal. Michel Ngongo, lors de son audition en tant que renseignant, à ce procès a nuancé par la même occasion, que le contrat ne peut être verbal qu’en cas d’urgence, avant d’être régularisé plus tard.
« Les contrats des marchés publics et de délégations de service public sont approuvés par une autorité compétente selon les modalités fixées par le décret du Premier ministre délibéré en conseil des ministres. Un marché public ou une délégation de service public n’a d’effets que s’il est approuvé », dispose l’article 15 de la Loi sur les marchés publics.
Pour sa part, Marcelin Bilomba, conseiller principal de Félix Tshisekedi en matière économique et financière, a balayé d’un revers de la main l’affirmation selon laquelle Vital Kamerhe aurait agi sur instruction du chef de l’État : « Je pense que le nom du chef de l’État a été utilisé abusivement », avant de brandir un relevé qu’il a obtenu à la banque centrale du Congo prouvant que 66 700 000 dollars ont été payés à la société Samibo SARL du chevronné entrepreneur Libanais Samih Jamal, bénéficiaire du marché pour 1 500 maisons préfabriquées, contrairement aux 57 millions de dollars soutenus par Vital Kamerhe, le gouverneur de la banque centrale et l’ancien ministre des Finances.
Les membres de la famille de Vital de Kamerhe ont aussi intervenu. Sa belle-fille Soraya Mpiana qui devait témoigner de ses relations avec l’opérateur économique libanais qui lui aurait offert une parcelle sur la baie de Ngaliema. Propos rejetés par l’accusée et confirmée par Daniel dit Massaro, le neveu de Kamerhe qui aurait acquis cette concession à prix d’argent alors que le libanais confirmait lalui avoir offert en cadeau.
Autre membre de la famille Kamerhe à avoir témoigné, sa femme, Hamida Shatur, qui a énuméré la liste des cadeaux reçus lors de leur mariage en février 2019 : 862 000 dollars, 33 000 euros, 10 millions de francs CFA (15 000 euros) et quatre voitures neuves.
Pour le reste, la femme d’affaires a mis le tribunal au défi de trouver sur ses comptes bancaires « un transfert venant de je ne sais quelle planète ».
Le directeur de la banque centrale du Congo, l’ancien ministre de finances et celui du budget ont aussi renseigné le tribunal sur la chaine de dépenses. Ici, ces différents témoignages ont démontré que le programme des 100 jours a été financé par les réserves de change de la Banque centrale du Congo (BCC). Une réserve essentielle pour l’Etat, qui lui permet de réguler les taux de change et de maintenir les équilibres macroéconomiques dans un pays où la plupart des transactions s’effectuent dollars. L’utilisation de cette réserve pour financer les travaux des 100 jours a provoqué « une dévaluation de la monnaie, une augmentation du coût des importations, une baisse de la croissance et une augmentation des prix »
Devant ses juges, Kamerhe continue à demander à l’accusation de démontrer, sur base des pièces probantes, comment il a pu détourner 48 millions de dollars destinés à la construction des logements sociaux.
L’audience de ce jeudi permettra à chaque partie d’affuter ses armes pour mieux se défendre. La bataille s’annonce alors très ardue pour ce procès qui est suivi par de milliers de congolais qui espèrent que la justice de ce pays fasse correctement son travail.
Nadine Fula
© Zoom Eco / Mediacongo, 11.06.20
Image: Vital Kamerhe
Source: Congo Synthèse