L’ONU consternée par le meurtre de près de 850 civils dans l’est de la RDC en 2020 (Monusco)
NEW YORK – Le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme (HCDH) s’est dit consterné, mardi, par la hausse significative des attaques contre les civils dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC). Selon l’ONU, près de 850 civils ont été tués par les groupes armés dans les provinces d’Ituri et du Nord Kivu en 2020.
Il s’agit généralement de meurtres commis par des combattants rebelles des Forces alliées démocratiques (ADF) dans les territoires de Beni (province du Nord-Kivu), d’Irumu et de Mambasa (province de l’Ituri). Ce groupe armé, à l’origine en Ouganda, sévit depuis plus de vingt ans dans l’est de la RDC.
« Étant donné la nature étendue et systématique de l’attaque dirigée contre la population civile, certaines des violations des droits de l’homme documentées peuvent constituer des crimes contre l’humanité », a déclaré lors d’un point de presse à Genève, une porte-parole du HCDH, Marta Hurtado.
Une hausse du nombre de civils enlevés pour effectuer des travaux forcés
Ces violences se sont d’ailleurs poursuivies au début de cette année. Le 13 janvier dernier, à Walese Vonkutu, dans le territoire d’Irumu, un « groupe d’hommes inconnus » a attaqué la communauté Twa et tué au moins 14 personnes, dont deux femmes enceintes. Cette attaque a fait suite à une autre attaque à Walese Vonkutu un mois plus tôt, où 10 personnes ont été tuées et 30 autres ont été kidnappées.
Dans sa présente mise à jour, le Bureau conjoint des Nations Unies sur les droits de l’homme (BCNUDH) dresse l’inventaire des violations et atteintes aux droits de l’homme en 2020.
Parmi les 849 civils tués en 2020 lors d’attaques imputables aux ADF, 381 ont été tués entre dans la première moitié de l’année dernière. Et 468 autres victimes ont été recensées entre juillet et décembre 2020. Au cours du second semestre, quatre femmes ont été victimes d’abus sexuels de la part de combattants des ADF.
La seconde moitié de 2020 a été aussi caractérisée par un certain nombre d’attaques de représailles des ADF contre la population civile dans des territoires précédemment contrôlés par ce groupe armé. Ces attaques ont entraîné des déplacements massifs de population dans la région.
Au moins 47 civils tués en 2020 par les forces de sécurité et de défense congolaises
« On a également constaté une augmentation du nombre de civils enlevés pour effectuer des travaux forcés », a ajouté Mme Hurtado, relevant que 534 civils ont été kidnappés l’année dernière, dont 457 sont toujours portés disparus.
Par ailleurs, les services de la Haut-Commissaire Michelle Bachelet se sont également dit très préoccupés par les violations commises par les forces de sécurité et de défense congolaises. Dans le cadre de leurs opérations contre les combattants des ADF, 22 civils ont été tués au premier semestre de l’année dernière.
Selon l’ONU, 9 femmes et 12 enfants ont été victimes d’abus sexuels, et 81 ont été arrêtés arbitrairement par les forces de sécurité. Au cours du second semestre, 25 civils ont été tués, 18 femmes et 10 enfants ont été victimes d’abus sexuels, et 45 ont été arrêtés arbitrairement par les forces de sécurité.
Plus largement, ces abus des forces congolaises et les cruautés des rebelles se déroulent dans « un contexte d’impunité, où peu de violations des droits de l’homme et du droit humanitaire international font l’objet d’enquêtes et de poursuites en bonne et due forme ».
Freiner la criminalité transfrontalière et éviter que les ADF se réfugient en Ouganda
A ce sujet, le HCDH note que l’attaque des ADF contre la prison de Beni en octobre 2020 – au cours de laquelle 1.300 détenus se sont échappés – a porté « un coup à la reddition des comptes en RDC ».
Face à ce sombre tableau décrit par le rapport, la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en RDC (MONUSCO) et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) demandent aux autorités congolaises de tout faire « pour garantir que les forces de sécurité agissent en conformité avec les standards des droits de l’homme et du droit international humanitaire ».
Le rapport souligne la nécessité de faciliter l’accès à la justice pour les victimes, et l’aide humanitaire pour les survivants, y compris ceux qui sont déplacés par les violences.
L’ONU encourage également les autorités de Kinshasa à s’engager, par le biais du cadre de coopération judiciaire, à freiner la criminalité transfrontalière. Il s’agit de faire en sorte que « les auteurs de crimes affiliés aux ADF et à d’autres groupes armés qui cherchent refuge dans les pays de la région, en particulier en Ouganda, soient traqués et traduits en justice ».
Source: Monusco / ONU, 03.02.21
Image – source: Monusco